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Décisions

Cass. crim., 11 octobre 1995, n° 94-83.657

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Simon

Rapporteur :

Mme Ferrari

Avocat général :

M. Amiel

Conseillers :

MM. Blin, Carlioz, Aldebert, Grapinet, Simon, Farge de la chambre

Avocats :

SCP Boré, Xavier, SCP Le Bret, Laugier.

TGI Bordeaux, ch. corr., du 9 juin 1993

9 juin 1993

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par S Abraham, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Bordeaux, 3e chambre, du 31 mai 1994, qui, pour publicité de nature à induire en erreur, l'a condamné à 200 000 francs d'amende, a ordonné une mesure de publication et a statué sur les intérêts civils ; - Vu les mémoires produits en demande et en défense ; - Sur le moyen unique de cassation pris la violation des articles 44 de la loi du 27 décembre 1973, de l'article 1er de la loi du 1er août 1905, de l'article 3 de l'arrêté du 2 septembre 1977, de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Abraham S coupable du délit de publicité mensongère et l'a en conséquence condamné à payer une amende de 200 000 francs ;

"aux motifs que deux éléments distincts fondent les poursuites, d'une part pour tromperie sur le lieu où les remises sont faites, d'autre part sur l'effectivité des remises ; que la lecture du tract publicitaire ne permet pas de supposer que la remise de 19 000 francs n'est pratiquée que dans le magasin de Mérignac et non sur la foire ; que le rapprochement du titre, des services promotionnels offerts et une remise sur l'achat de meubles amène le lecteur, faute de restrictions ou de précisions, à penser que le tout concerne la foire ; que la publicité en cause est bien mensongère, puisqu'elle comporte des mentions fausses sur la possibilité d'obtenir des remises sur un point de vente ; que sur le second point, la question posée par l'incrimination est celle de savoir si, au regard des dispositions de l'arrêté du 2 septembre 1977, un commerçant pratiquant habituellement le marchandage est en droit d'offrir des remises sur le prix de base de la discussion ;que les éléments réunis au cours de l'enquête permettent d'affirmer que les prix affichés en magasin sur la base des prescriptions données par Abraham S et recueillis dans la bible de prix communiquée à tous les vendeurs ne constituent qu'une base de discussion pour le prix de vente ;que la preuve en est établie par les dires des vendeurs, par le relevé des prix figurant sur les bons de commande et par l'audition d'un client ayant obtenu une remise juste avant le début de la promotion ; que ce fait conduit à considérer que le prix de référence utilisable dans les offres publicitaires de rabais ne consiste pas dans le prix affiché qui n'est pas le prix habituellement pratiqué mais dans le prix minimal que les vendeurs sont autorisés à pratiquer,à savoir en l'espèce celui obtenu par l'application du coefficient de 2,15 ; qu'en offrant au public une remise de 19 000 francs sur des meubles qui, tous sauf deux, étaient vendus normalement à des prix inférieurs sur discussion, Abraham S n'offrait aucun rabais sur les prix habituellement pratiqués dans la période antérieure à la période promotionnelle ;que cette constatation dispense par sa généralité et sa constance, de confronter les prix articles par articles dans les trente jours précédents, observation faite que cette comparaison, effectuée correctement par les agents de la DGCCRF pour un certain nombre de meubles démontre que les prix de vente effectifs ont été inférieurs aux prix affichés diminués de la remise de 19 000 francs (arrêt attaqué p. 14 alinéa 3, 4, p. 15 alinéa 1 à 7, p. 16 alinéa 1) ;

"1°) alors que dans ses conclusions d'appel, Abraham S avait soutenu que le tract publicitaire litigieux mentionnait clairement que seuls les articles marqués d'une étiquette rouge étaient visés par la vente promotionnelle ; qu'il en déduisait que les clients se rendant au stand de la foire "Conforexpo", et non dans le magasin de Mérignac, ne pouvaient pas être induits en erreur puisqu'aucun meuble exposé sur ce stand ne comportait cette étiquette d'une couleur volontairement très visible ; qu'en se bornant à énoncer que la publicité comportait des mentions fausses sur la possibilité d'obtenir des remises sur un lieu de vente, sans répondre au moyen des conclusions d'appel de Abraham S, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

"2°) alors que le délit de publicité mensongère consistant à appliquer un rabais sur le prix affiché et non sur le prix habituellement pratiqué dans la période de 30 jours précédent l'opération promotionnelle n'est caractérisé que si le juge constate que les articles visés dans la publicité étaient effectivement vendus à un prix inférieur au prix affiché ; que Abraham S avait fait valoir dans ses conclusions d'appel que les constatations des agents de la DGCCRF relatives aux prix affichés portaient sur des articles non visés par la publicité ; que ce moyen était de nature à démontrer que les rabais annoncés étaient effectifs et qu'à tout le moins les constatations des agents de la DGCCRF ne prouvaient pas que les rabais antérieurement pratiqués concernaient les articles visés à la publicité ; qu'en se bornant à énoncer que la constance et la généralité de la pratique des rabais la dispensait de confronter, article par article, les prix pratiqués antérieurement à ceux résultant de la publicité, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;"

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, par des motifs exempts d'insuffisance ou de contradiction; et répondant aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, a caractérisé en tous ses éléments constitutifs le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable, et ainsi justifié l'allocation, au profit de la partie civile, de l'indemnité qu'elle a estimé propre à réparer le préjudice découlant de cette infraction ;d'où il suit que le moyen, qui remet en discussion l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause contradictoirement débattus, ne saurait être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette le pourvoi.