Cass. crim., 25 septembre 1995, n° 94-84.726
COUR DE CASSATION
Arrêt
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Simon (faisant fonction)
Rapporteur :
M. Jorda
Avocat général :
M. Dintilhac
Avocats :
Me Bouthors, SCP Waquet, Farge, Hazan.
Rejet du pourvoi formé par L Daniel, S Nani, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Paris, 13e chambre, du 21 septembre 1994 qui, pour publicité de nature à induire en erreur, a condamné le premier à 100 000 francs, le second à 40 000 F d'amende a ordonné une mesure de publication et a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR : - Vu le mémoire produit ; - Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 66 de la Constitution, 44-I et II de la loi du 27 décembre 1973, L. 121-1 et L. 121- 2 du Code de la consommation, 111-5 du nouveau Code pénal, 16 et 20, 385, 591, 593 du Code de procédure pénale :
"en ce que l'arrêt confirmatif a rejeté l'exception de nullité tirée du défaut d'habilitation législative des agents de la Direction générale de la Concurrence, de la Consommation, et de la Répression des Fraudes et a condamné les prévenus tant sur l'action publique que sur l'action civile ;
"aux motifs que l'habilitation législative conférée par la loi du 27 décembre 1973 à la personne des agents de la Direction du commerce intérieur et des prix n'a pas été frappée de caducité du fait des divers changements de nom et réorganisations matérielles ayant affecté cette direction dès lors que ces derniers ont été régulièrement actés par des mesures réglementaires opérant transfert de pouvoirs et qu'à la Direction générale du commerce intérieur et des prix s'est ainsi substituée la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation, et de la Répression des Fraudes ;
"1°) alors que les agents verbalisateurs de la Direction générale de la Concurrence, de la Consommation, et de la répression des Fraudes ne jouissaient en mars 1992 d'aucune habilitation expresse en vertu des articles 44-II de la loi du 27 décembre 1973 et L. 121-2 de la loi du 26 juillet 1993 portant Code de la consommation, lesquels étaient respectivement, le premier, devenu caduc en ce qui concerne la désignation des organes habilités et, le second, non encore entré en vigueur ;
"2°) alors qu'il n'appartient pas au pouvoir réglementaire de déléguer lui-même, explicitement ou implicitement, une habilitation législative spéciale en ce qui concerne le pouvoir de constater des infractions, compétence ressortant exclusivement de la loi " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Daniel L et Nani S sont poursuivis pour publicité de nature à induire en erreur, sur le fondement d'un procès-verbal dressé par des agents de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) ;
Attendu que, pour écarter l'exception de nullité dudit procès-verbal, régulièrement présentée et prise du défaut d'habilitation législative des agents précités, les juges du second degré retiennent que la DGCCRF, créée par le décret n° 85-1152 du 5 novembre 1985, résulte de la fusion de la Direction générale du commerce intérieur et des prix, devenue la Direction générale de la concurrence et de la consommation, avec la Direction de la répression des fraudes ; qu'elle en déduit que la DGCCRF s'étant substituée à la Direction générale du commerce intérieur et des prix, "l'habilitation législative conférée par la loi du 27 décembre 1973 à la personne des agents" de cette direction "n'a pas été frappée de caducité du fait des divers changements de nom et réorganisation matérielle qui ont affecté cette direction" ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations desquelles il résulte que la constatation des faits de publicité de nature à induire en erreur a été effectuée par des agents légalement habilités pour ce faire malgré les divers changements de dénomination du service dont ils dépendent, la cour d'appel n'a pas encouru les griefs allégués ; que, dès lors, le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 66 de la Constitution, 44-I et II de la loi du 27 décembre 1973, L. 121-1 et suivants du Code de la consommation, 45 et suivants de l'ordonnance du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence, 2 de l'arrêté n° 77-105/P pris en application de l'ordonnance du 30 juin 1945, 385, 512, 591 à 593 du Code de procédure pénale, ensemble violation des droits de la défense :
"en ce que l'arrêt confirmatif a rejeté l'exception de nullité tirée de l'irrégularité du procès- verbal d'infraction et a condamné les prévenus tant sur l'action publique que sur l'action civile ;
"aux motifs que les procès-verbaux tendant à la recherche d'un délit de publicité trompeuse sont régis par l'article 44-II de la loi du 27 décembre 1973 et non par l'ordonnance du 1er décembre 1986 et le décret du 29 décembre 1986 qui ne sont pas ici applicables ; que les procès-verbaux ont été en l'espèce régulièrement dressés par les fonctionnaires de la DGCCRF en application des articles L. 121-1 et L. 121-2 du Code de la consommation qui reprennent textuellement les dispositions de l'article 44 de la loi précitée de 1973, étant observé par ailleurs que les prévenus ont pu contradictoirement discuter de toutes les pièces
"alors que les procès-verbaux de constatations d'infractions aux dispositions de l'article 44-I de la loi du 27 décembre 1973 ensemble l'article 2 de l'arrêté n° 77-105/P pris en application de l'ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945 aujourd'hui abrogée et remplacée par l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986, sont gouvernés par les formalités spécialement prévues par ladite ordonnance et son décret d'application n° 86-1309 du 29 décembre 1986 ; qu'ainsi est substantielle la signature du procès-verbal par l'enquêteur et la personne concernée qui doit être admise, avant l'établissement définitif dudit procès-verbal à faire valoir ses observations ; qu'en déclarant inapplicables les garanties liées au principe du contradictoire issues de l'ordonnance de 1986, la cour d'appel a commis une erreur de droit " ;
Attendu que les prévenus ont, aussi, avant toute défense au fond, excipé, de la nullité du procès-verbal établi à leur encontre faute de signature par eux de ce document en invoquant l'article 31 du décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986 ;
Attendu que, pour rejeter, cette exception, la juridiction du second degré se prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel, loin de méconnaître les textes visés au moyen, en a, au contraire, fait l'exacte application ;qu'en effet échappent aux prescriptions de l'article 31 du décret du 29 décembre 1986 les procès-verbaux constatant des faits de publicité de nature à induire en erreur qui n'ont, conformément en droit commun, à être signés que de leur seul rédacteur ;d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
Rejette le pourvoi.