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Décisions

Cass. crim., 3 mai 1990, n° 89-82.879

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Le Gunehec

Rapporteur :

M. Maron

Avocat général :

M. Perfetti

Avocat :

Me Ancel

Riom, ch. corr., du 27 avr. 1989

27 avril 1989

LA COUR : Statuant sur le pourvoi formé par B Gérard, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Riom, chambre correctionnelle en date du 27 avril 1989 qui, pour tromperie et publicité mensongère, l'a condamné à 20 000 F d'amende, a ordonné des mesures de publicité, et s'est prononcé sur les réparations civiles ; - Vu le mémoire produit ; - Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 1 et 2 du Code de procédure pénale, ensemble des articles 591 et 593 du même Code, des articles 1 de la loi du 1er août 1905, 44 de la loi du 27 décembre 1973 ;

" en ce que l'arrêt porte qu'il a été rendu en présence de la direction de la concurrence et des fraudes ;

" alors que, le droit d'intervenir devant le juge répressif est un droit exceptionnel et limité qui, à défaut d'un texte formel le consacrant ne peut être accordé qu'aux personnes civilement responsables ou à celles qui ont été personnellement et directement lésées par l'infraction ; qu'aucun texte ne permet à la direction de la concurrence et des fraudes d'intervenir en qualité de partie au procès pénal en matière d'infractions prévues par la loi du 1er août 1905 et par l'article 44 de la loi du 27 décembre 1973 ;

Attendu que, contrairement aux allégations du moyen, la décision attaquée, loin d'admettre la direction de la concurrence et des fraudes comme partie intervenante, porte simplement que les débats se sont déroulés " en présence " d'un représentant de cette Administration ; que le moyen, dès lors, qui procède d'une affirmation de fait inexacte, doit être écarté ;

Sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles 1 de la loi du 1er août 1905 de l'arrêté du 9 novembre 1971, 44 de la loi du 27 décembre 1973, ensemble de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de réponse aux conclusions, défaut de motifs, manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré B coupable des délits de publicité mensongère et tromperie sur les qualités substantielles de la chose vendue en l'espèce des boletus badius sous l'appellation " cèpe " dit de châtaigniers ;

" au motifs que " l'appellation " cèpe de châtaignier " utilise le terme cèpe réservé par la profession aux seuls boletus edulis et aerus ; que toute dénomination comportant le mot " cèpe ", quels que soient les qualificatifs ou suffixes d'origine ajoutés ne peut donc que désigner des boletus edulis et aerus sans que le fondement mycologique susceptible d'échapper au consommateur moyen de la dénomination " cèpe de châtaignier ", d'ailleurs partiellement inexacte pour le boletus badius, ne permette une quelconque dérogation " ;

" alors que l'arrêté du ministre de l'agriculture du 21 novembre 1971 ne vise que les conserves alimentaires dénommées " cèpes " sans autre précision ; qu'en déduisant de cette disposition l'interdiction de commercialiser des conserves de champignons sous la dénomination de cèpe de châtaignier qui constitue l'appellation courante la variété de bolets concernés, la cour d'appel a violé les dispositions susvisées " ;

Attendu que pour déclarer Gérard B coupable de publicité de nature à induire en erreur et de tromperie sur les qualités substantielles de la marchandise vendue, les juges du second degré relèvent que celui-ci a commercialisé des conserves contenant " des champignons de l'espèce boletus badius " sous la dénomination portée sur les étiquettes, de " cèpes des châtaigniers " alors que l'appellation " cèpes " est réservée, selon l'arrêté du ministre de l'Agriculture en date du 9 novembre 1971, aux seules espèces " boletus edulis et boletus aereus " ;

Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision ;

Qu'en effet, d'une part, lorsqu'une marchandise se voit expressément réserver une appellation, le vendeur se rend coupable de tromperie, au sens de l'article 1er de la loi du 1er août 1905, en désignant une autre marchandise, fût elle voisine, par ladite appellation, même avec l'adjonction d'un autre terme ou d'un qualificatif ;

Que, d'autre part, l'appellation cèpes des châtaigniers, même si elle correspond à l'une des dénominations vulgaires du boletus badius, est de nature à induire le consommateur en erreur au sens de la loi du 27 décembre 1973 dès lors que celle de cèpe a été exclusivement réservée, par le texte susrappelé, aux espèces boletus edulis et boletus aereus ;

Que le moyen, dès lors, ne saurait être admis ;

Et attendu que l'arrêt régulier en la forme ;

Rejette le pourvoi.