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Décisions

Cass. crim., 26 octobre 1994, n° 93-83.582

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Le Gunehec

Rapporteur :

Mme Verdun

Avocat général :

M. le Foyer de Costil

Avocats :

SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez

TGI Paris, ch. corr., du 21 oct. 1992

21 octobre 1992

LA COUR: Statuant sur le pourvoi formé par O Michel, C Gilles, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Pau, chambre correctionnelle, du 22 juin 1993 qui, pour publicité de nature à induire en erreur, les a condamnés chacun à 50 000 F d'amende, a ordonné une mesure de publication, et a prononcé sur les intérêts civils; - Vu le mémoire produit commun aux demandeurs; - Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 44-1 de la loi du 27 décembre 1973, 1 à 7 de l'arrêté du 2 septembre 1977 relatif à la publicité des prix l'égard du consommateur, 1101 et suivant du Code civil, 134 du même Code, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré O et C coupables de publicité mensongère et les a condamnés chacun à une peine d'amende 50 000 F, à la publication ainsi qu'à diverses réparations civiles;

"aux motifs qu'il est fait grief aux prévenus d'avoir effectué une publicité par affiches portant sur le prix des meubles proposés à la vente, et notamment d'avoir indiqué "reprise de votre ancien salon 12 000 F pour l'achat d'un canapé 3 places et de deux fauteuils marqués d'une étiquette spéciale en magasin" alors qu'aucune reprise n'est intervenue; qu'il n'est pas contesté que les conditions de vente réelles ne correspondaient pas aux offres publicitaires en ce sens que: "aucun des salons exposés en magasin n'était marqué d'une étiquette spéciale, - toutes les ventes réalisées durant l'opération promotionnelle faisaient l'objet d'une réduction de prix sans qu'aucune reprise d'ancien salon n'intervienne, - les réductions, variables, pratiquées toute l'année, étaient calculées à partir de prix affichés théoriques et artificiels jamais pratiqués effectivement;

"alors, d'une part que n'est pas légalement justifié l'arrêt, qui au vu d'un simple défaut d'apposition d'une étiquette spéciale en magasin, prononce néanmoins la culpabilité des prévenus du chef de publicité mensongère, dans la mesure où le défaut de concordance des indications du message publicitaire avec les conditions de la vente ne porte pas sur un élément pris en considération par le consommateur pour contracter, et dès lors qu'en l'occurrence, ce fait était justifié par l'offre plus intéressante faite aux consommateurs par les vendeurs d'application de l'offre publicitaire non pas aux seuls articles marqués d'une étiquette spéciale, mais à tous les salons en cuir, de sorte que la non apposition des étiquettes annoncées par le message publicitaire correspondait à la suppression d'une restriction mise par le message publicitaire à l'avantage consenti, favorable au consommateur;

"alors, d'autre part, que manque de base légale, l'arrêt qui, pour condamner les prévenus du chef de publicité mensongère, relève, d'une part, que l'annonce publicitaire proposait la reprise d'un ancien salon sous certaines conditions et se borne à énoncer qu'aucune reprise d'ancien salon n'est intervenue, sans constater le refus de l'annonceur d'honorer ses engagements à la demande d'un client, lequel était seul de nature à constituer l'infraction; qu'en effet, il n'existe de publicité mensongère, lorsque le message publicitaire porte comme en l'espèce sur une condition de vente, que pour autant que le consommateur ait accepté l'offre faite et demandé à en obtenir le bénéfice;

"et alors enfin que les indications d'un message publicitaire devant être appréciées en elles- mêmes, le délit de publicité mensongère suppose pour être légalement constitué, que l'objet du mensonge poursuivi soit identique à l'objet de la publicité diffusée par l'annonceur; que ne fait pas l'exacte application de la loi, la cour d'appel qui déclare mensongère une publicité proposant à l'acheteur de divers articles meublants la reprise de son ancien salon pour la somme de 12 000 F, aux motifs que les réductions de prix accordée aux consommateurs s'appliquaient sur la base de prix affichés, frauduleusement majorés au sens de l'article 3 de l'arrêté du 2 septembre 1977; qu'en effet la publicité poursuivie, faute de comporter une annonce de réduction de prix au sens de l'arrêté susvisé, ne pouvait être légalement reconnue comme mensongère au regard de la licéité propre des réductions de prix pratiquées par l'annonceur ";

Attendu qu'il ressort de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme qu'à l'occasion d'une opération promotionnelle réalisée par son magasin de vente, que dirige Gilles C, la société "X", dont Michel O est le gérant, a fait diffuser, par voie d'affiches, une publicité par laquelle elle s'engageait, auprès des acquéreurs de certains meubles " désignés par étiquettes spéciales en magasin ", à reprendre leur ancien salon pour une valeur de 12 000 F; que Michel O et Gilles C sont poursuivis pour publicité de nature à induire en erreur;

Attendu que, pour déclarer les prévenus coupables de ce délit, les juges du second degré retiennent que l'offre promotionnelle incriminée, qui ne correspondait pas aux conditions réelles de vente pratiquées en magasin, la clientèle ne se voyant proposer que des remises de prix, de surcroît illusoires, était de nature à induire le consommateur en erreur sur la portée des engagements pris par l'annonceur;

Attendu qu'en l'état de ces motifs, procédant de son appréciation souveraine des faits et circonstances de la cause, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués; q?ue le moyen ne saurait, dès lors, être accueilli;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme;

Rejette le pourvoi.