CA Rennes, 1re ch. A, 24 janvier 1995, n° 809-92
RENNES
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
An Oriant Immobilier (SARL), Me Duran (ès qual.)
Défendeur :
Donnart (époux)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Etienne
Conseillers :
M. Le Guillanton, Mme Trémoureux
Avoués :
SCP Castres, Colleu, SCP d'Aboville, de Moncuit.
La SARL An Oriant Immobilier qui a pour enseigne le nom "d'Agence n° 1" a reçu un mandat sans exclusivité de vendre une maison située à Lanester, 17 rue Emile Zola pour un prix de 350 000 F, sauf accord ultérieur.
Le 28 octobre 1991 elle obtenait pour ce bien de M. et Mme Donnart une offre d'achat de 310 000 F net vendeur, plus 24 500 F de commission à charge de l'acquéreur. Les vendeurs acceptaient cette offre, mais les acquérants se rétractaient par courrier du 4 novembre 1991 ce qui était accepté par les vendeurs.
Estimant qu'en dénonçant leurs engagements alors que l'offre d'achat était valable et accepté, les époux Donnart lui avait causé un préjudice, la SARL An Oriant Immobilier les a fait assigner en paiement de la somme de 24 500 F.
Par jugement du 6 août 1992 le Tribunal d'instance de Lorient a:
- débouté la SARL An Oriant Immobilier,
- débouté les époux Donnart de leur demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,
- condamné la SARL An Oriant Immobilier à payer aux époux Donnart la somme de 3 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu'à supporter les dépens.
La SARL An Oriant Immobilier a interjeté appel de cette décision. Me Duran en sa qualité de représentant des créanciers de son redressement judiciaire est intervenu en la cause en sollicitant qu'il lui soit alloué l'entier bénéfice des écritures précédemment déposées par la SARL An Oriant Immobilier.
Celle-ci a en effet sollicité la réformation du jugement et que la cour condamne conjointement et solidairement M. et Mme Donnart à lui verser 24 500 F à titre de dommages-intérêts avec intérêt de droit à compter du 12 mars 1992, date de l'exploit introductif d'instance ainsi que 8 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Elle fait essentiellement valoir que :
- les époux Donnart se sont engagés à lui payer la somme de 24 500 F à titre d'honoraires ; qu'acheteur et vendeurs ont signé le document valant vente, peu importe si ultérieurement ils ont convenu d'annuler cet acte et sites vendeurs, peu scrupuleux ont signé avec un autre acquéreur par l'intermédiaire d'une autre agence, ses honoraires lui restent dus.
Les époux Donnart demandent à la cour:
- de confirmer la décision, sauf en ce qu'elle ne leur a pas accordé de dommages-intérêts,
- de déclarer nulle la promesse d'achat et de vente signée par l'intermédiaire de l'agence,
- de débouter la SARL An Oriant Immobilier à leur payer 6 000 F à titre de dommages-intérêts et une somme de même montant en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Rappelant le déroulement des faits et notamment les conditions très particulières dans lesquelles l'agence leur a fait visiter la maison, ils exposent que:
- la promesse est nulle car la loi du 22 décembre 1972 relative à la vente à domicile n'a pas été respectée,
- l'article 1840-A du Code général des impôts n'a pas non plus été respecté,
- le droit à commission n'est pas établi la loi du 2 janvier 1970 interdit à l'agent de toucher une rémunération en l'espèce.
Il n'est pas dû de dommages-intérêts en l'état des termes du contrat prévoyant la restitution intégrale de la somme consignée en cas de non-réalisation.
La SARL professionnelle de l'immobilier bien que ces arguments aient été développés dans des courriers à son adresse avant l'audience a cru utile d'agir en justice puis d'interjeter appel. Cette procédure est abusive.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux conclusions figurant au dossier.
MOTIFS DE LA DECISION
Considérant que les époux Donnart exposent longuement et clairement dans leurs écritures les conditions dans lesquelles ils ont signé l'offre d'achat et mandaté l'agence n° 1 pour la présenter à l'acceptation du vendeur;
Considérant qu'ils exposent particulièrement qu'après leur avoir fait visiter ce bien dans la pénombre sans ouvrir les volets, l'agent immobilier s'est rendu à leur domicile après 20 H 30 pour leur faire régulariser une offre d'achat à un prix inférieur au prix du vendeur, en leur indiquant qu'ils pouvaient revenir sur leur décision ;
Considérant que la SARL An Oriant ne conteste pas l'exactitude de ce récit ;
Considérant que ce faisant la SARL An Oriant Immobilier a effectué un démarchage en vue d'une prestation de service, opération entrant dans le champ de la loi du 22 décembre 1972 qui s'applique "aux biens" terme qui inclut non seulement les meubles mais les immeubles ;
Considérant qu'il résulte de l'examen du document produit aux débats signé par les intimés à l'issue de ce démarchage que les dispositions d'ordre public de la loi du 22 décembre 1972 n'ont pas été respectées, puisque notamment ne figure pas dans ce document de clause relative au délai de réflexion du souscripteur ;
Considérant qu'en application de l'article 2 de cette même loi le document ainsi signé par les époux Donnart était nul et ne pouvait produire aucun effet ;
Considérant toutefois qu'il n'est pas établi qu'en présentant en justice ses prétentions la SARL An Oriant ait eu une attitude fautive;
Considérant que pour ces motifs substitués à ceux du premier juge, il y a lieu de confirmer la décision qui a débouté la SARL An Oriant Immobilier de ses demandes, sans qu'il soit nécessaire à la solution du litige d'examiner les autres moyens des parties ;
Considérant que les dépens d'appel seront à la charge de l'appelant; que l'équité n'impose pas que pour la cause d'appel il soit fait droit aux demandes formulées au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Par ces motifs : Substitués à ceux du premier juge, LA COUR, Donne acte à Me Duran de son intervention; Confirme la décision entreprise ; Dit n'y avoir lieu pour la cause d'appel à application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile; Condamne la SARL An Oriant Immobilier aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.