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Décisions

Cass. crim., 2 octobre 2002, n° 02-81.723

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Cotte

Rapporteur :

M. Chanut

Avocats :

SCP Waquet, Farge, Hazan.

Versailles, 9e ch., du 30 janv. 2002

30 janvier 2002

LA COUR : Statuant sur le pourvoi formé par X Dominique, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Versailles, 9e chambre, en date du 30 janvier 2002, qui, pour abus de confiance, falsification d'un certificat, tromperie sur la qualité, l'origine ou la quantité d'une marchandise, défaut de tenue de registre par un revendeur d'objets mobiliers, l'a condamné à 18 mois d'emprisonnement, dont 1 an avec sursis et mise à l'épreuve et a prononcé sur les intérêts civils ; - Vu le mémoire produit; - Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article 121-3, 314-1, 321-7, 441-7 alinéa 1, 2 du Code pénal, L. 213-1 du Code de la consommation, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que la cour d'appel a condamné Dominique X des chefs d'abus de confiance, falsification d'une attestation ou d'un certificat, tromperie sur la nature, la qualité, l'origine ou la quantité d'une marchandise et non-tenue du registre par un revendeur d'objets mobiliers à 18 mois d'emprisonnement dont 12 mois avec sursis ;

"aux motifs que le fait pour Dominique X d'avoir renseigné dans des conditions frauduleuses des documents servant normalement à la régularité des transactions, d'avoir sollicité le paiement du prix de certains véhicules qui ne lui avaient pas été confiés pour être vendus, alors qu'il savait qu'il ne restituerait pas le montant du prix à leur légitime propriétaire, eu égard aux difficultés financières irréversibles de la société dans laquelle il était également actionnaire, constituent un ensemble d'actes délibérés, graves, précis et concordants, établissant les infractions poursuivies ;

"aux motifs encore que Dominique X niait avoir rempli et signé le formulaire vierge de vente ; toutefois l'enquête démontrait que la signature apposée n'était pas celle du gérant de la SARL Y... propriétaire ; d'ailleurs le responsable du garage Occas-Autos affirmait que ce document lui avait été remis renseigné et signé par Dominique X ;

"et aux motifs que, dans le cadre de la transaction (entre Dominique X et M. Z..., portant sur le véhicule Ford Transit), il apparaissait que Dominique X avait établi les deux factures d'achat délivrées à M. Z... qui mentionnaient le kilométrage du Ford Transit pour 115.220, alors que les documents d'adjudication de ce véhicule par le précédent propriétaire au garage GP mentionnaient un kilométrage de 180 000 Kms ; tout en assumant avoir été le seul interlocuteur lors de la vente faite à M. Z..., Dominique X ne pouvait justifier de cette différence ;

"alors, d'une part, qu'il appartient aux juges du fond de caractériser le délit d'abus de confiance en tous ses éléments constitutifs, notamment de préciser, par une motivation exempte d'insuffisance ou de contradiction, les termes de la remise en vertu duquel le bien prétendument détourné a été confié ; que, concernant le détournement du véhicule Jeep Cherokee, les juges du fond omettent de se prononcer sur le but en vue duquel la remise du véhicule s'est effectuée, alors même que le prévenu soutenait qu'il s'agissait d'un mandat de vente et que, par voie de conséquence, la vente du véhicule ne pouvait constituer un détournement ; que, concernant les deux autres véhicules, il ressort des termes de l'arrêt attaqué que M. Y... "avait confié en dépôt-vente un véhicule Renault-Scénic" à Dominique X et que "le propriétaire antérieur (du véhicule Ford Transit) avait (dépossédé M. Z... de son véhicule) parce qu'il n'avait pas été réglé du prix par le garage GP", de sorte qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt attaqué que les véhicules sur lesquels ont porté les opérations litigieuses avaient été confiés à Dominique X à titre de dépôt-vente et donc à charge pour ce dernier de les vendre et que, en reprochant au prévenu "d'avoir sollicité le paiement du prix de certains véhicules qui ne lui avaient pas été confiés pour être vendus", la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs irréductible sur le but du contrat en vertu duquel ces véhicules avaient été confiés ; qu'en conséquence, c'est par une motivation insuffisante et entachée de contradiction que la cour d'appel a retenu l'existence d'un détournement ;

"alors, d'autre part, que le délit d'abus de confiance suppose que le détournement porte sur les fonds, valeurs, ou biens quelconques qui ont fait l'objet de la remise ; qu'en se bornant à retenir à l'encontre de Dominique X le fait "d'avoir sollicité le paiement du prix (lors de la vente de certains véhicules) alors qu'il savait qu'il ne restituerait pas le montant du prix à leur légitime propriétaire", et en s'abstenant ainsi de caractériser un détournement des véhicules qui lui avaient été remis ou des sommes d'argent issues de la vente de ces derniers, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

"alors, encore, que le délit prévu par l'article 441-7, alinéa 1, 2 du Code pénal ne vise que la falsification d'un certificat ou d'une attestation originairement sincère, de sorte que la falsification doit porter sur un document constituant en lui-même une attestation ou un certificat ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que le certificat de vente remis à Dominique X était vierge et que par conséquent, ce document ne constituait pas une attestation ou un certificat ; que, dès lors, en retenant le délit précité, alors que la falsification imputée au prévenu ne portait pas sur une attestation ou un certificat, la cour d'appel a violé le texte précité ;

"alors, au surplus, qu'en se bornant à relever l'existence d'une différence de kilométrage entre les factures d'achat établies par le prévenu et les documents d'adjudication du véhicule au garage GP, et en s'abstenant d'établir si cette différence était due à un fait volontaire du prévenu, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

"alors, enfin, que le délit de non-tenue du registre réglementaire par un revendeur d'objet mobilier, prévu par l'article 321-7 du Code pénal, n'est puni que d'une peine de 6 mois d'emprisonnement ; qu'en conséquence, la condamnation à dix-huit mois d'emprisonnement prononcée par l'arrêt attaqué ne saurait être justifiée par ce seul délit" ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation de l'article 1982, 2279 du Code civil, 2 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré recevable l'action civile d'Arnaud A... et a condamné Dominique X à lui verser la somme de 6 180,92 francs pour le préjudice financier, 16 000 francs pour les pertes de journées et 5 000 francs pour le préjudice moral à titre de dommages et intérêts ;

"alors que, en vertu de l'article 2279 du Code civil, en fait de meuble, la possession vaut titre, et l'exception prévue en cas de vol de la chose possédée, prévue par l'article 2279, alinéa 2, du même Code, ne peut être étendue à l'abus de confiance ; qu'en conséquence, Arnaud A..., possesseur de bonne foi du véhicule vendu par Dominique X, ne pouvait être inquiété dans sa possession ; que, dès lors, les préjudices invoqués par Arnaud A... ont pour fait générateur non pas le délit d'abus de confiance mais les revendications de l'ancien propriétaire, de sorte qu'ils ne peuvent avoir été directement causés par l'infraction reprochée à Dominique X et ne pouvait justifier la recevabilité et le bien-fondé de son action civile" ;

Les moyens étant réunis; - Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits dont elle a déclaré le prévenu coupable, et a ainsi justifié les allocations, au profit des parties civiles, des indemnités propres à réparer le préjudice en découlant ; d'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette le pourvoi.