CA Limoges, ch. corr., 6 avril 1994, n° 161
LIMOGES
Arrêt
PARTIES
Défendeur :
Syndicat professionnel des fourreurs et pelletiers de l'Ouest et du Centre
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Mercier
Substitut général :
M. Vergne
Conseillers :
MM. Ody, Payard
Avocats :
Mes Desfarges, Grasseau
Sur l'action publique:
Le tribunal a déclaré Claude H coupable des faits qui lui sont reprochés, en répression l'a condamné à la peine d'amende de 10 000 F, aux frais de publication par extraits de la présente décision dans les journaux: Le Populaire, La Montagne et l'Echo du Centre, le coût de ces publications ne devant pas dépasser 1 500 F pour chaque insertion, et au paiement d'un droit fixe de procédure de six cents francs;
Sur l'action civile:
Le tribunal a reçu le Syndicat professionnel des fourreurs Pelletiers de l'Ouest et du centre en sa constitution de partie civile, a condamné Claude H à lui verser la somme de 1 F à titre de dommages-intérêts et 1 000 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale;
LA COUR,
Le prévenu et le Ministère public ont interjeté appel du jugement dont le dispositif est ci-dessus rapporté, rendu le 18 octobre 1993 par le Tribunal correctionnel de Limoges;
Ces appels sont réguliers et recevables en la forme;
Le prévenu, qui comparait en personne, assisté de son Conseil Maître Grasseau, conteste l'infraction qui lui est reprochée et fait plaider sa relaxe;
Le Ministère public requiert confirmation de la décision déférée;
Le Syndicat professionnel des fourreurs Pelletiers de l'ouest et du centre, partie civile, sollicite la confirmation du jugement et l'allocation d'une indemnité supplémentaire de 4 000 F sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale;
Sur l'action publique
Le 6 novembre 1991, la SARL "X" a fait diffuser aux habitants de la région de Limoges, par distribution dans les boîtes aux lettres, une publicité relative à une vente de vêtements de cuirs et de fourrures organisée à la salle des fêtes de Nieul (87), les 9 et 10 novembre 1991, ladite publicité annonçant des remises de 500 F sur les articles marqués d'un point rouge et de 200 F sur les articles marqués d'un point rouge et de 200 F sur les articles marqués d'un point jaune. Le 9 novembre 1991, suite à la plainte de concurrents de la société X, les agents des services de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes se sont présentés, à la salle des fêtes de Nieul où avait lieu la vente au déballage et ont relevé les prix figurant sur les articles faisant l'objet des remises annoncées par voie publicitaire.
S'étant par la suite fait communiquer, afin de vérifier la réalité des remises annoncées, copie du livre des ventes sur lequel sont enregistrés les prix de vente pratiqués dans le magasin de la société et lors des ventes aux déballages réalisées à partir du 12 octobre 1991, ces fonctionnaires ont constaté que pour 13 des 18 articles concernés par la publicité et pour lesquels des ventes avaient été identifiées, les prix pratiqués lors des ventes au déballage précédentes étaient inférieurs à ceux servant de base au calcul des remises de 200 F et 500 F et considérant que les remises proposées avaient un caractère illusoire, ont relevé une infraction aux dispositions de l'article 44 de la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973.
L'article 2 de l'arrêté n° 77-105 P du 2 septembre 1977 relatif à la publicité des prix à l'égard des consommateurs prévoit que lorsqu'elle est faite hors des lieux de vente toute publicité comportant une annonce de réduction de prix doit préciser l'importance de la réduction de prix, soit en valeur absolue, soit en pourcentage, par rapport au prix de référence défini à l'article 3 comme étant "le prix le plus bas effectivement pratiqué par l'annonceur pour un article ou une prestation similaire, dans le même établissement de vente au détail, au cours des trente derniers jours précédant le début de la publicité".
Cette définition, contrairement à ce qu'a admis le tribunal, ne peut permettre de prendre comme prix de référence celui pratiqué au cours des ventes au déballage précédentes, lesquelles aux termes même du décret du 26 novembre 1962 présentent un caractère occasionnel ou exceptionnel et ont lieu dans des emplacements ou dans des locaux non habituellement destinés au commerce.
En outre, le raisonnement de l'administration, tel qu'il a été admis par le tribunal amènerait à faire entrer dans le prix de référence les réductions de prix consentis lors de la précédente vente au déballage, lesquelles par définition, sont des remises à caractère exceptionnel, alors que dans l'esprit du législateur il s'agit de se référer au prix le plus bas effectivement pratiqué à l'égard de la clientèle courante et dans des conditions normales de vente.
La société X disposant d'un magasin à Jarnac, où elle exerce habituellement la vente au détail, c'est donc, comme le soutient à juste titre le prévenu, par référence au prix le plus bas pratiqué dans cet établissement que doit être appréciée la régularité de la publicité.
Or l'examen des prix pratiqués lors de la vente au déballage du 9 novembre à Nieul, ne fait pas apparaître que les prix ayant servi de base au calcul des remises annoncées par voie de publicité, soient supérieurs à ceux les plus bas pratiqués au cours des 30 jours précédents la publicité en magasin à l'égard de la clientèle courante, sans tenir compte des rabais exceptionnels consentis à certains clients, ni des avantages liés à des conditions particulières tels que l'escompte pour paiement comptant.
Il s'ensuit que l'infraction de publicité mensongère reprochée à Claude H n'est pas établie et qu'il convient d'entrer en voie de relaxe à son égard.
Sur l'action civile
Si la constitution de partie civile du Syndicat professionnel des fourreurs Pelletiers de l'Ouest et du centre apparaît recevable en la forme, celui-ci compte tenu de la relaxe prononcée, ne peut qu'être débouté de ses demandes.
Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement. Sur l'action publique Reçoit Claude H et le Ministère public en leur appel. Réforme le jugement rendu le 18 octobre 1993 par le Tribunal correctionnel de Limoges. Statuant à nouveau. Relaxe Claude H des fins de la poursuite sans peine ni dépens. Sur l'action civile, Déclare la constitution de partie civile du Syndicat professionnel des fourreurs Pelletiers de l'ouest et du centre, recevable en la forme. Au fond: Déboute celui-ci de l'ensemble de ses demandes.