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Décisions

CA Paris, 5e ch. A, 7 novembre 2001, n° 1999-23262

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Locam (SA)

Défendeur :

Association Akoona, Roi

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Renard-Payen

Conseillers :

Mme Jaubert, Mme Percheron

Avoués :

Mes Blin, Kieffer-Joly

Avocats :

Mes Jakoubovitch, Busca.

TGI Créteil, du 14 sept. 1999

14 septembre 1999

La SA Locam est appelante du jugement assorti de l'exécution provisoire rendu le 14 septembre 1999 par le Tribunal de grande instance de Créteil qui a prononcé l'annulation du contrat de location conclu le 17 octobre 1997 entre l'Association Temps Pi Pour Vous (ci- après l'association) et la société Croisé Laroche aux droits de laquelle elle se trouve et l'a déboutée en conséquence de ses demandes, la condamnant à payer à l'association les sommes de 3 000 F à titre de dommages et intérêts et 3 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et à supporter les dépens. Elle prie la cour, réformant cette décision, de dire que les dispositions des articles L. 121 21 et suivants du Code de la consommation ne s'appliquent pas à l'association actuellement dénommée Akoona, qui est une personne morale, et de condamner cette dernière au paiement de la somme de 54 130,04 F au titre de loyers impayés et indemnité de résiliation avec intérêts au taux légal à compter du 28 juillet 1998, date de l'assignation, outre celles de 50 000 F à titre de dommages et intérêts et 20 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Elle fait valoir, subsidiairement, que le contrat litigieux échappe à l'application de la loi sur le démarchage dès lors qu'il a un lien direct avec l'activité de l'association, qu'en toute hypothèse il respecte les obligations édictées par cette loi et qu'enfin la nullité encourue est une nullité relative, couverte par l'association qui a commencé l'exécution du contrat.

L'association Temps Pi Pour Vous poursuit la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a déclaré nulle la convention litigieuse et la condamnation de la société Locam au paiement des sommes de 50 000 F à titre de dommages et intérêts et 20 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Elle soutient que l'article L. 121 21 du Code de la consommation lui est applicable en tant que groupement de personnes physiques sans but lucratif, que le contrat qu'elle a souscrit n'a pas de rapport direct avec son activité, et qu'il ne répond pas aux exigences des articles L. 121 23, L. 121 24 et L. 121 26. Elle invoque à titre subsidiaire un vice du consentement.

Sur ce, LA COUR:

Considérant qu'il est constant que l'Association représentée par son Président Christian Mazubert a souscrit le 17 octobre 1997 avec la société Croisé-Laroche aux droits de laquelle se trouve Locam un contrat de location portant sur un matériel de télésurveillance fourni par la société France Réseau Télésécurité qui a procédé à son installation, le procès-verbal de réception étant signé sans réserves le 28 novembre 1997; qu'à la suite de la réception de l'échéancier l'Association a fait part de son intention de ne pas donner suite à ce contrat dont les termes ne correspondaient pas selon elle à ce qui avait été convenu entre les parties, et annulé l'autorisation de prélèvement sur son compte bancaire;

Considérant que par courrier recommandé du 24 avril 1998 la société Locam a résilié le contrat de location et mis en demeure l'Association de lui payer la somme de 54 130,04 F avant de l'assigner en paiement de la même somme devant le Tribunal de grande instance de Créteil, qui a statué par le jugement dont appel;

Considérant que la société Locam conteste l'application à l'espèce des dispositions du Code de la consommation dès lors que l'Association qui a été régulièrement déclarée à la Préfecture du Val de Marne est une personne morale, et qu'il importe peu eu égard à la rédaction de l'article L. 121.21 du Code de la consommation qu'elle soit un groupement de personnes physiques, motif retenu par le tribunal pour décider que ses dispositions lui étaient applicables;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 121.21 du Code de la consommation "est soumis aux dispositions de la présente section quiconque pratique ou fait pratiquer le démarchage au domicile d'une personne physique, à sa résidence...", que le bénéfice de ladite loi est donc réservé aux personnes physiques;

Que c'est en vain que l'Association excipe d'un avis donné le 27 octobre 1995 par la Direction Générale de la Concurrence de la Consommation et de la Répression des Fraudes à la Direction Départementale de la Dordogne dès lors que cet avis, outre qu'il ne s'impose pas aux juridictions de l'ordre judiciaire, repose sur une analyse erronée - due à une méconnaissance des règles de procédure - de l'arrêt rendu le 6 janvier 1993 par la Cour de cassation qui n'a nullement décidé qu'un GAEC, groupement agricole, avait vocation à bénéficier de la loi sur le démarchage à domicile mais a simplement répondu au moyen du pourvoi, qui ne portait pas sur le fait que le GAEC n'était pas une personne physique;

Que c'est à tort qu'elle invoque une soumission volontaire des parties à ces dispositions légales protectrices, expressément mentionnées dans la convention litigieuse, alors qu'il est bien précisé par le contrat que ces dispositions s'appliquent uniquement si le cocontractant est une personne physique;

Que le contrat ne peut donc être annulé pour inobservation des prescriptions des articles L. 121.21 et suivants du Code de la consommation;

Considérant que l'Association invoque à titre subsidiaire un vice du consentement, faisant valoir que la signature du contrat n'a été obtenue que par épuisement et lassitude à la suite des manouvres déployées par le représentant de FRT qui, surprenant le président de l'Association en plein déménagement, ne lui a pas laissé le temps de lire le contrat;

Considérant, en premier lieu que Monsieur Mazubert, président de l'association, n'a pas été surpris par la visite inopinée d'un démarcheur puisqu'il résulte de son courrier du 9 janvier 1998 à FRT que c'est lui-même qui a fixé la date du rendez-vous à la suite d'un démarchage téléphonique; que l'Association ne caractérise pas les manouvres qu'elle impute au représentant de FRT, observation étant faite qu'elle n'a pas cru devoir attraire cette partie à l'instance;

Que ne caractérisant aucun vice du consentement l'Association est tenue de respecter les obligations par elle souscrites; qu'il y a lieu de la condamner -sous la nouvelle dénomination Akoona - à payer à la société Locam la somme, non contestée, de 54 130,04 F correspondant à quatre loyers échus impayés avec leurs accessoires et à l'indemnité de résiliation calculée conformément aux dispositions contractuelles et à la clause pénale, avec intérêts au taux légal à compter du 28 juillet 1998 date de l'assignation;

Considérant que la société Locam, qui ne caractérise pas les éléments constitutifs de sa demande de dommages et intérêts, à savoir faute de l'Association et préjudice spécifique en résultant pour elle, doit en être déboutée; Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à sa charge, à hauteur de la somme de 10 000 F, les frais irrépétibles par elle exposés;

Par ces motifs, Réforme le jugement entrepris et, statuant à nouveau; Condamne l'Association Temps Pi Pour Vous actuellement dénommée Akoona à payer à la société Locam la somme de 54 130,04 F avec intérêts au taux légal à compter du 28 juillet 1998; Déboute les parties de leurs autres demandes; Condamne l'Association Temps Pi Pour Vous actuellement dénommée Akoona à payer à la société Locam la somme de 10 000 F en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et à supporter les entiers dépens de première instance et d'appel; Admet l'avoué concerné au bénéfice de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.