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Décisions

CA Paris, 14e ch. A, 11 juin 2003, n° 2003-03136

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Morucci (SARL)

Défendeur :

Himy

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lacabarats

Conseillers :

Mme Percheron, M. Beaufrère

Avoués :

SCP Fanet-Serra-Ghidini, Me Bodin-Casalis

Avocats :

Mes Bourgeois, Azran.

T. com. Paris, du 22 août 2002

22 août 2002

Vu l'appel interjeté par la SARL Morucci de l'ordonnance rendue le 22 août 2002 par le juge des référés du Tribunal de commerce de Paris qui s'est déclaré compétent ratione materiae et ratione loci, a donné acte à la société Morucci de ce qu'elle reconnaît devoir la somme de 18 000 euros, a dit n'y avoir lieu à référé sur le surplus de la demande principale et sur la demande reconventionnelle, et a condamné la société Morucci à remettre dans le mois suivant la signification de l'ordonnance la somme de 18 000 euros à Maître Chevrier de Zitter, huissier, qui en demeurera séquestre jusqu'à ce qu'il en soit autrement ordonné par décision de justice devenue définitive au fond ou décidé d'accord entre les parties,

Vu les conclusions du 12 mai 2003 par lesquelles la société Morucci prie la cour, réformant cette décision, de se déclarer incompétente au profit "des juridictions américaines" et subsidiairement au profit du Tribunal de commerce de Paris statuant au fond, à titre infiniment subsidiaire de cantonner le séquestre à la somme de 9 363 euros, et en toute hypothèse de condamner Marc Himy au paiement de la somme de 2 200 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Vu les conclusions signifiées le 20 février 2003 par Marc Himy qui, appelant incident, poursuit la condamnation de la société Morucci à lui payer la somme de 78 388,13 euros à titre de commissions avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 27 décembre 2001 et capitalisation des intérêts - et subsidiairement la somme de 18 000 euros qu'elle a reconnu devoir - ainsi que la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et la même somme en vertu de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Considérant que le 5 avril 2001 la société Morucci, qui a pour activité la conception et la distribution de montures de lunettes, a conclu un contrat d'agent commercial avec Marc Himy portant sur le territoire des USA et du Canada et prévoyant une rémunération de l'agent égale à 30 % du chiffre d'affaires encaissé ; que faisant grief à son mandant d'avoir brutalement rompu ce contrat sans lui payer les commissions dues, Monsieur Himy a sollicité la condamnation par provision de la société Morucci au paiement de la somme de 514 192,44 F soit 78 388,13 euros à ce titre du juge des référés commercial de Paris, qui a statué par l'ordonnance déférée ;

Considérant que la société Morucci, qui reprend en cause d'appel l'exception d'incompétence soumise au premier juge, invoque l'article 17 de la Convention de Bruxelles pour préciser que les parties n'ayant pas entendu en faire application celles-ci se trouvent soumises "à la législation et aux juridictions applicables au lieu d'exécution de la prestation", qui se situe aux Etats-Unis ;

Mais considérant que, société commerciale ayant son siège social à Paris, la société Morucci est mal fondée à invoquer l'incompétence territoriale du juge naturel qu'est pour elle le Tribunal de commerce de Paris ;

Considérant que ce qu'elle présente comme une incompétence d'attribution du juge des référés commercial au profit du tribunal de commerce statuant au fond ne concerne en réalité que le défaut de pouvoir de juger pour cause de contestation sérieuse ;

Considérant que ne constitue pas une contestation sérieuse l'appréciation de la loi applicable au contrat dès lors que la demande ne porte pas sur les conséquences de la rupture, mais uniquement sur le paiement des commissions dont le mode de calcul et le taux sont fixés par le contrat lui-même ;

Qu'est par contre sérieuse la contestation portant, au-delà de la somme de 18 000 euros reconnue devant le premier juge par la société Morucci, sur l'encaissement effectif par la société Morucci des paiements effectués par les clients américains démarchés par Monsieur Himy, qui ne verse aux débats que les copies des chèques libellés par ces derniers ;

Qu'eu égard aux dispositions contractuelles selon lesquelles les avances sur commissions payées à Marc Himy - à hauteur de la somme non contestée de 8 637 euros - devaient être déduites à compter du treizième mois d'exercice (soit à partir du 6 avril 2002) l'obligation de la société Morucci n'est pas sérieusement contestable à hauteur de la somme de 9 363 euros qu'elle doit être condamnée à payer par provision à Marc Himy, avec intérêts au taux légal à compter du 27 décembre 2001, date de la mise en demeure, et capitalisation dans les termes de l'article 1154 du Code civil à compter du 20 février 2003, date de la demande ;

Considérant que la demande de Monsieur Himy tendant à l'allocation non d'une provision mais de dommages et intérêts pour résistance abusive ne relève pas des pouvoirs du juge des référés ;

Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur Himy l'intégralité des frais irrépétibles par lui exposés en cause d'appel.

Par ces motifs : Confirme l'ordonnance entreprise sauf en ce qu'elle a condamné la société Morucci de remettre la somme de 18 000 euros entre les mains de Maître Chevrier de Zitter constitué séquestre ; La réformant de ce chef et statuant à nouveau, Condamne la SARL Morucci à payer à Marc Himy, par provision, la somme de 9 363 euros avec intérêts au taux légal à compter du 27 décembre 2001 et capitalisation dans les termes de l'article 1154 du Code civil à compter du 20 février 2003 ; Dit n'y avoir lieu à référé sur le surplus des demandes ; Condamne la SARL Morucci à payer à Marc Himy la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et à supporter les dépens, qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.