CE, 1re et 4e sous-sect. réunies, 23 février 1998, n° 190366
CONSEIL D'ÉTAT
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Laboratoire Vétinject
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Rapporteur :
Mme Forray
LE CONSEIL : - Vu, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'État le 24 septembre 1997, l'ordonnance du 17 septembre 1997 par laquelle le président du Tribunal administratif de Rennes a transmis au Conseil d'État la requête du Laboratoire Vétinject, dont le siège est 25-27, rue Nationale, à Chantepie (35135) ; - Vu, enregistrée au greffe du Tribunal administratif de Rennes le 17 juin 1997 et au secrétariat du Contentieux du Conseil d'État le 24 septembre 1997, la requête présentée par le Laboratoire Vétinject ; le Laboratoire Vétinject demande au Conseil d'État : 1°) d'annuler, d'une part, la note du 18 avril 1997 par laquelle le ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation a prescrit de faire cesser la distribution et l'utilisation des produits Hypodurable, Chronofluid et Epidurable et, d'autre part, la lettre par laquelle le même ministre a demandé aux Editions du Point Vétérinaire de supprimer les monographies de ces trois produits de la prochaine édition du Dictionnaire des médicaments vétérinaires ; 2°) d'ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de ces décisions et de suspendre provisoirement cette exécution en application de l'article L. 10 du Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; - Vu les autres pièces du dossier ; - Vu le Code de la santé publique ; - Vu le Code de la consommation ; - Vu le Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; - Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Considérant qu'en indiquant à l'éditeur du Dictionnaire des médicaments vétérinaires qu'il serait opportun de ne plus mentionner à l'avenir dans cet ouvrage les trois "médicaments" dénommés Hypodurable, Chronofluid et Epidurable, qui ont fait l'objet d'un refus d'autorisation de mise sur le marché, le ministre s'est borné à formuler une recommandation dépourvue de force contraignante et n'a donc pas pris une décision faisant grief ; que, par suite, les conclusions de la requête du Laboratoire Vétinject dirigées contre la lettre du 15 avril 1997 sont irrecevables ; que cette irrecevabilité étant manifeste et insusceptible d'être couverte en cours d'instance, il y a lieu pour le Conseil d'État d'en prononcer le rejet par application des dispositions de l'article R. 83 du Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Sur les conclusions dirigées contre la note de service du 18 avril 1997 : - Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête sur ce point : - Considérant que, contrairement à ce que soutient le ministre de l'agriculture et de la pêche, cette note de service ne se borne pas à rappeler la réglementation existante en matière de substances médicamenteuses, mais comporte l'édiction de mesures faisant grief au Laboratoire Vétinject qui fabrique les produits mentionnés dans cette note ; que le laboratoire a, par suite, intérêt à demander l'annulation ;
Considérant que, si en cas de danger grave ou immédiat, l'article L. 221-5 du Code de la consommation habilite le ministre chargé de la consommation et le ou les ministres intéressés, à suspendre, par arrêté conjoint, pour une durée n'excédant pas un an, la fabrication, l'importation, la mise sur le marché, à titre gratuit ou onéreux, et l'utilisation d'un produit, en revanche, le ministre de l'agriculture ne tient d'aucun texte, ni d'aucun principe général de droit, le pouvoir d'enjoindre, de sa seule autorité, aux établissements de distribution en gros, aux pharmaciens et aux vétérinaires praticiens de cesser immédiatement toutes opérations concernant des médicaments qui n'ont pas obtenu l'autorisation de mise sur le marché, de faire procéder à la destruction des stocks dont ils disposent, ou de les retourner au fabricant; qu'ainsi, la note de service du 18 avril 1997, par laquelle le ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation a décidé de faire cesser toutes opérations concernant l'Hypodurable, le Chronofluid et l'Epidurable, ordonné la destruction des stocks d'Hypodurable et de Chronofluid et prescrit le retour chez le fabricant des stocks d'Epidurable, émane d'une autorité qui n'avait pas compétence pour prendre seule de telles mesures; qu'elle doit, par suite, être annulée pour excès de pouvoir, en tant qu'elle édicte ces mesures ;
Article 1er : La note de service du 18 avril 1997 du ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation est annulée en tant qu'elle décide de faire cesser toutes opérations concernant l'Hypodurable, le Chronofluid et l'Epidurable, ordonne la destruction des stocks d'Hypodurable et de Chronofluid et prescrit le retour chez le fabricant des stocks d'Epidurable.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête du Laboratoire Vétinject est rejeté.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au Laboratoire Vétinject, au Centre nationale d'études vétérinaires et alimentaires et au ministre de l'agriculture et de la pêche.