CA Pau, 1re ch. corr., 18 juin 1996, n° 96-00193
PAU
Arrêt
PARTIES
Défendeur :
Chambre syndicale des horlogers bijoutiers des PA, Fédération des bijoutiers, DGCCRF
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Pujo Sausset
Conseillers :
MM. d'Uhalt, Petriat
Avocats :
Mes Dissez, Madar
Rappel de la procédure :
Le jugement :
Le Tribunal correctionnel de Pau, par jugement contradictoire, en date du 25 janvier 1996,
A déclaré
Z Jean-François Edouard,
Coupable de publicité mensongère ou de nature à induire en erreur, du 1er septembre 1994 au 1er octobre 1994, à Pau (64), infraction prévue par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6 alinéa 1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 121-6 et L. 213-1 du Code de la consommation et, en application de ces articles,
L'a condamné à 30 000 F d'amende et a ordonné la publication aux frais du condamné du dispositif du jugement dans le journal La République des Pyrénées sans que le coût n'excède la somme de 3 000 F,
Et sur l'action civile,
L'a condamné à payer la somme de 10 000 F à titre de dommages-intérêts ainsi que la somme de 2 000 F au titre de l'article 475-1 du CPP à chaque partie civile : la Chambre syndicale des horlogers et la Fédération des bijoutiers.
Les appels :
Appel a été interjeté par :
Z Jean-François Edouard, le 26 janvier 1996,
M. le Procureur de la République, le 26 janvier 1996 contre Z Jean-François Edouard,
La Chambre syndicale des horlogers bijoutiers des PA, le 26 janvier 1996,
La Fédération des bijoutiers, le 26 janvier 1996.
Z Jean-François Edouard, prévenu, la Fédération des bijoutiers et la Chambre syndicale des horlogers bijoutiers des PA, parties civiles, furent assignés à la requête de M. le Procureur général, par actes en date des 14 et 19 mars 1996, d'avoir à comparaître devant la cour à l'audience publique du 10 avril 1996 ;
La Direction départementale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, fut avisée à la requête de M. le Procureur Général, par acte en date du 7 mars 1996, d'avoir à comparaître devant la cour à l'audience publique du 21 mai 1996.
Décision :
Vu les appels réguliers interjetés le 26 janvier 1996 par Jean-François Z, prévenu, le Ministère public, et les parties civiles, à l'encontre du jugement contradictoirement rendu le 25 janvier 1996 par le Tribunal correctionnel de Pau ;
Il est fait grief au prévenu :
- d'avoir à Pau, entre le 1er septembre 1994 et le 1er octobre 1994, effectué une publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur en annonçant une réduction de prix illusoire de : - 50 %, - 40 %, -30 %, -25 % ;
infraction prévue et réprimée par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6, L. 121-6 alinéa 1, L. 213-1 et L. 121-4 du Code de la consommation.
J.-F. Z soutient que l'analyse des ventes effectivement réalisées en dehors de la liquidation et pendant la liquidation démontre :
- que les prix annoncés comme prix liquidés sont bien ceux qui ont été pratiqués pendant la liquidation,
- que les prix barrés annoncés comme étant les prix de référence pratiqués avant la liquidation font apparaître une marge supérieure à celle résultant de la période de liquidation ;
Que, par rapport à l'exercice clos au 30 juin 1994, les prix de référence pratiqués avant la liquidation font apparaître une marge supérieure à celle résultant de la période de liquidation.
Jean-François Z demande à la cour de :
- constater la sincérité des prix de référence,
- le relaxer des poursuites dirigées à son encontre et rejeter toutes les constitutions de parties civiles.
Le Ministère public demande la confirmation du jugement.
La Chambre syndicale des horlogers, bijoutiers, joailliers, orfèvres, artisans des Pyrénées-Atlantiques et le Syndicat des artisans et chefs d'entreprise du secteur des métiers bijoutiers, joailliers, orfèvres du Béarn et du Pays-Basque demandent à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris sur le plan pénal.
Le réformant sur l'action civile,
- condamner J.-F. Z et la bijouterie X à verser à chacune des parties civiles la somme de 100 000 F à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi et celle de 7 000 F en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.
- ordonner la publication de l'arrêt dans un journal local et dans un journal professionnel, sans que le coût de chaque insertion dépasse 5 000 F.
Attendu que la Direction départementale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes a pu constater que les réductions annoncées dans les publicités étaient parfaitement illusoires, parce que, des recherches et des comparaisons auxquelles elle a pu procéder, il résulte que la marge pratiquée durant l'opération de promotion n'était pas différente de la marge normale de l'entreprise : le coefficient multiplicateur pour la période de soldes pris sur 15 articles choisis au hasard étant de 2,19 pour 2,21 pour l'exercice normal ;
Attendu que c'est à l'annonceur de produire les documents qui lui permettraient de justifier de la réalité du prix de référence invoqué ;
Attendu que l'inventaire déposé à la mairie de Pau le 3 août 1994 faisant état des prix de vente TTC n'a aucune valeur probante,
Que, comme l'a déclaré J.-F. Z, ces prix sont le plus souvent les prix conseillés par le fabricant ;
Que le prévenu n'a jamais pu justifier de la production de bordereaux, de tickets de caisse ou de tout autre document que ces prix étaient effectivement ceux qu'il pratiquait à l'égard de sa clientèle ;
Attendu que la Direction de la concurrence a conclu, à juste titre, que la marge pendant et avant liquidation était sensiblement la même et que, dès lors, les remises annoncées étaient illusoires ;
Que, par ailleurs, l'analyse du service des fraudes et le caractère illusoire des remises se sont trouvés confirmés à travers une comparaison entre les prix annoncés avec remise par la bijouterie X et les prix sans remise habituellement pratiqués pour des articles identiques, par des bijouteries de la place de Pau ;
Attendu qu'aux termes d'une jurisprudence constante la publicité est de nature à induire en erreur lorsqu'elle implique que le consommateur bénéficiera dans son esprit d'une remise par rapport au prix qu'il aurait dû normalement payer le produit, ce qui n'était pas le cas, les bijoux aux prix soi-disant réduits étant vendus à des prix quasiment égaux à ceux pratiqués par les bijoutiers traditionnels ;
Attendu que les premiers juges ont fait une juste appréciation des faits, de la sanction à infliger au prévenu, ainsi que du préjudice subi par les victimes,
Qu'il y a lieu, dans ces conditions, de confirmer leur décision,
Qu'il y a lieu de condamner J.-F. Z à verser à chacune des parties civiles une somme supplémentaire de 2 000 F sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ;
Par ces motifs : LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement, En la forme, Reçoit les appels du prévenu, du Ministère public et des parties civiles. Au fond, Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris. Y ajoutant, Condamne Jean-François Z à verser à chacune des parties civiles une somme supplémentaire de 2 000 F sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale. La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de 800 F dont est redevable le condamné ; Fixe la contrainte par corps conformément à la loi. Le tout par application du titre XI de la loi du 4 janvier 1993, les articles 749 et suivants du Code de procédure pénale, L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6, L.121-6 alinéa 1, L. 213-1 et L. 121-4 du Code de la consommation.