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Décisions

Cass. crim., 9 novembre 1992, n° 92-80.626

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Tacchella

Rapporteur :

M. Culié

Avocat général :

M. Galand

Avocats :

SCP Waquet, Farge, Hazan.

TGI Lyon, 5e ch. corr., du 14 févr. 1991

14 février 1991

LA COUR : - Statuant sur les pourvois formés par M Gino, E André, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Lyon, 7e chambre correctionnelle, en date du 13 novembre 1991, qui les a condamnés respectivement à 18 mois d'emprisonnement avec sursis et 200 000 francs d'amende pour publicité de nature à induire en erreur et infractions à la loi du 22 décembre 1972 sur le démarchage à domicile, 20 000 francs d'amende pour publicité mensongère et infractions en matière de démarchage, a ordonné la publication de la décision et a prononcé sur les réparations civiles. - Joignant les pourvois en raison de la connexité ; - Vu le mémoire produit ; - Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 44 de la loi du 27 décembre 1973, 1 à 5 de la loi du 22 décembre 1972, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, violation des droits de la défense :

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M et E coupables du délit de publicité de nature à induire en erreur sur les qualités substantielles d'appareils d'électrothérapie et sur ses procédés de vente ;

"alors, d'une première part, qu'aux termes de la prévention délimitant la saisine des juges du fond, les indications retenues dans la publicité comme étant fausses ou de nature à induire en erreur sur une qualité substantielle du produit présenté portaient exclusivement sur la mention de l'homologation du ministère de la Santé des appareils d'électrothérapie suggérant leur efficacité thérapeutique alors qu'elle se rapportait à leur conformité aux normes de sécurité électrique ; que dès lors, la cour d'appel, en énonçant que cette mention était indicative et non limitative et en s'arrogeant le droit d'examiner la réalité des propriétés thérapeutiques de l'appareil et son degré d'efficacité pour retenir comme fallacieux l'ensemble des termes publicitaires vantant cette efficacité, a excédé les limites de sa saisine et violé les droits de la défense ;

"alors, d'autre part, que la mention d'une homologation de l'appareil d'électrothérapie par le ministère de la Santé nécessaire à sa mise en vente et garantissant à l'utilisateur l'innocuité de son emploi, dès lors qu'elle est véridique, ne constitue pas une mention fallacieuse ; que, de surcroît, n'étant pas assimilable même pour un public moyennement averti à une garantie d'efficacité thérapeutique de l'appareil, elle n'est pas davantage de nature à tromper ce public sur les qualités thérapeutiques substantielles du produit présenté" ;

"alors, enfin, que pour être constitué, le délit de publicité trompeuse ou de nature à induire en erreur suppose à la fois que le message publicitaire soit effectivement de nature à induire en erreur, et que cette erreur porte sur l'un des éléments légaux prévus par l'article 4 de la loi du 27 décembre 1973 ; qu'en l'espèce, ne constitue pas une allégation fallacieuse l'offre de fournir préalablement à une vente éventuelle une information gratuite sur le produit proposé du seul fait que cette information a été donnée oralement par l'intermédiaire d'un représentant plutôt que par l'envoi d'une documentation écrite ; que de surcroît, le texte incriminé énonçant une information gratuite sur ces appareils vous sera donnée contre le retour du coupon-réponse ci-dessous ne fait aucune référence à un prétendu procédé de vente alléchant pour attirer abusivement la clientèle et ne constitue donc pas une publicité trompeuse sur un procédé de vente ; que dès lors, les éléments constitutifs du délit poursuivi ne sont pas caractérisés" ;

Attendu, d'une part, que saisie de citations reprochant aux prévenus "d'avoir à Paris, Lyon et sur l'ensemble du territoire national, courant 1984 et 1985, fait paraître des publicités comportant des indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur sur les qualités substantielles d'appareils d'électrothérapie, par la mention d'une homologation du ministère de la Santé suggérant leur efficacité thérapeutique, la cour d'appel, pour entrer en voie de condamnation, relève que cette mention d'homologation, figurant en caractères très apparents en tête des prospectus remis aux clients lors du démarchage, et reproduite sur une étiquette tricolore apposée sur chaque appareil, venait conforter les allégations pseudo-scientifiques de la publicité relatives à l'efficacité thérapeutique de l'appareil X ou à son expérimentation clinique, alors qu'elle concernait seulement la conformité aux normes de sécurité électrique et que plusieurs arrêtés du ministre de la Santé avaient prononcé l'interdiction des publicités en faveur de cet appareil comme faisant état de propriétés curatives inexactes ;

Attendu, d'autre part, que pour déclarer les prévenus coupables de publicité mensongère portant sur les procédés de vente, l'arrêt attaqué expose que toutes les publicités incriminées parues dans la presse comportaient l'indication finale : "une information gratuite sur ces appareils vous sera donnée contre le retour du coupon-réponse ci-dessous" ; que l'envoi de ce coupon-réponse était suivi de la visite à domicile d'un démarcheur, alors que les personnes intéressées s'attendaient à recevoir par courrier une documentation écrite leur laissant le temps de la réflexion ; que selon la cour d'appel, la réunion des termes "information gratuite", "recevoir" et "contre le retour du coupon-réponse", dans une publicité comportant implicitement une offre de contracter, était de nature à induire en erreur le lecteur moyen sur le procédé de vente éventuelle de l'appareil X, en évoquant logiquement l'idée d'une vente par correspondance plutôt que celle d'une vente à domicile avec tous les risques qui lui sont inhérents ;

Attendu qu' en l'état de ces énonciations caractérisant les éléments constitutifs du délit prévu par l'article 44-I de la loi du 27 décembre 1973, la juridiction du second degré, qui n'a pas excédé sa saisine, a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette les pourvois.