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Décisions

Cass. com., 5 mai 1987, n° 85-13.845

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Société Disanto

Défendeur :

Union syndicale des libraires de France

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Baudouin

Rapporteur :

M. Le Tallec

Avocat général :

M. Jeol

Avocats :

SCP Tiffreau, Thouin-Palat.

Versailles, du 13 mars 1985

13 mars 1985

LA COUR : - Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches : - Attendu que, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 13 mars 1985), l'Union syndicale des librairies de France et l'association " Librairies présentes " ont assigné en référé les sociétés Disanto et Levallois distribution pour qu'il leur soit ordonné sous astreinte de cesser de présenter à la vente des livres à des prix inférieurs à ceux prescrits par la loi du 10 août 1981 ;

Attendu que les sociétés Disanto et Levallois distribution font grief à la cour d'appel d'avoir accueilli la demande, alors que, selon le pourvoi, d'une part, dans leurs conclusions d'appel, les sociétés Disanto et Levallois distribution avaient fait valoir qu'à la suite de l'arrêt rendu par la Cour de justice des Communautés européennes le 10 janvier 1985, l'amputation de l'article 1er de la loi du 10 août 1981 " conduit à établir une discrimination entre les livres édités et vendus en France et les livres importés ", de sorte que, " par sa seule existence, il crée une réglementation distincte qui est susceptible d'entraver le commerce entre les Etats membres " et " constitue une mesure d'effet équivalent de caractère explicite " ; qu'il en est de même du " dernier alinéa de ce même article 1er de la loi du 10 août 1981 " ; qu'il " en résulte que le principe même de la fixation des prix du livre doit être écarté en raison de son incompatibilité avec le traité instituant la Communauté économique européenne, c'est-à-dire l'ensemble de la loi du 10 août 1981 ainsi que les deux décrets d'application " ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 809 du nouveau Code de procédure civile et le Traité ; alors que, d'autre part, en se faisant juge de l'interprétation de l'arrêt rendu par la Cour de justice le 10 janvier 1985, au regard de la question de savoir si la nouvelle distinction entre les livres édités et vendus en France et les livres importés ou réimportés n'était pas constitutive d'une mesure prohibée par les articles 7 et 30 du Traité, sans surseoir à statuer et renvoyer cette question préjudicielle à l'appréciation de la Cour de justice, la cour d'appel a violé les articles 809 du nouveau Code de procédure civile, 7, 30 et 177 du Traité ; alors qu'en outre, la Cour de justice n'ayant pas statué, dans son arrêt du 10 janvier 1985, sur la question de la compatibilité avec le Traité de la nouvelle distinction entre les livres édités et vendus en France et les livres importés ou réimportés, il appartiendra à la Cour de Cassation de surseoir à statuer et de renvoyer cette question préjudicielle à l'appréciation de la Cour de justice, par application de l'article 177 du traité ; et alors qu'enfin, en toute hypothèse, en confirmant l'ordonnance entreprise ayant fait " défense à la société Disanto et à la société Levallois distribution de pratiquer sur la vente des livres des remises excédant ce qui est prévu par la loi du 10 août 1981 ", sans opérer la distinction entre les catégories de livres, édités en France, importés ou réimportés, effectuée par la Cour de justice dans son arrêt du 10 janvier 1985, et en interdisant ainsi aux sociétés Disanto et Levallois distribution de vendre des livres importés ou réimportés avec des remises excédant ce qui est prévu par la loi du 10 août 1981, la cour d'appel a violé les articles 809 du nouveau Code de procédure civile, 7 et 30 du Traité ;

Mais attendu, en premier lieu, que la cour d'appel, qui a rappelé la distinction opérée par la Cour de justice entre différentes catégories de livres, a souverainement retenu que les sociétés Disanto et Levallois distribution ne versaient aux débats aucun document de nature à justifier que la plupart des livres vendus étaient importés de Belgique et a énoncé " qu'il leur appartiendra éventuellement, au cas où leurs adversaires feraient constater qu'elles vendent des livres au-dessous du prix légal, de justifier que ces livres proviennent d'un autre pays membre de la Communauté " ;

Attendu, en second lieu, que c'est à bon droit que la cour d'appel qui n'était pas tenue de poser une question préjudicielle, a retenu, en application des arrêts de la Cour de justice, que n'était pas contraire au Traité la fixation du prix du livre par l'éditeur dans la mesure où les livres étaient édités et vendus sur le territoire national ;qu'il n'y a donc lieu à question préjudicielle par la Cour de Cassation ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de surseoir à statuer, rejette.