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Décisions

Cass. crim., 1 février 2000, n° 99-81.974

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gomez

Rapporteur :

Mme Ferrari

Avocat général :

M. de Gouttes

Avocats :

SCP Delaporte, Briard.

TGI Nanterre, 15e ch. corr., du 12 mai 1…

12 mai 1998

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par S Christian, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Versailles, 9e chambre, du 25 février 1999, qui, pour publicité de nature à induire en erreur, l'a condamné à 30 000 francs d'amende ; - Vu le mémoire produit ; - Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 121-1, L. 121-4, L. 121-5, L. 121-6 et L. 213-1 du Code de la consommation, 121-3 du Code pénal, 2, 427, 485, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Christian S coupable de publicité fausse ou de nature à induire en erreur et, en répression, l'a condamné à 30 000 francs d'amende ;

"aux motifs que Patrick Chérubin, pharmacien à Vitry-sur-Seine, et qui avait contracté avec la société X, au vu d'une publicité proposant, sous le titre "voir c'est prévenir", un système d'alarme avec "levée de doute visuelle" censé déterminer l'origine de l'alarme grâce à un traitement informatique d'images immédiatement transmises par capteur à un centre de surveillance, pour ne donner l'alerte qu'en cas de réel danger, a, ayant par ailleurs obtenu résolution de l'abonnement souscrit, déposé plainte pour publicité mensongère, l'alerte étant systématiquement donnée au moindre mouvement observé dans sa pharmacie, et notamment lors du déplacement des trois chats qu'il y laissait la nuit ; que quoique certifiant l'efficacité technique du matériel, qui permet selon ses dires de distinguer "un objet d'un animal, et un animal d'un être humain", Christian S, président-directeur général de la société X, n'a pas contesté que "dans le cas de Patrick Chérubin", et comme l'exigeait "la procédure de base", pour s'affranchir de toute responsabilité auprès de la compagnie d'assurance, l'alerte avait été systématiquement déclenchée, notamment auprès de la police, "avant même de visualiser sur l'écran s'il s'agissait d'un chat ou d'un cambrioleur" ; qu'il a également fait valoir que le contrat type établi par la société D stipule en son article premier qu'en cas de réception au central de télésurveillance d'un message d'alarme, la société X s'engage à en informer l'abonné, ou toute personne désignée par lui, ainsi que, en fonction de la nature de l'alerte, les services publics compétents pour intervenir" ; qu'il appartenait dès lors à Patrick Chérubin, pour éviter d'être appelé à chaque déclenchement intempestif d'alarme, de signer au profit de la société X une décharge de responsabilité ; que la publicité en cause précise dans son dernier alinéa que "l'intervention d'image se déroule en 10 à 20 secondes après détection de l'alarme, permettant à la centrale de surveillance une réponse et une action très rapide à l' événement" ; qu'elle donne ainsi à penser, sans aucune restriction, que la levée de doute promise est effectuée systématiquement, que la cause du déclenchement de l'alarme est déterminée avant toute action ou toute décision, laquelle relève de l'appréciation du centre de surveillance, selon le type d'intrusion dans les locaux surveillés ; que, contrairement aux allégations de Christian S, la fiche d'instructions signée par le client en annexe au contrat d'abonnement, pour indication de la ou des personnes à prévenir en cas d'alarmes, ne comporte aucune clause entraînant décharge éventuelle de responsabilité ; qu'une contradiction, ou à tout le moins une ambiguïté, existe ainsi entre les termes de la publicité litigieuse, et la mise en application du système offert à la clientèle, les impératifs invoqués par Christian S apparaissant en réduire à néant l'intérêt pratique ; que l'infraction de publicité de nature à induire en erreur sur la portée des engagements de l'annonceur est ainsi suffisamment caractérisée (arrêt, pages 4 et 5) ;

"alors qu'en se déterminant par la circonstance que la publicité litigieuse donnerait à penser que la cause du déclenchement de l'alarme est déterminée avant toute action ou toute décision, et qu'ainsi, d'après cette publicité, le centre de télésurveillance était censé détecter la présence d'un chat dans l'officine avant tout déclenchement de l'alarme, et devait dès lors être en mesure de prévenir tout risque de nuisances intempestives, tout en relevant que les documents publicitaires remis au client indiquaient expressément que le système de capture d'image, permettant à la centre de surveillance d'intervenir rapidement, se mettait en marche 10 à 20 secondes après détection de l'alarme, ce dont il résulte que le client était informé de ce que le système ainsi proposé n'empêchait pas le déclenchement propre de l'alarme en cas d'intrusion, la cour d'appel a omis de tirer les conséquences légales de ses propres constatations" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, par des motifs exempts d'insuffisance ou de contradiction et répondant aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, a caractérisé en tous ses éléments constitutifs, le délit de publicité trompeuse dont elle a déclaré le prévenu coupable ;d'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en discussion l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause contradictoirement débattus, ne saurait être accueilli ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 121-1, L. 121-4, L. 121-5, L. 121-6 et L. 213-1 du Code de la consommation, 121-3, 132-19, 132-20 et 132-24 du Code pénal, 2, 427, 485, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué qui a déclaré Christian S coupable de publicité fausse ou de nature à induire en erreur, l'a condamné à 30 000 francs d'amende ;

"sans motifs ;

"alors que, conformément au principe de la personnalisation judiciaire des peines, consacré par l'article 132-24 du nouveau Code pénal, le juge fixe le quantum de la peine d'amende en fonction des circonstances de l'infraction, de la personnalité de son auteur, ainsi que des ressources et des charges de celui-ci ; "qu'ainsi, prive sa décision de toute base légale la cour d'appel qui condamne le demandeur à 30 000 francs d'amende, sans indiquer en quoi la personnalité de l'auteur de l'infraction, ainsi que les ressources et les charges de celui-ci étaient de nature à justifier une telle peine" ;

Attendu que, si l'article 132-24 du Code pénal prévoit que la juridiction doit déterminer le montant de la peine d'amende en tenant compte des ressources et des charges de l'auteur de l'infraction, ce texte ne lui impose pas de motiver sa décision ; que, dès lors, en condamnant le demandeur à une amende de 30 000 francs, dans la limite du maximum prévu par la loi, la cour d'appel n'a fait qu'user d'une faculté dont elle ne doit aucun compte ; d'où il suit que le moyen est inopérant ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette le pourvoi.