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Décisions

CJCE, 5 octobre 1994, n° C-47/91

COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

République italienne

Défendeur :

Commission des Communautés européennes

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

MM. Mancini

Présidents de chambre :

MM. Moitinho de Almeida, Diez de Velasco

Avocat général :

M. Van Gerven

Juges :

MM. Kakouris, Joliet (rapporteur), Schockweiler, Rodríguez Iglesias, Grévisse, Zuleeg, Kapteyn, Murray

CJCE n° C-47/91

5 octobre 1994

LA COUR,

1. Par requête déposée au greffe de la Cour le 31 janvier 1991, la République italienne a, en vertu de l'article 173 du traité CEE, demandé l'annulation de la décision de la Commission, qui lui a été communiquée par lettre du 23 novembre 1990, d'engager la procédure d'examen prévue à l'article 93, paragraphe 2, premier alinéa, du traité CEE, à l'encontre de l'octroi d'aides par les autorités italiennes à la société Italgrani, décision qui a été assortie d'un ordre de suspendre lesdites aides (ci-après la "décision d'engagement de la procédure"). Cette décision a été publiée au Journal officiel des Communautés européennes C 315 du 14.12.1990, p. 7 et sa version rectifiée au Journal officiel des Communautés européennes C 11 du 17.1.1991, p. 32.

2. Il ressort du dossier que la loi italienne n° 64, du 1er mars 1986 (ci-après la "loi d'aide au Mezzogiorno"), a institué un régime général d'aides en faveur du Mezzogiorno. Conformément à l'article 93, paragraphe 3, du traité, ce régime a été notifié à la Commission le 2 mai 1986.

3. Par une décision 88-318-CEE du 2 mars 1988 (ci-après la "décision d'approbation du régime général italien", JO L 143, p. 37), la Commission a approuvé le régime général d'aides institué en faveur du Mezzogiorno. L'article 9 de la décision a toutefois prescrit à la République italienne de respecter les dispositions et les règlements communautaires, en vigueur ou à adopter ultérieurement, en matière de coordination des différents types d'aides dans les secteurs de l'industrie, de l'agriculture et de la pêche.

4. À la suite de cette décision, le ministre italien pour les interventions dans le Mezzogiorno a octroyé des aides à la société napolitaine Italgrani en concluant avec elle un "contrat de programme". Celui-ci a été approuvé le 12 avril 1990 par le comité interministériel pour la coordination de la politique industrielle (ci-après le "CIPI").

5. Le contrat de programme en question comportait différents volets : la construction d'installations industrielles utilisant des matières premières d'origine agricole (céréales, betteraves, soja, fruits), dont une fabrique d'amidon et une glucoserie, la production d'huile de graines, celle de semoules et de farines, la constitution de stocks de produits agricoles, un programme de recherche et la formation du personnel de la société.

6. Le 26 juillet 1990, à la suite d'une plainte dont l'avait saisie Casillo Grani, une société concurrente d'Italgrani, la Commission a demandé aux autorités italiennes de lui transmettre des informations sur ces aides. Le 7 septembre 1990, les autorités italiennes ont communiqué la décision du CIPI approuvant le contrat de programme conclu avec Italgrani. Elles ont fourni des informations complémentaires sur ces aides lors d'une réunion en septembre 1990 et par courrier au cours du mois d'octobre de la même année.

7. Par lettre du 23 novembre 1990, la Commission a annoncé au Gouvernement italien sa décision d'ouvrir la procédure d'examen contradictoire prévue par l'article 93, paragraphe 2, premier alinéa, du traité à l'égard de la plupart des aides accordées à Italgrani et lui a enjoint de suspendre leur octroi.

8. Dans les motifs de sa décision, la Commission a exposé ses doutes quant au respect par les autorités italiennes de deux conditions qu'elle aurait mises à l'approbation du régime général. Ces autorités auraient méconnu les dispositions et règlements communautaires en matière de coordination des différents types d'aides dans le secteur de l'agriculture, contrairement à ce que leur prescrivait l'article 9 de la décision d'approbation du régime général. Par ailleurs, la Commission a relevé que les informations en sa possession ne lui permettaient pas de contrôler si les taux maximaux d'intensité qu'elle avait, selon elle, mentionnés dans sa décision d'approbation du régime général avaient été respectés (point D de la décision d'engagement de la procédure).

9. Après les avoir passées en revue, la Commission a conclu que les différentes aides octroyées à Italgrani ne paraissaient pouvoir bénéficier d'aucune des dérogations prévues à l'article 92, paragraphe 3, sous a) (aides en faveur de régions défavorisées ou en difficulté) et sous c) (aides sectorielles ou régionales), du traité (point I.1 de la décision). Elle a ajouté qu'"aux termes de l'article 93, paragraphe 3, du traité CEE, les mesures projetées ne peuvent être mises à exécution avant que la procédure prévue au paragraphe 2 du dit article ait abouti à une décision finale" (point I.3 de la décision). Elle a rappelé également que les aides versées en violation de cette règle étaient susceptibles de faire l'objet d'une demande de remboursement auprès de leurs bénéficiaires et que les dépenses communautaires qui seraient affectées par elles pourraient ne pas être prises en charge par le FEOGA (point I.4 de la décision).

10. C'est contre cette décision qu'est dirigé le présent recours.

11. Le Gouvernement italien reproche à la Commission d'avoir considéré les aides initialement prévues en faveur d'Italgrani comme des aides nouvelles, c'est-à-dire comme des aides non autorisées, et d'avoir, en conséquence, ordonné la suspension de leur versement en application de l'article 93, paragraphe 3, dernière phrase, du traité.

12. Selon le Gouvernement italien, le "contrat de programme" conclu avec la société Italgrani et ratifié le 12 avril 1990 par le CIPI constitue en effet la simple mise en œuvre du régime général d'aides italien. Comme la Commission aurait approuvé ce régime dans sa décision 88-318, précitée, sans se réserver la possibilité d'un examen ultérieur des mesures individuelles d'exécution, le Gouvernement italien soutient que les aides accordées à Italgrani n'avaient pas à être notifiées, parce qu'elles avaient déjà été autorisées et devaient en conséquence être traitées comme des aides existantes au sens de l'article 93, paragraphe 1, du traité. Par conséquent, la Commission n'aurait pu en ordonner la suspension, puisque celle-ci n'est prévue, par l'article 93, paragraphe 3, dernière phrase, du traité, que pour les aides nouvelles.

13. Toujours selon le Gouvernement italien, la Commission n'a pu ordonner la suspension des aides que parce que, tout en affirmant, dans la décision d'engagement de la procédure, qu'elle s'était bornée à contrôler si les aides accordées à Italgrani étaient couvertes par sa décision d'approbation du régime général, elle les a, en réalité, appréciées directement par rapport à l'article 92 du traité. Ce faisant, elle serait revenue implicitement sur sa décision 88-318 du 2 mars 1988 dans laquelle elle avait jugé le régime général compatible avec le traité. Elle aurait ainsi violé les principes de la sécurité juridique et de la confiance légitime.

14. Le 9 avril 1991, la Commission a soulevé une exception d'irrecevabilité au motif que l'acte attaqué n'était que préparatoire. La Cour a rejeté l'exception sans engager le débat au fond dans un arrêt du 30 juin 1992 (Rec. p. I-4145).

15. Dans les mémoires présentés postérieurement à cet arrêt, la Commission formule encore trois observations qu'elle qualifie de préliminaires.

16. En premier lieu, la Commission relève que, le 16 août 1991, elle a finalement autorisé les aides en faveur d'Italgrani moyennant certaines modifications et modalités proposées par les autorités italiennes au cours de la procédure d'examen (décision 91-474-CEE de la Commission, concernant les aides accordées par le Gouvernement italien à la société Italgrani pour la réalisation d'un complexe agro-alimentaire dans le Mezzogiorno, JO L 254 du 11.9.1991, p. 14). Elle fait valoir que l'annulation de la décision d'engagement de la procédure priverait la décision finale d'autorisation de base juridique et la rendrait par conséquent illicite.

17. En deuxième lieu, la Commission soutient que, comme le recours ne défère pas au contrôle de la Cour les appréciations économiques qui sous-tendent la décision d'engagement de la procédure et concerne seulement des aspects marginaux de cette dernière, il n'est pas de nature à en provoquer l'annulation.

18. En troisième lieu, la Commission fait observer que, comme la décision attaquée ne produit plus d'effet suspensif depuis la modification par les autorités italiennes des aides initialement prévues en faveur d'Italgrani, le recours a perdu son objet.

19. Il y a lieu de constater que les deux premières observations de la Commission ne sont pas fondées sur des éléments de droit ou de fait qui se seraient révélés postérieurement au débat sur la recevabilité du recours du Gouvernement italien qui a été clôturé par l'arrêt du 30 juin 1992, précité. Ces observations doivent dès lors être écartées. Quant à la troisième observation, il suffit de constater que la décision de suspension a eu un effet pendant une certaine période.

20. Quant au fond, il convient de relever d'abord que les aides accordées à Italgrani s'inscrivent dans le cadre du régime général d'aides institué par la loi d'aide au Mezzogiorno, comme la Commission l'a elle-même reconnu (voir la décision d'engagement de la procédure, point A, cinquième alinéa, et point C, et la décision finale d'autorisation des aides du 16 août 1991, point I, troisième alinéa).

21. Il y a lieu de souligner ensuite que, une fois qu'un régime général d'aides a été approuvé, les mesures individuelles d'exécution ne doivent pas, sauf si des réserves ont été émises en ce sens par la Commission dans la décision d'approbation, lui être notifiées, ainsi que la Commission l'a elle-même admis dans son quatorzième rapport sur la politique de la concurrence (point 203) et dans les affaires Irish Cement / Commission (voir les affaires jointes 166-86 et 220-86, Rec. 1988, p. 6482). En effet, comme les aides individuelles sont de simples mesures d'exécution du régime général d'aides, les facteurs que la Commission devrait prendre en considération pour les apprécier seraient les mêmes que ceux qu'elle a appliqués lors de l'examen du régime général. Il est dès lors inutile de soumettre les aides individuelles à l'examen de la Commission.

22. En l'espèce, la Commission soutient avoir mis une réserve à l'approbation du régime général italien. Dans son mémoire en défense, elle allègue que, dans un télex qu'elle a adressé au Gouvernement italien le 14 novembre 1986, elle se serait réservé le droit de prendre position ultérieurement sur les dispositions de la loi d'aide au Mezzogiorno relatives aux produits agricoles. Elle aurait alors averti le Gouvernement italien qu'elle ne se prononcerait pas sur ces dispositions tant que ne lui auraient pas été notifiées "les modalités d'application des aides aux produits des secteurs agricole et agro-alimentaire ... que les diverses régions du Mezzogiorno (devaient) arrêter dans le cadre de leurs compétences". Ces mesures d'application n'ayant jamais été adoptées, les aides accordées à Italgrani, qui concernent des produits agricoles, ne bénéficieraient pas de la dispense de notification découlant de la décision d'approbation du régime général italien.

23. Cet argument ne saurait être retenu. Quel que soit le sens à attribuer à ce télex, il suffit de constater que la Commission n'en a pas repris la substance dans sa décision d'approbation du régime général italien.

24. Il convient de relever en outre que, lorsqu'elle est confrontée à une aide individuelle dont il est soutenu qu'elle a été octroyée en application d'un régime préalablement autorisé, la Commission ne peut d'emblée l'examiner directement par rapport au traité. Elle doit se borner d'abord, avant l'ouverture de toute procédure, à contrôler si l'aide est couverte par le régime général et satisfait aux conditions fixées dans la décision d'approbation de celui-ci. Si elle ne procédait pas de la sorte, la Commission pourrait, lors de l'examen de chaque aide individuelle, revenir sur sa décision d'approbation du régime d'aides, laquelle présupposait déjà un examen au regard de l'article 92 du traité. Les principes de confiance légitime et de sécurité juridique seraient alors mis en péril tant pour les États membres que pour les opérateurs économiques, puisque des aides individuelles rigoureusement conformes à la décision d'approbation du régime d'aides pourraient à tout moment être remises en cause par la Commission.

25. Si, à la suite d'un examen ainsi limité, la Commission constate que l'aide individuelle est conforme à sa décision d'approbation du régime, celle-ci devra être traitée comme une aide autorisée, donc comme une aide existante. Dès lors, la Commission ne pourra en ordonner la suspension puisque l'article 93, paragraphe 3, du traité ne lui confère ce pouvoir que vis-à-vis des aides nouvelles.

26. Inversement, dans l'hypothèse où la Commission constate que l'aide individuelle n'est pas couverte par sa décision d'approbation du régime, l'aide doit être considérée comme une aide nouvelle. Pour le cas où elle ne lui aurait pas été notifiée, la Commission a le pouvoir, après avoir mis l'État membre concerné en mesure de s'exprimer à cet égard, d'enjoindre à celui-ci par une décision provisoire, en attendant le résultat de l'examen de l'aide, de suspendre immédiatement le versement de celle-ci et de fournir à la Commission, dans le délai qu'elle fixe, tous les documents, informations et données nécessaires pour examiner la compatibilité de l'aide avec le marché commun (voir arrêt du 14 février 1990, Boussac, C-301-87, Rec. p. I-307, point 19).

27. À cet égard, la Commission soutient que, dans la mesure où il prévoyait des aides à la production d'amidon, le contrat de programme conclu avec Italgrani violait sa décision d'approbation du régime général italien des aides d'État. En 1987, elle aurait annoncé, dans une publication intitulée "La politique de concurrence dans l'agriculture", que les États ne pouvaient plus accorder d'aides dans les secteurs exclus des financements communautaires. Tel était le cas du secteur de l'amidon : le règlement (CEE) n° 355-77 du Conseil, du 15 février 1977, concernant une action commune pour l'amélioration des conditions de transformation et de commercialisation des produits agricoles (JO L 51, p. 1), aurait en effet mis fin aux financements communautaires pour les investissements dans ce secteur. Dès lors que l'article 9 de la décision d'approbation imposait aux autorités italiennes de respecter, lors de la mise en œuvre du régime général, les dispositions et règlements communautaires en matière de coordination des différents types d'aides dans le secteur de l'agriculture, les aides accordées par l'Italie à Italgrani devaient être considérées comme interdites par la réglementation communautaire et donc comme non couvertes par la décision d'approbation du régime général. Dans ces conditions, la Commission aurait été fondée à les traiter comme des aides nouvelles et à en ordonner la suspension.

28. Cet argument doit être écarté. Il ressort de la décision d'engagement de la procédure que la Commission a directement apprécié la compatibilité de l'aide à la construction d'une amidonnerie avec l'article 92 du traité. Elle a, en effet, relevé que, puisque les investissements concernant l'amidon étaient exclus du financement communautaire, elle ne pourrait autoriser des aides d'État dans ce domaine que si elles remplissaient les conditions de l'article 92 du traité. Elle a estimé que tel n'était pas le cas en l'espèce : d'une part, le secteur de l'amidon était caractérisé par une surcapacité importante et, d'autre part, la création d'une capacité de production supplémentaire d'environ 357 000 tonnes - dont il n'était pas démontré qu'elle trouverait des débouchés nouveaux - risquait de perturber le marché de l'industrie amidonnière (point E.1).

29. Il ressort également de la décision d'engager la procédure que la Commission a examiné d'autres aides prévues en faveur d'Italgrani à la lumière du traité et non par rapport à sa décision d'approbation du régime général. Ainsi, la Commission n'était disposée à reconnaître la compatibilité de l'aide à la production d'huile de graines avec l'article 92 du traité que dans la mesure où son intensité n'excédait pas 50 % et où des capacités de production équivalentes étaient abandonnées dans le même temps (point E.3). En ce qui concerne les aides à la production de semoules et de farines, elle a relevé qu'il y avait surcapacité structurelle de la production et que l'octroi d'aides dans ce domaine risquait de perturber les échanges entre les États membres (point E.4). Quant aux aides à la recherche, la Commission a considéré qu'elle ne disposait pas de renseignements suffisants pour apprécier leur compatibilité avec l'article 92 du traité (point F).

30. De ces constatations, il résulte que, en ordonnant la suspension de leur versement, la Commission a considéré les aides énumérées ci-dessus comme des aides nouvelles sans vérifier si elles n'étaient pas autorisées par la décision d'approbation du régime général.

31. En revanche, il ressort de la décision d'engager la procédure que la Commission a dûment constaté la contrariété de l'aide à la constitution de stocks de produits agricoles avec la décision d'approbation du régime général. Elle a en effet relevé que les autorités italiennes avaient accordé cette aide en violation des organisations communes de marchés que l'article 9 de la décision d'approbation du régime général leur imposait pourtant de respecter (point G).

32. La Commission soutient encore que, malgré des demandes répétées entre le 26 juillet et le 23 novembre 1990, le Gouvernement italien ne lui a pas fourni les informations nécessaires pour dissiper ses doutes quant à la conformité des aides accordées à Italgrani avec sa décision d'approbation du régime général italien. Le manque de collaboration des autorités italiennes l'aurait, dès lors, contrainte à ouvrir la procédure d'examen contradictoire des aides et à ordonner leur suspension.

33. Il y a lieu de relever que l'article 93, paragraphe 3, du traité n'habilitant la Commission à ordonner que la suspension du versement d'aides nouvelles, il ne suffit pas qu'elle ait de simples doutes sur la conformité d'aides individuelles avec sa décision d'approbation du régime d'aides.

34. Si la Commission a des doutes sur la conformité d'aides individuelles avec sa décision d'approbation du régime d'aides, il lui incombe d'enjoindre à l'État membre concerné de lui fournir, dans le délai qu'elle fixe, tous les documents, informations et données nécessaires pour se prononcer sur la conformité de l'aide litigieuse avec sa décision d'approbation du régime d'aides.

35. Au cas où l'État membre omet, nonobstant l'injonction de la Commission, de fournir les renseignements demandés, celle-ci peut, pour des raisons analogues à celles retenues dans l'arrêt du 14 février 1990, Boussac, précité, en ordonner la suspension et en apprécier directement la conformité avec le traité, comme s'il s'agissait d'une aide nouvelle.

36. En l'espèce, il ressort, certes, de la décision d'engagement de la procédure que la Commission a estimé que les informations fournies par les autorités italiennes ne lui permettaient pas de se prononcer sur la compatibilité avec sa décision d'approbation du régime général italien des aides à la production d'isoglucose (point E.2, dernier alinéa), et des aides à la formation (point H). Le Gouvernement italien conteste cependant formellement avoir manqué à son devoir de collaboration. De plus, la Commission n'a pas produit de document par lequel, avant d'ordonner la suspension des aides initialement prévues en faveur d'Italgrani, elle aurait enjoint aux autorités italiennes de lui fournir, dans un certain délai, toutes les données nécessaires pour contrôler la conformité de ces aides avec sa décision d'approbation du régime général italien.

37. Des considérations qui précèdent, il découle que, en ordonnant la suspension des aides à la construction d'une amidonnerie et d'une glucoserie, des aides à la production d'huile de graine, de semoule et de farines, des aides à la recherche et à la formation en raison de simples doutes quant à leur conformité avec sa décision d'approbation du régime général italien, la Commission a violé les paragraphes 2 et 3 de l'article 93 du traité. Seule échappe à ce constat l'injonction de suspendre l'aide à la constitution de stocks de produits agricoles, ainsi qu'il a été souligné ci-dessus au point 31.

38. La critique du Gouvernement italien ne porte que sur les dispositions de la décision d'engagement de la procédure qui suspendent l'octroi des aides initialement prévues en faveur d'Italgrani. Cette partie étant dissociable du reste de la décision, il y a lieu d'annuler seulement les points I.3 et I.4 de la décision, sauf dans la mesure où ils concernent l'aide à la constitution de stocks de produits agricoles. Le point I.3 ordonne la suspension du versement des aides et le point I.4 rappelle que les aides versées en dépit de cette injonction sont susceptibles de faire l'objet d'une demande de remboursement auprès de leurs bénéficiaires et que les dépenses communautaires qui seraient affectées par elles pourraient ne pas être prises en charge par le FEOGA.

Sur les dépens

39. Aux termes de l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens. La Commission ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Par ces motifs,

LA COUR,

Déclare et arrête :

1) Les points I.3 et I.4 de la décision de la Commission, qui a été notifiée au Gouvernement italien par lettre du 23 novembre 1990, d'engager la procédure prévue à l'article 93, paragraphe 2, premier alinéa, du traité à l'encontre de l'octroi par les autorités italiennes d'aides à la société Italgrani sont annulés, sauf dans la mesure où ils concernent l'aide à la constitution de stocks de produits agricoles.

2) La Commission est condamnée aux dépens.