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Décisions

CA Orléans, ch. com., 29 août 2000, n° 99-02116

ORLÉANS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Sommer (SA)

Défendeur :

Tranchard

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Remery

Conseillers :

Mmes Magdeleine, Boury

Avoués :

Me Garnier, SCP Laval-Lueger

Avocats :

SCP O'Mahony-Garnier, SCP Sacaze-Grassin-Monany

T. com. Orléans, du 19 mai 1999

19 mai 1999

Exposé du litige :

LA COUR statue sur l'appel d'un jugement du Tribunal de commerce d'Orléans rendu le 19 mai 1999, interjeté par la société Sommer, suivant déclaration du 1er juillet 1999.

Pour l'exposé complet des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, il est expressément renvoyé à la décision déférée et aux dernières conclusions des parties signifiées les 14 février (société Sommer) et 10 mars 2000 (M. Tranchant).

Dans le présent arrêt, il sera seulement rappelé que M. Tranchant, par acte sous seing privé du 31 mars 1995, s'est porté caution solidaire envers la société Sommer de toutes obligations de la société Sorecap jusqu'au 31 décembre 1995 et dans la limite de 200 000 F,

La société Sorecap ayant été mise en redressement judiciaire par jugement du Tribunal de commerce d'Orléans du 31juillet 1996, la société Sommer a déclaré sa créance le 9 août 1996 et, le même jour, a demandé à M. Tranchant, de lui en régler le montant en exécution de son engagement de caution.

Par ordonnance de référé du 2 avril 1998, le président du Tribunal de commerce d'Orléans a condamné M. Tranchant à payer à la société Sommer la somme de 46 031,31 F avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation en référé, mais a dit n'y avoir lieu a référé pour le surplus, à savoir une somme de 28 713,85 F que la société Sommer a réclamée au fond devant le Tribunal de commerce d'Orléans qui, par le jugement aujourd'hui déféré à la cour, l'a déboutée de son action.

Appel a été interjeté par la société Sommer, qui conclut à l'infirmation du jugement.

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 5 avril 2000.

Motifs de l'arrêt :

Attendu que le fait, à le supposer établi, que le tribunal aurait relevé d'office le moyen tiré de la nature de la somme résiduelle de 28 713,85 F réclamée à la caution, pour en déduire que l'obligation de couverture de celle-ci ne concernait pas une telle somme, est sans incidence, dès lors que la cour en est aujourd'hui saisie contradictoirement ;

Attendu que la société Sommer, pour fonder sa demande en paiement, entend qualifier expressément la somme réclamée d'intérêts de retard visés à l'acte de cautionnement, alors que M. Tranchant l'analyse comme portant sur des pénalités de retard non couvertes, selon lui, par le même acte ;

Que, la discussion étant ainsi limitée, et dès lors que le créancier ne prétend pas, dans ses conclusions, que les pénalités de retard pourraient être dues en tant que telles à titre d'accessoires de la créance couverts par l'acte de cautionnement, la cour se bornera à analyser les qualifications proposées ;

Qu'il résulte, à cet égard, de l'examen des pièces versées par la société Sommer elle-même que celle-ci, hors litige, a toujours considéré que la somme de 28 713,85 F représentait des pénalités et, dans un document intitulé " note de débit " adressée le 24 juillet 1995 à la société débitrice principale, elle a expressément indiqué que cette somme était réclamée à titre de pénalités de retard par application de la loi n° 92-1442 du 31 décembre 1992 ;

Que cette loi, relative aux délais de paiement entre entreprises, a modifié l'ordonnance du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment son article 33 ; qu'aux termes du deuxième alinéa de ce texte, ainsi modifié, les conditions de règlement des entreprises " doivent obligatoirement préciser les modalités de calcul et les conditions dans lesquelles des pénalités sont appliquées dans le cas où les sommes dues sont versées après la date de paiement figurant sur la facture, lorsque le versement intervient au-delà du délai fixé par les conditions générales de vente", l'alinéa 3 précisant que ces pénalités sont d'un montant au moins équivalent â celui qui résulterait de l'application d'un taux égal à une fois et demie le taux de l'intérêt légal; qu'il résulte de ces dispositions que ces pénalités, même si elles empruntent partiellement aux intérêts moratoires leur mode de calcul, ne constituent pas elles-mêmes des intérêts de retard ;

Que cette qualification est encore confirmée par le fait qu'en l'espèce, la société Sommer réclame sur ces sommes la taxe sur la valeur ajoutée, ce qui peut parfois être le cas pour des pénalités réclamées par un fournisseur à son client, mais jamais pour des intérêts moratoires proprement dits, même s'ils donnent lieu à facturation;

Que, dès lors, la somme de 28 713,85 F n'a pas la nature d'intérêts de retard invoquée par la société Sommer; que le jugement sera donc confirmé ;

Attendu que la distinction entre pénalités et intérêts de retard étant suffisamment délicate pour que la société Sommer ait pu, de bonne foi, se méprendre, il n'est pas établi qu'elle ait commis une faute ayant fait dégénérer en abus son droit d'agir en justice ; que la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive sera donc rejetée ;

Qu'en revanche, condamnée aux dépens d'appel, elle sera tenue de verser à M, Tranchant la somme de 8 000 F par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Par ces motifs : Confirme, dans toutes ses dispositions, le jugement entrepris ; Rejette la demande incidente de dommages-intérêts pour procédure abusive formée par M. Tranchant ; Condamne la société Sommer aux dépens d'appel ; La condamne à payer à M. Tranchant la somme de 8 000 F (huit mille) par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Accorde à la SCP Laval-Lueger, avoué, le droit reconnu par l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.