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Décisions

CA Riom, 1re ch. civ. sect. 1, 21 avril 1994, n° 2803-93

RIOM

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Le Moal

Défendeur :

Sahuc

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Alzuyeta

Conseillers :

Mmes Valtin, Ladant

Avoués :

Mes Goutet, Gutton

Avocats :

Mes Sirol, Boissier.

TI Clermont-Ferrand, du 14 sept. 1993

14 septembre 1993

Attendu qu'un jugement du Tribunal d'instance de Clermont-Ferrand du 14 septembre 1993, rendu en premier ressort, a annulé le contrat de vente passé le 5 avril 1991 entre Le Moal et Irène Sahuc, condamné le premier à restituer 2 918,44 F à la seconde, enfin ordonné à celle-ci de rendre à l'autre la marchandise livrée

Attendu que les parties ont échangé des conclusions fournies que la cour a lues avec le plus grand soin, aux termes desquelles Le Moal sollicite la réformation du jugement, 5 212 F avec intérêts à compter du 13 août 1992 (date du paiement anticipé des 2 918,44 F susdits, en exécution d'un référé), 10 000 F de dommages-intérêts, 10 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, et Irène Sahuc souhaite la confirmation de la décision, 10 000 F de dommages- intérêts pour "résistance farouche", et 10 000 F sur le fondement du même article 700

Sur quoi, la COUR

Attendu que Le Moal exerce à Toulouse une activité dénommée "La Française de Santé et Diététique"; qu'un de ses démarcheurs s'est rendu le 5 avril 1991 au domicile d'Irène Sahuc à Beaumont près de Clermont-Ferrand pour lui proposer de la "gelée royale pure, Vitaroyalmine, pollen, propolis, ginseng, plantes, cosmétiques, micro-diffuseur Zephyr, huiles essentielles pures, agro-biologiques, produits naturels", pour 2 918,44 F; que le document signé par la dame s'intitule "offre préalable de vente à crédit"; qu'il se dit valable du 5 avril 1991 au 20 avril 1991, quinze jours, qu'il précise que pendant ce délai Irène Sahuc ne doit procéder "à aucun paiement" et n'est "tenue à aucun engagement"; que, par ailleurs, le document stipule "versement comptant 546 F" et plus loin "crédit 2 450 F durée 7 mensualités 350 F"; qu'enfin il comporte un bordereau de rétractation;

Attendu que la mention imprimée "versement comptant" est la seule qui puisse paraître violer les règles légales gouvernant le démarchage à domicile; que, toutefois, étant imprimée, elle n'a pas été faite spécialement pour tromper Irène Sahuc; que, surtout il s'évince tant de l'intitulé du contrat "offre préalable de vente à crédit valable quinze jours" que de son bordereau final de rétractation, que cette dame a été parfaitement éclairée et que la notion d'au comptant doit s'entendre, en l'espèce, du premier versement, celui qui précède la mise en place du crédit;

Attendu, au reste, qu'Irène Sahuc produit elle-même le relevé n° 44 de son compte chèques postal 427.43 S duquel il résulte que la somme de 546 F improprement appelée "au comptant" le 5 avril a été adressée pour débit le 2 mai 1991; qu'ainsi, cette dame établit elle-même que les délais de réflexion et de rétractation prévus par la loi ont été respectés;

Attendu que les conventions s'appliquent de bonne foi; qu'Irène Sahuc n'a pas utilisé le délai de rétractation, qu'elle a régulièrement payé les 350 F mensuels prévus au contrat jusqu'en septembre 1991, époque à laquelle un échange acide de courrier s'est instauré entre les parties; que n'ayant ainsi rien trouvé à redire pendant cinq mois, cette dame a établi sa satisfaction;

Qu'actuellement elle s'avère incapable de restituer la marchandise, ce qui implique qu'elle l'a consommée; que sa contestation présente est donc aussi inexplicable qu'infondée;

Attendu que vainement Irène Sahuc tente-t-elle de soutenir que les chèques débités se suivent dans leur numérotation, ce qui, à l'en croire, établirait qu'elle les a tous remis en bloc le 5 avril 1991 au démarcheur; qu'on peut d'abord observer qu'elle est tard venue à critiquer ce qui serait sa propre et coupable conduite, paraît-il; qu'on doit ensuite noter que la susdite remise en bloc n'est caractérisée par aucune preuve; qu'enfin, il sied de remarquer que la numérotation continue ne démontre rien par elle-même, Irène Sahuc pouvant avoir voulu consacrer un chéquier particulier au paiement de la gelée royale pure Vitaroyalmine;

Attendu, dès lors, qu'Irène Sahuc doit rembourser ce qui lui a été versé le 13 août 1992 par Le Moal; que, toutefois, les dommages-intérêts réclamées par celui-ci ne sont pas fondés; que 5 000 F sont exacts sur la base de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;

Par ces motifs: LA COUR Statuant publiquement et contradictoirement, Infirme le jugement; Dit que le contrat du 5 avril 1991 conclu entre les parties doit recevoir application; En conséquence, condamne Irène Sahuc à restituer à Claude Le Moal les sommes que celui-ci lui a versées le 13 août 1992, avec intérêts légaux à compter de cette date; Déboute Le Moal de sa demande de dommages- intérêts; Condamne Irène Sahuc à payer à Claude Le Moal cinq mille francs (5 000 F) sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile; Condamne Irène Sahuc aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.