CA Rennes, 3e ch., 25 mai 2000, n° 99-00820
RENNES
Arrêt
Confirmation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Gayet
Conseillers :
Mmes Turbe-Bion, Jeannesson
Avocat :
Me Weil-Chalbos.
Rappel de la procédure:
Le jugement:
Le tribunal correctionnel par jugement contradictoire en date du 16 mars 1999, pour
Publicité mensongère ou de nature à induire en erreur demande ou obtention de paiement ou d'accord avant la fin du délai de reflexion - démarchage
a relaxé M. X du chef de démarchage à domicile et le déclare coupable des faits de publicité mensongère et l'a condamné à 40 000 F d'amende.
Les appels:
Appel a été interjeté par:
M. X le 23 mars 1999,
M. le Procureur de la République, le 23 mars 1999.
LA PREVENTION:
Considérant qu'il est fait grief au prévenu:
- d'avoir à Brest, entre février et mars 1998, effectué une publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur sur "la portée des engagements de l'annonceur... laissant penser que les adhérentes féminines bénéficient d'un choix d'adhérents masculins exerçant une profession attractive" d'un bien ou d'un service;
Faits prévus et réprimés par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6 al. 1, L. 121-6, L. 121-4, L. 213-1 du Code de la consommation;
- d'avoir à Brest, de février à juin 1998, après avoir démarché M. Lancien Michel à domicile, sa résidence ou son lieu de travail exigé ou obtenu de lui, directement ou indirectement, une contrepartie ou un engagement, en l'espèce 7 chèques d'une valeur totale de 5 900 F;
Faits prévus et réprimés par les articles L. 121-28, L. 121-26, L. 121-28 du Code de la consommation;
En la forme:
Considérant que les appels sont réguliers et recevables en la forme;
Au fond:
Les faits sont les suivants:
Le 17 mars 1998, les contrôleurs de la Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes, (DGCCRF) se présentaient à l'institut de rencontres à l'enseigne "X" situé à Brest afin de vérifier le bien fondé des publicités passées dans les hebdomadaires gratuits de la région brestoise ainsi que le respect des dispositions de l'article 6 de la loi du 23 juin 1989 concernant les offres de rencontre.
La publicité adressée aux femmes indiquait qu'elles rencontreraient des hommes exerçant les professions de Président Directeur Général, artistes, fonctionnaires, médecins, sportifs, hommes d'affaires, etc.
Il s'avérait cependant, à l'examen des contrats passés à l'agence de Brest, que parmi les professions communiquées par 34 des adhérents masculins, seules quatre pouvaient correspondre à celles annoncées (fonctionnaire, cadre, ingénieur en informatique, responsable commercial).
De plus, les contrats signés par les femmes faisaient apparaître qu'elles avaient souscrit une formule "T.2" limitant la sélection dans l'Institut X où elles étaient inscrites, c'est-à-dire l'agence de Brest, ne leur donnant pas accès aux agences situées en dehors de la Bretagne.
Par ailleurs, les agents de la DGCCRF constataient que quatorze contrats souscrits pendant la première quinzaine du mois de mars 1998, avaient entraîné le paiement simultané par le client de son adhésion, sans que soit respecté le délai de sept jours pendant lequel celui-ci bénéficie d'une faculté de rétractation en application de l'article 6 de la loi n° 89-421 du 23 juin 1989.
Entendu par les services de police de la Seyne sur Mer le 8 septembre 1998, M. X ne reconnaissait pas les faits, indiquant d'une part, que le fichier national, auxquels les femmes pouvaient avoir accès par un choix spécifique parmi les prestations proposées, contenait bien les différentes professions annoncées et que l'institut qui était un simple lieu de rencontres et de loisirs n'était pas concerné par la loi du 23 juin 1989 visant les agences de courtage matrimonial.
Devant les premiers juges, il maintenait ses déclarations.
Le tribunal l'a déclaré coupable des faits de publicité mensongère mais l'a relaxé du chef du non-respect de la loi sur le démarchage à domicile au préjudice de M. Lancien visé par la citation.
Devant la cour,
Le conseil de M. X conclut à la réformation du jugement et à la relaxe de son client faisant valoir que les candidates Brestoises avaient la possibilité d'opter pour des rencontres dans la France entière où toutes les catégories socio-professionnelles visées sont représentées au travers des fichiers des 17 agences de l'Institut X.
M. l'Avocat général observe que le Ministère public n'est pas appelant de la relaxe prononcée par le tribunal, qu'en revanche, l'infraction de publicité mensongère ou de nature à induire en erreur est établie. Il requiert la confirmation du jugement;
Sur ce
Considérant que l'article L. 121-1 du Code de la consommation vise toute publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur le consommateur; qu'en faisant paraître une annonce dans la presse brestoise s'adressant à des jeunes femmes et leur faisant miroiter des rencontres avec des hommes dont les professions paraissent attractives alors qu'aucun des adhérents masculins à l'agence de Brest n'exerçait les professions annoncées, M. X a délibérément induit en erreur les adhérents; que même s'il rapporte la preuve que 26 adhérents dans l'ensemble de ses agences correspondent selon leurs déclarations à ces professions (sauf le seul et unique pilote qui n'est pas un professionnel mais un amateur) force est de constater que 10 d'entre eux sont domiciliés dans le midi de la France, ce qui ne facilitent pas les rencontres, que les 16 autres adhérents des agences de Bordeaux, Saint-Etienne, Lyon, Rouen, le Havre, s'ils sont plus accessibles, restent fort peu nombreux si l'on veut bien admettre que chaque agence a un nombre d'adhérents masculins voisin de celle de Brest soit une quarantaine; que de surcroît, le surcoût d'accès à l'ensemble des fichiers pour les femmes qui veulent élargir leur recherche est de 4 000 F annuel, ce qui est évidemment dissuasif; que dans ces conditions, il convient de confirmer le jugement et de déclarer M. X coupable de publicité de nature à induire en erreur le consommateur.
Considérant qu'eu égard à la gravité des faits mais à l'absence de mention sur le casier judiciaire du prévenu, il convient de réformer la peine et de condamner M. X au paiement d'une amende de 20 000 F.
Par ces motifs, LA COUR, Après en avoir délibéré conformément à la loi, Statuant publiquement, par arrêt contradictoire à l'égard de, En la forme, Reçoit les appels, Au fond, Confirme le jugement en ce qu'il a déclaré M. X coupable des faits de publicité mensongère; Réformant sur la peine, Condamne M. X à la peine d'amende de vingt mille francs (20 000 F), Prononce la contrainte par corps.