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Décisions

CA Bordeaux, 3e ch. corr., 19 janvier 1999, n° 97-000171

BORDEAUX

Arrêt

Confirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Castagnede

Conseillers :

Mme Robert, M. Minvielle

Avocat :

Me Latournerie.

TGI Bergerac, du 21 janv. 1997

21 janvier 1997

FAITS

Par actes en date du 24 janvier 1997 reçus au secrétariat-greffe du Tribunal de grande instance de Bergerac, le prévenu et le Ministère public ont relevé appel d'un jugement rendu contradictoirement par ledit tribunal le 21 janvier 1997 à l'encontre de Pierre B poursuivi comme prévenu:

- d'avoir à Vézac (24) en tout cas sur le territoire national, courant 1995 et les 9 janvier 1995, 16 janvier 1995, 23 janvier 1995, 30 janvier 1995, 6 février 1995, le 19 février 1995, trompé les Etablissements Ussel, la SA Sovecope, contractants, sur les qualités substantielles, l'aptitude à l'emploi, de conserves de truffes de Chine présentant des signes d'altération.

Faits prévus et réprimés par les articles L. 213-1, L. 216-2 et L. 216-3 du Code de la consommation.

- d'avoir dans les mêmes circonstances de temps et de lieu, mis en vente des denrées alimentaires dont l'étiquetage ou la présentation n'étaient pas conformes aux prescriptions réglementaires en l'espèce:

- en omettant d'indiquer, de manière lisible et indélébile sur 398 boites de conserves l'origine du produit et la date de fabrication de ces produits;

- en omettant d'indiquer sur les factures de vente desdites marchandises, la dénomination et la durabilité des produits.

Faits prévus et réprimés par les articles L. 213-1, L. 216-2, L. 216-3, L. 214-2 du Décret 84-1147 du 7 décembre 1984, et les articles 2, 4 du Décret 55-241 du 10 février 1955.

LE TRIBUNAL:

- A renvoyé le prévenu des fins de la poursuite sans peine ni dépens du chef de tromperie sur les qualités substantielles de la marchandise vendue aux Etablissements Ussel et la SA Sovecope.

- A déclaré le prévenu coupable de 398 contraventions relatives au marquage de boîtes de conserves.

- En répression, a condamné le prévenu à 398 amendes de cinquante francs l'une, soit au total dix neuf mille neuf cent francs (19 900 F).

Sur quoi,

Monsieur le Président a informé les parties présentes que l'affaire était mise en délibéré à l'audience publique du 24 novembre 1998.

A ladite audience, Monsieur le Président a informé les parties présentes que le délibéré était prorogé à l'audience publique du 19 janvier 1999.

Et, à ladite audience, Monsieur le Président a donné lecture de la décision suivante:

Attendu que les appels interjetés le 24 janvier 1997 par le prévenu Pierre B et par le Ministère public sont recevables pour l'avoir été dans les formes et délais de la loi.

Attendu que Pierre B comparaît assisté de son avocat et fait plaider la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a prononcé sa relaxe du chef de tromperie et sa réformation en vue d'une relaxe concernant les contraventions qui lui sont reprochées au motif que les prescriptions des textes visés aux poursuites relatives aux présentations et étiquetages s'appliquent aux ventes destinées aux consommateurs alors qu'il s'agit en l'espèce d'opérations de conditionnement entre professionnels.

Attendu que le Ministère public requiert la confirmation de la décision entreprise en ce qu'elle a déclaré le prévenu coupable des contraventions, la réformation concernant la relaxe du chef de tromperie et la condamnation de B de ce chef à la peine de 50 000 F d'amende.

Attendu qu'à l'occasion de contrôles effectués les 25 octobre 1995 aux Etablissements Ussel à Daglan et le 28 février 1996 aux Etablissements Sovecope à Nabiran, les services de la répression des fraudes de la Dordogne procédaient à l'examen de stocks de conserves de truffes provenant de la société La Truffe Sarladaise qui les avait vendus aux sociétés précitées après leur avoir fait subir un premier traitement.

Attendu que les investigations menées aux Etablissements Ussel révélaient que sur 798 boîtes de truffes de divers formats, la date de fabrication, l'origine et, le poids des truffes étaient portés au feutre de façon non indélébile;

Qu'aucune mention de durabilité du produit n'apparaissait sur les factures.

Qu'enfin certaines boîtes présentaient des bombements et flocages les rendant impropres à la consommation selon un rapport d'analyse du 29 novembre 1995.

Attendu que les investigations menées aux Etablissements Sovecope révélaient que sur 398 boîtes de truffes la date de fabrication, et l'origine du produit étaient portées au feutre de façon non indélébile et parfois illisible.

Que de même les mentions obligatoires correspondant à la dénomination de vente du produit et la date de durabilité faisaient défaut sur les factures de ventes de la SARL La Truffe Sarladaise.

Qu'enfin la quasi-totalité des boîtes recensées lors du contrôle présentait des bombements des deux extrémités des boîtes et un flocage.

- Sur le défaut de marquage non indélébile:

Attendu que le prévenu ne saurait valablement soutenir que les prescriptions du Décret 84-1147 du 7 décembre 1984 ne lui seraient pas applicables au motif que ce texte serait destiné à protéger les consommateurs alors qu'en l'espèce il s'agit de transactions entre professionnels.

Attendu en effet que l'article 6-2 du Décret précité stipule que "lorsque les denrées alimentaires préemballées sont commercialisées à un stade antérieur à la vente au consommateur final, les mentions prévues à l'article 5 peuvent ne figurer que sur les fiches, bons de livraison ou documents commerciaux lorsque ceux-ci accompagnent les denrées alimentaires auxquels ils se rapportent... Dans ce cas les mentions prévues aux alinéa 1,4 et 5 de l'article 5 sont portées en outre sur l'emballage extérieur dans lequel lesdites denrées sont présentées lors de la commercialisation."

Attendu qu'il résulte des constatations des enquêteurs que les marchandises ont été contrôlées après une vente par B aux Etablissements Ussel et Sovecope soit à un stade de commercialisation antérieur à la vente au consommateur.

Qu'ainsi les dispositions de l'article 6 2ème alinéa du Décret 84-1147 doivent recevoir application.

Qu'en l'espèce tel n'était pas le cas puisque les enquêteurs ont relevé sur les boîtes un marquage tantôt non indélébile, tantôt illisible concernant l'origine du produit et la date de fabrication.

Que de même la durabilité des produits n'apparaissait pas sur les factures de vente. Qu'en conséquence c'est à juste titre que les premiers juges ont déclaré le prévenu coupable des 398 contraventions visées à la prévention et l'ont condamné à 398 amendes de 50 F, peines justifiées dans leur quantum au regard des faits commis.

Qu'ainsi il sied de confirmer la décision de ce chef.

- Sur le délit de tromperie:

Attendu qu'il est constant que certaines boîtes de truffes contrôlées aux Etablissements Ussel, et la quasi-totalité de celles contrôlées aux Etablissements Sovecope présentaient des bombements et flocage.

Attendu qu'il résulte des dispositions de l'article 4 du Décret du 10 février 1955 que les récipients renfermant des conserves mis en vente ou vendus ne doivent pas présenter de signes extérieurs tels que bombements ou traces de fuite, susceptibles de correspondre à une altération de la denrée en question.

Qu'à tous les stades du commerce les détenteurs de lots de conserves doivent vérifier l'absence desdits caractères.

Qu'en ce qui concerne le stade de gros et de demi-gros, les vérifications précitées doivent être effectuées en tout cas au moment de la livraison aux acheteurs.

Attendu qu'outre les constatations des enquêteurs concernant l'aspect extérieur des boîtes qui ne répond pas aux exigences de la législation en vigueur, il faut relever que le rapport consécutif à l'analyse effectuée par le laboratoire de la Répression des Fraudes concluait à une impropriété à la consommation des échantillons saisis aux Etablissements Ussel.

Attendu qu'il importe peu que l'acquéreur des boîtes, la société Ussel, ait indiqué ne pas se considérer comme victime d'une tromperie de la part de La Truffe Sarladaise alors qu'il est établi que les truffes litigieuses sont destinées à la revente, qu'elles ont été déclarées impropres à la consommation par les Fraudes et, qu'aucune explication technique n'a été apportée tendant à établir que les traitements ultérieurs qu'elles ont vocation à recevoir aux Etablissements Ussel et Sovecope sont de nature à les rendre à nouveau propres à la consommation.

Attendu en effet que si les attestations versées aux débats par le prévenu tendent à établir le caractère normal des bombements subis par les boîtes après une première cuisson, il n'est pas sans intérêt de relever que l'attestation émanant du Directeur général adjoint du Centre Technique de la conservation des produits agricoles précise que les truffes pourront être réutilisées si la déformation des fonds n'a pas altéré la qualité bactériologique des truffes.

Que tel n'est pas le cas en l'espèce pour les conserves analysées en provenance de chez Ussel puisque le laboratoire des Fraudes les a qualifiées d'impropres à la consommation.

Qu'ainsi et alors qu'il n'est pas contesté que ces marchandises sont destinées à la revente après traitement, il y a lieu de considérer que les acheteurs des boîtes en provenance des Etablissements Ussel sont susceptibles d'être trompés.

Qu'en conséquence il sied de retenir B dans les liens de la prévention et de réformer sur ce point la décision entreprise.

Attendu que les analyses effectuées sur les prélèvements réalisés aux Etablissements Sovecope n'ayant pas révélé d'anomalie il sied de renvoyer le prévenu des fins de la poursuite concernant les marchandises livrées à cette société faisant l'objet de la facturation du 19 septembre 1995 et de confirmer sue ce point la décision entreprise.

Attendu que les faits de tromperie dont Pierre B est déclaré coupable justifient le prononcé d'une peine d'amende ferme.

Par ces motifs, LA COUR, après en avoir délibéré, statuant publiquement et par arrêt contradictoire; Déclare les appels recevables; Confirme la décision entreprise sur la culpabilité et les peines contraventionnelles afférentes ainsi que la relaxe du chef de tromperie concernant les marchandises livrées aux Etablissements Sovecope faisant l'objet de la facture du 19 septembre 1995; Réformant pour le surplus; Déclare B coupable du délit de tromperie envers les Etablissements Ussel; Le Condamne à la peine de 50 000 F d'amende; Dit que la contrainte par corps s'appliquera dans les conditions prévues aux articles 749 et 750 du Code de procédure pénale; La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de huit cents francs dont est redevable chaque condamné par application de l'article 1018 A du Code général des impôts.