CA Paris, 25e ch. A, 14 décembre 1993, n° 92-26.251
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Setcom systèmes et équipements de télécommandes (SARL)
Défendeur :
Office d'annonces (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Renard-Payen (faisant fonction)
Conseillers :
MM. Faucher, Rostagno
Avoués :
SCP Garrabos-Alizard, SCP Regnier
Avocats :
Mes Delrue, Clout, Fauquet.
LA COUR est saisie de l'appel interjeté par la SARL Setcom systèmes et équipements de télécommandes (Setcom) du jugement contradictoirement rendu le 2 octobre 1992 par le Tribunal de commerce de Paris (15e chambre) qui, dans le litige l'opposant à la SA Office d'annonces,
- l'a condamnée, outre aux dépens, à verser à cette société, en règlement de factures, la somme de 27 449,97 F avec intérêts au taux légal à compter du 18 février 1991,
- a condamné la société Office d'annonces à verser àl'appelante la somme de 1 F à titre de dommages-intérêts,
- a débouté les parties de toutes autres demandes.
La société Setcom prie la cour d'infirmer le jugement déféré, de condamner la société Office d'annonces à lui verser la somme de 150 000 F à titre de dommages-intérêts, d'ordonner la compensation entre sa créance et celle de l'intimée et de condamner celle-ci, outre aux dépens, à lui verser une somme de 10 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
La société Office d'annonces sollicite la confirmation du jugement déféré et demande à la cour d'y ajouter en condamnant la société Setcom, outre aux dépens, à lui verser une somme de 10 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Sur ce, LA COUR :
Considérant que la société Setcom, qui reconnait devoir à la société Office d'annonces la somme de 27 449,97 F, montant de deux factures relatives à des insertions publicitaires, reproche à l'intimée d'avoir, dans une parution, commis une erreur qui, selon l'appelante, lui est préjudiciable ;
Considérant qu'il résulte des documents versés aux débats que le 21 septembre 1989 la société Setcom, alors domiciliée 22, rue Traversière à Boulogne (92-100) -tél. 46.08.48.48, a souscrit trois ordres d'insertion pour les éditions 1990 des annuaires publiés par l'Office d'annonces ;
Qu'en ce qui concerne l'annuaire Europages la société intimée a mentionné une adresse et un numéro de téléphone erronéscorrespondant aux coordonnées d'une société Ercom, immeuble le Sirius, route de Verrières 92265 Meudon Cedex, tél. 40 94 00 37, Fax. 40 94 01 56;
Considérant que cette erreur ne peut sérieusement être contestée par la société Office d'annonces qui, au demeurant, sollicite la confirmation du jugement déféré ayant reconnu le principe de sa responsabilité ;
Qu'à cet égard, force est de constater que si, dans le passé, les sociétés Setcom et Ercom étaient domiciliées à la même adresse et entretenaient des liens privilégiés à tel point que les ordres d'insertion mentionnaient en qualité de "négociateur" "Ercom Setcom" 22 rue Traversière 92100 Boulogne, il n'en demeure pas moins que ces sociétés se sont séparées et que pour les ordres passés le 21 septembre 1989 par l'appelante, la mention relative à la société Ercom était nettement rayée des plans d'insertion,détail qui n'a d'ailleurs pas échappé à l'intimée pour les parutions dans les annuaires officiels de France Télécom qui, elles, ne comportent aucune erreur ;
Que l'envoi par la société Ercom à l'Office d'annonces d'une lettre lui annonçant le 21 octobre 1989 son déménagement, ce que ne pouvait faire la société Setcom qui, elle, n'avait pas encore changé d'adresse, devait éveiller l'attention de l'intimée et la conduire à se rapprocher de ses partenaires afin d'éviter tout malentendu ;
Considérant que si, en raison de cette erreur grossière, inexcusable de la part d'un professionnel de la publicité, la société Setcom est en droit d'obtenir la réparation de son préjudice, la valeur de celui-ci ne peut être que limitée eu égard aux éléments versés aux débats ;
Qu'il convient en effet de relever que la comparaison du chiffre d'affaires clients pour les années 1991/1992 est inopérante dès lors qu'aucun document ne permet d'affirmer que la baisse constatée en 1992 est la conséquence de l'annonce erronée parue en 1990 ;
Que le seul élément pouvant être pris en considération est la lettre dans laquelle la société Ercom, tout en admettant avoir "ré-aiguillé" sur la société Setcom les appels téléphoniques lui étant destinés, reconnaît des "pertes d'appels" dues à une faiblesse de son secrétariat ;
Que cette circonstance justifie pour la société appelante une perte de chance d'obtenir des clients, préjudice qu'il convient d'évaluer à la somme de 3 000 F
Considérant que, tout comme en première instance, l'équité ne commande pas de faire droit aux demandes fondées sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Considérant que, eu égard aux condamnations prononcées, il y a lieu de faire supporter 1/4 des dépens à la société Office d'annonces et les 3/4 restant à la société Setcom ;
Par ces motifs : Réforme le jugement déféré en ce qu'il a évalué à 1 F le préjudice de la société Setcom et statuant à nouveau sur ce chef de demande, condamne la société Office d'annonces à payer à la société Setcom la somme de trois mille francs (3 000 F) avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt en réparation de son préjudice, Le confirme pour le surplus, Déboute les parties de leurs demandes formées au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, Dit que les dépens seront supportés pour 1/4 par la société Office d'annonces et pour 3/4 par la société Setcom ; autorise la SCP Regnier et la SCP Garrabos-Alizard, avoués, à les recouvrer directement dans les conditions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.