CA Paris, 13e ch. A, 31 janvier 2000, n° 99-03640
PARIS
Arrêt
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Guilbaud
Conseillers :
Mme Ajjan, M. Ancel
Avocat :
Me Briolin.
RAPPEL DE LA PROCÉDURE:
LA PREVENTION:
S Jérôme est poursuivi pour avoir :
- à Cachan, le 12 juillet 1996, trompé le contractant sur l'aptitude à l'emploi et les qualités substantielles d'une marchandise vendue ou offerte à la vente, en l'espèce en fournissant, en tant que professionnel de l'automobile, un véhicule d'occasion sans préciser qu'il n'avait pas été réceptionné par le service des mines et ne pouvait en conséquence, être immatriculé et maintenu en circulation.
- à Cachan, du 1er avril 1996 au 18 mars 1997, effectué une publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur sur l'identité et les qualités du vendeur et du prestataire, en l'espèce en utilisant l'enseigne et l'ensemble des signes distinctifs de la marque Citroën, alors qu'il n'appartenait plus à son réseau.
LE JUGEMENT:
Le tribunal, par jugement contradictoire, a :
déclaré S Jérôme :
- coupable de tromperie sur la nature, la qualité, l'origine ou la quantité d'une marchandise,
faits commis le 12 juillet 1996, à Cachan,
infraction prévue par l'article L. 213-1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 213-1, L. 216-2, L. 216-3 du Code de la consommation
- coupable de publicité mensongère ou de nature à induire en erreur,
faits commis du 1er avril 1996 au 18 mars 1997, à Cachan,
infraction prévue par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6 al. 1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 121-6, L. 121-4, L. 213-1 du Code de la consommation
et, en application de ces articles, vu les articles 132-29 à 132-34 du Code pénal, l'a condamné à 2 mois d'emprisonnement avec sursis et 10 000 F d'amende,
Aussitôt le Président lui a donné l'avertissement prévu par l'article 132-29 du Code pénal,
prononcé à titre de peine complémentaire la publication du jugement aux frais du condamné en fixant à la somme de 10 000 F le coût maximum de cette publication,
a dit que cette décision était assujettie au droit fixe de procédure de 600 F dont est redevable le condamné,
vu l'article 473 du Code de procédure pénale,
dit que la contrainte par corps s'exercerait, en cas de besoin, conformément aux articles 749 et suivants du Code de procédure pénale.
statuant sur l'action civile,
déclaré irrecevable la constitution de partie civile de Gaulard Thierry et laissé les dépens à sa charge.
LES APPELS:
Appel a été interjeté par :
M. le Procureur de la République, le 16 décembre 1998, contre Monsieur S Jérôme;
Monsieur S Jérôme, le 16 décembre 1998, sur les dispositions pénales et civiles contre Monsieur Gaulard Thierry ;
DÉCISION:
Rendue après en avoir délibéré conformément à la loi,
Statuant sur les appels relevés par le prévenu et le Ministère public à l'encontre du jugement précité auquel il est fait référence pour l'exposé des faits et de la prévention ;
Jérôme S, assisté de son conseil, sollicite de la cour, par infirmation, l'indulgence ainsi que l'exclusion de la mention de la condamnation à intervenir au Bulletin n° 2 de son casier judiciaire ;
Il ne conteste pas la matérialité des faits poursuivis mais fait valoir qu'il a accepté la gérance de la SARL X pour rendre service à son père Nicolas qui en était le véritable animateur;
Monsieur l'Avocat général requiert la cour de confirmer le jugement déféré sur la déclaration de culpabilité tout en ne s'opposant pas à une application modérée de la loi pénale pour tenir compte des circonstances particulières de l'espèce;
Bien que régulièrement cité, Thierry Gaulard ne comparaît pas. Il sera statué par défaut à son égard :
Rappel des faits :
Le tribunal a exactement et complètement rapporté les faits de la cause dans un exposé auquel la cour se réfère expressément ;
Il suffit de rappeler que le 12 juillet 1996 M. Thierry Gaulard faisait l'acquisition d'un véhicule d'occasion Peugeot 309 GLO, au prix de 26 000 F, auprès du garage SARL X dont le prévenu est le gérant ;
Il prenait ce véhicule en immatriculation provisoire avec, pour tout document, un reçu d'achat ;
Il s'avérait en réalité que l'immatriculation définitive nécessitait un passage du véhicule aux mines (DRIRE) ;
Six mois après la vente, l'automobile n'était toujours pas immatriculable ;
Le 9 janvier 1997 l'engin était présenté au centre de contrôle technique de la DRIRE (mines) à Villabé ;
Le procès-verbal de réception était refusé pour défauts relatifs à la direction et au freinage ;
Le 20 février 1997, la Peugeot 309 était à nouveau présentée au contrôle de la DRIRE et pouvait enfin faire l'objet d'un procès-verbal de "réception à titre isolé" de véhicule reconstruit ;
Par ailleurs, le 18 mars 1997 les agents de la Direction de la Concurrence de la Consommation et de la Répression des Fraudes du Val de Marne constataient, à l'extérieur du garage X, l'enseigne Citroën accompagnée du "logo" propre à cette marque, à savoir les deux chevrons rouges sur fond blanc ;
Ils relevaient également que les documents commerciaux, factures, tampons utilisés étaient à en-tête Citroën ;
Il s'avérait toutefois des déclarations de Nicolas S, ancien gérant, que le garage n'appartenait plus au réseau Citroën depuis mars 1996 ;
Cette situation était confirmée par la direction commerciale France Citroën ;
Sur l'action publique :
Considérant que la matérialité des faits n'est pas contestée par le prévenu qui se borne à solliciter une application bienveillante de la loi pénale ;
Considérant que le véhicule vendu à Thierry Gaulard par le garage X n'était pas conforme aux prescriptions réglementaires de sécurité et de conformité en vigueur, puisque le 12 juillet 1996, jour de la vente, le procès-verbal de "réception à titre isolé" par le service de la DRIRE d'un véhicule reconstruit n'était pas délivré ;
Considérant que les démarches nécessaires à l'obtention de ce certificat n'étaient pas commencées le jour de la vente ;
Considérant que la remise en conformité par un concessionnaire de la marque n'a été faite que le 1er octobre 1996 ;
Que le dossier de demande de "réception à titre isolé" d'un véhicule reconstruit n'a été déposé auprès de la DRIRE que le 9 décembre 1996 ;
Considérant que c'est donc un véhicule non conforme accompagné de documents non conformes que le garage X a remis à M. Gaulard le 12 juillet 1996 ;
Que le refus de délivrance du procès-verbal "RTI" par la DRIRE lors de la présentation du 9 janvier 1996 pour défauts relatifs à la direction et au freinage confirme l'inaptitude du véhicule à la circulation ;
Considérant que le plaignant a été également abusé par l'enseigne et le logo Citroën apposés sur la devanture du garage et la raison sociale X figurant sur les documents commerciaux alors que ce garage ne faisait plus partie du réseau de la marque ;
Considérant que Jérôme S, gérant de la SARL X, se devait de veiller personnellement à la conformité des véhicules d'occasion vendus par l'établissement dont il avait accepté d'assurer la direction, ainsi qu'à l'exactitude des informations à caractère publicitaire, diffusés par sa société ;
Considérant que les faits visés à la prévention sont établis à l'encontre du prévenu ;
Considérant que la cour confirmera le jugement attaqué sur la déclaration de culpabilité mais le modifiera en répression, ainsi que précisé au dispositif, pour mieux tenir compte des divers aspects de cette affaire ;
Que la cour, par ailleurs, au vu des éléments soumis à son appréciation, dispensera le prévenu de la publication de la décision et ordonnera l'exclusion de la mention de la condamnation à intervenir au Bulletin n° 2 du casier judiciaire de Jérôme S ;
Sur l'action civile :
Considérant que le jugement entrepris a déclaré irrecevable la constitution de partie civile de M. Thierry Gaulard par application des dispositions de l'article 5 du Code de procédure pénale ;
Que Thierry Gaulard n'a pas relevé appel de cette décision ;
Que l'appel relevé par Jérôme S, sur les dispositions civiles du jugement critiqué, sera déclaré sans objet ;
Que par suite la cour constatera que les dispositions civiles du jugement entrepris sont devenues définitives :
Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement, contradictoirement à l'encontre de Jérôme S et de la société X, par défaut à l'égard de Thierry Gaulard, Sur l'action publique, Confirme le jugement dont appel sur la déclaration de culpabilité, Le modifie en répression, Condamne Jérôme S à 10 000 F d'amende, Vu les articles L. 124-4 du Code de la consommation et 775-1 du Code de procédure pénale, Dispense le condamné de la publication de la décision, Ordonne l'exclusion de la mention de la présente condamnation au Bulletin n° 2 du casier judiciaire de Jérôme S, Sur l'action civile, Déclare sans objet l'appel du prévenu sur les dispositions civiles, Constate que les dispositions civiles du jugement entrepris sont devenues définitives.