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Décisions

CA Chambéry, ch. civ., 26 septembre 2001, n° 1998-00234

CHAMBÉRY

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Finalion (SA), Télésix (SA)

Défendeur :

Jeandet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Alberca

Conseillers :

M. Leclercq, Mme Nève de Mevergnies

Avoués :

SCP Buttin-Richard & Fillard, SCP Vasseur-Bollonjeon-Arnaud, Me Delachenal

Avocats :

Mes Lala- Bouali, SCP Plouton, Dolmazon.

TI Chambéry, du 20 mai 1997

20 mai 1997

Par déclaration au greffe du 23 janvier 1998, la SA Finalion fait régulièrement appel contre Madame Jeanine Jeandet d'un jugement du Tribunal d'instance de Chambéry du 20 mai 1997.

Par acte d'huissier du 23 septembre 1998, la SA Finalion a appelé en cause la SA Télésix.

Par deux actes sous seing privé du 2 novembre 1995, Madame Jeandet, qui tenait un commerce de fleuriste au centre hospitalier de Chambéry à l'enseigne "Serviflor ", a conclu, d'une part, avec la SA Finalion un contrat de location et d'autre part avec la SA Télésix un contrat de maintenance portant tous deux sur un lecteur de chèques de type Monotel fourni par la SA Télésix, pour un prix mensuel de 590,94 F TTC pour les deux contrats d'une durée de 48 mois.

La présentation du contrat de location conclu avec la SA Finalion prête à discussion, puisque le premier juge a estimé qu'il était inexistant.

À plusieurs reprises et peu de temps après la signature du contrat, Madame Jeandet chercha à en obtenir la résiliation auprès de la SA Télésix.

Celle-ci répondait que la résiliation anticipait l'exposait au paiement d'une indemnité contractuelle réclamée par l'établissement bancaire qui avait financé l'opération.

Madame Jeandet cessait de payer les loyers.

La SA Finalion prononçait par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 5 juin 1996, la résiliation du contrat de location et faute d'avoir obtenu paiement de sa créance, déposait une requête en injonction de payer entre les mains du juge d'instance de Chambéry, qui par ordonnance du 23 août 1996 condamnait Madame Jeandet à lui payer la somme principale de 22 980,27 F outre intérêts au taux légal à compter du 19 juillet 1996.

Madame Jeandet a formé opposition à cette ordonnance.

Le jugement déféré avait mis à néant l'ordonnance d'injonction de payer prise le 23 août 1996 à la demande de la SA Finalion et statuant à nouveau avait:

Débouté la SA Finalion de ses demandes et l'avait condamnée aux dépens.

La SA Finalion a fait signifier ses dernières conclusions dans les formes de l'article 954 du nouveau Code de procédure civile (rédaction du décret du 28 décembre 1998) le 17 avril 2001 pour voir:

- dire et juger recevable et bien fondé l'appel de la SA Finalion et y faisant droit:

- réformer en toutes ses dispositions le jugement déféré

Statuant à nouveau,

A titre principal:

- Condamner Madame Jeandet à payer à la société Finalion la somme principale de 25 337,40 F outre intérêts au taux légal à compter du 18 juin 1995.

- Donner acte à la SA Finalion de l'appel en cause de la société Télésix.

A titre subsidiaire,

- Si par extraordinaire la cour devait confirmer le jugement déféré.

- dire et juger que la société Télésix a commis une faute engageant sa responsabilité.

- La condamner alors à payer à la société Finalion une somme de 25 000 F à titre de dommages et intérêts

- La condamner également à relever garantir la SA Finalion de toutes condamnations qui pourraient être prononcées contre elle

- Condamner Madame Jeandet à payer la somme de 4 000 F au titre de l'article 700.

- Condamner Madame Jeandet aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de la SCP Buttin Richard Fillard, avoués, par application des dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.

Madame Jeanine Jeandet a fait signifier ses dernières conclusions dans les formes de l'article 954 du nouveau Code de procédure civile (rédaction du décret du 28 décembre 1998) le 8 juin 1999 pour voir confirmer le jugement déféré et en toute hypothèse, débouter la SA Finalion de ses demandes.

Elle lui demande paiement d'une indemnité de 3 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi que les dépens avec application des dispositions de l'article 699 du même Code.

La SA Télésix a fait signifier ses dernières conclusions dans les formes de l'article 954 du nouveau Code de procédure civile (rédaction du décret du 28 décembre 1998) le 19 mars 1999 pour voir :

- Constater que Madame Jeandet a contracté avec Télésix en qualité de commerçante et dans le cadre de l'exploitation de son activité commerciale,

- Constater qu'en qualité de commerçante, Madame Jeandet fait des actes de commerce indissociablement liés à son activité professionnelle, lesdits actes de commerce constituant en la vente à la clientèle,

- Constater qu'en conséquence la réception du paiement des marchandises vendues par Madame Jeandet constitue une activité en rapport direct avec son exploitation commerciale,

- Dire et juger que le contrat conclu entre la SA Télésix et Madame Jeandet est un contrat conclu entre professionnels dans le cadre de leur activité professionnelle et constitue un acte d'exploitation de la part de Madame Jeandet,

- Dire et juger qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que le contrat présente un rapport direct avec l'activité de Madame Jeandet exercée dans le cadre de son exploitation commerciale et professionnelle,

- Dire et juger applicable au contrat l'article L. 121-22-4° du Code de la consommation,

- Dire et juger en conséquence, que Madame Jeandet ne bénéficiait d'aucun délai de rétractation légal et qu'il n'y a lieu ni à nullité ni à annulation des contrats,

- Dire et juger que Madame Jeandet a valablement et en parfaite connaissance de cause signé le contrat de location accepté par Finalion,

- Dire et juger qu'elle ne peut dès lors contester son engagement vis à vis de cette société,

- Constater que Madame Jeandet ne peut prétendre avoir contracté à la légère ou dans de mauvaises conditions alors qu'il est établi qu'elle a porte la plus grande attention aux contrats qu'elle a souscrits;

en conséquence,

- Rejeter l'ensemble des griefs, moyens et demandes de Mme Jeandet,

- Rejeter comme non fondées toutes demandes qui pourraient être présentées contre la société Télésix,

- Condamner Madame Jeandet à payer à la société Télésix la somme de 10 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

- Condamner Madame Jeandet en tous les dépens distraits au profit de la SCP Vasseur-Bollonjeon- Arnaud, avoués associés, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.

Attendu que la discussion porte en premier lieu sur l'application en la présente espèce des dispositions de l'article L. 121-22 du Code de la consommation, que la SA Télésix soutient qu'elle pourrait se prévaloir des dispositions du 4e alinéa de ce texte selon lesquelles les opérations qui ont un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre d'une exploitation agricole, industrielle, commerciale ou artisanale ou de toute autre profession échappent à la législation protectrice de la vente à domicile.

Attendu que l'appréciation des capacités et des performances de cet appareil exige des connaissances en bureautique et en informatique, compétences qui dépassent celle d'une fleuriste.

Attendu qu'il en résulte que Madame Jeandet est en droit d'invoquer les dispositions de l'article L. 121-22 du Code de la consommation.

Attendu que Madame Jeandet soutient avoir fait part le 8 novembre 1995 à la SA Télésix de son désir de ne pas donner suite au contrat signé le 2 novembre 1995.

Attendu qu'il résulte de l'article L. 110-3 du Code de commerce (article 109 de l'ancien Code) qu'à l'égard des commerçants, les actes de commerce peuvent se prouvent par tous moyens.

Attendu que le contrat conclu avec la SA Télésix présente incontestablement un caractère commercial et intervient entre deux commerçants.

Attendu qu'il n'y a pas d'incompatibilité entre la mise en œuvre des dispositions protectrices du Code de la consommation et celles de la liberté de la preuve en matière commerciale.

Attendu qu'il résulte que Madame Jeandet doit être autorisée à rapporter la preuve par tous moyens de l'envoi de la lettre prévue par l'article L. 121-25 du Code de la consommation pour résilier le contrat conclu avec la SA Télésix.

Attendu que celle-ci ne contredit pas expressément l'affirmation de Madame Jeandet selon laquelle celle-ci lui adressait le 8 novembre une lettre simple pour lui signifier sa volonté de résilier le contrat et dont la copie figure à son dossier.

Attendu au contraire que les longues explications contenues dans les conclusions de la SA Télésix sur le caractère inapplicable à la présente espèce des dispositions de l'article 121-22 du Code de la consommation constituent un aveu implicite de la réception de cette lettre, puisque si Madame Jeandet ne l'avait pas envoyée, ces dispositions seraient en toute hypothèse inopérantes.

Attendu qu'il en résulte que le contrat est nul selon les dispositions de l'article 6 du Code civil, que le contrat de crédit n'est que l'accessoire du contrat principal conclu par Madame Jeandet avec la SA Télésix, que la SA Finalion doit en conséquence être déboutée de sa demande contre celle-ci.

Attendu qu'il convient en conséquence de débouter la SA Finalion de sa demande contre Madame Jeandet.

Attendu que la SA Finalion est bien fondée à exercer sur le fondement de l'article 1147 du Code civil un recours contre la SA Télésix avec laquelle était en relations contractuelles, qu'il convient de condamner celle-ci à payer à l'établissement bancaire la somme de 25 000 F que celui-ci sollicite à titre de dommages-intérêts, somme qui est inférieure à la créance de la banque contre Madame Jeandet.

Attendu qu'il n'est pas équitable de faire droit à la demande formée par Madame Jeandet sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile dès lors que celle-ci l'a dirigée contre la seule SA Finalion.

Attendu qu'il en va de même pour la SA Finalion dès lors que celle-ci n'a dirigé sa demande que contre Madame Jeandet.

Attendu que la SA Finalion et la SA Télésix seront condamnées solidairement aux dépens, que Télésix garantira Finalion de cette condamnation.

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement ; Donne acte à la SA Finalion de la mise en cause de la SA Télésix ; Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré ; Y ajoutant, Condamne la SA Télésix à payer la SA Finalion une somme de 25 000 F (vingt cinq mille francs) à titre de dommages et intérêts ; Déboute Madame Jeandet et la SA Finalion de leurs demandes d'indemnités sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Condamne solidairement la SA Finalion et la SA Télésix aux dépens de première instance et d'appel et dit que la SA Télésix garantira la SA Finalion de cette condamnation, avec faculté de recouvrer les dépens d'appel dans les formes de parties de 699 du nouveau Code de procédure civile au profit de la SCP Buttin-Richard et Fillard et de Maître Delachenal.