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Décisions

Cass. crim., 26 janvier 1988, n° 86-92.459

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Berthiau

Rapporteur :

Mme Guirimand

Avocat général :

Mme Pradain

Avocat :

Me Choucroy.

TGI Paris, 31e ch., du 11 juill. 1985

11 juillet 1985

Rejet du pourvoi formé par P Robert, contre un arrêt de la Cour d'appel de Paris, 13e chambre, en date du 27 février 1986 qui, pour publicité de nature à induire en erreur, l'a déclaré coupable du délit poursuivi et l'a dispensé de peine, et qui a prononcé sur l'action civile

LA COUR : - Vu le mémoire produit ; - Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 44 de la loi du 27 décembre 1973, 1er de la loi du 1er août 1905, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le demandeur coupable du délit de publicité mensongère ;

" aux motifs qu'il résulte des pièces de la procédure que la notice remise à l'époque des faits aux clients éventuels de X et décrivant les spécifications de l'appareil SR 40 indiquait ses caractéristiques (EGG 3 pistes automatiques incorporées, section photo analyse automatique incorporée et indicateur d'axe électrique) ; que le terme "incorporés" ne peut laisser aucun doute, à première lecture, sur leur appartenance d'origine à la machine présentée ; qu'il s'agit donc bien d'indications fausses portant sur des qualités substantielles et les propriétés du bien proposé à la vente ; que compte tenu de la notice très technique du matériel vendu, des caractéristiques de la clientèle concernée et des conditions habituelles de vente des matériels de cette catégorie, il existe de très larges circonstances atténuantes ;

" alors que, d'autre part, le délit de publicité mensongère n'est constitué que si la tromperie porte sur une qualité substantielle de la chose, que la description erronée d'un objet qui peut n'être que l'expression exagérée de la publicité ne suffit pas à caractériser le délit de publicité mensongère, qu'en l'espèce, la simple erreur relative aux caractéristiques "en option" de l'appareil ne porte pas sur une qualité substantielle de la chose, mais constitue une simple inexactitude insusceptible de caractériser l'infraction de publicité mensongère ;

" alors, d'autre part, que la publicité mensongère suppose que le message incriminé puisse induire en erreur un consommateur moyen ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de l'arrêt attaqué que l'appareil était proposé à la vente à des médecins cardiologues donc à des spécialistes et non à des consommateurs moyens ; que ceux-ci ne pouvaient en conséquence se déterminer à acquérir à une "première lecture" du prospectus et sans procéder à un essai exigeant des explications ; qu'il s'en suit que la cour d'appel qui a, elle-même, constaté sa qualité de spécialiste des acquéreurs ne pouvait légalement entrer en répression" ;

Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué et du jugement qu'à la suite de la diffusion d'une plaquette publicitaire émanant du groupement d'intérêt économique X, dirigé par P, l'association "Centre médical Saint-Michel" avait acquis de cet organisme un "ordinateur multifonctions SR 40", appareil destiné à analyser des électrocardiogrammes effectués sur bande magnétique par la technique dite de "holter", lequel n'était pas conforme aux indications publicitaires ; qu'il est apparu que cet appareil était dépourvu de trois des sept performances techniques annoncées, soit celle ayant trait à l'existence de trois pistes automatiques d'enregistrement, le matériel vendu n'en comportant que deux, celle relative à la fourniture d'une section de photo-analyse incorporée automatique mais ne fonctionnant en réalité qu'en coordination avec un électrocardiogramme, soit enfin celle concernant la présence d'"indicateurs" d'axes électriques sur l'ordinateur, dépourvu en fait de tout équipement intérieur correspondant ; qu'en raison de ces faits, P a été cité à comparaître devant la juridiction répressive sur le fondement des dispositions de l'article 44 de la loi du 27 décembre 1973, et déclaré coupable, par les premiers juges, de l'infraction poursuivie ;

Attendu que pour confirmer à cet égard le jugement entrepris dont elle adopte les motifs non contraires, la cour d'appel énonce qu'il appartenait à P, en sa qualité d'annonceur, d'indiquer dans la plaquette en cause, afin de dissiper toute équivoque, que les trois performances techniques manquantes ne concernaient pas l'appareil de base présenté mais du matériel acquis en option ; qu'elle ajoute qu'est inopérant en l'espèce, puisque toute publicité doit être appréciée en elle-même indépendamment des informations pouvant être données ultérieurement ou de son résultat concret, l'argument selon lequel la publicité incriminée était destinée à des professionnels ; qu'elle relève enfin que le document en cause comportait des indications fausses concernant les qualités substantielles et les propriétés du bien proposé à la vente ;

Attendu qu'en prononçant ainsi, les juges ont justifié leur décision sans encourir les griefs allégués par le demandeur; qu'ils ont à juste titre estimé, d'une part, que les mentions relatives aux caractéristiques "en option" de l'appareil portaient sur les qualités substantielles du bien considéré et ne pouvaient seulement constituer une expression publicitaire exagérée, et, d'autre part, que le fait que la publicité effectuée, particulièrement spécialisée, fût destinée à des professionnels, n'était pas de nature dans le cas de l'espèce à ôter aux agissements du prévenu leur caractère délictueux; que, dès lors, le moyen doit être écarté;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette le pourvoi.