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Décisions

Cass. crim., 31 mai 1995, n° 94-83.779

COUR DE CASSATION

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Association réseau des émetteurs français

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M Le Gunehec

Rapporteur :

M. Jorda

Avocat général :

M. Perfetti

Avocats :

Me Guinard, SCP Waquet, Farge, Hazan

TGI Chaumont, ch. corr., du 14 févr. 199…

14 février 1994

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par l'Association réseau des émetteurs français, partie civile, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Dijon, chambre correctionnelle, du 1er juillet 1994, qui, après relaxe de Jean-Lou D du chef de publicité de nature à induire en erreur, l'a déboutée de ses demandes ; - Vu les mémoires produits en demande et en défense ; - Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 121-3 du nouveau Code pénal, 339 de la loi d'adaptation du 16 décembre 1992, 44 de la loi du 27 décembre 1973, 1er de la loi du 1er août 1905, 485, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a relaxé D du chef de publicité fausse ou de nature à induire en erreur, débouté la demanderesse, partie civile, de ses demandes ;

"aux motifs que à la date des faits, la mauvaise foi n'était pas un élément constitutif de l'infraction de publicité mensongère ; "qu'il résulte de l'article 121-3 du Code pénal en vigueur à compter du 1er mars 1994 et de l'article 339 de la loi d'adaptation du 16 décembre 1992 (et non pas du 16 novembre 1992 comme indiqué par erreur par l'arrêt), qu'il n'y a pas de délit sans intention de le commettre, imprudence ou négligence ; "qu'il n'est en l'espèce pas établi que le prévenu, qui a fait paraître une annonce dans une revue réservée à des spécialistes "Radio CB Magazine" ait voulu, en omettant de préciser que les postes visés par la publicité ne pouvaient être utilisés sans obtention d'un certificat d'opérateur, tromper les consommateurs intéressés par ce type d'appareil ; "qu'il appartient aussi au consommateur de s'enquérir comme doivent le faire par exemple les utilisateurs de certains types de motocyclettes pour lesquels un permis de conduire est nécessaire, des formalités administratives à entreprendre pour utiliser des appareils sophistiqués pour lesquels chacun sait que la réglementation est à la fois précise et touffue ; "qu'à défaut d'intention de tromper le consommateur par une publicité incomplète, le prévenu doit être relaxé des faits qui lui sont reprochés (arrêt p. 5 et 6) ;

"alors qu'il résulte de l'article 339 de la loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992 que les délits non intentionnels prévus par des textes autres que le nouveau Code pénal sont constitués s'il est rapporté la preuve d'une imprudence ou d'une négligence imputable au prévenu ; "qu'en l'espèce, il est constant que D, président directeur général d'une société spécialisée dans la vente de récepteurs portatifs, a fait paraître des publicités vantant les qualités de plusieurs appareils, sans préciser que leur utilisation était, sous peine d'amende, subordonnée à la délivrance d'un certificat d'opérateur, qui n'est délivré qu'après avoir satisfait aux épreuves d'un examen dont les modalités sont définies par un arrêté du 1er décembre 1983 ;

"que, dès lors, en se déterminant par la seule circonstance qu'il n'était pas établi que le prévenu ait voulu tromper les consommateurs intéressés par ce type d'appareil, pour en déduire que le prévenu devait être relaxé, à défaut d'intention frauduleuse, sans rechercher si, en omettant délibérément de mettre en garde les consommateurs quant aux conditions d'utilisation des récepteurs et, partant, en exposant ceux-ci à une condamnation pour non-respect de la réglementation en vigueur, le prévenu, professionnel qualifié n'avait pas nécessairement commis une imprudence ou une négligence, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 44 de la loi du 27 décembre 1973 et 339 de la loi du 16 décembre 1992" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que la société que préside Jean-Lou D a, dans une revue, fait paraître, en septembre 1991, une annonce publicitaire concernant des appareils émetteurs-récepteurs sans faire connaître aux consommateurs que ces appareils ne pouvaient être utilisés que par des radio-amateurs dûment autorisés ; que Jean-Lou D est poursuivi pour publicité de nature à induire en erreur ;

Attendu que, pour relaxer le prévenu et débouter l'Association "Réseau des Emetteurs Français (AREF), partie civile, de ses demandes, la juridiction du second degré relève que le prévenu a fait paraître la publicité litigieuse "dans une revue réservée à des spécialistes" ; qu'elle ajoute qu'il appartient au consommateur "de s'enquérir des formalités administratives à entreprendre" pour utiliser les appareils litigieux ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, d'où il résulte que la publicité litigieuse n'avait aucun caractère trompeur ou ambigu, -et, abstraction faite de motifs surabondants, voire erronés, relatifs à l'élément moral du délit de publicité de nature à induire en erreur-, la cour d'appel a donné une base légale à sa décision ; d'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette le pourvoi.