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Décisions

Cass. crim., 29 novembre 1995, n° 94-83.050

COUR DE CASSATION

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

X

Défendeur :

Ministère public

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Le Gunehec

Rapporteur :

Mme Ferrari

Avocat général :

M. le Foyer de Costil

Avocats :

SCP de Chaisemartin, Courjon, Me Cossa.

Cass. crim. n° 94-83.050

29 novembre 1995

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par G Christian, la société L F SA, civilement responsable, contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 13e chambre, du 26 mai 1994, qui, pour complicité de publicité illicite en faveur du tabac, a condamné le premier à 100 000 F d'amende, a déclaré la seconde civilement responsable, et a prononcé sur les intérêts civils ; - Vu les mémoires produits en demande et en défense ; - Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 2 de la loi modifiée du 9 juillet 1976, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et de base légale ;

" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré Christian G, directeur de publication du Figaro, complice du délit de publicité illicite en faveur du tabac, et en répression, l'a condamné à 100 000 F d'amende outre 50 000 F de dommages-intérêts pour le comité national de lutte contre le tabagisme, la société L F étant déclarée civilement responsable ;

" aux motifs que, s'agissant de la responsabilité pénale de Christian G, directeur de publication, elle ne peut, en l'état de la législation applicable, être établie que dans les termes du droit commun ; que la Cour ne peut déduire l'élément intentionnel nécessaire à la réalisation de l'infraction poursuivie que des circonstances de la cause ; qu'en l'espèce, elle considère que Christian G s'est bien sciemment rendu coupable du délit qui lui est reproché compte tenu, d'une part, de la notoriété de la loi précitée du 10 janvier 1991 et du caractère de professionnel du prévenu, et, d'autre part, du fait que sans l'accord du prévenu, cette publication n'aurait pu être réalisée étant observé que dans l'espace du journal " Carrières et Emplois ", en raison du nombre important de petites annonces publiées, de la faible importance de leur texte et de l'habitude prise de faire paraître les annonces demandées par la gendarmerie dont l'exigence de sécurité pouvait justifier certaines précautions, les juges ont pu admettre que l'élément intentionnel de M. H faisant défaut alors qu'en l'espèce, le texte publié par L F Magazine de par son importance, sa présentation avec un fond vieux rose sur lequel il paraissait, et la matière même du texte, n'a pu être publié en dehors de la volonté expresse du prévenu ;

" alors que les références inopérantes à la notoriété du texte sanctionnateur, au caractère professionnel du prévenu ou à l'importance et à la présentation du texte publié, ne sont pas de nature à caractériser une participation consciente du directeur de publication à l'acte principal punissable qui suppose de sa part un acte positif de participation ; que ces références d'où résulterait que le texte incriminé n'a pu être publié sans l'accord du prévenu, reviennent à instituer à l'encontre du directeur de publication, en raison de sa seule qualité, une présomption de responsabilité exclue en la matière ; que dès lors, l'arrêt attaqué manque de base légale au regard des textes susvisés " ;

Attendu que Christian G, directeur de publication du quotidien " L F ", et la société du même nom, éditeur du journal, ont été cités, la seconde comme civilement responsable, pour infraction à l'article 2 de la loi du 9 juillet 1976 relative à la lutte contre le tabagisme, dans sa rédaction issue de la loi du 10 janvier 1991 - devenu l'article L.325-24 du Code de la santé publique - à la suite de la parution, le 3 avril 1993, dans le supplément hebdomadaire du journal, intitulé " TV Magazine L F ", d'un article consacré au lancement, par la société Rothmans International France, d'un nouveau produit à prix réduit, les cigarettes " Craven International King Size Filter ", et illustré d'un paquet ouvert de ces cigarettes ;

Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable de complicité du délit poursuivi, les juges du second degré rappellent qu'en l'état de la législation applicable, sa responsabilité pénale ne peut être recherchée que dans les conditions du droit commun ; qu'ils retiennent ensuite, par motifs propres et adoptés, que l'article incriminé, dont ils caractérisent l'illicéité, n'a pu, à raison de son importance, de sa présentation et de son contenu, être publié hors la volonté expresse du directeur de publication, qui demeure tenu d'une obligation de surveillance et de contrôle ;

Attendu qu'en l'état de ces motifs, d'où il résulte que Christian G a sciemment fourni le support publicitaire ayant servi à la commission de l'infraction, la cour d'appel a justifié sa décision au regard tant des dispositions de l'article 60 ancien, que de celles de l'article 121-7 nouveau du Code pénal ; Que, dès lors, le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette le pourvoi.