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Décisions

CA Orléans, ch. com., économique et financière, 4 mai 2000, n° 99-01342

ORLÉANS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Sully Solo (SARL)

Défendeur :

Prefi (SA), Sécu Monétique Centre (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Remery

Conseillers :

Mme Boury, M. Puechmaille

Avoués :

SCP Laval-Lueger, SCP Duthoit-Desplanques, Me Bordier

Avocats :

Mes Rouquette, Nizou-Lesaffre, Dolmazon.

CA Orléans n° 99-01342

4 mai 2000

Statuant sur l'appel interjeté par la SARL Sully Solo à l'encontre d'un jugement rendu par le Tribunal de commerce de Montargis en date du 15 janvier 1999 qui a :

- déclaré recevable la SARL Solo mais mal fondée en son opposition à injonction de payer et l'en a déboutée,

- confirmé en toutes ses dispositions l'ordonnance d'injonction de payer entreprise,

- condamné la SARL Sully Solo à payer à la SA Prefi la somme de 29 093,28 F assortie des intérêts au taux légal à compter du 18 novembre 1996, outre 3 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire,

- dit la SARL Sully Solo mal fondée en son appel à garantie formé contre la SARL Secu Monétique Centre, ci-après dénommée société SMC et l'en a déboutée,

- condamné la SARL Sully Solo à payer la société SMC la somme de 3 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

La cour ainsi saisie renvoie pour l'exposé des faits à la relation exacte qu'en a donnée le premier juge et se réfère expressément aux écritures prises devant elle en ce qui concerne les demandes des parties et leurs moyens.

Il suffira de rappeler que la société Sully Solo poursuit l'infirmation du jugement entrepris en demandant à la cour de :

- déclarer abusives et non écrites les clauses exonératoires de responsabilité contenues le contrat de location liant la société Sully Solo à la société Prefi et stipulées au profit de cette dernière,

- débouter en conséquence la société Prefi de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions contre la société Sully Solo au titre dudit contrat,

- constater que la société SMC a manqué à ses obligations contractuelles de délivrance, de garantie, et de maintenance,

- condamner la société SMC à payer à la société Sully Solo la somme de 20 000 F à titre de dommages-intérêts, et à relever et garantir la société Sully Solo des éventuelles condamnations prononcées contre elle au profit de la société Prefi,

- condamner solidairement les sociétés Prefi et SMC à payer à la société Sully Solo la somme de 15 000 F au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction, pour ces derniers, au profit de la SCP Laval-Lueger, avoués associés.

L'appelante fait essentiellement valoir qu'elle n'a jamais eu conscience de contracter avec la société Prefi, le contrat régularisé à son insu avec cette dernière faisant selon elle double emploi avec le contrat de maintenance signé avec SMC; qu'en tout état de cause, le bailleur est tenu d'une obligation de délivrance et de garantie concernant la chose louée ; que les clauses du contrat de location exonérant le bailleur de ses obligations sont abusives comme conférant un avantage excessif au professionnel au détriment du consommateur.

Elle prétend s'agissant de la société SMC, que celle-ci a manqué à ses obligations, tant en ne délivrant pas un matériel exempt de vices ou de défauts, qu'en s'abstenant d'assurer la maintenance dudit matériel. Elle soutient que son préjudice résulte du fait qu'elle n'a pu bénéficier des fonctions de l'appareil (lecteur de chèques) et qu'elle a payé des loyers en pure perte.

La société Prefi conclut à la confirmation du jugement, y ajoutant une demande de capitalisation des intérêts par application de l'article 1154 du Code civil et de condamnation de la société Sully Solo à lui payer la somme de 8 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Elle fait valoir que l'inexécution de ses obligations par la société assurant la maintenance du matériel loué, à la supposer établie, ne pouvait justifier la suspension du paiement des loyers par le locataire ; que la possibilité d'une mise en cause de la société SMC lui est à présent fermée dès lors qu'en ne payant pas les loyers, elle a laissé se résilier à tort le contrat de location et perdu le bénéfice de la clause de subrogation prévue à celui-ci ; que les clauses abusives que tente d'invoquer à son profit la société Sully Solo sont inapplicables à une société exerçant une activité commerciale.

La société SMC demande quant à elle à la cour de :

- constater que la société Sully Solo a unilatéralement cessé le paiement des mensualités dont elle était redevable causant la résiliation du contrat conclu entre elle-même et la société Prefi,

- constater que la société Sully Solo demande à être relevée et garantie par la société SMC afin d'obtenir que ce soit la société SMC qui assume le paiement des sommes dont la société Sully Solo est redevable à la société Prefi en raison de la rupture unilatérale anticipée du contrat de location de matériel de monétique auprès de la société Prefi,

- dire et juger irrecevable la société Sully Solo en son appel en cause de la société SMC, la cessation de paiement ayant entraîné la résolution du contrat de location et par voie de conséquence déchu la société Sully Solo de la subrogation dans les droits du bailleur contre le fournisseur,

- dire et juger que la société Sully Solo n'établit aucune anomalie de nature à justifier l'inexécution de ses obligations contractuelles,

- dire et juger que le contrat rompu unilatéralement et de façon fautive par la société Sully Solo ayant été conclu entre des sociétés commerciales agissant dans le cadre de leur activité, les dispositions du Code de la consommation sur les clauses abusives ne trouvent pas matière à s'appliquer, le principe étant celui de la libre volonté des parties, le contrat ayant d'ailleurs été négocié comme en atteste la dispense de frais obtenue par la société Sully Solo,

- en conséquence, rejeter les demandes de la société Sully Solo, la déclarer mal fondée en son appel et confirmer le jugement entrepris,

- condamner la société Sully Solo à payer à la société SMC en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile la somme de 10 000 F,

- condamner la société Sully Solo en tous les dépens, avec distraction des dépens d'appel en faveur de Maître Bordier, avoué, par application de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.

Sur ce :

Sur les prétentions de la société Sully Solo à l'égard de la société Prefi :

Attendu qu'à supposer justifiée l'inexécution des obligations incombant à SMC, il appartenait malgré tout à Sully Solo de poursuivre ses paiements auprès de Prefi.

Que seule la résiliation du contrat de vente prononcée à l'initiative du locataire, qui a reçu mandat du propriétaire du matériel pour exercer toute action contre le vendeur (article 3 bis du contrat de location), peut entraîner la résiliation du contrat de location.

Qu'en présence d'un problème technique, Sully Solo ne pouvait donc pas suspendre le paiement des loyers, ainsi que déjà rappelé, et encore moins résilier le contrat de location, mais devait, conformément aux règles applicables en la matière et aux clauses du contrat de location, agir contre SMC.

Que l'appelante soutient à tort, qu'elle n'aurait jamais eu conscience de contracter avec Prefi.

Qu'en effet, aux termes du contrat de location conclu le 18 janvier 1996, Sully Solo a bien reçu mandat par Prefi pour désigner le type et la marque du matériel répondant à ses besoins ainsi que le fournisseur de son choix.

Qu'elle n'est pas fondée d'autre part à exciper de relations contractuelles uniquement avec SMC, alors que Prefi opérait des prélèvements mensuels, ce qu'elle ne pouvait ignorer de par le contrat de location signé par elle.

Qu'enfin, c'est également à tort qu'elle invoque à l'encontre de Prefi l'abus de puissance économique sur le fondement de l'article L. 132-1 du Code de la consommation.

Qu'il est en effet de jurisprudence constante que le bénéfice de la protection en matière de clause abusive a été mis en place au seul profit des consommateurs ou des non professionnels; qu'en l'espèce, Sully Solo ne peut être considérée comme un simple consommateur dès lors que l'objet du contrat (mise à disposition d'un appareil lecteur de chèques) avait un rapport direct avec son activité professionnelle.

Qu'elle a d'autre part expressément approuvé lors de la signature du contrat de location le 18 janvier 1996, les clauses dont elle invoque aujourd'hui le caractère abusif.

Qu'il s'ensuit que c'est à bon droit qu'elle a été déclarée mal fondée en son opposition à injonction de payer et condamnée en conséquence à payer à Prefi la somme de 29 093,28 F en principal outre intérêts au taux légal à compter du 18 novembre 1996, date de réception de la mise en demeure ; que le jugement entrepris de ce chef doit être confirmé.

Que les conditions édictées par l'article 1154 du Code civil se trouvant remplies, il doit être fait droit aux conclusions de Prefi demandant la capitalisation des intérêts au taux légal, laquelle aura lieu à compter de la date des dites conclusions valant demande à cette fin, soit le 26 avril 1999.

Qu'il serait inéquitable de laisser Prefi supporter la charge de ses frais irrépétibles en cause d'appel, qui seront fixés à 5 000 F.

Que Sully Solo qui succombe en ses prétentions à l'égard de cette dernière, aura la charge des dépens de l'instance.

Sur les prétentions de la société Sully Solo à l'égard de la société SMC

Attendu que les allégations de l'appelante relatives à l'état défectueux de l'appareil livré sont démenties par le fait qu'elle a signé sans aucune réserve le 24 janvier 1996 le procès-verbal de livraison de ce matériel.

Qu'outre le fait d'exonérer le bailleur Prefi de toute responsabilité en cas de fonctionnement défectueux, cela implique nécessairement que le matériel en cause était conforme à sa destination et à l'attente de Sully Solo;

Que l'attestation de Monsieur Fouquereau invoquée par l'appelante est inopérante dans la mesure où aucune précision n'est fournie quant à la panne qu'aurait connue l'appareil.

Que Sully Solo n'a d'ailleurs jamais soulevé la moindre critique auprès de SMC, ce qu'elle n'aurait pas manqué de faire s'il y avait eu réellement anomalie de fonctionnement.

Qu'ayant cessé de payer les mensualités au bailleur Prefi, le contrat de location s'est trouvé de plein droit résilié et faute par elle d'avoir exercé un recours contre SMC, la résiliation du contrat de location a mis fin au mandat qu'elle détenait du bailleur pour agir contre ladite société ; qu'ayant ainsi perdu le bénéfice de la clause de subrogation prévue au contrat, Sully Solo est dès lors mal fondée à solliciter la garantie de SMC.

Que le jugement entrepris l'ayant déboutée de ce chef, doit être confirmé.

Qu'il serait inéquitable de laisser SMC supporter la charge de ses frais irrépétibles en cause d'appel, qui seront fixés à 5 000 F.

Que Sully Solo qui succombe en ses prétentions à l'égard de cette dernière aura la charge des dépens de l'instance.

Par ces motifs, LA COUR, Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris, Y ajoutant, Dit que les intérêts échus au profit de la société Prefi à la date du 26 avril 1999, seront eux-mêmes productifs d'intérêts au taux légal à compter de cette date, Déboute les parties du surplus de leurs prétentions, Condamne la société Sully Solo à payer à chacune de la société Prefi et de la société Sécu Monétique Centre dite SMC, la somme de 5 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, Condamne la même aux dépens d'appel, Accorde à la SCP Duthoit-Desplanques, avoués associés, et à Maître Bordier, avoué, le droit prévu à l'article 699 du nouveau Code de procédure civile, Et le présent arrêt a été signé par le Président et le Greffier.