CA Aix-en-Provence, 1re ch. A, 8 mars 1990, n° 86-12762
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Paloméras
Défendeur :
Centre Franco Allemand (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Hugues
Conseillers :
MM. Roudil, Roman
Avoués :
SCP Martelly, SCP Tollinchi
Avocats :
Mes Lounis, Troegeler.
Faits, procédure, moyen des parties
Par acte du 8 octobre 1986, Luc Paloméras a interjeté appel du jugement rendu le 17 septembre 1986 par le Tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence dans une instance l'opposant à la société " Centre Franco Allemand " dans les circonstances suivantes :
Ayant participé à un " Jeu Concours " organisé par la société " Centre Franco Allemand ", société Commerciale de vente par correspondance, Luc Paloméras a été avisé que son nom avait été tiré au sort et qu'il devait bénéficier de l'un des " 4 prix super " faisant l'objet de ce jeu, à savoir : 100 000 F en espèces, un voyage de 15 jours pour 2 personnes aux Antilles, une voiture Peugeot 205 GL, une bague avec diamant brut de 1/100e de carat " environ ".
Ayant reçu une bague dépourvue de valeur, il a considéré que le tirage n'a pas été régulier et a saisi le tribunal de grande instance pour demander l'instauration d'un nouveau tirage au sort ou, subsidiairement, obtenir la condamnation de la société franco-allemande au paiement de la somme de 80 000 F à titre de dommages-intérêts.
Par le jugement déféré à la cour, le tribunal de grande instance l'a débouté de ses demandes.
A l'appui de son appel, il fait valoir à titre principal que le tirage n'a pas été régulier puisque après avoir retourné l'enveloppe réponse lui annonçant qu'il était bénéficiaire de l'un des 4 lots énumérés ci-dessus dans le délai dont le terme expirait le 10 juillet 1985 et après avoir sollicité le 23 juillet 1985 des renseignements, la société Le Centre Franco Allemand, par courrier du 26 juillet lui précisait que le tirage interviendrait le 10 août 1985 mais que néanmoins par envoi posté le 20 juillet 1985, le " Comité de remise des prix " lui adressait " une bague ornée d'un véritable diamant " ; ensuite la société Centre Franco Allemand ne répondait pas au courrier qui lui était adressé le 8 août 1985 par lequel il lui était demandé de préciser les conditions exactes du tirage des lots et l'identité et l'adresse des 3 gagnants des 3 autres lots.
Subsidiairement, il soutient que la société le Centre Franco Allemand était liée par son offre qu'il avait acceptée et que son consentement a été vicié.
Il réclame le paiement de la somme de 80 000 F à titre de dommages-intérêts de substitution et 6 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Par conclusions en réponse, la société " Centre Franco Allemand " demande de confirmer le jugement entrepris et de débouter Monsieur Paloméras de ses prétentions.
Elle soutient que la régularité des opérations du tirage au sort résulte des procès-verbaux établis par huissier desquels il résulte que la société intimé a été contrainte de procéder à plusieurs tirages en raison de l'absence de réception des autres bulletins de participations mais que le dernier intervenu le 19 août 1983 ne fait état d'aucune exclusion. Elle fait valoir en outre que le concours ne comprenait que 3 prix et que tous les participants recevaient une bague.
Elle soutient enfin que s'agissant d'un contrat à titre gratuit, Paloméras ne peut lui reprocher de ne pas lui avoir remis un prix de valeur.
La procédure a été clôturée en cet état des prétentions des parties.
Motifs et décision de la cour
Attendu que l'appel est régulier en la forme et qu'il y a lieu de le recevoir ;
Attendu en droit que celui qui offre de remettre un objet à une autre personne qui l'accepte dans le cadre d'un contrat où celle-ci a rempli les obligations qui lui étaient proposées doit exécuter son engagement à moins qu'il ne démontre que l'exécution de celui-ci a été rendu impossible par une cause qui lui est étrangère;
Attendu en l'espèce qu'il résulte des documents produits que la société Centre Franco Allemand s'est engagée à faire bénéficier Luc Paloméras de l'" un des 4 Prix Super " à savoir un chèque de 100 000 F, une bague avec un vrai diamant, un voyage aux Antilles pour deux personnes ou une Peugeot 205 GL sous réserve de la participation du bénéficiaire à un tirage au sort de caractère publicitaire avec offres commerciales, acceptation qu'il a donnée et adressée par courrier par envoi recommandée le 30 mai 1985 ;
Que le document par lequel la société Centre Franco Allemand manifestait son offre, précisait " Monsieur Paloméras, grâce à votre numéro gagnant vous avez la certitude d'obtenir l'un des 4 grands Prix Super, c'est absolument garanti " ;
Attendu que les procès-verbaux de tirage au sort rédigés par huissier ne permettent pas d'établir que les divers tirages effectués comportent des irrégularités mais qu'en revanche, ils révèlent que les tirages au sort n'ont porté que sur 3 ou 4 lots offerts, la bague avec diamant n'en faisant pas partie ;
Qu'ainsi, la société Centre Franco Allemand n'a pas exécuté son engagement;
Que n'ayant pas gagné l'un des 3 autres lots offerts, Paloméras a nécessairement gagné la bague dite " bague avec diamant véritable " compte tenu de la " garantie " qui lui avait été donnée ;
Qu'il n'est pas contesté que la bague adressé à Paloméras ne comporte pas de diamant et n'a pas de valeur ;
Que pour inexécution de son obligation, la société Centre Franco Allemand devra verser à Paloméras la somme de 50 000 F, montant auquel la cour fixe le préjudice qui découle pour lui de cette faute adverse ;
Attendu qu'il apparaît inéquitable de laisser à la charge de Luc Paloméras des frais engagés pour assurer la défense de ses droits non inclus dans les dépens, qui doivent être fixés à la somme de 6 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Vu l'article 696 du nouveau Code de procédure civile.
Par ces motifs : LA COUR, Statuant publiquement, contradictoirement et en matière civile, Infirme le jugement entrepris. Condamne la société Centre Franco Allemand à payer à Luc Paloméras les sommes de 50 000 F (cinquante mille francs) de dommages-intérêts et de 6 000 F (six mille francs) en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. La condamne aux dépens et dit que la SCP d'avoués Martelly pourra recouvrer directement contre elle les dépens dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision.