Cass. 1re civ., 17 juillet 1996, n° 94-14.662
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Crédit de l'Est (SA)
Défendeur :
Malandrini
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Lemontey
Rapporteur :
M. Aubert
Avocat général :
Mme Le Foyer de Costil
Avocats :
SCP Célice, Blancpain, Me Blondel
LA COUR, - Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que, le 13 décembre 1991, M. Malandrini, exploitant un commerce de location de vidéo-cassettes, a été démarché par un représentant de la société " Expansion bureautique communication " (EBC) et a signé un bon de commande d'un photocopieur d'un prix de 104 381,87 F ; que le 10 janvier 1992, la société Crédit de l'Est lui a assuré le financement de ce matériel au moyen d'un contrat de crédit-bail prévoyant le versement de 60 loyers d'un montant unitaire de 2 497,91 F, avec option d'achat au terme de la location ; que le même jour M. Malandrini a signé un procès-verbal de réception de ce matériel qui n'était cependant pas livré ; qu'il a, ensuite, informé le fournisseur, lequel lui avait, dès le 21 janvier 1992, remboursé le premier prélèvement qui avait été opéré, qu'il annulait sa commande, puis a fait observer à celui-ci qu'il n'avait pas le droit de lui faire signer le procès-verbal de réception en l'absence de livraison ; que le 29 janvier suivant, M. Malandrini a demandé au Crédit de l'Est, après un premier prélèvement sur son compte, d'annuler ce prélèvement automatique ; que celui-ci, qui avait entre-temps payé à la société EBC le prix du matériel, au vu du procès-verbal de réception, a refusé cette demande et, le 10 septembre 1992, a mis en demeure M. Malandrini de régler l'arriéré de loyers ; que la société EBC ayant été mise en redressement, puis en liquidation judiciaire, les 2 et 9 avril 1992 M. Malandrini a assigné le liquidateur et le Crédit de l'Est en annulation des contrats de vente et de crédit-bail des 13 décembre 1991 et 10 janvier 1992 ; que l'arrêt attaqué, confirmatif sur ce point (Dijon, 24 février 1994), a accueilli ces demandes ;
Sur le moyen unique, pris en ses première, troisième, quatrième et sixième branches : - Attendu, d'abord, que les conclusions prises par le Crédit de l'Est n'avaient pas invoqué la circonstance que le crédit consenti par voie de crédit-bail dépassait le plafond des crédits soumis aux dispositions des articles L. 311-1 et suivants du Code de la consommation, et notamment à l'article L. 311-37 ; que le grief est donc nouveau et qu'il est, s'agissant d'un crédit-bail, mélangé de fait ; qu'ensuite, le Crédit de l'Est n'est pas fondé à critiquer devant la Cour de cassation une disposition du jugement qu'il n'avait pas critiquée en cause d'appel ; qu'enfin, les griefs tirés d'une faute commise par M. Malandrini en sa qualité de mandataire et de son éventuel comportement, dans le cas où les mesures d'information du consommateur auraient été respectées, sont nouveaux et mélangés de fait ; que le moyen est donc irrecevable en ses première, troisième, quatrième et sixième branches ;
Et sur les deuxième et cinquième branches du même moyen : - Attendu que le Crédit de l'Est fait grief à l'arrêt d'avoir statué comme il a fait, alors que, d'une part, en se bornant à relever que M. Malandrini se trouvait dans le même état d'ignorance que n'importe quel autre consommateur sans rechercher, comme elle y était expressément invitée, si le photocopieur couleur n'avait pas été commandé pour les besoins de l'activité professionnelle de M. Malandrini, et sans répondre aux conclusions qui soulignaient le lien direct entre les besoins professionnels de celui-ci et l'acquisition du photocopieur, la cour d'appel aurait privé sa décision de base légale au regard des articles L. 121-224° et L. 311-33° du Code de la consommation et violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; et alors que, d'autre part, en faisant droit à la demande de nullité du contrat de crédit après avoir relevé que, nonobstant les termes inexacts du procès-verbal de réception que M. Malandrini avait signé, le matériel n'avait jamais été livré à l'utilisateur par le fournisseur, la cour d'appel, qui n'a pas répondu aux conclusions qui faisaient valoir que " nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude ", n'aurait pas tiré les conséquences légales de ses constatations au regard de cet adage ;
Mais attendu, d'abord, qu'après avoir justement rappelé que les ventes, locations ou location- ventes de biens ou les prestations de service ne sont pas soumises aux règles applicables au cas de démarchage lorsqu'elles ont un rapport direct avec l'activité exercée, la cour d'appel a, par motifs propres et adoptés, souverainement estimé que tel n'était pas le cas ; qu'ensuite, l'adage invoqué ne s'opposant pas à l'action en nullité mais seulement, le cas échéant, à l'exercice des actions en restitution consécutives à la nullité du contrat, c'est à bon droit que la cour d'appel, qui a constaté la méconnaissance des règles applicables au cas de démarchage, a prononcé la nullité du contrat de crédit-bail ;
Par ces motifs : Rejette le pourvoi.