Livv
Décisions

Cass. crim., 26 avril 2000, n° 99-81.436

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gomez

Rapporteur :

M. Roman

Avocat général :

M. Géronimi

Avocats :

SCP Bouzidi, SCP Parmentier, Didier.

Colmar, ch. corr., du 30 oct. 1998

30 octobre 1998

LA COUR : Statuant sur le pourvoi formé par M Rémy, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Colmar, chambre correctionnelle, en date du 30 octobre 1998, qui, pour tromperie sur les qualités substantielles de la marchandise vendue, l'a condamné à 20 000 F d'amende et a prononcé sur les intérêts civils ; - Vu les mémoires produits, en demande et en défense ; - Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 215-11 et 215-12 du Code de la consommation, des articles 156 à 169 du Code de procédure pénale, de l'article 427, des articles 485, 593 du même Code, violation de l'article 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen réaffirmée par la Constitution du 4 octobre 1958, violation de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

"en ce que la décision attaquée a déclaré le demandeur coupable du délit de falsification des boissons destinées à l'espèce humaine, fait prévu et réprimé par les articles L. 213, 216-2 et 216-3 du Code de la consommation ;

"aux motifs que les explications fournies par le prévenu ne sauraient être retenues ;

"aux motifs que la recherche spécifique concernant une éventuelle surchaptalisation réalisée par les deux laboratoires de Montpellier et de Bordeaux aboutirait à des résultats concordants qui apparaissent suffisants pour établir la culpabilité du prévenu, qui a bien reçu notification des résultats du laboratoire de Montpellier ;

"alors que, lorsqu'une présomption de culpabilité résulte d'une analyse effectuée par un laboratoire à l'occasion d'une enquête, l'auteur présumé de la fraude ou de la falsification, qui est avisé du résultat par le procureur de la République, a le droit de réclamer une expertise contradictoire ; que, lorsqu'un des experts désignés ne peut remplir sa mission, par suite d'un événement qui lui est étranger, le juge ne peut tenir compte, pour entrer en condamnation, des résultats résultant de l'expertise effectuée par l'autre expert désigné ; qu'il en est ainsi, en particulier (et surtout), lorsque l'expert qui a été empêché d'exécuter sa mission est l'expert désigné par l'auteur présumé de la fraude ; qu'en se fondant exclusivement sur l'expertise du laboratoire officiel auquel la Direction de la concurrence et de la répression des fraudes avait soumis des échantillons prélevés et sur les conclusions du laboratoire de l'expert désigné par le juge d'instruction, sans qu'il ait été possible au laboratoire désigné par le demandeur et nommé par le juge d'instruction de remplir sa mission, les juges du fond ont violé les articles L. 215-9, 215-11 et 215-12 du Code de la consommation et ont privé, au surplus, le prévenu d'un traitement équitable et par là-même, violé l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'à la suite d'un contrôle et d'une analyse de prélèvements par les agents de la Direction de le concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ayant révélé que le vin d'Alsace Riesling de sa récolte de 1992 avait fait l'objet d'une chaptalisation dépassant le taux autorisé par la réglementation, Rémy M, viticulteur, a été mis en examen du chef du délit de tromperie prévu par l'article 213-1 du Code de la consommation ; que le juge d'instruction, a ordonné l'expertise contradictoire des échantillons conformément aux dispositions de l'article 215-12 dudit Code ; que l'expert nommé par le juge d'instruction a confirmé les résultats du laboratoire de la répression des fraudes ; que le technicien choisi par le prévenu n'a pu se prononcer, l'échantillon qui lui était adressé ayant été détruit accidentellement ; que, sur les réquisitions du ministère public, l'affaire a été renvoyée devant le tribunal correctionnel, qui a déclaré le prévenu coupable du délit ;

Attendu que, pour confirmer le jugement, la cour d'appel retient que les résultats concordants des analyses réalisées par deux laboratoires différents corroborent les constatations des enquêteurs ;

Attendu qu'en l'état de ces motifs, procédant de l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et des éléments de preuve contradictoirement débattus, la cour d'appel a justifié sa décision ; que, d'une part, par application des articles 179, alinéa 5, et 385, alinéa 1, du Code de procédure pénale, le prévenu est irrecevable à se prévaloir d'un défaut d'exécution de l'expertise contradictoire prévue par les articles 215-9 et suivants du Code de la consommation, moyen de nullité qu'il n'a pas soulevé avant la clôture de l'information ; que, d'autre part, il résulte de l'article R. 215-1 du Code de la consommation que la preuve des infractions aux articles L. 213-1 à 216-9 du même Code peut être établie par toutes voies de droit commun ; d'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette le pourvoi.