CA Nancy, 4e ch., 13 novembre 2001, n° 01-00384
NANCY
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Défendeur :
Ministère public, CGA de Lorraine, FNAB, GAB des Vosges, UFC Que Choisir, Pauhle
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Jurd
Substitut :
au Procureur: M. Sudre
Conseillers :
M. Magnin, Mlle Muzzin
Avocats :
Mes Joubert, d'Ivernois, Kihl.
RAPPEL DE LA PROCÉDURE:
LE JUGEMENT:
Le tribunal, par jugement du 2 mai 2000 contradictoire, a poursuivi B Gilles pour:
Tromperie sur la nature, la qualité, l'origine ou la quantité d'une marchandise, courant 1997 à 1998, à Saint-Ouen-Les-Parey, infraction prévue par l'article L. 213-1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 213-1, L. 216-2, L. 216-3 du Code de la consommation
Exécution d'un travail dissimule, courant 1997 à 1998, à Saint-Ouen-Les-Parey, infraction prévue par les articles L. 362-3, L. 324-9, L. 324-10. L. 324-11, L. 320, L. 143-3 du Code du travail et réprimée par les articles L. 362-3, L. 362-4, L. 362-5 du Code du travail;
Faux: altération frauduleuse de la vérité dans un écrit, courant 1996 à 1998, à Saint-Ouen-Les-Parey, infraction prévue par l'article 441-1 du Code pénal et réprimée parles articles 441-1 al. 2, 441-10, 441-11 du Code pénal;
Abus des biens ou du crédit d'une SARL par un gérant a des fins personnelles, courant 1996 à 1998, à Saint-Ouen-Les-Parey, infraction prévue par les articles L. 241-3 4°, L. 241-9 du Code de commerce et réprimée par l'article L. 241-3 du Code de commerce
Faux dans un document administratif constatant un droit, une identité ou une qualité, le 24 juillet 1997, a Saint-Ouen-Les-Parey, infraction prévue par les articles 441-2 al. 1, 441-1 al. 1 du Code pénal et réprimée par les articles 441-2 al. 1, 441-10, 441-11 du Code pénal
Usage de faux dans un document administratif constatant un droit, une identité ou une qualité, le 24 juillet 1997, à Saint-Ouen-Les-Parey, infraction prévue par les articles 441-2 al. 2, al. 1, 441-1 al. 1 du Code pénal et réprimée par les articles 441-2 al. 1, 441-10, 441-11 du Code pénal
vente publique de bovin sans vérification, par autorité chargée de la vente, du document d'accompagnement valide et du certificat sanitaire conforme, le 24 juillet 1997, à Saint-Ouen-Les-Parey, infraction prévue par les articles 14, 3 A 7, 20 de l'Arrêté ministériel du 08-08-1995, l'article 2 al. 1 du Décret 63-136 du 18/02/1963 et réprimée par l'article 2 al. 1 du Décret 63-136 du 18-02- 1963
Exécution d'un travail dissimule, de mai 1997 au 1 octobre 1997, à Saint-Ouen-Les-Parey, infraction prévue par les articles L. 362-3, L. 324 9, L. 324-10, L. 324-11, L. 320, L. 143-3 du Code du travail et réprimée par les articles L. 362-3, L. 362-4, L. 362-5 du Code du travail
et, a statué comme suit : jonction procédures 97012346, 99001413, 99009693
Relaxe Monsieur B Gilles du chef de négoce paille et bovins et d'abus de biens sociaux et le déclare coupable du surplus;
Condamne B Gilles à la peine de 2 ans d'emprisonnement dont 18 mois avec sursis simple.
Le condamne à 2 amendes de 2 000 F pour les contraventions connexes;
Ordonne confiscation des scellés;
Sur l'action civile:
Condamne B Gilles à faire publier à ses frais l'intégralité du jugement dans les revues "Biofis" et "Le Sol à Table", le coût maximum de ces deux publications étant limitée globalement à 250 000 F;
Ordonne l'exécution provisoire de cette disposition;
Reçoit L'union fédérale des consommateurs d'Epinal et ses environs, l'UFC Que Choisir en sa constitution de partie civile,
Déclare Monsieur B responsable du préjudice subi par l'Union Fédérale des Consommateurs d'Epinal et ses environs, L'UFC Que Choisir;
Le condamne à payer à l'Union Fédérale des consommateurs d'Epinal et ses environs, l'UFC Que Choisir la somme de 30 000 F à titre de dommages-intérêts;
Le condamne à verser à l'Union Fédérale des Consommateurs d'Epinal et ses environs, L'UFC Que Choisir, au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale la somme de 3 000 F;
Ordonne l'exécution provisoire en ce qui concerne les dispositions civiles;
Reçoit la Fédération Nationale des Agriculteurs Biologiques des Régions de France FNAB, en sa constitution de partie civile;
Déclare Monsieur Gilles B responsable du préjudice subi par la Fédération Nationale des Agriculteurs Biologiques des Régions de France FNAB;
Le condamne à payer à la Fédération Nationale des Agriculteurs Biologiques des Régions de France FNAB, la somme de 100 000 F à titre de dommages-intérêts;
Le condamne à verser à la Fédération Nationale des Agriculteurs Biologiques des Régions de France - FNAB, au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, la somme de 3 000 F;
Ordonne l'exécution provisoire en ce qui concerne les dispositions civiles;
Reçoit le Centre des Groupements d'Agrobiologistes de Lorraine CGA de Lorraine en sa constitution de partie civile,
Déclare Monsieur Gilles B responsable du préjudice subi par le Centre des Groupements d'Agrobiologistes de Lorraine CGA de Lorraine;
Le condamne à payer au Centre des Groupements d'Agrobiologistes de Lorraine CGA de Lorraine la somme de 60 000 F à titre de dommages-intérêts,
Le condamne à verser au Centre des Groupements d'Agrobiologistes de Lorraine CGA de Lorraine au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale la comme de 3 000 F.
Ordonne l'exécution provisoire en ce qui concerne les dispositions civiles.
Reçoit le Groupement des Agrobiologistes des Vosges GAB 88 en sa constitution de partie civile;
Déclare Monsieur Gilles B responsable du préjudice subi par le Groupement des Agrobiologistes des Vosges GAB 88;
Le condamne à payer au Groupement des Agrobiologistes des Vosges GAB 88 la somme de 20 000 F à titre de dommages-intérêts;
Le condamne à verser au Groupement des Agrobiologistes des Vosges GAB 88, au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, la somme de 3 000 F
Ordonne l'exécution provisoire en ce qui concerne les dispositions civiles, Reçoit Monsieur Gilles Pauhle au soutien de l'action publique.
LES APPELS:
Appel a été interjeté par:
M. le Procureur de la République, le 5 mai 2000 contre Monsieur B Gilles Monsieur B Gilles, le 5 mai 2000 contre Monsieur Pauhle Gilles, FNAB Fédération Nationale Des Agriculteurs Biologiques Des Régions De France, CGA de Lorraine Centre des Groupements d'Agrobiologistes de Lorraine, GAB des Vosges Groupement des Agrobiologistes des Vosges, UFC Que Choisir Union Fédérale des Consommateurs "Que Choisir" FNAB Fédération Nationale des Agriculteurs Biologiques des Régions de France, le 12 mai 2000 contre Monsieur B Gilles GAB des Vosges Groupement des Agrobiologistes des Vosges, le 12 mai 2000 contre Monsieur B Gilles CGA de Lorraine Centre des Groupements d'Agrobiologistes de Lorraine, le 12 mai 2000 contre Monsieur B Gilles UFC Que Choisir Union Fédérale des Consommateurs "Que Choisir", le 12 mai 2000 contre Monsieur B Gilles
Sur ce, LA COUR:
I. EN LA FORME
Attendu que les appels du prévenu, du Ministère public et des parties civiles, réguliers en la forme, ont été enregistrés dans les délais légaux;
Qu'il y a lieu de les déclarer recevables;
Attendu qu'à l'audience de la cour, la partie civile UFC Que Choisir, ne se présente pas ni personne pour elle bien que régulièrement citée ; qu'il échet de donner défaut contre elle par application des dispositions des l'article 487 du Code de procédure pénale;
II. AU FOND:
Faits et procédure:
Attendu que Monsieur Gilles B, gérant de l'EARL du Gaffey, exploitation agricole d'élevage de bovins "bio", située à Saint-Ouen-Les-Parey (88) a été cité à comparaître devant le Tribunal correctionnel d'Epinal, des chefs de tromperie sur la qualité substantielle d'une marchandise, d'exécution d'un travail dissimulé, d'altération frauduleuse de la vérité dans un écrit, d'abus des biens ou du crédit d'une SARL, de faux dans un document administratif, d'usage de faux, et de non-présentation de documents sanitaires;
Que ces faits ont donné lieu à trois procédures distinctes, jointe par le jugement du Tribunal correctionnel d'Epinal du 2 mai 2000, qui a relaxé Monsieur B des chefs de négoce de paille et bovins et abus de biens sociaux, l'a déclaré coupable pour le surplus et l'a condamné à 2 ans d'emprisonnement dont 18 mois avec sursis et à deux amendes de 2 000 F chacune pour les contraventions connexes, et a ordonné la confiscation des scellés;
Attendu que Monsieur B, le Ministère public, ainsi que le GAB 88, la FNAB, le CGA de Lorraine et l'UFC Que Choisir, ont relevé appel de ce jugement;
Que devant la cour, Monsieur B a déposé des conclusions à l'encontre du Ministère public, de la FNAB, du CGA, Lorraine et du GAB 88, ainsi qu'à l'encontre de l'UFC Que Choisir, conclusions aux termes desquelles il formule les demandes suivantes:
- à l'encontre du Ministère public:
1°) Constater qu'il n'a été procédé en l'état à aucune instruction, l'ordonner en conséquence et désigner pour ce faire l'un des membres de la cour aux fins de procéder à:
- l'examen contradictoire des éléments saisis et placés sous scellés,
- l'audition des divers témoins dont les dépositions ont été recueillies par les gendarmes et leur confrontation avec le prévenu.
2°) En tout état de cause, s'il n'était pas fait droit à cette demande de mesure d'instruction:
- constater que la cour ne dispose pas, dans le dossier qui lui est aujourd'hui soumis, des documents qui y sont visés, comme ayant été saisis et placés sous scellés, ordonner en conséquence le renvoi, pour transmission de l'intégralité desdits scellés, par le greffe du Tribunal correctionnel d'Epinal, ordonner encore,
- la transmission par la DGCCRF des Vosges du rapport qui aurait été établi par ses services, relativement aux faits objet des poursuites du chef de tromperie,
- l'audition, à l'audience de renvoi, de Monsieur Soulie (DGCCRF 88) et de Madame Morviller (DDAF 88),
- à l'encontre de l'UFC Que Choisir:
Constater que l'UFC d'Epinal, et ses environs UFC Que Choisir ne justifie:
- ni de son existence légale,
- ni d'un agrément en cours de validité,
- ni de l'identité et la qualité de l'organe actuellement habilité à la représenter en justice,
- ni de l'existence et du quantum d'un préjudice en relation avec les faits poursuivis.
Infirmer en conséquence le jugement déféré et, statuant à nouveau:
- déclarer irrecevable et mal fondée la constitution de partie civile de l'UFC d'Epinal et ses environs UFC Que Choisir,
- la débouter de toutes ses demandes, fins et prétentions,
- la condamner aux dépens de son action.
- à l'encontre des autres parties civiles
Constater que la Fédération Nationale des Agriculteurs Biologiques des Régions de France (FNAB), le Centre des Groupements d'Agrobiologistes de Lorraine (CGA de Lorraine) et le Groupement des Agrobiologistes des Vosges (GAB 88) ne justifient:
- ni de leur forme juridique, ni de leur existence légale,
- ni de l'identité et de la qualité de l'organe actuellement habilité à les représenter en justice,
- ni de l'existence et du quantum d'un préjudice propre, en relation avec les faits poursuivis.
Infirmer en conséquence le jugement déféré et, statuant à nouveau:
- déclarer irrecevables et mal fondées leurs constitutions de parties civiles,
- les débouter de toutes leurs demandes, fins et prétentions,
- les condamner aux dépens de leurs actions.
Qu'en ce qui les concerne, la Fédération des Agriculteurs Biologiques des Régions de France (FNAB), le Centre des Groupements d'Agrobiologistes de Lorraine (CGA), et le Groupement des Agrobiologistes des Vosges (GAB 88) concluent ainsi:
- condamner le prévenu selon les réquisitions du Ministère public,
- le condamner à la publication de l'arrêt à titre de réparation pénale suivant l'article L. 121-4 du Code de la consommation dans Biofil et Le Sol à la Table,
- dire recevable et bien fondée la constitution de partie civile de la FNAB, du CGA de Lorraine et du GAB 88,
- en conséquence, réformer le jugement et condamner le prévenu à indemniser intégralement chacune des parties civiles des préjudices subis par le versement de dommages et intérêts à hauteur des sommes suivantes:
1°) FNAB
- 150 000 F à titre de dommages et intérêts pour préjudice matériel,
- 30 000 F à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,
2°) CGA de Lorraine
- 100 000 F à titre de dommages et intérêts pour préjudice matériel,
- 10 000 F à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,
3°) GAB 88
- 30 000 F à titre de dommages et intérêts pour préjudice matériel,
- 10 000 F à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,
- condamner Monsieur B à verser à chacune des parties civiles une indemnité complémentaire de 10 000 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale outre le paiement des entiers dépens d'instance;
Que Monsieur Gilles Pauhle, autre partie civile, non appelant, sollicite le paiement de la somme de 5 000 F en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale;
MOTIFS DE L'ARRÊT:
I. Sur la demande de mesures d'instruction formulée par le prévenu:
Attendu qu'il convient tout d'abord de relever, que Monsieur B a été cité pour l'audience du 29 février 2000, par le Procureur de la République près le Tribunal de grande instance d'Epinal, suivant exploit d'huissier du 30 juin 1999 et 17 février 2000 ; que par ailleurs, à l'audience du 29 février 2000, devant le Tribunal correctionnel d'Epinal, Monsieur B était assisté d'un avocat; que les droits de la défense n'ont donc nullement été méconnus à l'égard de Monsieur B,
Attendu que le conseil de Monsieur B devant la cour, sollicite l'examen contradictoire des pièces mises sous scellés ; qu'il n'est cependant pas contesté que le conseil du prévenu à pris connaissance des pièces sous scellés au greffe du Tribunal correctionnel d'Epinal, et était donc en mesure de les discuter ; qu'au demeurant, le conseil du prévenu n'indique nullement les scellés au sujet desquels se rapporte sa demande d'examen;
Qu'au sujet de sa demande tendant à l'audition de divers témoins déjà entendus au cours de l'enquête de gendarmerie, et des personnes membres du service de la DGCCAF et de la DDAF qui ont dressé les procès-verbaux ayant servi de support à l'enquête, le conseil du prévenu n'explicite nullement le bien fondé et l'opportunité d'une telle mesure d'instruction qui n'apportait aucun élément nouveau aux faits de la cause;
Qu'il y a lieu enfin de relever que devant le tribunal correctionnel, Monsieur B était assisté d'un conseil et n'a jamais soulevé de moyens tendant à faire établir une quelconque atteinte aux droits de la défense ou au caractère contradictoire des débats et de l'instruction de l'affaire à l'audience; qu'il résulte au contraire des actes de la procédure de première instance, que Monsieur B a été longuement entendu et a pu librement s'exprimer sur tous les chefs de poursuites retenus contre lui;
Attendu en conséquence de tout ce qui précède, qu'il y a lieu de rejeter l'ensemble des mesures d'instruction sollicitées par le prévenu à hauteur d'appel;
II. Sur la culpabilité:
1°) Sur l'exercice d'un travail dissimulé:
Attendu qu'il résulte de l'enquête de gendarmerie, que Monsieur Gilles Pauhle qui a été victime d'un accident du travail fin septembre 1997, a travaillé pour Monsieur B sans avoir été déclaré et sans avoir reçu de bulletins de salaires pour la période du 6 mai au 1er octobre 1997;
Que la réalité du travail effectué par Monsieur Pauhle pour le compte de l'EARL du Gaffey, et pour le compte de Monsieur B personnellement, entre le 6 mai et le 1er octobre 1997 est établie tant par les mouvements de sommes versées sur le compte bancaire de Monsieur Pauhle, que par les témoignages de Monsieur Higy, et Clément et du maire de Sauville, qui ont déclaré avoir vu Monsieur Pauhle travailler sur des chantiers de Monsieur B, ainsi qu'à la ferme;
Attendu que l'enquête de gendarmerie a également permis d'établir que Monsieur B avait employé irrégulièrement, soit pour son propre compte soit pour celui de l'EARL du Gaffey, de 1997 à 1998, Monsieur Clément, Thiébaut, Higy et Fava, lesquels ont effectué divers travaux sans recevoir de fiche de paie, et sans déclaration préalable à l'embauche;
Que devant la cour, Monsieur B ne nie plus la réalité des faits ainsi relatés;
Que par les motifs ci-dessus, et ceux non contraires des premiers juges que la cour adopte, il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a retenu la culpabilité de Monsieur B du chef d'exercice d'un travail dissimulé;
2°) Sur les faux documents et leur usage:
Attendu que par des motifs pertinents que la cour adopte, c'est à bon droit que le tribunal a également retenu la culpabilité de Monsieur B pour faux et usage; que le jugement déféré sera donc confirmé de ce chef;
3°) Sur le défaut de présentation des documents sanitaires d'accompagnement (DAB):
Attendu que par des motifs pertinents que la cour adopte, c'est encore à bon droit que le tribunal a retenu la culpabilité de Monsieur B pour défaut de présentation des documents ci-dessus ; que le jugement déféré sera donc également confirmé de ce chef;
4°) Sur les fausses factures:
Attendu que par des motifs pertinents que la cour adopte, c'est à bon droit que le tribunal a retenu la culpabilité de Monsieur B pour avoir établi de fausses factures; que le jugement déféré sera donc également confirmé de ce chef;
Qu'il suffit de rappeler qu'au cours de l'enquête de gendarmerie, Monsieur B a reconnu avoir établi les 16 fausses factures retenues contre lui;
5°) Sur les faits de tromperie sur les qualités substantielles des bovins vendus à l'abattoir ou aux consommateurs contractants:
Attendu qu'il résulte tant de l'enquête de gendarmerie que de l'enquête menée par les services de la DDCCAF, que courant 1994, l'EARL du Gaffey gérée par Monsieur B, a décidé de convertir son exploitation agricole conventionnelle en exploitation biologique,
Qu'au cours de cette conversion, Monsieur B a perçu pour une durée de 5 ans, des aides d'un montant de 126 930 F par an;
Que le 26 septembre 1994, l'EARL du Gaffey a été contrôlée par la société Ecocert, organisme habilité qui atteste qu'au titre de la "terre en première année de conversion vers l'agriculture biologique", 181,33 ha de prairies permanentes ont reçu cette certification qu'en outre, à cette surface réservée l'agriculture biologique, il faut ajouter 3 ha de prairies naturelles conservées à titre conventionnel;
Attendu qu'au titre des années 1997 et 1998 retenues par les termes de la prévention, l'EARL du Gaffey gérée par Monsieur B, a été licenciée par la société Ecocert du 16 février 1996 au 15 mars 1997, pour 181,32 ha de prairie permanente, puis du 20 février 1997 au 15 mars 1998 pour 181,32 ha de prairie permanente et 110 têtes de vaches allaitantes de race Charolaise, puis du 24 février 1998 au 15 mars 1999, pour 4,23 ha de blé tendre représentant 148,05 quintaux, 177,09 ha de prairie permanente, 4 têtes de boeufs Charolais de 1998, 34 têtes de génisses Charolaises de 1996, 5 têtes de taureaux Charolais, 41 têtes de boeufs Charolais de 1997, 47 têtes de broutards Charolaises de 1998, 52 têtes de génisses Charolaises de 1997, et 87 têtes de vaches allaitantes Charolaises, soit un cheptel bio de 317 têtes;
Attendu qu'il convient de rappeler, que l'élevage et l'agriculture biologiques, imposent au licencié, le respect de certaines normes d'élevage et de productions définies par le règlement CEE n° 2092- 91, modifié, du conseil du 24 juin 1991;
Or attendu que si ces normes ont été respectées par l'EARL du Gaffey en ce qui concerne les produits fournis par les terres (prairies et céréales) en revanche, de nombreuses irrégularités ont été constatées en ce qu'il concerne l'élevage proprement dit, à savoir:
- vente d'animaux avec la certification "bio" alors que ces animaux étaient engraissés sur une exploitation conventionnelle,
- récupération des boucles et documents d'accompagnement bovins afin d'introduire des animaux sur l'exploitation, en échappant à tout contrôle,
- non-déclaration d'achat d'animaux non biologiques, ce qui fausse le pourcentage toléré pour le renouvellement du cheptel,
- tenue irrégulière du cahier d'étable, ce qui ne permet pas une bonne traçabilité de la vie des bovins,
- non-respect entre les bovins de l'espace prévu dans les stabulations,
- absence de surface bétonnée d'exercice,
- taureaux laissés en état de zéro pâturage, ce que le cahier des charges interdit,
- absence de désinfection de bâtiments datant de 1962,
- animaux laissés dans un état de saleté excessif,
- non-déclaration d'abattage d'une bête sur la ferme, et non-respect des conditions d'hygiène,
- présence d'un bouc non bio parmi les bovins bio, alors que l'hygiène impose une grande vigilance quant à l'introduction d'autres animaux,
- absence de tenue du carnet d'élevage, s'agissant de l'inventaire des animaux,
- parties relatives avec parcelles de stockage des fumiers non remplies en temps utile,
- non-signalement de 7 animaux sortis alors qu'ils étaient chez un agriculteur non bio pour engraissement,
- absence d'abris sur certaines pâtures.
Qu'il ressort ainsi de l'ensemble des irrégularités ci-dessus constatées, que Monsieur B a vendu des animaux avec la certification "bio", alors que ceux-ci étaient élevés sur son exploitation au mépris des règles de l'élevage biologiques;
Que Monsieur B a par ailleurs vendu des animaux non bio, alors que cela lui était interdit, du fait qu'il détenait la certification "bio" pour des propres bovins;
Que sur tous les points ci-dessus, Monsieur B est mal venu à minimiser, voir même à décliner sa responsabilité en arguant de son ignorance dans la mesure où la région Lorraine organise fréquemment des formations permettant aux agriculteurs d'éviter toute infraction au respect des règles qu'ils se sont engagés à appliquer;
Attendu qu'il résulte de tout ce qui précède, que les faits de tromperie reprochés à Monsieur B sont donc parfaitement caractérisés; que le jugement entrepris sera donc également confirmé de ce chef;
6°) Sur les abus de biens sociaux:
Attendu qu'il ressort de l'enquête, que Monsieur B a encaissé de l'argent revenant à l'EARL du Gaffey, sur son compte personnel, soit pour son profit personnel, soit pour les membres de sa famille;
Que c'est ainsi qu'il a remis des chèques clients destinés à l'EARL du Gaffey, à des tiers, en l'espèce, à Madame Sylvie Brasseur épouse Thomas pour un montant de 241 809 F, à Mademoiselle Christine Kost pour un montant de 22 228,15 F, et à des membres de sa famille pour un montant de 181 240,39 F;
Que devant les enquêteurs, Monsieur B a déclaré:
"Je reconnais avoir pris connaissance de l'intégralité de votre dossier relatif tant aux fausses factures qu'aux détournements d'activité ou aux abus de biens sociaux. Je maintiens que je n'ai remis des chèques qu'aux personnes avec qui j'avais personnellement des dettes ou des affinités.
J'ai fait cela dans le seul souci d'améliorer le confort de ma famille et celui de ma société. Mes malversations n'ont causé de préjudice à personne de mon entourage. Il n'y a que des taxes qui n'ont pas été prélevées.
Je tiens à préciser que je dois rembourser une dette importante vis-à-vis de ma mère, de ma soeur et de mon grand-père. Cette situation financière délicate m'a contraint à user de ce genre de stratégie. Je dois encore 400 000 F à ma mère - 250 000 F à ma soeur et 40 000 F à mon grand-père. Dès à présent je m'engage à conduire les affaires de ma société avec beaucoup plus de rectitude".
Attendu que les faits ci-dessus sont en réalité constitutifs, non pas d'un abus de bien social, mais d'un abus de confiance dans la mesure où une partie des fonds appartenant à l'EARL du Gaffey a été détournée au profit de tierces personnes ; qu'il y a donc lieu de requalifiés les faits d'abus de biens sociaux, en abus de confiance, et de retenir Monsieur B dans les liens de la prévention de ce chef
7°) Sur l'activité de marchand de paille et de bestiaux:
Attendu que par des motifs pertinents que la cour adopte, c'est à bon droit que le tribunal a relaxé Monsieur B des chefs ci-dessus;
Que le jugement déféré sera donc confirmé sur ce point;
III. Sur la peine
Vu l'alinéa 2 de l'article 132-19 du Code pénal;
Attendu que la nature et la gravité des faits, d'une part, les données existant sur la personne du prévenu, d'autre part, rendent nécessaire le prononcé d'une peine d'emprisonnement ferme à son égard;
Attendu que, compte tenu de la nature et de la gravité des faits, d'une part, et des données existant sur la personne du prévenu, d'autre part, le tribunal a exactement apprécié la sanction nécessaire et qu'il y a donc lieu de confirmer les peines prononcées;
IV. Sur les constitutions de parties civiles
Attendu qu'il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a reçu Monsieur Gilles Pauhle en sa constitution de partie civile au soutien de l'action publique; qu'il y a lieu par ailleurs de condamner Monsieur B à lui verser la somme de 3 000 F en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale;
Attendu que par des motifs pertinents que la cour adopte, c'est à bon droit que le tribunal a déclaré recevable en la forme et bien fondée la constitution de partie civile de l'UFC Que Choisir et a condamnée le prévenu à lui verser la somme de 30 000 F à titre de dommages et intérêts, outre celle de 3 000 F en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ; que le jugement déféré sera donc confirmé de ce chef;
Attendu qu'en ce qui concerne, la Fédération Nationale des Agriculteurs Biologiques des Régions de France, le Centre de Groupement d'Agrobiologistes de Lorraine, et le Groupement des Agrobiologistes, il résulte des pièces versées aux débats (certificats de dépôt des statuts et extraits de délibérations de leurs organes dirigeants), que les parties civiles ci-dessus justifient de leur forme juridique et de leur existence légale, et de leur capacité à agir en justice ; qu'il y a donc lieu de déclarer recevables en la forme leurs constitutions de parties civiles;
Qu'au fond, c'est par des motifs pertinents que la cour adopte que le tribunal les a déclarés bien fondées en leurs constitutions de parties civiles et a alloué:
- à la FNAB, la somme de 100 000 F à titre de dommages et intérêts entre celle de 3 000 F en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale,
- au CGA de Lorraine, la somme de 60 000 F à titre de dommages et intérêts outre celle de 3 000 F en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale,
- au GAB 88, la somme de 20 000 F à titre de dommages et intérêts outre celle de 3 000 F en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale;
Qu'il y a lieu en outre, d'allouer à chacune des trois parties civiles ci-dessus, la somme de 4 000 F en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale à hauteur d'appel;
Par ces motifs: LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement à l'égard de toutes les parties et par défaut à l'égard de la partie civile UFC; Reçoit comme réguliers en la forme, les appels du prévenu, du Ministère public et des parties civiles, du jugement en date du 2 mai 2000 du Tribunal correctionnel d'Epinal; Rejette les demandes de mesures d'instruction et de renvoi de la procédure formulées par Monsieur Gilles B; Au fond: Sur l'action publique: Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a relaxé Monsieur Gilles B du chef d'abus de biens sociaux et statuant à nouveau; Requalifie les faits d'abus de biens sociaux visés dans la prévention en faits d'abus de confiance; Déclare Monsieur Gilles B coupable de faits d'abus de confiance commis au préjudice de l'EARL du Gaffey, courant 1996, 1997 et 1998; Confirme le jugement déféré en ce qu'il a relaxé Monsieur Gilles B du chef de négoce de paille et bovins; Confirme le jugement déféré en ce qu'il a déclaré Monsieur Gilles B coupable pour le surplus des autres chefs de prévention; Confirme le jugement déféré sur la peine; Monsieur le Président a donné l'avertissement prévu par l'article 13 2- 29 du Code pénal; La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de 800 F dont chaque condamné est redevable; Dit que la contrainte par corps s'exécutera conformément aux dispositions des articles 749 et suivants du Code de procédure pénale; Le tout en vertu des articles susvisés, 515 du Code de procédure pénale; Sur l'action civile: Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions sur l'action civile; Y ajoutant, Condamne Monsieur Gilles B à payer, à hauteur d'appel, en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale: à Monsieur Gilles Pauhle, la somme de 3 000 F; à la Fédération Nationale des Agriculteurs Biologiques des Régions de France, la somme de 4 000 F; au Centre des Groupements d'Agrobiologistes de Lorraine; la somme de 4 000 F, au Groupement des Agrobiologistes des Vosges, la somme de 4 000 F; Condamne Monsieur Gilles B à faire publier à ses frais le présent arrêt, dans les revues "Biofil" et "Le Sol à la Table", le coût maximum de ces deux insertions étant limité à la somme de 20 000 F pour chacune d'elles; Déboute les parties de toutes autres demandes plus amples ou contraires; Condamne Monsieur Gilles B aux dépens de l'instance d'appel nés de l'action civile.