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Décisions

CA Riom, ch. corr., 16 novembre 1994, n° 601

RIOM

Arrêt

Confirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Barnoud

Conseillers :

MM. Montcriol, Jean

Avocats :

Mes Grimaud, Chapus, SCP Herman-Paulet-villatte.

CA Riom n° 601

16 novembre 1994

DEBATS

A Christian et B Mario le premier en qualité d'employé de la SARL G de Saint Eloy, le second en qualité de gérant de ladite société ont été poursuivis devant le Tribunal correctionnel de Clermont-Ferrand pour :

avoir à Vic le Comte le 19 juillet 1992 pratiquant le démarchage dans un lieu non destiné à la commercialisation du bien ou du service proposé, en l'espèce dans la salle des fêtes de Vic le Comte :

- remis des contrats ne comprenant pas de formulaire détachable destiné à faciliter l'exercice de la faculté de renonciation dans le délai de 7 jours à compter de la commande ou de l'engagement d'achat

- exigé ou obtenu des clients directement ou indirectement à quelque titre ou sous quelque forme que ce soit, une contrepartie quelconque.

Faits prévus et punis par les articles L. 121-21, L. 121-24, L. 121-28, L. 121-26 du Code de la consommation.

Par jugement contradictoire du 6 juin 1994, le tribunal a relaxé le prévenu A, a déclaré le prévenu B coupable, l'a condamné à une amende de 15 000 F, a reçu Serge Vernat, Annick Desgeorges et l'Union fédérale des consommateurs du Puy de Dôme en leur constitution de parties civiles et a condamné le prévenu B à payer à Vernat Serge la somme de 4 800 F avec intérêts au taux légal à compter du 19 mars 1992 et la somme de 1 000 F à titre de dommages intérêts et a donné acte à cette partie civile de son offre de restituer la marchandise, à payer à Annick Desgeorges la somme de 4 800 F avec intérêts au taux légal à compter du 19 mars 1992 et celle de 1 000 F à titre de dommages intérêts à charge pour elle de restituer la marchandise et la somme de 1 200 F en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale et a déclaré cette partie civile irrecevable ou mal fondée pour le surplus de sa demande et à condamné le prévenu à payer à 1'Union fédérale des consommateurs du Puy de Dôme la somme de 1 500 F à titre de dommages intérêts.

La partie civile Annick Desgeorges a :

régulièrement interjeté appel le 15 juin 1994 des dispositions civiles de ce jugement à l'égard de Mario B.

Le prévenu B Mario a formé le 17 juin 1994 un appel incident sur les dispositions pénales et civiles du jugement.

Le même jour, le Ministère public a formé un appel incident contre les deux prévenus.

Le prévenu Mario B qui comparaît assisté de son conseil fait valoir oralement et par conclusions que la société pour laquelle il a agi en qualité de gérant exerce l'activité de marchand ambulant, qu'il est titulaire de la carte professionnelle de commerçant non sédentaire, que les produits vendus sont des produits de consommation courante et qu'en application de l'article L. 121-22 du Code de la consommation, la société JP de Saint Eloy n'est pas soumise aux dispositions des articles L. 121-23 à L. 121-28 dudit Code. Il sollicite en conséquence sa relaxe et le débouté des parties civiles.

Le prévenu A Christian régulièrement cité et qui a eu connaissance de la date d'audience ne comparaît pas et l'arrêt contradictoire devra lui être signifié.

La partie civile Desgeorges Annick fait valoir qu'outre les infractions reprochées aux prévenus, elle a été victime aussi de leur part du délit d'abus de faiblesse prévu par l'article L. 122-8 du Code de la consommation, qu'elle s'est acquittée totalement du prix de la chose commandée et livrée soit 12 800 F et elle sollicite la résiliation de la vente, la condamnation des prévenus à lui rembourser la somme de 12 800 F, à lui payer la somme de 20 000 F à titre de dommages intérêts et celle de 5 000 F à titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.

La partie civile Serge Vernat sollicite la confirmation des dispositions du jugement la concernant et la condamnation du prévenu Mario B à lui payer une somme supplémentaire de 400 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale pour ses frais devant la cour.

L'Union fédérale des consommateurs du Puy de Dôme sollicite la confirmation du jugement sur la culpabilité et la condamnation de Mario B à lui payer la somme de 5 000 F à titre de dommages intérêts et la publication de l'arrêt à intervenir dans le journal " La Montagne" et son affichage au domicile du prévenu.

Le Ministère public requiert l'application de la loi.

Attendu que le tribunal a fait une exacte appréciation des circonstances de la cause et en a tiré les conséquences juridiques qui s'imposaient en retenant par des motifs pertinents que la cour adopte la culpabilité de Mario B et en relaxant le prévenu A Christian ;

Attendu qu'il résulte du procès-verbal d'enquête et qu'il n'est pas contesté par le prévenu B que la SARL de Saint Eloy dont il est le gérant et dont l'activité est la vente de porcelaine cristaux orfèvrerie par représentants et marchands ambulants d'articles d'art de la table, a, le 19 juillet 1992 organisé dans la salle des fêtes de la commune de Vic le Comte une réunion à laquelle certaines personnes avaient été invitées parmi lesquelles certaines ont signé des bons de commandes pour un service de table en porcelaine de Limoges de 72 pièces à livrer dans un certain délai et pour une ménagère de métal comportant 70 pièces et une nappe brodée, ces deux derniers articles étant emportés~pour un prix total de 12 800 F payables à raison de 4 800 F payé le jour de la commande et encaissé par le représentant de la société et le solde soit 8 000 F payable par versements ultérieurs ; qu'il n'est pas non plus contesté que le contrat signé par l'acheteur ne comportait pas de formulaire détachable pour faciliter la renonciation et qu'au contraire il était mentionné que le contractant ne bénéficiait pas de la possibilité de renonciation, que la somme versée comptant ne constituait par des arrhes mais une partie du prix définitivement acquise au vendeur et que le contrant n'était pas soumis à la loi 72-1137 du 22 décembre 1972 modifiée reprise aux articles

Attendu que la vente effectuée dans un lieu non habituellement affecté au commerce et à des personnes qui avaient été invitées à une réunion par voie téléphonique ou par voie postale est une vente assimilée à une vente au démarchage et qu'elle est soumise aux dispositions de la section 3 du chapitre 1 du Code de la consommation, articles L. 121-21, L. 121-23 à L. 121- 28 ;

Attendu que le prévenu soutient que les ventes ainsi effectuées par la société qu'il gère peuvent bénéficier des exonérations prévues par l'article L. 121-22 alinéa 2 1° dudit Code ;

Attendu que ce texte prévoit que ne sont pas soumises aux dispositions des articles L. 121-23 à L. 121-28 et par conséquent notamment l'article L. 121-24 prévoyant le formulaire détachable et l'article L. 121-26 interdisant l'exigence ou l'obtention du client d'une contrepartie quelconque avant l'expiration du délai de renonciation de 7 jours, " les ventes à domicile de denrées ou de produits de consommation courante faites ... par des personnes titulaires de l'un des titres de circulation prévus par la loi n° 69-3 du 3 janvier 1969 relative à l'exercice des activités ambulantes et au régime applicable aux personnes circulant en France sans domicile ni résidence fixe " ;

Attendu qu'il est justifié par le prévenu B qu'il est titulaire d'une carte permettant l'exercice d'activités non sédentaires ;

mais qu'en revanche les ventes effectuées ne constituaient pas des ventes à domicile et qu'il ne s'agissait pas de ventes portant sur des produits de consommation courante un service en porcelaine de Limoges marqué aux initiales de son propriétaire et d'un prix égal ou supérieur à 8 000 F n'étant pas susceptible d'être acheté et encore moins utilisé journellement par le grand public, ne pouvant correspondre à cette définition ;

Attendu en conséquence que le jugement ayant retenu Mario B gérant de la SARL G de Saint Eloy qui utilisait ce procédé de vente coupable des infractions reprochées sera en conséquence confirmé ;

Attendu que Christian A qui a reconnu avoir effectué un certain nombre de ces ventes mais qui a agi en qualité de salarié de la SARL dans le cadre des instructions qui lui avaient été données et en utilisant des imprimés confiés par son employeur et qui pouvait raisonnablement ignorer la réglementation applicable a été à juste titre relaxé par le tribunal ;

Attendu que l'amende de 15 000 F prononcée contre B Mario par le tribunal constitue une sanction adéquate à la gravité des faits et à la personnalité du prévenu connu selon la notice de renseignements figurant au dossier pour avoir une conduite habituelle douteuse ;

Attendu que le tribunal a pu à juste titre recevoir les constitutions de partie civile de Serge Vernat, de l'Union fédérale des consommateurs du Puy de Dôme et de Annick Desgeorges qui avaient subi un préjudice résultant directement de l'infraction ;

que l'évaluation faite par le tribunal du préjudice subi par Serge Vernat apparaît équitable et doit être confirmé et que l'équité justifie que cette partie civile soit indemnisée à concurrence de 400 F des frais d'instance engagés devant la cour à la suite de l'appel principal non fondé du prévenu ;

que l'Union fédérale des consommateurs du Puy de Dôme n'apparaît pas recevable à présenter devant la Cour une demande supérieure à la condamnation prononcée à son profit et dont elle n'a pas interjeté appel et que l'évaluation de son préjudice apparaissant équitable le jugement sur le seul appel du prévenu sera confirmé ;

Attendu que la partie civile Desgeorges Annick avait sollicité devant le tribunal une somme de 20 000 F à titre de dommages intérêts ; qu'elle n'est pas recevable àprésenter devant la Cour une demande supérieure ; que la cour n'est au surplus pas compétente pour ordonner la résolution de la vente et pour condamner le prévenu à restituer les sommes perçues d'un montant total de 12 800 F ;

que la cour sur le seul fondement de l'indemnisation résultant directement de l'infraction de non conformité du contrat à la réglementation a les éléments suffisants pour évaluer ce préjudice à 6 000 F ;

que l'équité justifie que cette partie civile soit indemnisée à concurrence de 3 000 F des frais irrépétibles engagés devant le tribunal et la cour ;

Par ces motifs, LA COUR statuant publiquement et contradictoirement, l'arrêt devant être signifié au prévenu A : Sur l'action publique - Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions. Dit que le présent arrêt est assujetti à un droit fixe de procédure de 800 F prévu par la loi du 4 janvier 1993 et l'article 1018 A du Code général des impôts, dont Marius B sera redevable et que l'éventuelle contrainte par corps s'exercera selon les modalités légales. Sur l'action civile - Confirme le jugement déféré en ce qu'il a reçu les constitutions de partie civile de Serge Vernat, de Annick Desgeorges et de l'Union fédérale des consommateurs du Puy de Dôme, déclare le prévenu Mario B tenu à réparer l'entier préjudice de ces parties civiles, condamne ce prévenu à l'égard de Serge Vernat et de l'Union fédérale des consommateurs du Puy de Dôme - Y ajoutant, Condamne Mario B à payer à Serge Vernat une somme supplémentaire de 400 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale. Réformant le jugement déféré - Condamne Mario B à payer avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à Annick Desgeorges une somme de 6 000 F à titre de dommages intérêts et une somme de 3 000 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale. Rejette les demandes plus amples de Annick Desgeorges et de l'Union fédérale des consommateurs du Puy de Dôme. Condamne Mario B à payer aux parties civiles les frais engagés par elle et non avancés par l'Etat, Le tout en application des textes susvisés et des articles 410, 411, 749-750 du Code de procédure pénale et 1018 A du Code général des impôts.