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Décisions

CA Paris, 13e ch. A, 20 février 1995, n° 6130-94

PARIS

Arrêt

Confirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Petit

Avocat général :

M. Blanc

Conseillers :

M. Guilbaud, Mme Penichon

Avocat :

Me Stéfani.

TGI Evry, 61e ch., du 3 mai 1994

3 mai 1994

Rappel de la procédure :

Le jugement :

Le tribunal, par jugement en date du 3 mai 1994, a déclaré Monsieur D Pascal coupable d'avoir à Morsang-sur-Orge, le 3 mars 1993 avant l'expiration du délai de réflexion de 7 jours à compter de la commande ou de l'engagement d'achat accordant au client une faculté de renoncement exigé ou obtenu directement ou indirectement une contrepartie quelconque un engagement ou l'accomplissement d'une prestation de service de quelque nature que ce soit en l'espèce en obtenant le paiement intégral de bouteilles de vin objet de la vente ; faits prévus et réprimés par les articles L. 121-28, L. 121-26 et L. 121-28 du Code de la consommation. L'a condamné à payer une amende de 10 000 F. A dit que la contrainte par corps s'exercera s'il y a lieu dans les conditions prévues par les articles 750 et suivants du Code de procédure pénale.

Sur l'action civile

A reçu M. Brunet en sa constitution de partie civile. A condamné D Pascal, à lui verser la somme de 1 000 F à titre de dommages et intérêts.

Les appels :

Appel a été interjeté par :

1°) Me Michaud, Avocat au Barreau de l'Essonne substituant Me Stéphani, Avocat au Barreau d'Evreux, et celui de Monsieur D Pascal, en toutes ses dispositions, le 5 mai 1994.

2°) Le Ministère public, le 9 mai 1994.

Décision :

Rendue publiquement après en avoir délibéré conformément à la loi.

Statuant sur les appels relevés par le prévenu et le Ministère public à l'encontre du jugement précité auquel il convient de se référer pour l'exposé des faits et de la prévention.

Par voie de conclusions, D Pascal soulève, in limine litis devant la cour, la nullité du procès-verbal bas dressé le 18 mai 1993 par la Direction générale de la Concurrence, de la Concurrence et de la Répression des Fraudes et par voie de conséquence, la nullité de l'ensemble de la procédure subséquente.

Il fait essentiellement valoir que le procès-verbal dont s'agit, établi en son absence, a été signé uniquement par l'enquêteur chargé du contrôle et que le double de ce document ne lui a jamais été adressé.

Subsidiairement au fond, il conclut, par infirmation, à sa relaxe des fins de la poursuite.

Il souligne en effet, que la société " X " sise à Marcoussis, dont il est le gérant a, sur place, un responsable local alors que lui-même dirige une autre société à Saint-André de l'Eure et ne vient que très rarement à Marcoussis.

Il affirme d'autre part, qu'il n'a jamais été personnellement informé des faits dénoncés par les plaignants qui, par ailleurs, se sont vus restituer leurs chèques et ne subissent donc aucun préjudice.

Il soutient enfin que les VRP de la société X ont toujours eu l'interdiction totale de recevoir une contrepartie quelconque avant l'expiration du délai de réflexion ainsi qu'il ressort des pièces versées aux débats.

Monsieur l'Avocat général requiert de la cour de déclarer irrecevable, par application de l'article 385 du Code de procédure pénale, l'exception de nullité soulevée et de confirmer sur le fond la décision entreprise.

Jean-Claude Brunet, partie civile intimée, sollicite de la cour la confirmation du jugement déféré et, y ajoutant, la condamnation du prévenu à lui verser la somme supplémentaire de 500 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.

Considérant qu'après en avoir délibéré la cour a joint l'incident au fond afin qu'il soit statué, par un seul et même arrêt, sur l'exception et sur le fond.

Sur l'exception de nullité :

Considérant que la cour constate que D Pascal n'a pas devant les premiers juges soulevé in limite litis la nullité du procès-verbal du 18 mai 1993 et celle de la procédure subséquente ;

Qu'il convient dès lors - par application de l'article 385 du Code de procédure pénale - de déclarer irrecevable l'exception de nullité invoquée pour la première fois en cause d'appel ;

Sur le fond :

Sur l'action publique :

Considérant qu'il suffit de rappeler qu'à la suite de deux plaintes déposées par Messieurs Brunet et Humbert la Direction générale de la Concurrence, de la Concurrence et de la Répression des Fraudes procédait le 13 avril 1993 à un contrôle au siège de la société " X ", et dont le gérant est le prévenu, afin de vérifier le respect par cette entreprise des dispositions de la loi n° 72-1137 du 22 décembre 1972 relative à la protection des consommateurs en matière de démarchage et de vente à domicile ;

Qu'il s'avérait que les VRP de la société se faisaient remettre systématiquement le jour même de la prise de commande et en tous les cas dans un délai inférieur au délai légal de réflexion de 7 jours, des chèques correspondant au paiement intégral des marchandises faisant l'objet de la vente et procédaient durant le même laps de temps à la livraison desdites marchandises ;

Considérant que la cour ne saurait suivre le prévenu en son argumentation ;

Considérant que la cour constate en effet que D Pascal n'a jamais fait état de la signature d'une délégation de pouvoir au profit d'un responsable local qui aurait pu lui permettre, le cas échéant, et sous certaines conditions, de s'exonérer de sa responsabilité personnelle ;

Considérant que la cour relève, d'autre part, que Alberto Barbosa, VRP de la SARL " X " a déclaré, lors du contrôle : " en moyenne, 40 % des consommateurs démarchés procèdent à un achat qui s'élève en moyenne, pour ces nouveaux clients, à 1 000 - 1 200 F. Le plus souvent, les clients qui décident d'acheter se voient remettre immédiatement la marchandise (que les commerciaux transportent dans leur véhicule) en échange du paiement (remises de chèques) instantané " ;

Qu'il en résulte que le processus dénoncé était systématique au sein de l'entreprise et ne pouvait donc, en tant que tel, échapper à la vigilance du gérant ;

Considérant que la cour observe par ailleurs - en ce qui concerne les documents produits par la défense - que la note de service interdisant clairement aux VRP de la société la perception de fonds avant l'expiration du délai de rétractation de 7 jours est datée du 18 janvier 1994, donc postérieure aux faits poursuivis, alors qu'une précédente note du 23 mars 1992 se révèle pour sa part beaucoup plus ambiguë puisqu'elle prohibe l'acceptation du règlement à a commande tout en précisant que le client " paye à la livraison uniquement " étant rappelé qu'en l'espèce commandes et livraisons étaient simultanées ;

Considérant qu'il échet, par ces motifs et ceux pertinents des premiers juges que la cour fait siens, de confirmer la décision attaquée sur la déclaration de culpabilité ainsi que sur la peine d'amende infligée qui constitue une juste application de la loi pénale, parfaitement adoptée à la relative gravité des agissements commis et à la personnalité du prévenu délinquant primaire ;

Sur l'action civile :

Considérant que la cour ne trouve pas motif à modifier le jugement critiqué qui a fait une équitable appréciation du préjudice subi par Jean-Claude Brunet et découlant directement de l'infraction ;

Qu'il y a lieu de confirmer le jugement dont appel sur les intérêts civils et, y ajoutant, de condamner le prévenu à verser à Jean-Claude Brunet la somme supplémentaire de 500 F pour frais irrépétibles en cause d'appel ;

Par ces motifs, et ceux non contraires des premiers juges qu'elle adopte expressément, LA COUR, Statuant publiquement, contradictoirement à l'encontre de D Pascal et de Jean-Claude Brunet ; Vu l'article 385 du Code de procédure pénale ; Déclare irrecevable l'exception de nullité soulevée ; Rejette les conclusions de relaxe du prévenu ; Confirme le jugement déféré en toute ses dispositions ; Y ajoutant, condamne D Pascal à verser à Jean-Claude Brunet la somme supplémentaire de 500 F au titre des frais irrépétibles en cause d'appel ; Rejette toutes conclusions plus amples ou contraires ; La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de 800 F dont est redevable chaque condamné.