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Décisions

Cass. crim., 11 avril 1991, n° 90-80.594

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Le Gunehec

Rapporteur :

M de Bouillane de Lacoste

Avocat général :

M. Perfetti

Avocats :

SCP Waquet, Farge, Hazan, Me Capron, SCP Guiguet, Bachellier, Potier de la Varde.

Versailles, 8e ch., du 15 déc. 1989

15 décembre 1989

LA COUR: - Statuant sur le pourvoi formé par: L. Patrick contre l'arrêt de la Cour d'appel de Versailles, 8e chambre, en date du 15 décembre 1989 qui, pour homicide involontaire, l'a condamné à 10 000 F d'amende et à des réparations civiles; - Vu les mémoires produits en demande et en défense; - Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 319 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motif, manque de base légale";

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré L. coupable d'avoir commis un homicide involontaire par négligence et, sur l'action civile, retenu pour un quart sa responsabilité, et l'a solidairement condamné à payer des dommages et intérêts aux parties civiles;

"aux motifs que le prévenu, ayant vendu l'appareil sous forme d'un lot de sous-ensembles, a, malgré l'absence de réglementation au sujet de la mise en place de harnais de sécurité à bord des ULM, commis une négligence en équipant ses appareils de ceintures aux coutures très fragiles comportant un vice apparent et achetées à bas prix par souci d'économie; que sa faute a contribué à la réalisation des blessures ayant entraîné la mort de la victime;

"alors, d'une part, que l'arrêt attaqué constatant qu'aucune réglementation n'imposait d'équiper les ULM de ceintures ou harnais de sécurité, aucune faute de négligence, imprudence ou inobservation des règlements ne pouvait être imputée à L. du fait de la prétendue inefficacité des ceintures de sécurité dont il avait pris l'initiative de munir les appareils qu'il fabriquait;

"alors, d'autre part, que le délit d'homicide involontaire suppose l'existence d'un lien de causalité certain entre la faute retenue et le décès de la victime; qu'en l'espèce la cause directe du décès de la victime est la faute de pilotage qui a provoqué l'accident, tandis que l'inefficacité prétendue de la ceinture de sécurité n'a pu contribuer que de façon indirecte et hypothétique à l'aggravation des blessures";

Attendu qu'il ressort de l'arrêt attaqué qu'un aéronef "ultra léger motorisé (ULM)", piloté par Christian M. et transportant Saïd Aoualli, s'est écrasé au sol par suite d'une fausse manœuvre du pilote; que le passager, dont la ceinture de sécurité s'est rompue et qui a été projeté hors de l'appareil, est décédé des suites de ses blessures;

Attendu que, pour déclarer notamment Patrick L., fabricant de l'aéronef, coupable d'homicide involontaire et tenu à réparation envers les ayants droit de la victime, les juges retiennent que ce prévenu a commis une négligence en équipant ses appareils de ceintures "aux coutures très fragiles, comportant un vice apparent et achetées à bas prix par souci d'économie"; qu'ils ajoutent que l'examen du corps de la victime a "confirmé l'inefficacité de la ceinture de sécurité au moment du choc", et en déduisent que "la faute commise par L. a contribué à la réalisation des blessures ayant entraîné la mort d'Aoualli";

Attendu qu'en l'état de ces motifs, la cour d'appel, qui a considéré à bon droit que l'absence d'une réglementation s'imposant au fabricant ne faisait pas obstacle à ce qu'une négligence puisse être retenue à sa charge, et qui a caractérisé tant la faute du prévenu que le lien de causalité unissant cette faute au dommage, n'a pas encouru les griefs allégués; qu'en effet, les articles 319 et 320 du Code pénal n'exigent, pour leur application, ni que la faute du prévenu constitue la cause exclusive du décès ou des blessures de la victime, ni qu'il existe, entre cette faute et le dommage, un lien de causalité direct et immédiat, dès lors que ce lien de causalité est certain; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme;

Rejette le pourvoi.