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Décisions

Cass. crim., 1 février 1990, n° 89-82.570

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Le Gunehec

Rapporteur :

M. Maron

Avocat général :

M. Rabut

Avocats :

SCP Waquet, Farge

Amiens, ch. corr., du 27 févr. 1989

27 février 1989

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par P Jacques, contre l'arrêt de la Cour d'appel d'Amiens en date du 27 février 1989 qui, pour publicité de nature à induire en erreur, l'a condamné à 30 000 F d'amende et a ordonné des mesures de publication de la décision. - Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ; - Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 4 et 30 de la loi n° 79-596 du 13 juillet 1979, 44-I et II de la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973, ensemble du principe specialia generalibus derogant, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable de publicité mensongère ;

"aux motifs que les encarts publicitaires, faisant état d'une mensualité de 961 F seulement, constituaient une information insuffisante, cette mensualité étant susceptible de modifications à compter de la troisième année ; que l'annonce publicitaire parue dans le Pic Chauny présente un caractère ambigu dont la compréhension est difficile ; que 60,42 F par 10 000 F empruntés ne constituent pas une mensualité mais le montant des charges de remboursement la première et la deuxième années dans l'hypothèse d'un indice stable ;

"alors, d'une part, qu'aux termes de l'article 4 de la loi n° 79-595 du 13 juillet 1979, toute publicité relative à des prêts destinés à financer l'une des opérations immobilières visées à l'article 1er doit préciser l'identité du prêteur, la nature et l'objet du prêt et, si elle comporte un ou plusieurs éléments chiffrés autres que la durée, le coût total ainsi que le taux du prêt ; qu'en l'espèce, les publicités incriminées remplissaient les conditions ci-dessus rappelées puisqu'elles précisaient que le prêteur était le C, qu'il s'agissait de prêts à taux ajustables PAJ destinés à financer l'acquisition de maisons anciennes et leur rénovation et qu'elles indiquaient, outre le taux du prêt pendant 6 ans (7,25 %), son taux moyen sur la durée totale (8,55 % en 20 ans) et le coût total du prêt par 10 000 F empruntés ; qu'il s'ensuit que, peu important les autres informations jugées insuffisantes par les juges d'appel, en particulier celles relatives aux mensualités de remboursement applicables dans le cadre d'un prêt PAJ, aucune infraction n'était constituée ;

"alors, d'autre part, qu'il est de principe que les dispositions spéciales dérogent aux dispositions générales ; que les publicités relatives aux prêts sont exclusivement régies par les dispositions de la loi n° 79-596 qui en prévoient tant les modalités que les sanctions ; que, par conséquent, c'est au regard de ce seul texte, nonobstant les textes visés par erreur à la prévention, que les faits reprochés au prévenu devaient être examinés et qu'en l'espèce il résulte des dispositions de l'article 30 de cette loi que seules sont applicables aux infractions relatives à la publicité relevées dans le cadre de la présente loi les dispositions de l'article 44- II de la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 ; qu'il s'ensuit que le prévenu ne pouvait en aucun cas être déclaré coupable sur le fondement de l'article 44-I de ce texte ;

"alors, enfin, et en toute hypothèse, que ne constitue pas une publicité mensongère ou de nature à induire en erreur, au sens de l'article 44-I de la loi du 27 décembre 1973, le fait pour un annonceur de présenter de façon suffisante les informations relatives aux mensualités de remboursement applicables dans le cadre d'un prêt PAJ dès lors que le prix et les conditions d'octroi du prêt - dont seules la fausseté ou l'inexactitude auraient pu être éventuellement sanctionnées - ont été très exactement décrits dans les publicités " ;

Attendu que, pour condamner Jacques P du chef de publicité de nature à induire en erreur, les juges exposent que celui-ci a fait paraître dans divers magazines des annonces publicitaires portant à la connaissance des lecteurs la possibilité d'acheter une maison ancienne et de la rénover grâce aux prêts à taux ajustable (PAJ) ; qu'ils relèvent que les encarts publicitaires faisaient état " d'une mensualité de 961 F seulement ", ce qui " constitue une information insuffisante étant donné que cette mensualité, en raison du mode de calcul de l'APL qui repose sur des paramètres variables tels que la situation de famille du bénéficiaire et les ressources de ce dernier, doit suivre une modification ascendante à compter de la troisième année à cause des variations auxquelles le crédit PAJ est indexé en précisant toutefois que dans le cas d'une baisse de taux la nouvelle mensualité ne peut pas être inférieure à la précédente " ; qu'ils ajoutent enfin que l'annonce publicitaire parue dans l'un des magazines présente un caractère ambigu dont la compréhension est difficile ; qu'en effet 60,42 F par 10 000 F empruntés ne constituent pas une mensualité mais le montant des charges de remboursement ;

Attendu qu'en l'état de ces motifs la cour d'appel n'a pas encouru les griefs allégués ; qu'en effet, d'une part, une publicité ayant un objet autre qu'un prêt mais comportant des informations relatives à un prêt doit répondre cumulativement aux exigences d'information prescrites par la loi du 27 décembre 1973 et à celles prescrites par la loi du 13 juillet 1979 ;que, d'autre part, des informations incomplètes et ambiguës peuvent tomber sous le coup du premier de ces textes ;que le moyen, dès lors, doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette le pourvoi.