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Décisions

CA Paris, 9e ch. B, 7 octobre 1998, n° 98-04846

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Hubrecht

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Thin

Avocat général :

M. Millet

Conseillers :

Mme Beauquis, M. Barrau

Avocat :

Me Benaiem.

TGI Paris, 31e ch., du 20 mai 1998

20 mai 1998

Rappel de la procédure:

La prévention:

B Bruno est prévenu d'avoir à Paris, le 18 août 1997 et le 25 septembre 1997:

- fait souscrire à M. Hubrecht et Mme Hirault, un engagement, en l'espèce par le moyen de visite à domicile, de travaux conclu dans une situation d'urgence alors que ces personnes n'étaient pas en mesure de consulter un ou plusieurs professionnels qualifiés, tiers au contrat, abusant ainsi de la faiblesse ou de l'ignorance de M. Hubrecht et Mme Hirault,

- après avoir démarché M. Hubrecht et Mme Hirault, à leur domicile, à leur résidence, à leur lieu de travail, exigé ou obtenu d'elles, directement ou indirectement, une contrepartie ou un engagement,

- après avoir démarché M. Hubrecht et Mme Hirault, à leur domicile, à leur résidence, à leur lieu de travail, remis un contrat ne comportant pas les mentions obligatoires et la formule détachable destinée à faciliter l'exercice de la faculté de renonciation.

Le jugement:

Le tribunal, par jugement contradictoire, a déclaré B Bruno:

- non coupable d'abus de faiblesse ou de l'ignorance d'une personne démarchée: souscription d'un engagement, remise d'un contrat non conforme au client lors d'un démarchage à domicile ou dans un lieu non destiné au commerce du bien ou service proposé, demande ou obtention de paiement ou d'accord avant la fin du délai de réflexion, en ce qui concerne Mme Hirault, et l'a relaxé de ces chefs de poursuite,

- coupable d'abus de faiblesse ou de l'ignorance d'une personne démarchée: souscription d'un engagement, remise d'un contrat non conforme au client lors d'un démarchage à domicile ou dans un lieu non destiné au commerce du bien ou service proposé, demande ou obtention de paiement ou d'accord avant la fin du délai de réflexion, en ce qui concerne M. Hubrecht, faits commis du 18 août 1997 au 25 septembre 1997, à Paris, infractions prévues et réprimées par les articles L. 121-21, L. 121-23, L. 121-24, L. 121-26, L. 121-28, L. 122-9, R. 121-3, R. 121-4, R. 121-5, R. 121-6 du Code de la consommation,

et, en application de ces articles,

- l'a condamné aux peines de 2 mois d'emprisonnement avec sursis et 20 000 F d'amende;

- a assujetti la décision à un droit fixe de procédure de 600 F;

- a reçu M. Hubrecht en sa constitution de partie civile et lui a alloué 4 736 F à titre de dommages et intérêts.

Les appels:

Appel a été interjeté par:

Monsieur B Bruno, le 20 mai 1998, sur les dispositions pénales et civiles.

Monsieur le Procureur de la République, le 20 mai 1998, contre Monsieur B Bruno.

Décision:

LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la loi,

En la forme:

Considérant, en se référant aux mentions qui précèdent et aux pièces de la procédure que le prévenu, et le Ministère public ont régulièrement interjeté appel du jugement susvisé du Tribunal de grande instance de Paris du 20 mai 1998, et qu'il y a lieu, par suite, de déclarer lesdits appels recevables.

Considérant que les premiers juges ayant exactement rappelé les prévention et les faits de la cause la cour s'en remet sur ces points aux énonciations du jugement;

Au fond:

Considérant qu'il résulte de la procédure et des débats les faits suivants:

Considérant que Joël Hubrecht, qui louait depuis le 14 septembre 1997, un studio dans lequel des travaux de plomberie, incombant au propriétaire, étaient à faire, demandait à la SARL X, dirigée par Bruno B d'établir un devis de travaux, afin de la transmettre au propriétaire;

Que le plombier de la société X qui se rendait sur les lieux le 25 septembre 1997, invoquant un risque imminent d'aggravation des dommages existant, proposait à Joël Hubrecht de procéder immédiatement au remplacement du mélangeur de la douche, de celui de l'évier, ainsi qu'au remplacement du réservoir des sanitaires;

Que Joël Hubrecht acceptait cette proposition, et signait, le jour même, après l'exécution des travaux un devis d'un montant de 6 121 F TTC et une facture du même montant qu'il réglait au moyen de deux chèques;

Que la propriétaire du studio ayant refusé de rembourser le montant de cette facture au motif que le coût des travaux était excessif, Joël Hubrecht déposait plainte auprès de la Direction régionale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes;

Que Bruno B a été cité directement en police correctionnelle du chef d'infractions à la législation sur le démarchage à domicile;

Sur l'abus de faiblesse

Considérant que, les premiers juges ont déclaré le prévenu coupable d'abus de faiblesse au motif que: " le préposé de la société X avait usé de son autorité de professionnel auprès d'un jeune homme inexpérimenté pour le persuader de l'urgence et obtenir de lui un engagement immédiat ";

Mais considérant que le délit visé par la poursuite n'est constitué que si la preuve est rapportée que la personne démarchée entre dans la catégorie des consommateurs particulièrement fragiles;

Qu'en l'espèce, aucun élément de la personnalité de Joël Hubrecht, jeune étudiant strasbourgeois venu poursuivre ses études à Paris n'établit qu'il ait été particulièrement vulnérable;

Qu'en conséquence et en l'absence de l'un des éléments constitutifs de l'infraction la cour renverra Bruno B de ce chef de poursuite;

Sur la perception de fonds avant l'expiration du délai de réflexion

Considérant que Bruno B qui a reçu du client, le paiement des travaux, le jour même de la signature du devis, a contrevenu ainsi qu'il le reconnaît, aux dispositions de l'article L. 121-26 du Code de la consommation;

Que la déclaration de culpabilité de ce chef sera confirmée;

Sur la remise d'un contrat ne comportant pas les mentions légales

Considérant que Joël Hubrecht a produit devant le tribunal une photocopie du devis signé par lui le 25 septembre 1997;

Que ce document comporte un bordereau de renonciation détachable, mais ne reproduit pas le texte intégrale des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26 du Code de la consommation qui précisent les modalités et les conséquences du droit de renonciation conféré par la loi aux consommateurs démarchés à leur domicile;

Que ces mentions sont obligatoires au terme de l'article L. 121-23 précité et leur absence dans les contrats conclu à l'occasion de démarchage à domicile est sanctionné par l'article L. 121-28 du Code de la consommation;

Que la déclaration de culpabilité de ce chef sera donc confirmée;

Que le dossier ne contient aucune pièce relative aux faits concernant Mme Hirault, qu'il y a lieu de confirmer la relaxe prononcée par les premiers juges, du chef des trois infractions relatives à cette victime;

Sur la peine:

Considérant qu'eu égard, aux relaxes partielles à intervenir, la cour émendant sur la peine, supprimera la peine d'emprisonnement avec sursis et diminuera la peine d'amende prononcée par les premiers juges;

Sur l'action civile

Considérant qu'il y a lieu de confirmer la condamnation en deniers ou quittance prononcée par les premiers juges.

Par ces motifs, LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement à l'égard du prévenu, de la partie civile et en second ressort; En la forme: Reçoit les appels du prévenu et du Ministère public; Au fond: Sur l'action publique, Réformant pour partie et confirmant pour partie le jugement; Renvoie Bruno B des fins de la poursuite des chefs: - d'abus de faiblesse en ce qui concerne Mme Hirault et M. Joël Hubrecht, - perception de fonds avant l'expiration du délai de réflexion en ce qui concerne Mme Hirault, - remise d'un contrat ne comportant pas les mentions légales en ce qui concerne Mme Hirault; Déclare Bruno B coupable de perception de fonds avant l'expiration du délai de réflexion et de remise d'un contrat ne comportant pas les mentions légales; Le condamne à une amende de dix mille francs (10 000 F); Sur l'action civile: Confirme le jugement. Le tout par application des articles L. 121-26 et L. 121-28 du Code de la consommation, 512, 515 du Code de procédure pénale.