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Décisions

Cass. crim., 4 octobre 1995, n° 94-86.057

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Simon

Rapporteur :

Mme Ferrari

Avocat général :

M. Libouban

Avocat :

Me Bouthors

Cass. crim. n° 94-86.057

4 octobre 1995

LA COUR : - Vu le mémoire produit ; - Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 114-4 et 121-1 du Code pénal nouveau, 1 à 5 et 8 de la loi no 721137 du 22 décembre 1972 relative à la protection des consommateurs en matière de démarchage et de vente à domicile, 2 et suivants, 469-1, 591 à 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :

" en ce que l'arrêt attaqué a condamné le prévenu du chef d'infraction à la loi sur le démarchage et a statué sur les intérêts civils ;

" aux motifs que Christian D est président du conseil d'administration de la SA M, dont le siège est à Gonsans et l'objet la vente de montres et le service après-vente ; que la société commercialise des articles d'horlogerie par vente directe sur les foires et dans les entreprises ; les agents commerciaux de la firme prospectent notamment les entreprises dans lesquelles ils déposent , à une personne investie ou non d'un pouvoir de représentation du personnel, une mallette contenant les marchandises à vendre ; que dans les jours qui suivent, les représentants livrent les montres commandées avec écrin et certificat de garantie ; le prix est immédiatement encaissé ; que toute vente de montre neuve à une personne démarchée, d'une manière quelconque, directement ou par un intermédiaire, sur son lieu de travail est soumise aux prescriptions de la loi du 22 décembre 1972 dès lors qu'elle ne répond pas aux exceptions stipulées en son article 8 ; qu'il n'est d'ailleurs pas exigé que l'ensemble des opérations de démarchage soit effectué par la même personne ni même que celle-ci soit un préposé de l'entreprise faisant pratiquer le démarchage ; qu'une somme de 1 franc sera allouée à l'association Franche-Comté consommateurs (arrêt, p. 3 et 4) ;

" 1°) alors, d'une part, qu'en l'absence d'actes de sollicitation individuelle et directe des consommateurs personnellement reprochables au prévenu ou à ses préposés, les opérations de commercialisation décrites par l'arrêt attaqué n'entrent pas dans les prévisions de l'article 1er de la loi du 22 décembre 1972 ;

" 2°) alors que, d'autre part, la cour d'appel ne pouvait évoquer sur la peine sans autrement s'expliquer sur la portée de l'ajournement prononcé par les premiers juges " ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Christian D, dirigeant d'une société qui commercialise des articles d'horlogerie, est poursuivi pour avoir contrevenu aux dispositions de la loi du 22 décembre 1972 relative à la protection des consommateurs en matière de démarchage et de vente à domicile, désormais codifiée sous les articles L. 121-21 et suivants du Code de la consommation ; que le tribunal correctionnel l'a déclaré coupable de ces délits et a ajourné le prononcé de la peine ; que, saisie des appels du prévenu et du ministère public, la juridiction du second degré, pour confirmer la décision sur la culpabilité et condamner Christian D à une amende, énonce qu'il fait prospecter des entreprises par ses agents commerciaux afin de proposer la vente de montres aux employés de celles-ci ; que les juges précisent que la méthode de vente consiste pour le démarcheur à laisser en dépôt à un membre du personnel une mallette de démonstration contenant des montres, puis à revenir quelques heures plus tard pour recueillir les commandes et remettre les articles vendus contre paiement ; que les juges ajoutent qu'en méconnaissance des prescriptions légales, les achats effectués par les salariés sur leur lieu de travail ne font pas l'objet de contrat écrit, que les acheteurs ne bénéficient pas d'une faculté de renonciation et qu'ils acquittent sur-le-champ le prix de vente ;

Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;

Qu'en effet, d'une part, il résulte de l'article L. 121-21 du Code de la consommation qu'est notamment soumis à la réglementation du démarchage quiconque pratique ou fait pratiquer le démarchage sur le lieu de travail d'une personne physique afin de lui proposer la vente de biens ou la fourniture de services ; qu'il n'importe, pour l'application de ce texte, que le démarchage de la personne physique ait été effectué de façon indirecte par le démarcheur ;

Que, d'autre part, lorsqu'elle est saisie de l'appel du Ministère public contre un jugement déclarant le prévenu coupable mais ajournant le prononcé de la peine, la juridiction du second degré doit se prononcer sur la peine sans égard pour la date à laquelle le tribunal avait prévu de le faire ; d'où il suit que le moyen, qui n'est fondé en aucune de ses branches, ne saurait être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette le pourvoi.