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Décisions

Conseil Conc., 10 juillet 1990, n° 90-A-11

CONSEIL DE LA CONCURRENCE

Avis

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Délibéré en section sur le rapport de M. Zachmann, dans sa séance du 10 juillet 1990, où siégeaient : M. Pineau, vice-président; MM. Blaise, Cabut, Cortesse, Gaillard, Sargos, Urbain, membres.

Conseil Conc. n° 90-A-11

10 juillet 1990

Vu la lettre enregistrée le 19 avril 1990 sous le numéro A 71 par laquelle le ministre d'Etat, Ministre de l'Economie, des Finances et du Budget, a saisi le Conseil de la concurrence sur le fondement de l'article 38 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 d'une demande d'avis relative à la constitution d'un groupement d'intérêt économique par les sociétés Médiavision Cinéma et Publicité et Jean Mineur et Circuit A dans le secteur de la publicité cinématographique; Vu l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence, modifiée, ensemble le décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986, modifié, pris pour son application; Vu les pièces du dossier; Le rapporteur, le rapporteur général, le commissaire du Gouvernement et les parties entendues; Retient les constatations (I) et adopte l'avis (II) ci-après exposés.;

I. CONSTATATIONS

Les sociétés Médiavision Cinéma et Publicité et Jean Mineur (ci-après dénommée Médiavision) et Circuit A commercialisent l'espace publicitaire que constituent les écrans de salles de cinéma dont elles se sont assuré l'exclusivité de représentation.

Pour les annonceurs nationaux, elles sont les deux seules sociétés à mettre à disposition un réseau d'écrans de salles implantées sur l'ensemble du territoire. Elles prospectent par leurs propres moyens ces annonceurs et leurs prestataires de services que sont les agences-conseil en communication et les centrales d'achat d'espace à qui est confié leur budget de publicité cinématographique.

Pour les annonceurs locaux, elles ont concédé les écrans de salles de cinéma qu'elles représentent à des sociétés (Socogex, Prociné, Médiainfo, SEP, RM 7 et Havas) selon différentes zones géographiques et un système d'exclusivité territoriale qui profite à chacune d'elles. Ces sociétés prospectent par leurs propres moyens les annonceurs locaux dont les besoins en publicité cinématographique se limitent à une diffusion régionale.

La société Médiavision est filiale des sociétés Pathé Cinéma, Publicis, Havas et Jean Mineur. Elle a assuré, en 1989, la régie sur le marché national de 2 304 salles de cinéma et réalisé un chiffre d'affaires de 149 millions de francs.

La société Circuit A est filiale de la société Union générale cinématographique (UGC). Elle a assuré, en 1989, la régie sur le marché national de 808 salles de cinéma et réalisé un chiffre d'affaires de 75 millions.

Selon ces données, les deux sociétés Médiavision et Circuit A représentent respectivement sur le marché national de la publicité cinématographique 74 p. 100 et 26 p. 100 des salles de cinéma et 67 p. 100 et 33 p. 100 du chiffre d'affaires.

Les deux sociétés ont le projet de constituer un groupement d'intérêt économique dénommé Le Cinéma publicitaire français à qui seront confiées les activités de prospection et de promotion de la publicité cinématographique sur le marché national auprès des annonceurs. Les autres fonctions relatives aux relations avec les exploitants de salles de cinéma, la régie de leur espace publicitaire, la distribution des redevances, le montage et le routage des films publicitaires, l'administration et la gestion demeurent de la compétence de chacune des deux sociétés fondatrices du GIE qui restent ainsi présentes sur le marché.

Selon les projets de statuts et de règlement intérieur, le groupement " agira en qualité d'agent intermédiaire et devra travailler pour des entreprises tierces " et limitera son activité à " l'établissement de devis communs pour chacun de ses membres, la prise d'ordres destinée aux supports de chacun de ses membres ". Ainsi, le GIE constituera simplement le représentant unique des sociétés Médiavision et Circuit A pour la prospection des annonceurs nationaux.

Il est encore prévu qu'il sera constitué pour une durée de neuf ans, sans capital et apports initiaux, et sera doté par chacune des sociétés fondatrices des effectifs nécessaires à son fonctionnement.; Enfin, il est précisé que les sociétés Médiavision et Circuit A disposent chacune de la moitié des voix au conseil d'administration.

II. À LA LUMIÈRE DES CONSTATATIONS QUI PRÉCÈDENT, LE CONSEIL DE LA CONCURRENCE

Considérant que l'article 39 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 dispose que " la concentration résulte de tout acte, quelle qu'en soit la forme, qui emporte transfert de propriété ou de jouissance sur tout ou partie des biens, droits et obligations d'une entreprise ou qui a pour objet, ou pour effet, de permettre à une entreprise ou à un groupe d'entreprises d'exercer, directement ou indirectement, sur une ou plusieurs autres entreprises une influence déterminante ";

Considérant, d'une part, que le groupement d'intérêt économique ne se verrait confier que l'une des fonctions jusqu'alors exercées par chacune des sociétés fondatrices et limitée à la prospection et la prise d'ordres de commandes auprès des annonceurs nationaux de publicité cinématographique;

Considérant, d'autre part, que le GIE, agissant dans ce cadre comme agent intermédiaire des deux régies, n'aurait ainsi aucune recette propre et ne réaliserait aucun profit, son action se bornant à la promotion et au démarchage des annonceurs;

Considérant qu'il résulte de ces caractéristiques que le GIE n'emporte pas transfert de propriété ou de jouissance sur tout ou partie des biens, droits ou obligations des entreprises fondatrices, le GIE n'exerçant aucune activité économique autonome et Médiavision et Circuit A demeurant présentes sur le marché;

Est d'avis :

Que l'opération soumise à l'appréciation du Conseil de la concurrence ne constitue pas une concentrationau sens de l'article 39 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986.