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Décisions

CA Orléans, ch. corr., 3 septembre 1996, n° 648-96

ORLÉANS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Union Fédérale des Consommateurs d'Indre et Loire

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Vallée

Conseillers :

M. Turquey, Mme Lacabarats

Avocats :

Mes Doussot, Joureau

T. corr. Tours, du 6 mars 1995

6 mars 1995

LA COUR,

Par jugement du 6 mars 1995 dont le prévenu, le civilement responsable et le Ministère public ont régulièrement interjeté appel, le Tribunal correctionnel de Tours a, sur l'action publique, rejeté l'exception tirée de l'autorité de la chose jugée et condamné Philippe L à 50 000 F d'amende, la publication de la décision par extraits dans la Nouvelle République du Centre Ouest et Télé Z, du chef d'infraction à l'article 5 de la loi du 23 juin 1989 devenu l'article L. 121-36 du Code de la consommation et, sur l'action civile, a alloué à l'Union Fédérale des Consommateurs (UFC), 3 000 F à titre de dommages-intérêts et 1 800 F sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.

Philippe L et la Sté DS maintiennent que le premier nommé a déjà été condamné du même chef par arrêt de la Cour d'appel de Paris du 12 septembre 1994 devenu définitif et que la présente poursuite se heurte donc à l'autorité de la chose jugée. Ils considèrent par ailleurs que l'article 5 de la loi du 23 juin 1989 ne leur est pas applicable car elle vise les opérations où tout le monde gagne un lot ce qui n'était pas le cas en l'espèce. Ils demandent encore à voir constater l'amnistie. Subsidiairement, ils précisent que le texte, s'agissant du bon de participation et du bon de commande, a employé le terme de " distinct " et non pas " séparé " ; qu'en l'espèce ces bons ne figurent pas dans le même encadrement et que dès lors, la loi est respectée. Ils concluent à l'irrecevabilité de la constitution de partie civile de l'UFC qui ne justifie pas de son préjudice.

Philippe L sollicite très subsidiairement par la voix de son conseil, la confusion de la peine à venir avec celle prononcée le 12 septembre 1994 par la Cour d'appel de Paris.

M. l'Avocat général considère que même si le jeu en cause était le même dans le cas tranché par la Cour d'appel de Paris, il n'y a pas autorité de la chose jugée. Il s'appuie sur cette espèce pour affirmer que la loi du 23 juin 1989 est applicable puisque la décision fondée sur ce texte n'a pas été censurée par la Cour de cassation. Estimant l'infraction caractérisée, il requiert la confirmation du jugement relevant que la confusion avec la peine prononcée par la Cour d'appel de Paris est recevable.

L'UFC estimant que les dispositions légales n'ont pas été respectées, que la confiance des consommateurs a été ainsi trompée, demande 5 000 F à titre de dommages-intérêts, 5 000 F sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.

Sur ce

Attendu que les faits de la cause sont très exactement rapportés dans le jugement auquel la cour se réfère expressément ;

1. Sur l'action publique

Sur l'exception soulevée :

Attendu que l'exception d'autorité, de la chose jugée ne peut être valablement invoquée qu'au cas d'identité de cause, d'objet et de parties dans deux poursuites distinctes ;

Attendu en l'espèce que si les faits déférés à la cour et aux juges par la Cour d'appel de Paris présentent un lien de connexité s'agissant d'une campagne publicitaire unique, il n'en demeure pas moins qu'ils sont distincts dans la mesure où la publicité en cause se présente de manière individualisée présentant ici notamment les mentions " Félicitations Mme Meunier " ou encore " quelle voiture verra-t-on peut être bientôt au 16 allée des Sapines à Troyes " ;

Qu'il existe autant d'infractions que de personnes visées ;

Qu'en conséquence, l'exception soulevée doit être rejetée ;

Sur l'application de l'article 5 de la loi du 23 juin 1989 :

Attendu qu'au terme d'une motivation particulièrement pertinente et convaincante que la cour adopte, les premiers juges ont déterminé que ce texte avait vocation à s'appliquer :

Sur l'amnistie :

Attendu qu'il résulte de l'article 7 de la loi du 3 août 1995 portant amnistie que sont amnistiées les infractions commises avant le 18 mai 1995 punies d'une peine d'amende ;

Mais attendu que l'article 5 paragraphe 8 de la loi du 23 juin 1989 devenu, et dans la même rédaction, l'article L. 221-41 du Code de la consommation, prévoit en outre que le tribunal peut ordonner la publication et l'affichage de sa décision ;

Qu'en conséquence, l'amnistie en raison du quantum de la peine encourue n'est pas acquise ;

Sur le fond :

Attendu que l'analyse des faits par les premiers juges doit être retenue ;

Qu'en effet, le bon de participation, dont la mention figure dans la même typographie dans une phrase complète et non en titre, ne se distingue pas du bon de commande dont l'énoncé est particulièrement visible ;que malgré le cadre rose du bon de participation, le lecteur peut ainsi croire qu'il s'agit d'un document unique ;que cette impression se trouve confortée par la mention du " Bon de participation - Bon de commande " figurant à la page suivante ;

Attendu que le tribunal a prononcé une sanction proportionnée à la gravité de l'infraction tant en ce qui concerne l'amende que la publication de la décision ;

Attendu que la connexité sur évoquée autoriserait que la peine d'amende ainsi confirmée soit confondue avec celle prononcée le 12 septembre 1994 par la Cour d'appel de Paris mais que cette dernière ne figure pas au casier judiciaire de l'intéressé ; qu'il y a lieu de craindre qu'elle ne soit pas définitive ou encore ne puisse être rappelée à la suite de l'amnistie ; qu'en l'état, il ne sera donc pas fait droit à la demande de confusion de peine présentée à la barre ;

2. Sur l'action civile

Attendu que l'UFC a vocation à se constituer partie civile pour la défense des consommateurs dont l'intérêt collectif a subi un préjudice du fait de la publicité poursuivie ;

Que ce dernier a été justement évalué par le tribunal ;

Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de la partie civile les frais visés à l'article 475-1 du Code de procédure pénale fixés à 1 800 F en cause d'appel ;

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement, Déclare les appels recevables, Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris, Rejette en l'état la demande de confusion entre la peine d'amende prononcée ce jour et celle prononcée par la Cour d'appel de Paris le 12 septembre 1994, Condamne Philippe L à verser à l'Union Fédérale des Consommateurs d'Indre et Loir, la somme de mille huit cents francs (1 800 F) sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale en cause d'appel, La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de 800 F dont est redevable chaque condamné.