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Décisions

TPICE, 4e ch., 24 juin 1998, n° T-596/97

TRIBUNAL DE PREMIERE INSTANCE DES COMMUNAUTES EUROPEENNES

Ordonnance

PARTIES

Demandeur :

Dalmine SpA

Défendeur :

Commission des Communautés européennes

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Lindh

Juges :

MM. K. Lenaerts, J. D. Cooke

Avocat :

Me Arossa.

Comm. CE, du 6 oct. 1997

6 octobre 1997

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),

Faits à l'origine du recours

1. La requérante est une société anonyme de droit italien qui produit des tubes d'acier, dont le capital serait détenu par Techint BV, à concurrence de 47 %. Techint BV serait une filiale à 100 % de Siderca Saic, une société de droit argentin produisant des tubes d'acier et ayant son siège à Buenos Aires (Argentine) (ci-après "Siderca"). Selon la Commission, Siderca est contrôlée par la société holding de Techint Group, San Faustin NV, dont le siège est situé à Curaçao (Antilles). Le siège de Techint Group serait aussi situé à Buenos Aires, à la même adresse que Siderca.

2. Le 13 février 1997, dans le cadre d'une enquête ayant pour but de vérifier certaines informations concernant l'existence d'accords ou de pratiques concertées entre producteurs de tubes d'acier, et la compatibilité de ces accords avec l'article 85 du traité CE, la Commission a procédé à une vérification dans les locaux de la requérante, avec l'accord de cette dernière. Par lettre datée du 4 avril 1997, la requérante a répondu à un certain nombre de questions posées par la Commission lors de cette vérification.

3. Par lettre du 22 avril 1997, la Commission a adressé à la requérante et au "groupe de contrôle Techint-Siderca" une demande de renseignements, au titre de l'article 11 du règlement n° 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d'application des articles 85 et 86 du traité (JO 1962 13, p. 204, ci-après "règlement n° 17"), comportant au total douze questions. La requérante y a répondu par courrier du 29 mai 1997.

4. Considérant que la requérante et le groupe de contrôle Techint-Siderca n'avaient pas répondu à toutes les questions, ou avaient répondu de manière incomplète, la Commission leur a envoyé une nouvelle demande, datée du 12 juin 1997, les invitant à fournir les renseignements demandés. Par lettre du 11 juillet 1997, la requérante a fourni des renseignements supplémentaires.

5. Étant d'avis que les renseignements fournis en réponse à quatre desdites questions restaient toujours incomplets, la Commission a adopté la décision C(97) 3036 du 6 octobre 1997, relative à une procédure d'application de l'article 11, paragraphe 5, du règlement n° 17 du Conseil (IV-35.860 - Tubes d'acier) (ci-après "décision attaquée"), notifiée à la requérante le 7 octobre 1997. Dans la décision attaquée, la Commission a précisé que le caractère incomplet des renseignements transmis par la requérante concernait les questions n° 1, sous b), n° 3, sous b), et n° 8 et celui des renseignements transmis par le groupe Techint-Siderca concernait la question n° 2.

6. Le dispositif de la décision attaquée est rédigé comme suit:

"Articolo 1

Entro trenta giorni dalla data di notifica della presente decisione:

- Dalmine SpA è tenuta a fornire le informazioni indicate nelle domande n° 1, lettera b), n° 3, lettera b), n° 8, formulate nell'allegato 1 alla presente decisione;

- Techint Group e SIDERCA Saic sono tenuti a fornire le informazioni indicate nella domanda n° 2 formulata nell'allegato 1 alla presente decisione.

Articolo 2

Qualora Dalmine SpA, Techint Group e SIDERCA Saic non forniscano le informazioni richieste nei termini e secondo le modalità indicati nell'articolo 1, viene inflitta a ciascuno di loro una penalità di mora di 1 000 ECU per ogni giorno di ritardo a decorrere dal termine loro assegnato dall'articolo 1.

La società Dalmine SpA è responsabile in via solidale per il pagamento delle penalità di mora inflitte a Techint Group ed a SIDERCA Saic.

Articolo 3

Gli allegati 1 e 2 fanno parte integrante della presente decisione.

Articolo 4

Sono destinatarie della presente decisione:

- Dalmine SpA, Piazza Caduti 6 luglio 1944, n° 1, I-24044 DALMINE (Bergamo)

- Techint Group, Av. L.N. Alem 1067, Buenos Aires (Argentina)

c/o Dalmine SpA, Piazza Caduti 6 luglio 1944, n° 1, I-24044 DALMINE (Bergamo)

- SIDERCA Saic, Av. L.N. Alem 1067, Buenos Aires (Argentina)

c/o Dalmine SpA, Piazza Caduti 6 luglio 1944, n° 1, I-24044 DALMINE (Bergamo).

Contro la presente decisione può essere proposto, nei termini previsti dall'articolo 173 del trattato CE, un ricorso al Tribunale di Primo Grado delle Comunità Europee.

Conformemente all'articiolo 185 del trattato CE, il ricorso non ha effetto sospensivo."

["Article premier

Dans un délai de trente jours à compter de la notification de la présente décision:

- Dalmine SpA est tenue de fournir les renseignements demandés dans les questions n° 1, sous b), n° 3, sous b), et n° 8, de l'annexe 1 à la présente décision;

- Techint Group et Siderca Saic sont tenus de fournir les renseignements demandés dans la question n° 2 de l'annexe 1 à la présente décision.

Article 2

Si Dalmine SpA, Techint Group et Siderca Saic ne fournissent pas les renseignements demandés dans le délai imparti et selon les modalités indiquées à l'article 1er, une astreinte de 1 000 écus par jour de retard sera infligée à chacun d'eux à compter de l'expiration du délai qui leur a été accordé par cet article.

La société Dalmine SpA est solidairement responsable des astreintes infligées à Techint Group et à Siderca Saic.

Article 3

Les annexes 1 et 2 font partie intégrante de la présente décision.

Article 4

Sont destinataires de la présente décision:

- Dalmine SpA, Piazza Caduti 6 luglio 1944, n° 1, I-24044 Dalmine (Bergamo),

- Techint Group, av. L. N. Alem 1067, Buenos Aires (Argentine) s/c Dalmine SpA, Piazza Caduti 6 luglio 1944, n° 1, I-24044 Dalmine (Bergamo),

- Siderca Saic, av. L. N. Alem 1067, Buenos Aires (Argentine) s/c Dalmine SpA, Piazza Caduti 6 luglio 1944, n° 1, I-24044 Dalmine (Bergamo).

Un recours peut être formé contre la présente décision auprès du Tribunal de première instance des Communautés européennes dans les conditions prévues à l'article 173 du traité CE.

Conformément à l'article 185 du traité CE, ce recours n'a pas d'effet suspensif."]

7. Par lettre du 7 novembre 1997, la requérante, soulignant qu'elle considérait déjà avoir fourni des réponses complètes aux questions n° 1, sous b), n° 3, sous b), et n° 8, a répondu "alle ulteriori questioni sollevate dalla Commissione in relazione alle domande citate" ("aux points relatifs auxdites questions soulevés ultérieurement par la Commission"). La Commission a accusé réception de cette lettre par courrier du 19 novembre 1997.

8. Par requête déposée au greffe du Tribunal le 17 décembre 1997, la requérante a introduit le présent recours.

Conclusions des parties

9. La requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

- annuler les articles 2 et 4 de la décision attaquée, dans la mesure où ils concernent la requérante;

- condamner la Commission aux dépens.

10. La Commission conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

- rejeter le recours comme irrecevable;

- à titre subsidiaire, le rejeter comme non fondé;

- condamner la requérante aux dépens.

Sur la recevabilité

11. Aux termes de l'article 111 du règlement de procédure, lorsqu'un recours est manifestement irrecevable, le Tribunal peut, sans poursuivre la procédure, statuer par voie d'ordonnance motivée.

12. En l'espèce, le Tribunal s'estime suffisamment éclairé par la requête et le mémoire en défense, ainsi que par les pièces y annexées. Il n'y a donc pas lieu de poursuivre la procédure écrite ni d'ouvrir la procédure orale.

Arguments des parties

13. La requérante invoque quatre moyens à l'appui de ses conclusions, qu'elle présente comme étant subsidiaires l'un par rapport à l'autre selon l'ordre dans lequel ils sont exposés dans son recours.

14. Le premier moyen est tiré d'une violation des formes substantielles, d'un détournement de pouvoir et d'une violation du traité et des règles relatives à son application. La requérante explique à cet égard que la Commission n'est pas habilitée à adresser une demande de renseignements à des tiers par la voie d'une décision au titre de l'article 11, paragraphe 5, du règlement n° 17, notifiée à la requérante, et de demander à cette dernière de transmettre la décision aux tiers qui en sont destinataires, en l'occurrence Siderca et Techint Group.

15. Le deuxième moyen est également tiré d'une violation des formes substantielles, d'un détournement de pouvoir et d'une violation du traité et des règles relatives à son application. La requérante souligne à cet égard que la Commission n'est pas compétente pour lui infliger une astreinte en vertu de l'article 16, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 17, ni, partant, pour la déclarer solidairement et indivisiblement responsable, dans l'hypothèse où Siderca et/ou Techint Group s'abstiendraient de fournir des renseignements en réponse à la décision attaquée. Elle ne serait pas non plus habilitée à faire usage d'une telle astreinte aux fins de contraindre la requérante à transmettre à Siderca et/ou à Techint Group une copie de la décision attaquée.

16. Le troisième moyen est tiré d'une violation de l'article 190 du traité. La requérante prétend ainsi que la décision attaquée est incohérente, contradictoire et insuffisamment motivée. Elle relève que, si la Commission considère Siderca, Techint Group et la requérante comme une entreprise unique pour la notification de la demande de renseignements, elle les considère comme des entreprises séparées pour ce qui est de la responsabilité et de l'imposition d'astreintes. La motivation de la décision attaquée relative au droit de la Commission d'obliger la requérante à transmettre la décision aux autres destinataires ne serait pas non plus adéquate.

17. Le quatrième moyen est tiré d'une violation des formes substantielles, du traité et des règles relatives à son application. La requérante soutient à cet égard que, dans la décision attaquée, la Commission tente de fixer le montant de l'astreinte à un niveau plus élevé que l'article 16, paragraphe 1, du règlement n° 17 ne le permet. Elle fait ainsi remarquer que l'article 2 de la décision attaquée inflige une astreinte d'un montant total de 3 000 écus par jour, alors que, dans la mesure où la Commission considère la requérante, Techint Group et Siderca comme une seule entreprise, le montant maximal d'une astreinte ne peut être supérieur, en vertu de l'article 16, paragraphe 1, du règlement n° 17, à 1 000 écus.

18. La requérante indique qu'elle a fourni, par la lettre du 7 novembre 1997, des renseignements supplémentaires en réponse à la décision attaquée, afin de collaborer avec la Commission dans le cadre de l'enquête menée par cette dernière. Elle déduit de l'accusé de réception de sa lettre du 7 novembre 1997 que la Commission lui a adressé par courrier du 19 novembre 1997 et de l'absence de réaction de cette dernière depuis cette date que la Commission considère désormais que la requérante a répondu de façon complète aux questions n° 1, sous b), n° 3, sous b), et n° 8.

19. La Commission fait d'abord observer que la requérante ne conclut pas à l'annulation de l'article 1er de la décision attaquée et qu'elle n'attaque pas non plus la partie de la décision relative à l'astreinte qui lui serait infligée si elle ne fournissait pas les renseignements demandés. Le recours serait dès lors dirigé, d'une part, contre le fait que la décision attaquée a été notifiée à Techint Group et à Siderca à l'adresse de la requérante, obligeant dès lors cette dernière à la leur transmettre, et, d'autre part, contre le fait que la décision attaquée la rend solidairement responsable des astreintes infligées à Techint Group et à Siderca.

20. Ensuite, sans soulever formellement une exception d'irrecevabilité au sens de l'article 114 du règlement de procédure, la Commission conteste la recevabilité du recours, tant en ce qu'il vise à obtenir l'annulation de l'article 2 de la décision attaquée qu'en ce qu'il vise à obtenir l'annulation de l'article 4 de celle-ci.

21. Dans la mesure où il concerne la validité de l'article 2 de la décision attaquée, le recours serait peu judicieux et, en tout état de cause, prématuré, cet article n'imposant aucune obligation ou responsabilité susceptible de recevoir exécution aux dépens de la requérante, ni d'ailleurs de Techint Group ou de Siderca. La Commission explique ainsi qu'elle n'a pas encore définitivement infligé d'astreinte en l'espèce, conformément aux dispositions du règlement n° 17. Ces dispositions préciseraient les différentes étapes de la procédure à suivre pour obtenir des renseignements. Cette procédure commencerait par une demande de renseignements, fondée sur l'article 11, paragraphe 3, du règlement n° 17, pour se poursuivre, dans l'hypothèse où une entreprise ne fournit pas les renseignements demandés dans le délai imparti par la Commission ou les fournit de façon incomplète, par l'adoption d'une décision en vertu de l'article 11, paragraphe 5, du règlement n° 17 exigeant la transmission desdits renseignements. Selon la Commission, cette décision précise les renseignements demandés, fixe un délai approprié dans lequel les renseignements doivent être fournis, indique les sanctions prévues à l'article 15, paragraphe 1, sous b), et à l'article 16, paragraphe 1, sous c), en cas de non-respect et mentionne le recours ouvert devant la Cour contre une telle décision.

22. La Commission pourrait ainsi, sur la base de l'article 16, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 17, infliger une astreinte, à raison de 50 à 1 000 écus par jour, soit dans la décision exigeant que les renseignements soient fournis, soit dans une décision ultérieure. L'imposition d'une telle astreinte n'aurait cependant pas d'effet immédiat. Le caractère exécutoire de l'imposition d'une astreinte découlerait de l'adoption d'une nouvelle décision, sur la base de l'article 16 du règlement n° 17, déterminant le montant de l'astreinte. Seule cette seconde décision pourrait recevoir exécution. De même, ce ne serait qu'avant l'adoption de cette dernière décision que les exigences procédurales prescrites par le règlement n° 17 devraient être remplies. La Commission devrait ainsi envoyer une communication des griefs à l'entreprise, précisant que celle-ci n'a pas fourni les renseignements demandés, procéder à l'audition de l'entreprise et consulter le comité consultatif (voir arrêt de la Cour du 21 septembre 1989, Hoechst/Commission, 46-87 et 227-88. Rec. p. 2859, points 51 à 58).

23. Dès lors, dans une décision adoptée sur la base des articles 11, paragraphe 5, et 16, paragraphe 1, du règlement n° 17, une disposition telle que l'article 2 de la décision attaquée n'aurait qu'un caractère préliminaire, correspondant en quelque sorte à un avertissement adressé à l'entreprise concernée.

24. Par ailleurs, une communication des griefs n'étant pas un acte attaquable sur la base de l'article 173 du traité, la Commission souligne que l'article 2 de la décision attaquée qui, dans le déroulement de la procédure, se situe avant la communication des griefs, ne peut pas, a fortiori, être un acte attaquable.

25. Dans la mesure où le recours concerne l'article 4 de la décision attaquée, la Commission fait remarquer qu'il n'affecte pas la requérante, dès lors qu'il ne peut entraîner aucune conséquence pratique dans son chef, quelle que soit la validité reconnue à la notification à Techint Group et à Siderca.

26. La Commission affirme d'abord qu'elle a notifié la décision attaquée à Techint Group et à Siderca à l'adresse qu'elle considère être la leur à l'intérieur de la Communauté, à savoir le siège social de la requérante. Elle précise ensuite que, s'il fallait considérer que la notification contestée est valable, l'absence de transmission des renseignements demandés dans la décision attaquée par Techint Group et Siderca ne saurait avoir de conséquences pratiques pour la requérante avant que la procédure décrite ci-dessus au point 22 ne soit menée à son terme et que la décision fixant définitivement l'astreinte de Techint Group et de Siderca ne soit adoptée. Enfin, s'il fallait considérer que cette notification n'est pas valable, la Commission soutient que Techint Group et Siderca ne seraient pas obligées de fournir les renseignements demandés, ce qui n'aurait pas non plus de conséquences pour la requérante. La Commission ne pouvant en effet pas infliger d'astreinte à Techint Group et à Siderca, la requérante ne pourrait donc en être tenue solidairement responsable.

Appréciation du Tribunal

27. Il ressort de l'ensemble de l'argumentation de la requérante que celle-ci conclut en substance à l'annulation de l'article 2 de la décision attaquée, pour autant qu'elle y est tenue pour solidairement responsable de l'astreinte de Techint Group et de Siderca, et à l'annulation de l'article 4 de la décision attaquée, pour autant que l'adresse de notification y indiquée pour Techint Group et pour Siderca est celle de la requérante.

28. Il en ressort également que la requérante ne conclut pas à l'annulation de l'article 1er de la décision attaquée lui ordonnant de fournir les renseignements demandés dans les questions n° 1, sous b), n° 3, sous b), et n° 8, reprises dans l'annexe 1 à la requête.

29. Or, en ce qui concerne l'article 2 de la décision attaquée, il convient de rappeler que, selon l'article 173 du traité, un recours en annulation est ouvert contre les actes du Conseil et de la Commission autres que les recommandations ou avis. Ce recours tend à assurer, conformément aux prescriptions de l'article 164 du traité, le respect du droit dans l'interprétation et l'application du traité, et il serait contraire à cet objectif d'interpréter restrictivement les conditions de recevabilité du recours en limitant sa portée aux seules catégories d'actes visés par l'article 189 du traité. Pour déterminer si les mesures attaquées constituent des actes au sens de l'article 173 du traité c'est, dès lors, à leur substance qu'il y a lieu de s'attacher. Suivant une jurisprudence constante, constituent des actes ou des décisions susceptibles de faire l'objet d'un recours en annulation au sens de l'article 173 du traité les mesures produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts de la requérante, en modifiant de façon caractérisée la situation juridique de celle-ci (voir arrêt de la Cour du 11 novembre 1981, IBM/Commission, 60-81, Rec. p. 2639, points 8 et 9).

30. En outre, selon la jurisprudence, la fixation d'astreintes en vertu de l'article 16 du règlement n° 17 comporte nécessairement deux phases. Par une première décision, visée au paragraphe 1 dudit article, la Commission inflige une astreinte à raison d'un certain nombre d'unités de compte par jour de retard à partir de la date qu'elle fixe. Cette décision, faute de déterminer le montant total de l'astreinte, ne peut pas recevoir exécution. Ce montant ne peut être définitivement fixé que par une nouvelle décision (voir arrêt Hoechst/Commission, précité, point 55).

31. Ne produisant donc pas d'effets juridiques obligatoires, la décision visée à l'article 16, paragraphe 1, du règlement n° 17, infligeant une astreinte à raison d'un certain nombre d'unités de compte par jour de retard à partir de la date qu'elle fixe, ne constitue pas un acte attaquable.

32. En effet, cette décision ne constitue qu'une phase de la procédure au terme de laquelle la Commission adopte éventuellement une décision fixant définitivement le montant total de l'astreinte et formant ainsi titre exécutoire.Avant qu'elle ne puisse adopter cette dernière décision, la Commission doit cependant satisfaire à certaines obligations procédurales. Elle doit envoyer une communication des griefs à l'entreprise concernée, procéder à son audition et consulter le comité consultatif en matière d'ententes et de positions dominantes, de sorte que tant l'entreprise que le comité consultatif sont en mesure de faire connaître utilement leur point de vue au sujet de tous les éléments retenus par la Commission pour infliger l'astreinte et en fixer le montant définitif (voir arrêt Hoechst/Commission, précité, point 56).

33. En l'espèce, l'article 2 de la décision attaquée inflige des astreintes à raison de 1 000 écus par jour de retard à partir de l'expiration d'un délai de 30 jours à compter de la notification de la décision attaquée. La décision contenue dans cet article est donc celle infligeant une astreinte, en vertu de l'article 16, paragraphe 1, du règlement n° 17, et non pas celle fixant définitivement le montant total d'une astreinte.

34. L'article 2 de la décision attaquée ne produit donc pas d'effets juridiques obligatoires en ce qu'il inflige des astreintes.

35. Dès lors, il ne produit pas d'effets juridiques obligatoires non plus en ce que, dans son paragraphe 2, il tient la requérante solidairement responsable des astreintes infligées à Techint Group et à Siderca. Seule la reprise formelle de ce paragraphe dans une éventuelle décision ultérieure fixant définitivement le montant total de ces astreintes est susceptible d'engendrer des effets juridiques obligatoires. L'adoption d'une telle décision doit toutefois être précédée par l'accomplissement de certaines obligations procédurales (voir ci-dessus point 32).

36. Les conclusions relatives à l'article 2 de la décision attaquée n'ont donc pas pour objet une décision attaquable. Elles sont dès lors manifestement irrecevables.

37. Quant aux conclusions relatives à l'article 4 de la décision attaquée, il convient de rappeler que, selon l'article 191, paragraphe 3, du traité, les décisions telles que celle en cause en l'espèce sont "notifiées à leurs destinataires et prennent effet par cette notification".

38. Il ressort de la jurisprudence que ce régime ne peut pas être modifié par l'article 4 de la décision attaquée, de sorte que cet article ne saurait faire grief à la requérante (voir arrêt de la cour du 14 juillet 1972, ICI/Commission, 48-69, Rec. p. 619, points 36 à 38).

39. Les éventuelles irrégularités dans la procédure de notification d'une décision sont extérieures à l'acte concerné et ne peuvent donc le vicier. Certes, dans certaines circonstances, de telles irrégularités peuvent avoir pour effet d'empêcher que le délai de recours commence à courir, dans la mesure où, en vertu de l'article 173, cinquième alinéa, du traité, le délai des recours en annulation contre les actes individuels de la Commission commence à courir à partir de la notification de la décision à la requérante ou, à défaut, du jour où celle-ci en a eu connaissance (voir arrêt ICI/Commission, précité, points 39 à 41). Cela n'est cependant pas le cas en l'espèce où il est constant que la requérante a eu notification de la décision attaquée et qu'elle a fait usage, dans les délais, de son droit de recours.

40. Dans de telles circonstances, le fait que, à l'article 4 de la décision attaquée, la Commission a indiqué l'adresse de la requérante comme adresse de notification de la décision attaquée pour Techint Group et Siderca n'a donc pas, en soi, pour effet d'obliger la requérante à leur transmettre la décision. Si, comme le soutient la requérante, la notification de la décision attaquée à Techint Group et à Siderca au siège de la requérante devait être considérée comme irrégulière, la décision ne prendrait tout simplement pas effet à leur égard.

41. Quant au fait que, en vertu de l'article 2, paragraphe 2, de la décision attaquée, la requérante est tenue solidairement responsable des astreintes infligées à Techint Group et à Siderca, il suffit de rappeler que ce paragraphe ne produit pas d'effets juridiques obligatoires (voir ci-dessus point 35).

42. Il s'ensuit que la question de savoir si des irrégularités ont été commises dans la notification de la décision attaquée à Techint Group et à Siderca est dénuée de pertinence dans le cadre du présent recours. En effet, cette question s'avère uniquement pertinente dans la mesure où il conviendrait d'établir si la décision attaquée a été valablement notifiée à Techint Group et à Siderca et, le cas échéant, de déterminer le point de départ du délai dont disposeraient celles-ci pour introduire un recours contre la décision attaquée sur la base de l'article 173 du traité.

43. Par conséquent, la requérante n'a pas d'intérêt à poursuivre l'annulation de l'article 4 de la décision attaquée en ce qu'il indique l'adresse de la requérante comme adresse de notification de Techint Group et de Siderca.

44. Dès lors, les conclusions visant à l'annulation de l'article 4 de la décision attaquée, pour autant que l'adresse de notification y indiquée pour Techint Group et pour Siderca est celle de la requérante, sont manifestement irrecevables.

45. Il résulte de tout ce qui précède que le recours dans son entièreté doit être rejeté comme manifestement irrecevable, conformément à l'article 111 du règlement de procédure.

Sur les dépens

46. Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé en ses conclusions et la Commission ayant conclu à sa condamnation, il y a lieu de condamner la requérante aux dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

ordonne:

1) Le recours est rejeté comme manifestement irrecevable.

2) La requérante est condamnée aux dépens.