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Décisions

CA Aix-en-Provence, 8e ch. civ., 19 décembre 1991, n° 91-5762

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Baldizzone

Défendeur :

Société Alarme Détection Système (ADS) Protection (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Degrandi

Conseillers :

Mme Degrandi, M. Bachasson

Avoués :

SCP Blanc, SCP Sider

Avocats :

Mes Bernardi, Lesage.

T. com. Aix, du 18 mars 1991

18 mars 1991

Exposé du litige

Le 14 octobre 1988, M. Baldizzone a signé un bon de commande pour l'installation d'un système d'alarme à la suite de la visite à son domicile d'un sieur Pain qui s'est présenté au nom de la société ADS.

Le lendemain un technicien de cette entreprise a procédé à l'installation du matériel.

A la suite d'une plainte avec constitution de partie civile déposée par M. Baldizzone le Tribunal correctionnel de Marseille a, le 23 mai 1990, condamné par défaut M. Pain du chef de faux en écritures privées, usage dudit faux auprès de son employeur et infractions à la loi n° 72 1137 du 22 décembre 1972 relative à la protection des consommateurs en matière de démarchage et de vente à domicile, à 3 mois d'emprisonnement avec sursis et à verser à M. Baldizzone 8 000 F de dommages-intérêts et 3 000 F en application de l'article 475-1 du Code de procédure civil.

Par jugement du 18 mars 1991, le Tribunal de commerce d'Aix-en-Provence a rejeté la demande en paiement de ces sommes et des dépens (1 393,39 F) faite par celui-ci à l'encontre de la société ADS ès qualités de civilement responsable de M. Pain, a ordonné la restitution du matériel et a condamné le demandeur à régler à son adversaire 3 000 F d'indemnité de jouissance outre 2 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

M. Baldizzone a interjeté appel. Il sollicite la réformation, la condamnation de la société ADS à lui payer 11 393,39 F avec intérêts de droit à compter du 6 novembre 1990, 10 000 F pour résistance abusive et 7 500 F en application de l'article précitée du nouveau Code de procédure civile, en précisant qu'il ne s'oppose pas à la reprise de l'installation. Il fait valoir que les premiers juges ont méconnu l'autorité absolue de la chose jugée au pénal en ce qui concerne les infractions commises par M. Pain et ont écarté l'article 1384 du Code civil sans s'expliquer.

La société ADS demande la confirmation en ce qui concerne le rejet des prétentions de M. Baldizzone et réclame 35 461,140 F, avec intérêts au taux légal à compter du 5 octobre 1981 en paiement de l'alarme commandée et utilisée, subsidiairement sa restitution, 10 000 F pour usage, rétention et dépréciation de ce matériel, 5 000 F pour ses frais non répétibles.

Elle soutient qu'elle a été abusée par son préposé qui n'a agi que dans son intérêt personnel, qu'elle ne saurait en conséquence être tenue pour civilement responsable d'agissements qui lui ont été préjudiciables, que la décision correctionnelle ne lui est pas opposable, que le préjudice de l'appelant n'est pas démontré, qu'après usage du système d'alarme pendant plus de deux ans entraînant confirmation et notification de la commande à supposer celle-ci entachée de nullité, M. Baldizzone doit en payer le prix.

Motifs de la décision

L'appel est recevable en la forme.

Il n'est pas contesté que M. Pain, employé de la société ADS a agi dans le cadre de ses fonctions, de sorte que celle-ci est bien civilement responsable de son préposé,ce qui n'exclut pas son droit à lui demander réparation du dommage dont elle a été elle-même victime.

En revanche, elle est bien fondée à soulever l'inopposabilité de la décision correctionnelle à laquelle elle n'a pas été partie et à discuter en conséquence le préjudice allégué.

Les infractions commises par M. Pain ont contraint M. Baldizzone à saisir la justice pour préserver ses intérêts. Les tracas inhérentes au suivi de la procédure pénale et les frais engendrés ont causé un préjudice moral et financier certain à l'appelant, équitablement réparé par les sommes de 8 000 F et 3 000 F réclamées assorties des intérêts au taux légal à compter de ce jour.

La société ADS ne peut par ailleurs sérieusement invoquer la validité de la vente du matériel dont la nullité résulte expressément de l'article 2 de la loi n° 72 1137 du 22 décembre 1987.

Il lui appartient donc de voir reprendre le matériel qu'elle n'a jamais revendiqué avant la présente procédure et que M. Baldizzone tient à sa disposition, sans que puisse être reproché à ce dernier l'usage et la dépréciation du système d'alarme qui procèdent à la fois des faits dont elle est civilement responsable et de son propre désintérêt à l'égard du sort de ce bien.

L'appelant ne caractérisant pas la faute de son adversaire et ne cernant pas son préjudice à l'appui de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive, celle-ci sera rejetée.

Il serait cependant contraire à l'équité qu'il supporte l'intégralité des frais non répétibles qu'il a dû exposer dans le présent dossier tant en première instance qu'en appel.

Les dépens seront à la charge de la société ADS.

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement, En la forme, reçoit l'appel ; Au fond, réforme le jugement entrepris et statuant à nouveau, Condamne la société ADS (Alarme Détection Système Protection) ès qualités de civilement responsable de M. Pain, à verser à M. Baldizzone les sommes de huit mille francs (8 000 F) et trois mille francs (3 000 F) en réparation de ses préjudices moral et financier, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour, outre quatre mille francs (4 000 F) sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Rejette toutes autres prétentions ; Constate que le matériel d'alarme est à la disposition de ladite société au domicile de M. Baldizzone où elle devra venir le reprendre ; Condamne la société ADS aux dépens oui seront recouvrés par la SCP d'avoués Blanc sur son affirmation d'en avoir fait l'avance sans avoir reçu provision.