CA Montpellier, 2e ch. A, 14 décembre 1995, n° 94-3411
MONTPELLIER
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Syndicat d'Habillement des Pyrénées-Orientales
Défendeur :
Kiabi (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Ottavy
Conseillers :
MM. Derdeyn, Thibault-Laurent
Avoués :
SCP Argellies, Nègre
Avocats :
SCP Domerg & Mejean, Me Greffe.
Faits et procédure :
En décembre 1992 la société Kiabi, dont l'objet est la vente de vêtements, plaçait sur la façade de son magasin route d'Espagne à Perpignan une banderole où étaient portées les indications Prix Chocs - 30 % sur des milliers d'articles du 4 au 24 décembre 1992.
Arguant qu'il s'agissait d'une opération de vente de soldes hors des périodes autorisées, le Syndicat de l'Habillement des Pyrénées Orientales assignait la société Kiabi devant le Tribunal de commerce de Perpignan afin de la voir condamner à lui payer la somme de 200 000 F en réparation du préjudice causé.
Par jugement en date du 7 février 1994 le Tribunal de commerce de Perpignan a débouté le Syndicat de l'Habillement des Pyrénées Orientales de ses demandes et l'a condamné à payer à la société Kiabi une somme de 2 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Le 27 avril 1994 le Syndicat de l'Habillement des Pyrénées Orientales a relevé appel de cette décision.
Prétentions et moyens des parties:
Le Syndicat de l'Habillement des Pyrénées Orientales demande à la cour de réformer le jugement déféré et de condamner la société Kiabi à lui payer la somme de 200 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
A l'appui de ses prétentions le Syndicat de l'Habillement des Pyrénées Orientales soutient que l'opération faite par la société Kiabi est une opération de vente de soldes hors des périodes autorisées et que cette vente de soldes illicite est un acte de concurrence déloyale qui porte préjudice à l'ensemble des commerçants.
La société Kiabi demande à la cour de confirmer la décision déférée et de condamner le Syndicat de l'Habillement des Pyrénées Orientales à lui payer la somme de 50 000 F à titre de dommages-intérêts pour appel abusif et celle de 20 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Au soutien de ses demandes la société Kiabi fait valoir que le Syndicat de l'Habillement des Pyrénées Orientales ne démontre pas qu'elle a procédé à des soldes irrégulières, ce d'autant plus qu'en réalité il s'agissait d'une simple annonce publicitaire pour une vente promotionnelle.
Discussion :
Il est constant et non contesté par les parties que dans le département des Pyrénées Orientales les périodes de soldes pour l'habillement s'ouvrent le 1er janvier pour la période d'hiver et le 15 juillet pour la période d'été, sauf pour la zone côtière où elle débute le 15 août.
Dès lors, il apparaît que l'opération faite par la société Kiabi a été faite hors de cette période et il est donc nécessaire de déterminer s'il s'agissait d'une opération de soldes comme le soutient le Syndicat de l'Habillement ou si, au contraire, comme le soutient la société Kiabi, il ne s'agissait que d'une vente promotionnelle.
Une vente est promotionnelle si elle a pour but, dans un temps limité, d'offrir, sans limitation de quantité, des articles nouveaux ou des articles dont le commerçant entend relancer la vente, à un prix inférieur à celui qui sera ensuite pratiqué. Le rabais et la publicité ayant pour but de provoquer un premier achat et de créer une habitude d'achat et d'ainsi fidéliser la clientèle.
En revanche les soldes se font sur un stock déterminé et limité dont le commerçant entend se libérer rapidement en dehors de toute perspective de réapprovisionnement en produits identiques.
Il résulte du constat de Me Schelma huissier de justice que le 10 décembre 1992 était accrochée sur la façade du magasin Kiabi à Perpignan une banderole portant les mentions "Prix Chocs - 30 % sur des milliers d'articles du 4 au 24 décembre 1992" et que des promos (sic) étaient effectuées sur certains articles au moyen de petits panneaux.
Ce constat fort laconique ne permet d'établir que l'existence de rabais lesquels sont insuffisants à caractériser des soldes par rapport à d'autres types de vente, notamment la vente promotionnelle.
Il ne résulte pas de ce constat, seul élément de preuve versé aux débats par le Syndicat de l'Habillement des Pyrénées Orientales, que l'opération en cause avait pour but de liquider rapidement un stock déterminé et intangible de marchandises.
En conséquence le Syndicat de l'Habillement des Pyrénées Orientales, à qui incombe le fardeau de la preuve, ne prouve pas que l'opération de la société Kiabi était des soldes.
En conséquence le jugement déféré doit être confirmé.
La société Kiabi ne justifie d'aucun préjudice résultant d'une procédure, qui par ailleurs n'a pas excédé le cadre normal du débat judiciaire, permettant de lui allouer les dommages-intérêts qu'elle sollicite.
L'application en cause d'appel des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile conduit à allouer à la société Kiabi la somme de 3 500 F.
Par ces motifs : La Cour statuant publiquement et contradictoirement ; En la forme, reçoit l'appel ; Au fond, le dit injustifié ; Confirme le jugement déféré qui produira son plein et entier effet ; Y ajoutant, Déboute la société Kiabi de sa demande en paiement de dommages-intérêts ; Condamne le Syndicat de l'Habillement des Pyrénées Orientales à payer, en cause d'appel, une somme de 3 500 F TTC à la société Kiabi au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Condamne le Syndicat de l'Habillement des Pyrénées Orientales aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.