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Décisions

CA Paris, 25e ch. A, 23 février 1996, n° 94-22.337

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Perre Contact (SA)

Défendeur :

Larmurier

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Renard-Payen (faisant fonction)

Conseillers :

MM. Faucher, Weill

Avoués :

SCP Gaultier-Kistner, SCP Fanet

Avocats :

Mes Djian-Lascar, Boccara.

T. com., Paris, 7e ch., du 7 juill. 1994

7 juillet 1994

LA COUR est saisie de l'appel interjeté par la SA Perre Contact du jugement contradictoirement rendu le 7 juillet 1994 par le Tribunal de commerce de Paris (7e chambre) qui, dans le litige l'opposant à Gilles Larmurier à l'occasion de la résiliation d'un contrat de conseil en publicité, l'a condamnée, outre aux dépens, à payer à celui-ci, à titre d'honoraires et de préavis, la somme de 213 480 F avec intérêts au taux légal à compter du 30 mai 1989 ainsi que celle de 10 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et a débouté les parties de toutes autres demandes.

Au soutien de son recours l'appelante fait valoir que Gilles Larmurier ne peut lui réclamer ni honoraires ni indemnités de préavis puisque, d'une part, sachant depuis la fin de l'année 1988 que ses relations contractuelles ne pouvaient se poursuivre sur les bases alors existantes, il ne pouvait continuer son travail en janvier et février 1989, d'autre part, ne pouvant se prévaloir des dispositions du contrat type des agences de publicité, l'intimé, conseil extérieur en publicité, chargé d'une succession de missions ponctuelles, n'est pas fondé à solliciter, en raison de la résiliation litigieuse, le paiement d'un quelconque préavis.

La société Perre Contact demande en conséquence à la cour d'infirmer le jugement déféré, de débouter l'intimé de ses demandes et de le condamner, outre aux dépens, à lui payer 20 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Gilles Larmurier qui forme un appel incident, réplique que :

- il a effectivement travaillé au service de la société Perre Contact au cours des mois de janvier, février et mars 1989,

- suite à la résiliation du contrat s'articulant autour de la notion de l'intérêt commun, il est en droit, conformément aux usages en matière publicitaire, de se prévaloir d'un préavis de six mois nécessaire pour retrouver une clientèle et compenser sa brusque perte de revenus.

Dès lors, l'intimé sollicité la réformation de la décision des premiers juges et la condamnation de sa cocontractante à lui payer :

- 160 110 F TTC à titre d'honoraires pour les mois de janvier, février et mars 1989,

- 213 480 F à titre de solde de préavis sur 4 mois, ces sommes devant être augmentées des intérêts de retard à compter de la mise en demeure du 30 mai 1989,

- 40 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Sur ce, LA COUR :

1°) Sur la forme :

Considérant que la cour ne peut que rejeter des débats les écritures signifiées par la société Perre Contact le 12 janvier 1996, jour de l'ordonnance de clôture ;

Qu'en effet, en agissant de la sorte, alors qu'il lui était loisible de répondre dans un délai raisonnable aux conclusions de son adversaire en date du 8 décembre 1995, elle n'a pas permis à Gilles Larmurier d'y répondre ;

2°) Sur le fond :

Considérant qu'il résulte des éléments de la cause que les parties ont, sans limitation de durée, conclu un contrat de conseil en publicité en vertu duquel Gilles Larmurier a, une fois par semaine, moyennant des honoraires mensuels, aidé par son savoir-faire la société Perre Contact dans la mise en œuvre des campagnes publicitaires du groupe Conforama ;

Que, dans une lettre datée du 1er janvier 1989, mais expédiée le 30 janvier, le cachet de la poste faisant foi, la société Perre Contact a écrit à son cocontractant : " A la suite de la reprise de l'agence, de sa nouvelle structure et à la réduction importante du budget Conforama, il ne nous est pas possible de continuer notre collaboration sur les bases actuelles. Nous vous proposons donc de travailler avec la société sous la forme de free-lance dans des conditions à définir ensemble " ;

Que le 17 février 1989, Gille Larmurier a répondu en ces termes à l'appelante : " Je note avec regret que vous n'entendez pas poursuivre notre collaboration sur les bases actuelles, ce dont je ne peux que prendre acte, sous réserve bien entendu du préavis d'usage. Par ailleurs, je suis prêt à travailler avec votre société et reste à votre disposition afin d'en établir les modalités " ;

Considérant que, aucun accord n'étant intervenu entre les parties, le contrat litigieux s'est, à défaut d'éléments établissant le contraire, trouvé résilié le 30 janvier 1989, date de la notification de la rupture ;

Considérant que si la société Perre Contact s'est prévalue, ce qui n'est pas sérieusement contesté, d'un motif légitime de rupture, elle ne pouvait toutefois de bonne foi, compte tenu de l'ancienneté des relations contractuelles, résilier immédiatement le contrat et ainsi priver brusquement l'intimé d'une source de revenus ;

Que d'ailleurs, sans nul doute consciente de cet inconvénient, elle a laissé les relations contractuelles se poursuivre jusqu'à la fin du mois de février 1989 et non postérieurement comme le soutient à tort l'intimé qui se trouve sur ce point en contradiction avec les termes d'une lettre par lui écrite à la société Perre Contact le 10 mai 1989 ;

Considérant que, le principe même d'un préavis étant ainsi retenu, Gilles Larmurier ne peut sérieusement se prévaloir, en raison même de sa qualité de conseil extérieur en publicité, ni du " contrat type entre annonceurs et agents de publicité ", ni d'un usage, non établi, pour déterminer la durée de son préavis ;

Qu'à cet égard la cour ne peut, avec le tribunal, compte tenu de la prestation de l'intimé n'exigeant pas plus d'une journée de présence par semaine, que fixer celle-ci à trois mois ;

Qu'ainsi, il convient de confirmer le jugement déféré, sauf en ce qui concerne le point de départ des intérêts au taux légal qui, concernant les honoraires du mois de janvier 1989, doit se situer au jour de la mise en demeure et qui, pour l'indemnité de préavis, soit 160 110 F, doit se situer au jour de sa fixation par le tribunal ;

Considérant que l'équité ne commande pas d'allouer à Gilles Larmurier d'indemnité complémentaire sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Considérant que la société Perre Contact, partie perdante, ne peut obtenir le remboursement de ses frais irrépétibles ;

Par ces motifs, LA COUR, Rejette des débats les conclusions signifiées par l'appelante le 12 janvier 1996, Confirme le jugement déféré, sauf en ce qui concerne le point de départ des intérêts qui se situe le 30 mai 1989 pour la somme de 53 370 F TTC et le 7 juillet 1994 pour celle de 160 110 F TTC, Déboute les parties de toutes autres demandes, Condamne la société Perre Contact aux dépens de première instance et d'appel ; admet la SCP J & JJ Fanet au bénéfice de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.