CA Lyon, 1re ch. civ., 19 septembre 2002, n° 00-04626
LYON
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Calor (SA), Seb (SA)
Défendeur :
Filtech France (SARL), Rupofil BV (Sté), Filtertechniek Nederland BV (Sté), Diffusion de pièces détachées d'origine (DPDO Flandres) (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Jacquet
Conseillers :
MM. Roux, Gourd
Avoués :
SCP Junillon-Wicky, SCP Brondel-Tudela
Avocats :
Mes Veron, Cousin
Faits - Procédure - Prétentions des parties :
La société Seb est propriétaire d'un brevet français n° 90 07218, dont la demande a été déposée le 11 juin 1990, relatif à un fer à repasser électrique à cartouche déminéralisante et réservoir d'eau perfectionné ; la société Calor exploite ce brevet en qualité de licenciée brevet en fabriquant et commercialisant des fers à repasser et cartouches sous les dénominations respectives " Aquagliss " et " Aquasystem ".
Après avoir fait procéder à deux saisies-contrefaçon les 6 et 16 décembre 1996, ces deux sociétés ont fait assigner les sociétés Diffusion de pièces détachées d'origine DPDO-Flandres et Filtech France et les sociétés de droit néerlandais Rupofil et Filtertechniek pour faire juger qu'elles avaient commis des actes de contrefaçon de brevet et de marque et de concurrence déloyale, pour leur faire interdiction de poursuivre ces actes et pour les faire condamner à payer des dommages- intérêts et une indemnité en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Le 28 février 2000 le tribunal de grande instance a rendu le jugement suivant :
- Prononce la nullité de la saisie-contrefaçon exécutée le 6 décembre 1996,
- Déclare régulière la saisie-contrefaçon exécutée le 16 décembre 1996,
- Déboute les sociétés Seb et Calor de leur demande partant sur la contrefaçon du brevet Seb n° 9007218, les conditions de l'incrimination par fourniture de moyens n'étant pas réunies,
- Dit que la revendication n° 9 du brevet Seb n° 90 07218 est nulle pour défaut d'activité inventive, mais dit n'y avoir lieu à transmission du jugement à l'INPI par les soins du greffe, ce chef du dispositif n'étant pas assorti de l'exécution provisoire,
- Déboute les sociétés Seb et Calor de leurs demandes fondées sur la contrefaçon de la marque Calor Aquasystem et la contrefaçon du fer à repasser enregistré sous le n° 93 0823 rendu public le 28 mai 1993,
- Dit que les sociétés de droit français Filtech France et Diffusion de pièces détachées d'origine DPDO et les sociétés de droit néerlandais Rupofil et Filtertechniek se sont rendues coupables de concurrence déloyale envers la société Calor en diffusant des cartouches dont la présentation les rendait susceptibles d'être confondues avec celles de la société Calor,
- Fait défense sous astreinte aux sociétés défenderesses de fabriquer, importer et commercialiser des cartouches déminéralisantes présentant les caractéristiques de présentation visées au présent jugement comme susceptibles de provoquer la confusion dans l'esprit de l'acheteur,
- Condamne in solidum les sociétés Filtech France, DPDO-Flandres, Rupofil et Filtertechniek à payer à la société Calor la somme de 80 000 F à titre de dommages-intérêts,
- Autorise la publication dans 5 revues au choix de la société Calor et aux frais des sociétés défenderesses dans la limite de 20 000 F par insertion,
- Rejette le surplus des demandes.
Les sociétés Calor et Seb ont fait appel de cette décision en excluant de leur recours les dispositions du jugement déclarant valable la saisie-contrefaçon du 16 décembre 1996, rejetant les demandes des défenderesses en annulation des revendications n° 1, 2, 3, 17 et 22 du brevet n° 90 07218 et de la marque " Calor Aquasystem ", et déclarant les sociétés défenderesses coupables de concurrence déloyale. Elles demandent à la cour de rejeter les demandes adverses en nullité de la saisie-contrefaçon du 6 décembre 1996 et en nullité de la revendication n° 9 du brevet n° 90 07218, de dire que les sociétés défenderesses se sont rendues coupables de contrefaçon d'une part du brevet n° 90 07218 et d'autre part de la marque " Calor Aquasystem " et du modèle de fer enregistré sous le n° 93 0823 ; de dire que les mêmes se sont rendues coupables de concurrence déloyale en diffusant des cartouches défectueuses susceptibles d'être confondues avec celles de la société Calor ; de faire défense sous astreinte à ces sociétés de récidiver ; de les condamner à verser les sommes de 500 000 F à la société Calor et de 100 000 F à la société Seb à titre de dommages-intérêts ; d'ordonner la confiscation et la destruction de toute cartouche et conditionnement incriminé ; de condamner sous astreinte les défendeurs à obtenir de leurs clients la restitution des cartouches incriminées non encore commercialisées ; d'ordonner la publication de l'arrêt ; de condamner les sociétés intimées à leur payer une indemnité en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Les sociétés DPDO, Filtech France, Rupofil et Filtertechniek concluent ensemble au rejet de l'appel principal et forment appel incident pour faire prononcer la nullité de la saisie-contrefaçon du 16 décembre 1996 ; prononcer la nullité des revendications n° 1, 2, 3, 17 et 22 du brevet n° 90 07218 pour défaut d'activité inventive et de la revendication n° 3 pour exposer l'invention de façon insuffisamment claire et complète et ne permettant pas à l'homme du métier de l'exécuter et en raison du fait que son objet s'étend au-delà du contenu de la demande telle qu'elle a été déposée ; ordonner la transmission de l'arrêt à 1'INPI en vue de son inscription au Registre national des brevets ; constater la nullité du dépôt de modèle n° 93 0823 et l'irrecevabilité de la société Calor à prétendre protéger la forme de ce dépôt ; constater l'absence de caractère distinctif du terme " Aquasystem " et sa dégénérescence ; constater l'absence de risque de confusion constitutif de concurrence déloyale ; condamner les sociétés intimées à leur payer des dommages-intérêts pour actions abusives et une indemnité en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Motifs de la décision
Sur la nullité des revendications 1, 2, 3, 9, 17 et 22 du brevet n° 90 07218
Attendu, selon le brevet n° 90 07218, qu'étant connu le fer à repasser électrique à vapeur comprenant, entre autres éléments, une cartouche déminéralisante placée dans le circuit d'eau reliant le réservoir d'eau à la chambre de vaporisation, l'invention consiste en ce que la cartouche déminéralisante est disposée de façon amovible entre un réservoir primaire d'eau brute et un réservoir secondaire d'eau déminéralisée avec lesquels elle communique au moyen de clapets évitant l'écoulement de l'eau lorsque cette cartouche est retirée du fer ;
Attendu que pour dénier toute activité inventive au brevet Seb les sociétés DPDO et consorts arguent, comme en première instance, de l'état antérieur de la technique résultant du brevet européen n° 0 306 623 (dit brevet Krups), du brevet suisse CH 422 705 (dit brevet Braun), du brevet français n° 87 2938-2 595 381 (dit brevet Rowenta) ainsi que de la " divulgation du dispositif " Calor turbo 2000 " confirmée dans la revue " Que Choisir " de février 1990 et de la cassette qui va avec " ;
Attendu que le brevet " Krups " enseigne - en plus des éléments constituant le fer à repasser électrique à vapeur avec réservoir d'eau, un compartiment pour détartrant et une chambre de vaporisation - un " hublot ou une fenêtre de vision ou un regard afin de reconnaître de l'extérieur l'état du détartrant ", un " compartiment pour détartrant disposé sur un support qui traverse une découpe de la paroi arrière du fer à repasser ", lequel support " présente des éléments de guidage et de blocage en vue d'un montage amovible sur la paroi arrière du fer à repasser " ;
Que, contrairement à ce que prétendent les intimées, rien dans ce brevet ne suggère l'existence d'un réservoir " secondaire " distinct du réservoir " primaire " et situé, dans le circuit d'eau, en aval de la cartouche déminéralisante ;
Attendu qu'il en est de même des brevets " Braun " et " Rowenta " qui ne portent respectivement que sur un réservoir d'eau inséré dans une cavité de la base de la poignée du fer, ce réservoir pouvant être verrouillé en vue de son immobilisation et sur un clapet à bille ;
Que les intimées affirment que le dispositif " Calor Turbo 2000 " témoigne de ce qu'antérieurement au brevet contesté la société Calor vendait une centrale à vapeur utilisant une cartouche anti-tarte fonctionnellement semblable en tous points à celle qui est mise en œuvre dans le brevet Seb, en particulier en ce qu'elle comportait également " deux embouts " ; que, étant rappelé que l'invention selon le brevet n° 90 07218 ne se réduit pas à la cartouche anti- tartre, l'article paru dans la revue " Que Choisir " de février 1990, qui est la seule pièce produite par les intimées concernant le dispositif " Calor Turbo 2000 ", ne révèle rien d'autre au sujet de l'appareil en question que la présence d'un dispositif anti-tartre consistant en une " cassette anti- calcaire dans le réservoir ", ce qui est sans rapport utile avec l'objet du brevet contesté ;
Attendu que l'invention d'appareils du type " centrales à vapeur " (ex : dispositif " Calor Turbo 2000 ") montre qu'était connu le problème de l'allongement du temps pendant lequel le fer peut être utilisé en produisant de la vapeur sans interruption mais qu'elle l'a résolu en séparant le réservoir d'eau et le générateur de vapeur du fer à repasser lui-même ; que cette solution est radicalement différente de celle qui a été adoptée dans l'invention décrite dans le brevet contesté qui concerne un fer incorporant réservoir et générateur de vapeur ;
Attendu que, contrairement à ce que prétendent les intimées, un conduit n'a pas pour finalité d'accumuler le produit qui s'y écoule et n'est donc pas assimilable à un réservoir ; qu'il n'était donc pas évident pour l'homme du métier de tirer de l'existence dans les fers réalisés conformément à ces brevets " Krups ", " Braun " et " Rowenta " de conduits amenant l'eau jusqu'à la chambre de vaporisation, après passage au travers du produit déminéralisant, la solution consistant à installer, après le dispositif anti-calcaire, un second réservoir servant au stockage de l'eau déminéralisée ;
Que la combinaison des divers éléments enseignés par ces mêmes brevets ne permettait pas plus de concevoir cette solution ;
Que c'est donc à bon droit que le tribunal a rejeté la demande en nullité de la revendication 1 du brevet n° 90 07218 ;
Attendu qu'il a tout aussi justement retenu que les revendications 2, 3, 17 et 22 dudit brevet étaient dépendantes de la revendication 1 dès lors qu'elles portent sur des modes de réalisation de l'invention décrite par la revendication 1 ;
Attendu, en revanche, que c'est à tort qu'il a déclaré nulle la revendication 9 ; qu'en effet d'une part cette revendication est tout aussi dépendante de la revendication 1 que les précédentes ; que d'autre part le modèle DM - 015 108 publié le 31 janvier 1990 présente certes une carrosserie se prolongeant en partie arrière au-delà de la semelle et, dans cette partie, un rectangle sombre qui tranche sur le fond clair du reste de la carrosserie mais que rien ne révèle que ce rectangle correspond à l'emplacement de la cartouche déminéralisante ; que d'autre part encore la photocopie de la couverture et d'une page du magazine " Confortique Magazine " produite par les intimées ne porte aucune date et que rien ne permet de vérifier que ce magazine est antérieur au dépôt de la demande du brevet n° 90 07218 ;
Que sur ce point le jugement doit être infirmé ;
Sur la nullité des saisies contrefaçon
Attendu que les articles 454 et 458 du nouveau Code de procédure civile impose, à peine de nullité sans que celui qui l'invoque ait à prouver un grief, que le jugement contienne le nom du juge qui le prononce ; que cette obligation est applicable aux ordonnances sur requête et donc à l'ordonnance du 5 décembre 1996 autorisant la société Seb à faire procéder à une saisie-contrefaçon ;
Que sur l'exemplaire de cette ordonnance que l'huissier requis par la société Seb a présenté lors de ses opérations de saisie, il est mentionné qu'elle a été rendue par le président du Tribunal de grande instance de Lille ;
Que le premier juge a exactement énoncé que cette seule mention ne répondait pas à l'exigence de l'article 454 du nouveau Code de procédure civile dès lors qu'elle ne permet pas d'identifier avec certitude celui qui a rendu cette ordonnance compte tenu de la possibilité de délégation de fonctions ; qu'en annulant pour ce motif cette décision il n'a pas excédé ses pouvoirs, la règle édictée par l'article 460 du nouveau Code de procédure civile selon laquelle voies de nullité n'ont lieu contre les jugements n'étant pas applicable aux ordonnances sur requête ;
Mais que devant la Cour les sociétés Seb et Calor produisent la copie de l'exemplaire de la même ordonnance conservée au secrétariat-greffe du Tribunal de grande instance de Lille - copie non contestée par les sociétés intimées - où figure, à la suite de la mention " Président du Tribunal de grande instance de Lille ", le nom de ce magistrat (Jean-Pierre Delzoide) ;
Que cet exemplaire de l'ordonnance faisant foi et peu important que l'exemplaire produit par l'huissier de justice lors des opérations de saisie n'ait pas porté cette mention, le moyen de nullité invoqué par les sociétés DPDO et consorts manque en fait ;
Qu'en conséquence la saisie contrefaçon exécutée en vertu de cette ordonnance n'est pas nulle et que le jugement doit être réformé sur ce point ;
Attendu que la cour adopte le motif par lequel le tribunal a rejeté la demande de nullité de l'ordonnance rendue le 16 décembre 1996 par le président du Tribunal de grande instance d'Albertville ;
Attendu que les sociétés DPDO et consorts prétendent faire annuler la saisie-contrefaçon pratiquée le 6 décembre 1996 (et non le 16 décembre 1996, comme indiqué par erreur dans les écritures des intimées) motif pris que l'huissier de justice requis n'aurait pas respecté l'ordonnance qui avait autorisé cette saisie ; que pour cela elles arguent du fait que, selon les mentions du procès-verbal de saisie, l'expert qui assistait l'huissier de justice s'était préalablement muni d'un " blister concernant le produit repris en l'ordonnance " et l'avait exhibé au représentant de la société DPDO (René Deudon) ;
Que c'est à tort qu'elles prétendent que cela constitue l'introduction non autorisée d'une pièce dans la saisie-contrefaçon ; qu'en effet, la présentation de cette pièce (blister) est détachable des opérations de saisie-contrefaçon, bien qu'elle ait eu lieu à cette occasion, et qu'elle pouvait être effectuée même sans autorisation ; que cela n'entraîne pas la nullité de la saisie-arrêt pratiquée le 6 décembre 1996 dans les locaux de la société DPDO ;
Sur la contrefaçon
Attendu qu'ayant fait une exacte analyse des revendications 1, 2, 3, 9, 17 et 22 du brevet Seb n° 90 07218 le tribunal a considéré à bon droit que les quatre premières revendications protégeaient non pas la cartouche déminéralisante mais seulement sa position et sa localisation dans le fer à repasser et que les deux dernières revendications (17 et 22) ne concernaient pas la cartouche mais le logement destiné à la recevoir ;
Attendu, par ailleurs, que la cartouche déminéralisante ne constitue pas un moyen de mise on œuvre de l'invention se rapportant à un élément essentiel de celle-ci ;
Qu'est indifférente la circonstance que les cartouches litigieuses sont destinées à être insérées dans les fers à repasser fabriqués conformément à l'invention ;
Que les sociétés Seb et Calor sont donc mal fondées à prétendre que les intimées ont commis des actes de contrefaçon de ce brevet par fourniture de moyen en fabriquant et vendant ces cartouches ;
Sur la contrefaçon de modèle
Attendu que la Cour adopte les motifs par lesquels le premier juge s'est déterminé pour retenir que la société Calor était fondée à invoquer la protection pour son modèle de fer à repasser publié le 28 mai 1993 sous le n° 93 0823 ;
Attendu qu'il est établi par les pièces communiquées par les sociétés Seb et Calor que sur les emballages des cartouches litigieuses fabriquées et commercialisées par les sociétés DPDO et consorts figure l'image d'un fer à repasser en tous points semblable au modèle protégé susvisé ; qu'il ne s'agit pas d'une représentation " symbolique " qui serait valable pour plusieurs marques et modèles de fers à repasser, contrairement à ce qu'objectent les sociétés DPDO qui ne produisent d'ailleurs aucun document pour étayer cette allégation ;
Que vainement les intimées font valoir que le but de cette image n'est qu'explicatif de la destination de la cassette alors que la mention écrite des fers à repasser auxquels étaient destinées les cassettes était suffisante ;
Que les sociétés DPDO et consorts ne justifient nullement de leur bonne foi ;
Attendu que cette reproduction du modèle protégé constitue une atteinte au droit de la société Calor qui a droit, de ce chef, à réparation ;
Sur la contrefaçon de marque
Attendu que la Cour adopte les motifs du jugement retenant la validité de la marque " Calor Aquasystem " déposée par la société Calor et enregistrée le 23 mai 1990 sous le n° 1 593 663 la marque " Calor Aquasystem " pour les produits de la classe 11 et écartant le moyen tiré de la prétendue dégénérescence de la marque ;
Qu'il y a toutefois lieu de les rectifier en précisant que parmi les produits désignés figurent expressément les " cassettes pour filtrer l'eau destiné (sic) à des fers à repasser à vapeur " ;
Attendu qu'il est constant que sur l'emballage des cartouches déminéralisantes destinées à des fers à repasser fabriquées et commercialisées par les sociétés DPDO et consorts est inscrit en grands caractères le terme " Aquasystem " suivi du chiffre " 2 " ;
Que le premier juge a considéré qu'il n'y avait pas contrefaçon dès lors que le terme " Calor " était le plus fort de la marque protégée et qu'il n'était pas reproduit, que plusieurs autres marques comprenant le terme " Aquasystem " avaient été déposées après l'enregistrement de la marque protégée sans protestation de la société Calor, enfin que sur les produits litigieux le terne " Aquasystem " était précédé du nom " Filtech " ;
Mais attendu que s'il évoque certainement un dispositif relatif à l'eau, le terme " Aquasystem " n'est ni nécessaire ni générique ni descriptif d'un fer à repasser quand bien même cet appareil est-il muni d'un dispositif à vapeur ;
Qu'il est protégé même séparé du terme " Calor " ;
Que la circonstance que d'autres marques comprenant le terme " Aquasystem " ont été déposées après l'enregistrement de la marque protégée n'a pas fait perdre à la société " Calor " le bénéfice de la protection attachée au dépôt de sa marque ;
Qu'il importe peu que sur l'emballage des cartouches litigieuses le terme " Aquasystem " soit précédé de tout autre terme et suivi du chiffre " 2 " dans la dénomination ;
Que l'article L 713-6 b du Code de la propriété intellectuelle, prévoyant la possibilité d'utiliser un signe protégé comme référence nécessaire potin indiquer la destination d'un produit on tant qu'accessoire ou pièce détachée, autorisait l'inscription sur l'emballage des cartouches litigieuses de la mention " adaptable Calor-Tefal à litre indicatif ", comme cela a été fait, mais qu'elle n'autorisait pas la désignation de ces mêmes cartouches sous une dénomination comportant le terme protégé " Aquasystem " ;
Que l'usage du terme " Aquasystem " est constitutif d'une contrefaçon et que la société Calor est fondée à réclamer réparation pour le préjudice causé par cette contrefaçon ;
Sur la concurrence déloyale
Attendu que le tribunal a considéré à bon droit que, pour capter la clientèle, les sociétés DPDO et consorts avaient choisi d'offrir les cartouches litigieuses à vente sous une présentation aussi proche que possible des cassettes originales et qu'en conséquence la concurrence déloyale était établie;
Attendu que la société Calor prétend que les sociétés intimées ont encore commis des actes de concurrence déloyale à son détriment en fabriquant et commercialisant des cartouches déminéralisantes défectueuses susceptibles d'être confondues avec les siennes; que pour étayer cette allégation elle produit aux débats un rapport d'essais réalisés par un laboratoire (CTTN-IREN) ;
Que pour rejeter cette prétention le premier juge a retenu d'une part que ce rapport d'essais, qui n'avaient pas été réalisés contradictoirement et n'avaient porté que sur quelques cartouches, n'était pas suffisant pour établir la mauvaise qualité généralisée des produits litigieux d'autre part que la société Calor n'avait pas demandé une expertise contradictoire ;
Que devant la cour la société Calor, qui ne sollicite pas l'organisation d'une expertise judiciaire, ne produit, sur ce point, pas d'autre élément que le rapport du laboratoire CTTN-IREN qui est effectivement insuffisant pour constituer la preuve non seulement de la concurrence déloyale par acte de nature à nuire à la réputation de la société Calor et de ses produits mais aussi du préjudice qui aurait ainsi été causé à cette société;
Que la décision du tribunal sur ce point doit être confirmée ;
Attendu que la somme de trente mille euros apparaît constituer la juste et intégrale réparation du préjudice causé à la société Calor par les actes de concurrence déloyale et de contrefaçons de ses marque et modèle protégés ;
Attendu qu'il convient d'autoriser la société Calor à publier le présent arrêt aux lieu et place du jugement querellé ;
Attendu qu'il y a lieu d'allouer à la société Calor une indemnité pour ses frais non compris dans les dépens ;
Par ces motifs, LA COUR, Infirme les dispositions du jugement annulant la saisie-contrefaçon exécutée le 6 décembre 1996, annulant la revendication 9 du brevet français Seb n° 90 07218, déboutant les sociétés Calor et Seb de leurs demandes fondées sur la contrefaçon de la marque " Calor Aquasystem " et du modèle de fer à repasser enregistré sous le n° 93 08323, condamnant in solidum les sociétés Filtech France, DPDO-Flandres, Rupofil BV et Filtertechniek Nederland BV à payer à la société Calor la somme de 80 000 F à titre de dommages-intérêts et autorisant la publication du jugement ; Confirme les autres dispositions du jugement ; Et statuant à nouveau, Condamne in solidum les sociétés Filtech France, DPDO-Flandres, Rupofil BV et Filtertechniek Nederland BV à payer à la société Calor les sommes de trente mille euros (30 000 euros) en réparation du préjudice causé par les actes de concurrence déloyale et de contrefaçons de ses marque et modèle protégés, quatre mille euros (4 000 euros) en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Autorise la publication d'extraits du présent arrêt dans 5 revues ou journaux au choix de la société Calor et aux frais des sociétés intimées dans la limite de 3 000 euros par insertion ; Rejette toute autre demande ; Condamne les sociétés Filtech France, DPDO-Flandres, Rupofil BV et Filtertechniek Nederland BV aux dépens de première instance et d'appel et autorise l'avoué de la société Calor à recouvrer directement contre elle les sommes dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision suffisante.