CA Paris, 25e ch. A, 18 novembre 1993, n° 92-15939
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Générale des Grands Travaux de Peintures (SARL)
Défendeur :
Master Peintures (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Guérin
Conseillers :
Mme Renard-Payen, M. Faucher
Avoués :
SCP Fisselier-Chiloux-Boulay, SCP Maumont-Autier
Avocats :
SCP Bouaziz-Cornaire- Maynard, Me Ledri.
LA COUR est saisie de l'appel interjeté par la SARL Générale des Grands Travaux de Peintures du jugement contradictoirement rendu le 20 janvier 1992 par le Tribunal de commerce de Melun qui, dans le litige l'opposant à la SA Master Peintures pour le règlement d'un solde de factures concernant la livraison d'un produit "Confotherm N" et d'un "sablon", l'a condamnée, outre aux dépens, à payer à l'intimée la somme de 123 344 F avec intérêts de droit à compter du 2 mars 1988, date de signification de l'ordonnance portant injonction de payer cette somme.
La société Générale des Grands Travaux de Peintures (GGTP) prie la cour d'infirmer le jugement déféré, de débouter la société Master Peintures de ses demandes et de la condamner aux dépens ainsi qu'au versement des sommes de 414 836,96 F à titre de dommages-intérêts et 10 000 F sur le fondement de l'article 700 du NCPC.
La société Master Peintures, devenue la société Peintures Maestria conclut à la confirmation de la décision des premiers Juges, au débouté de l'appelante de toutes ses demandes et à sa condamnation, outre aux dépens, à lui payer 10 000 F de dommages- intérêts pour procédure abusive et 15 000 F au titre de ses frais irrépétibles.
Sur ce, LA COUR :
Considérant que les 15, 20 et 27 mai 1987 la société Master Peintures a livré à la société GGTP, sur un chantier sis à l'Hôtel des Finances de Créteil, 30 tonnes de "confotherm N", "revêtement intérieur à base de billes de polystyrène, avec liant synthétique, en phase aqueuse, avant projection et échange", pour une valeur totale de 300 651 F TTC ainsi qu'un "sablon" pour 3 083,60 F ;
Considérant que la société GGTP ayant manifesté son mécontentement à l'égard de ce produit, la société Master Peintures a, tout en contestant la mauvaise qualité de celui-ci, accepté à deux reprises d'en reprendre une certaine quantité ;
Qu'ainsi la société Master Peintures, à qui la société GGTP avait restitué 20,55 tonnes de "confotherm N", a réexpédié à son client au mois d'août 1987 16 tonnes de produit retraité, puis accepté d'en reprendre 13 tonnes au mois d'octobre 1987 en établissant un avoir de 130 282,10 F au profit de la société GGTP
Considérant que, compte tenu de ce qui précède, la société Master Peintures, qui refuse toute déduction pour les 4 556 tonnes perdues à la suite du retraitement consécutif, selon elle, à la négligence de son client, réclame à celui-ci la somme de 123 344 F, se décomposant comme suit :
- facture n° 7 05 006 503 : 100 217 F
- facture n° 7 05 006 504 : 100 217 F
- facture n° 7 05 006 505 : 100 217 F
- facture n° 7 10 006 503 : 3 083,60 F
TOTAL : 303 734,60 F
A déduire :
- chèque BP du 3 septembre 1987 : 50 108,50 F
- avoir à établir : 130 282,10 F
123 344 F
Considérant que la société GGTP, qui a accepté trois traites de 100 217 F chacune émises en règlement des factures litigieuses, soutient, en se référant notamment au rapport de Patrick Lecouffe, expert désigné par jugement avant dire droit du 19 décembre 1988, que le produit livré par son fournisseur présentait un caractère défectueux se manifestant par un durcissement lors du stockage ainsi que par des fissurations consécutives à la pose du "confotherm N" ;
Considérant que si le technicien désigné par le tribunal a entendu les parties et étudié leurs pièces, force est de constater qu'il n'a procédé ni à l'examen du produit litigieux ni à celui des désordres allégués, la société GGTP l'ayant averti que les travaux effectués sur le chantier de l'Hôtel des Finances de Créteil avaient été repris ou rectifiés ;
Considérant que la société Master Peintures, qui a toujours revendiqué la bonne qualité de son produit, a, dès l'origine, dans des correspondances circonstanciées faisant suite pour la plupart à des déplacements de techniciens, mis en cause l'abandon du "confotherm N", à l'extérieur du chantier, à une époque de forte chaleur, contrairement au cahier des charges, ainsi que la mauvaise application du produit, notamment avec un "sablon" différent du sien ;
Considérant que si les allégations du fournisseur sont contestées par la société GGTP, celle-ci n'établit pas l'absence de caractère marchand du produit ;
Qu'à cet égard l'appelante ne peut sérieusement se référer au rapport de l'expert qui, en l'absence de tout élément objectif d'appréciation et de manière dubitative et contradictoire écrit : "Nous pensons que le produit n'a pas dû être exposé à des températures supérieures à 35° C - au mois de mai - ce qui ne devrait pas avoir sensiblement altéré la teneur en eau du mélange ensaché", alors que ce même technicien admet (rapport page 15) que "la défectuosité du produit initialement livré (au mois de mai) n'est pas établie" ;
Que par ailleurs, en ce qui concerne les conditions d'utilisation du "confotherm N" qui, note Patrick Lecouffe, restent "totalement inconnues" (rapport page 13), il y a lieu de relever que si la société GGTP a bien acquis un "sablon" de la société Master Peintures, cela n'établit pas pour autant qu'elle l'ait utilisé, ce que conteste l'intimée ;
Qu'en outre, la reprise d'une quantité importante de "confotherm N", soit pour retraitement, soit contre avoir, ne vaut pas reconnaissance du. caractère défectueux du produit dont le paiement est réclamé,alors que le fournisseur invoque de manière plausible des raisons commerciales fondées sur des rapports amicaux, non contestés, ayant existé entre membres des deux sociétés ;
Qu'enfin les attestations et le constat d'huissier produits par l'appelante n'établissent ni la cause des désordres invoqués, ni la reconnaissance par le démonstrateur de la société Master Peintures de la mauvaise qualité du "confotherm N" livré ou retravaillé ;
Considérant en conséquence que, faute par la société GGTP d'établir en l'espèce l'absence de caractère marchand du produit, il convient de confirmer le jugement déféré et de condamner l'appelante à payer à la société Peintures Maestria, conformément au décompte détaillé ci-dessus reproduit, la somme de 123 344 F avec intérêts au taux légal à compter du 2 mars 1988 ;
Considérant qu'il ne peut être fait droit à la demande reconventionnelle de la société GGTP fondée sur le caractère défectueux du produit qui n'est pas établi ; qu'il convient donc de débouter cette société de sa demande ;
Considérant qu'il n'existe en l'espèce aucun élément de nature à caractériser une faute de la société GGTP dans l'exercice de son droit d'interjeter appel ; qu'il y a lieu en conséquence de déclarer mal fondée la société Peintures Maestria, qui au demeurant ne rapporte pas la preuve d'un préjudice, en sa demande de dommages-intérêts ;
Considérant que l'équité ne commande pas de faire application en l'espèce des dispositions de l'article 700 du NCPC ;
Par ces motifs : Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré sauf à préciser que la condamnation prononcée bénéficie à la société Peintures Maestria ; Déboute les parties de toutes autres demandes ; Condamne la société GGTP aux dépens de première instance et d'appel ; admet la SCP Maumont-Autier, avoué, au bénéfice de l'article 699 du NCPC.