CA Paris, 13e ch. B, 5 février 1997, n° 96-04876
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Ministère public, Comité National contre le Tabagisme
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Bertolini
Conseillers :
Mmes Barbarin, Marie
Avocats :
Me Mignan, SCP Wilhem, Me Bihl.
Rappel de la procédure :
La prévention :
B dit B Thierry est poursuivi pour avoir dans ses numéros 38 d'août-septembre 1995 et 39 d'octobre 1995 de son journal des publicités en faveur de Peter Stuyvesant Travel et de s'être ainsi rendu coupable du délit de publicité illicite en faveur du tabac.
Le jugement :
Le tribunal, par jugement contradictoire, a requalifié en complicité de publicité illicite en faveur du tabac les faits poursuivis sous la qualification de publicité illicite en faveur du tabac,
En a déclaré Thierry B dit B coupable,
(faits commis du 1er août 1995 au 30 septembre 1995, à Paris, infraction prévue et réprimée par les articles 121-6 et 121-7 du Code pénal, L. 355-25 et L. 355-31 du Code de la santé publique,
et, en application de ces articles,
l'a condamné à 30 000 F d'amende,
a déclaré irrecevable sa demande au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale,
a déclaré la société MP solidairement responsable de son dirigeant,
a mis à la charge de celle-ci le paiement des amendes et des frais de justice,
a reçu le Comité National Contre le Tabagisme en sa constitution de partie civile, l'a déclarée fondée,
a condamné Thierry B dit B à lui payer la somme de 40 000 F à titre de dommages et intérêts et celle de 5 000 F au titre de l'article 475-1 du CPP,
a déclaré la société MP civilement responsable de son dirigeant,
a dit que cette décision est assujettie au droit fixe de procédure de 600 F dont est redevable le condamné.
Les appels :
Appel a été interjeté par :
- M. B et B Thierry, le 19 avril 1996 contre le Comité National Contre le Tabagisme,
- MP (société), le 19 avril 1996 contre le Comité National Contre le Tabagisme,
- M. le Procureur de la République à Paris le 19 avril 1996.
Décision :
Rendue contradictoirement à l'égard du prévenu et de la société ME, contradictoirement en application de l'article 420-1 du CPP à l'égard du CNCT et après avoir délibéré conformément à la loi,
Par exploit en date du 13 décembre 1995, le Comité National Contre le Tabagisme (CNCT) a fait citer directement M. Thierry B dit B et la société ME, cette dernière en qualité de civilement responsable, devant le Tribunal correctionnel de Paris, sous la prévention de publicité illicite en faveur du tabac (faits commis en août, septembre et octobre 1995, prévus et réprimés par les articles L. 355-25 et L. 355-26 du Code de la santé publique).
Par jugement en date du 9 avril 1996, le tribunal a :
- requalifié l'infraction en complicité de publicité illicite en faveur du tabac,
- condamné Thierry B, de ce chef, à 30 000 F d'amende,
- déclaré la société ME civilement responsable.
Appel de cette décision a régulièrement été interjeté par le prévenu, par la société ME et par le Ministère public.
À l'audience de la Cour du 8 janvier 1997, M. B, assisté de son conseil et la société ME, représentée par le même conseil, demandent à la Cour, par voie de conclusions conjointes, vu le dédommagement de la partie civile, de leur donner acte de ce qu'ils se désistent de l'appel des dispositions civiles du jugement, de ce qu'ils acquiescent aux condamnations prononcées par jugement du 9 avril 1996, se désistant ainsi également de leur appel au plan pénal.
Subsidiairement, si le Ministère public ne se désistait pas de son appel incident, ils demandent à la Cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a condamné M. Thierry B et de relaxer des chefs de la poursuite.
À titre éminemment subsidiaire, ils demandent à la Cour de faire la plus légère application de la loi pénale et de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société ME à payer en totalité les amendes et frais de justice mis à la charge de M. Thierry B.
Le Ministère public demande la confirmation du jugement en toutes ses dispositions pénales.
Par lettre en date du 12 novembre 1996, le CNCT, partie civile intimée, a indiqué à la Cour qu'il se désistait de son action. Il lui en sera donné acte et il sera statué, à son égard, en application de l'article 420-1 du CPP ;
Sur ce, LA COUR,
Considérant que le CNCT, partie civile, s'est désisté de son action ; que la Cour ne se trouve donc plus saisie que des dispositions pénales du jugement déféré ;
Considérant que dans sa situation, le CNCT a fait valoir que le journal " L'argus des voyages " dont M. Thierry B dit B est le directeur de publication, avait fait paraître dans son numéro 38 d'août-septembre 1995 deux demi-pages de publicité en faveur de " Peter Stuyvesant Travel " et que, sous couvert de publicité pour cette entreprise de voyages, avait été ainsi réalisée, indirectement, une publicité en faveur de la marque de cigarette mondialement connue " Peter Stuyvesant " ;
Que la partie civile a également soutenu et démontre que, bien qu'elle ait adressé à M. B une lettre recommandée le 1er août 1995, pour l "informer du caractère illicite de cette publicité, celui-ci avait fait paraître la même annonce sur une demi-page dans le numéro suivant du journal (numéro 39 d'octobre) ;
Considérant que trois encarts publicitaires contestés proposent des voyages aux États-Unis ou en Grèce organisés par " Peter Stuyvesant Travel " et que le nom de cette entreprise figure en bas de chacune des annonces; que celles-ci constituent une publicité indirecte en faveur du tabac au sens de l'article L. 355-26 du Code de la santé publique, comme l'ont dit les premiers juges, compte tenu de l'utilisation d'une marque de cigarettes mondialement connue;
Considérant que M. Thierry B est le directeur de publication du magazine " L'Argus des Voyages " qui a principalement pour objet d'informer le public sur les tarifs promotionnels pratiqués par différentes entreprises organisatrices de voyages; qu'il ne pouvait ignorer le caractère illicite de la publicité et ce d'autant plus qu'il l'a republiée après avoir été mis en garde par le CNCT;
Qu'en tant que responsable de publication, il doit être considéré comme auteur et non comme complice de l'infraction visée à la préventionet qu'il convient, dès lors, en réformant sur ce point le jugement déféré, de déclarer M. Thierry B dit B coupable d'avoir, indirectement, courant août, septembre et octobre 1995, fait une publicité illicite en faveur du tabac ;
Considérant qu'il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné Thierry B à 30 000 F d'amende, cette peine étant proportionnée à la gravité relative des faits poursuivis ;
Considérant que la Cour n'est pas saisie de la question de la responsabilité civile de la SARL ME, éditrice du magazine " L'Argus des Voyages ", compte tenu des désistements intervenus ;
Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement te contradictoirement à l'égard de Thierry B dit B et de la société ME, contradictoirement en application de l'article 420-1 du CPP à l'égard du Comité National Contre le Tabagisme (CNCT), Donne acte au prévenu et à la société ME de leur désistement d'appel sur les dispositions civiles du jugement, Donne acte au Comité National Contre le Tabagisme, partie civile intimée, de son désistement d'action, Reçoit les appels du prévenu et du Ministère public sur les dispositions pénales du jugement, Réformant le jugement déféré sur la déclaration de culpabilité du prévenu, Déclare M. Thierry B dit B coupable d'avoir, indirectement, courant août, septembre et octobre 1995, fait une publicité illicite en faveur du tabac, Confirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné M. B à 30 000 F d'amende, Dit n'y avoir lieu à statuer sur la responsabilité civile de la société ME, Le tout par application des articles L. 355-25 et L. 355-26 du Code de la santé publique, 512 et suivants du CPP, Dit que cette décision est assujettie au droit fixe de procédure de 800 F dont est redevable le condamné.