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Décisions

CA Paris, 13e ch. B, 1 février 1996, n° 95-02023

PARIS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Défendeur :

Comité national contre le tabagisme, Ligue contre la fumée de tabac en public

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Magnet

Avocat général :

M. Bartoli

Conseillers :

Mmes Marie, Le Jan

Avocats :

Mes Vaisse, Caballero.

TGI Paris, 31e ch., du 26 janv. 1995

26 janvier 1995

RAPPEL DE LA PROCÉDURE:

LE JUGEMENT:

Le tribunal, par jugement contradictoire, a déclaré W Hans, Joachim coupable de publicité illicite en faveur du tabac, courant 1992, à Paris, infraction prévue par l'article 1, 2, 8, 12, 15 de la loi n° 76-616 du 09/07/1976,

et, en application de ces articles, l'a condamné à 100 000 F d'amende, a assujetti la décision à un droit fixe de procédure de 600 F

Sur l'action civile le tribunal a reçu le Comité national contre le tabagisme et la Ligue contre la fumée du tabac en public en leur constitution de partie civile et a condamné W Hans Joachim à payer:

- au Comité national contre le tabagisme la somme de 200 000 F à titre de dommages-intérêts et celle de 10 000 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.

- à la Ligue contre la fumée du tabac en public la somme de 1 F à titre de dommages-intérêts et celle de 2 000 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.

LES APPELS:

Appel a été interjeté par:

Monsieur W Hans, Joachim, le 2 février 1995 contre Comité national contre le tabagisme,

La société X GmbH, le 2 février 1995 contre Comité national contre le tabagisme,

Le Procureur de la République le 2 février 1995,

Le Comité national contre le tabagisme, le 6 février 1995 contre X GmbH, Monsieur W Hans, Joachim.

DÉCISION:

Rendue contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant sur les appels régulièrement interjetés par le prévenu Monsieur Hans Joachim W, le civilement responsable la société X GmbH, les parties civiles le Comité national de lutte contre le tabagisme, la Ligue contre la fumée du tabac en public et le Ministère public à l'encontre du jugement déféré auquel il est fait référence pour les termes de la prévention.

RAPPEL DES FAITS

La société X GmbH fabricant des cigarettes C et Y a fait entreprendre une campagne publicitaire en faveur de ses produits.

Ainsi est parue dans les revues Actuel et Première respectivement en novembre 1991, avril 1992 et mars 1992 et dans différents autres organes de presse, 1'Etudiant, l'Express, le Nouvel Observateur, Géo, Ça m'intéresse, de février à mai 1992, une publicité concernant la marque C, représentant un chameau dans le désert sur un fond de désert et de pyramide avec une colonne en premier plan. L'animal avait en outre une patte avant tordue.

S'agissant de la marque Y, elle est apparue dans diverses publications sous la forme d'un tableau composé de plusieurs paquets de cigarettes posés sur une table, avec un fond couleur cuir entouré d'un liseré bleu et d'un fond beige.

Le message sanitaire imposé par la loi du 9 juillet 1976, était dans les deux cas précédé des termes "selon la loi n° 91-32".

Ces publicités avaient été commandées par la société X GmbH qui les avait conçues ainsi que cela résulte des factures versées au dossier.

Le CNCT avait fait citer les 2 et 15 septembre 1992, Messieurs L et S respectivement directeur général de la société X France et représentant de la société X GmbH, au sein du conseil d'administration de ladite société, ainsi que cette société en vue de les voir déclarés coupables d'infractions à la loi du 9 juillet 1976 pour les personnes physiques et condamnés à lui payer des dommages-intérêts.

Les prévenus ayant soutenu que l'infraction ne pouvait être imputée qu'à Monsieur W et à la société X GmbH, société de droit allemand, le CNCT avait demandé le renvoi de l'affaire afin de les faire citer. En raison du refus opposé à cette demande par le tribunal, il s'est désisté et a fait délivrer une nouvelle citation, visant Messieurs L, S et W, ainsi que les sociétés X France et X GmbH.

Une transaction étant intervenue en mai 1993 entre le CNCT et Messieurs L et S à titre personnel et es-qualité et par jugement du 16 juin 1993, le tribunal avait donné acte au CNCT de son désistement et constaté que le Ministère public ne reprenait pas les poursuites.

Messieurs L, S et W, les sociétés X GmbH et X France, représentés par leurs conseils font valoir par voie de conclusions:

En premier lieu que l'action publique est éteinte en application de l'article 2 de la loi d'amnistie du 3 août 1995, qui bénéficie aux infractions punies d'une peine d'amende à l'exclusion de toute autre peine ou mesure.

Ils soulignent que la possibilité donnée au juge d'interrompre la publicité tend à faire cesser une situation illicite, et ne peut être analysée comme une peine ou une mesure complémentaire, et font observer que les publicités incriminées n'étaient plus diffusées depuis longtemps lorsque le tribunal a statué.

En deuxième lieu, que la constitution de partie civile du CNCT et de la Ligue contre la fumée du tabac en public est irrecevable, cette action faisant suite au désistement d'une précédente action portant sur les mêmes faits.

Ils prétendent que le désistement de la partie civile opère "in rem" et qu'elle n'a plus que la possibilité d'agir devant la juridiction civile qu'elle que soit l'identité de la personne poursuivie.

Sur la recevabilité de la constitution de partie civile de la Ligue contre la fumée du tabac en public, ils font observer que cette dernière est intervenue par voie de conclusions devant le tribunal de grande instance et que sa constitution n'est pas recevable dès lors que la constitution de partie civile du CNCT n'est pas elle-même recevable.

Ils ajoutent que de toute façon cette association ne justifie d'aucun préjudice personnel.

Messieurs L, S, W, et les sociétés X France et X GmbH font observer que s'agissant des publicités en faveur des cigarettes C des accords étaient intervenus selon lequel le CNCT renonçait à toute procédure à l'encontre des publicités litigieuses.

En troisième lieu, Messieurs L et S et la société X France soutiennent qu'ils ne sauraient se voir imputer la responsabilité de la campagne publicitaire litigieuse qui a été commandée par la société X GmbH, le rôle de la société X France étant limité à la surveillance de la commercialisation des cigarettes C et Y.

Monsieur L fait observer qu'il est directeur général de la société X France et qu'eu égard à ses fonctions dans la société en question, sa responsabilité pénale ne saurait être retenue en l'absence d'une délégation de pouvoir et à la condition que les faits incriminés aient été englobés dans cette délégation.

En quatrième lieu, Messieurs L, S, W, les sociétés X France et X GmbH soutiennent que le libellé du message sanitaire est identique à celui qui avait été adopté depuis la mise en vigueur de la loi du 9 juillet 1976.

Ils ajoutent que la mention selon la loi indique l'origine du message et est justifiée par la jurisprudence américaine relative à la responsabilité du fait des produits défectueux, laquelle mention constitue une reconnaissance de responsabilité.

Ils soulignent que la possibilité, voire l'obligation d'accompagner les avertissements sanitaires de la mention de l'autorité qui en est l'auteur est expressément admise par la directive du Conseil des Communautés européennes du 15 novembre 1989.

En outre, ils estiment que le respect de la liberté d'expression et d'opinion exige d'une part, qu'un fabricant ne soit pas contraint d'exprimer une opinion peut être différente de la sienne, sans qu'il puisse indiquer l'origine - légale - externe d'un message figurant sur ses produits, d'autre part, que le consommateur puisse lui-même se former une opinion quant à la valeur du message en disposant de tous les éléments d'information nécessaires à cet effet, et en particulier concernant son auteur.

En cinquième lieu, sur l'annonce Y, ils soutiennent que l'article 8 de la loi de 1976 autorise expressément: "la représentation graphique ou photographique du produit, de son emballage et de l'emblème de la marque" et que dans ces conditions, une simple représentation picturale fidèle des quatre paquets de cigarettes de la gamme Y, sans adjonction d'aucun autre élément, est conforme à ces dispositions.

Sur l'annonce C, ils soutiennent que le dromadaire est représenté en mouvement et que cela ne saurait suffire à rendre la publicité illicite.

Sur les dommages et intérêts réclamés les prévenus font observer d'une part, que le CNCT qui réclame des sommes équivalentes à celles qui ont été déboursées selon lui pour acheter les espaces publicitaires litigieux, n'a pas effectué d'investissements publicitaires notables avec les sommes qui lui ont été allouées à l'occasion de précédentes instances.

D'autre part que ce faisant il assimile son préjudice à celui de la somme des préjudices subis par toutes les victimes potentielles desdites publicités.

Le préjudice selon eux doit être réduit à une somme symbolique.

Les concluants qui estiment que les actions du CNCT et de la Ligue contre la fumée du tabac en public sont empreintes de malveillance réclament en conséquence, la condamnation de chacun d'eux à leur payer la somme de 100 000 F sur le fondement de l'article 472 du Code de procédure pénale.

Le Comité national contre le tabagisme (CNCT) et la Ligue contre la fumée du tabac en public (LCFTP) qui se sont fait représenter à l'audience par leur conseil, font valoir par voie des conclusions:

En premier lieu sur la recevabilité de l'action du CNCT à l'encontre de Monsieur W et de la société RJ X GmbH d'une part, que le désistement de la partie civile est un acte volontaire, unilatéral dont elle est absolument maîtresse et que si le CNCT s'est désisté dans l'instance dirigée contre Messieurs L et S et la société X France c'est uniquement parce qu'il avait sollicité le renvoi de l'affaire afin d'étendre son action à Monsieur W et à la société RJ X GmbH dont il venait d'apprendre la participation à l'infraction poursuivie et que son désistement était strictement limité aux prévenus et aux civilement responsables mis en cause dans la procédure.

Ils soutiennent que le désistement de la partie civile, ne rend pas son action irrecevable pour les mêmes faits contre d'autres personnes dont la participation à l'infraction s'est révélée postérieurement à l'introduction de l'instance.

D'autre part, que le désistement du CNCT relatif à des publicités en faveur de la marque C est intervenu à la suite d'une transaction concernant des publicités parues dans le Point et l'Auto-Journal de février 1992 et ne concerne pas l'ensemble des publicités en faveur de cette marque parues dans la presse écrite.

Ils précisent que le protocole d'accord n'a pas été régularisé, ni exécuté, Monsieur L ayant assorti sa signature de la mention "Bon pour acceptation du CNCT à renoncer à toutes actions contre la publicité mentionnée" tentant ainsi à partir d'un accord ponctuel d'étendre le champ d'application de la transaction.

En deuxième lieu sur l'illicéité des publicités en faveur des cigarettes C et Y:

D'une part sur le "visuel" C, que la patte avant dudit animal était tordue ce qui avait pour objet de ridiculiser le message sanitaire dont étaient obligatoirement assorties, à l'époque, les publicités en faveur du tabac.

Les parties civiles ajoutent que le "visuel" C n'est pas limité à la représentation de l'emblème de la marque et que par sa recherche photographique, sur fond de soleil couchant, il valorise le produit, ce qui est interdit.

D'autre part, s'agissant de la publicité en faveur des cigarettes Y, les parties civiles indiquent que la présentation des paquets de cigarettes n'était pas conforme aux dispositions légales qui ne permettent que la représentation du produit.

Elles font remarquer que l'image des paquets de cigarettes était destinée à donner une impression de négligé-chic, qui est au centre de la communication de la marque Y et destinée à valoriser le tabac.

En troisième lieu le CNCT et la Ligue contre la fumée du tabac en public, soulignent que l'article 6 de la loi du 9 juillet 1976, tel que modifié par la loi du 10 janvier 1991, précise que jusqu'au 31 décembre 1992, toute propagande ou publicité en faveur du tabac ou des produits du tabac est assortie d'un message de caractère sanitaire, dans des conditions fixées par un arrêté du ministre de la Santé et que conformément à l'arrêté du 26 avril 1991, le message sanitaire est le suivant "Fumer provoque des maladies graves".

Ils soutiennent que l'adjonction au message sanitaire imposé par le législateur des termes "selon la loi n° 91-32" dénature ou ridiculise le message comme l'a retenu le tribunal et que la directive de la CEE du 13 novembre 1989 invoquée par les prévenus ne vise pas la publicité en faveur du tabac.

Les parties civiles estiment que les prévenus ne sauraient prétendre en libellant ainsi le message sanitaire avoir usé de leur liberté d'expression s'agissant d'une réglementation impérative imposant des mentions obligatoires, en précisant la taille des caractères, la surface minimale, les conditions d'impression et de contraste du message, en vue d'assurer "une protection accrue des consommateurs".

En quatrième lieu, sur l'application de la loi d'amnistie, les parties civiles soutiennent que l'article 355-1 du Code de la santé publique qui a repris les dispositions de l'article 12 de la loi du 10 janvier 1991, prévoyant que la juridiction de jugement peut prononcer, outre une peine d'amende la suppression ou, l'enlèvement ou la confiscation de la publicité, celle-ci ne saurait bénéficier aux prévenus, dés lors que la loi précise que ne sont amnistiés que les délits pour lesquels seule une peine d'amende est encourue, à l'exception de toute autre peine ou mesure.

En cinquième lieu, sur les dommages et intérêts réclamés, le CNCT et la Ligue contre la fumée du tabac en public font observer qu'ils demandent réparation du préjudice causé par une campagne massive entreprise sur plusieurs mois dans l'ensemble des titres de la presse magazine française.

Le CNCT, partie civile réclame outre la somme de 3 729 300 F celle de 60 000 F sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, la Ligue contre la fumée du tabac en public 10 000 F sur le fondement de ce même texte.

Sur ce,

Sur l'action publique

Considérant que, Messieurs L et S, ainsi que la société X France ne sont ni appelants, ni intimés;

Qu'en effet, d'une part, le jugement déféré a déclaré irrecevable la constitution de partie civile du CNCT et de la Ligue contre la fumée du tabac en public à l'égard de Messieurs L et S et de la société X France, au motif que le CNCT s'était désisté de l'action qu'il avait engagée à leur encontre, d'autre part, l'acte d'appel du CNCT et de la Ligue contre la fumée du tabac en public mentionne que cette voie de recours n'est exercée qu'à l'encontre de Monsieur W;

Que, par conséquent, leurs conclusions sont irrecevables sur ce point;

Sur le moyen tiré de l'amnistie

Considérant qu'aux termes de l'alinéa 1er de l'article 2 de la loi n° 95-884 du 3 août 1995, sont amnistiés les délits pour lesquels seule une peine d'amende est encourue, à l'exception de toute autre peine ou mesure, lorsqu'ils ont été commis avant le 18 mai 1995

Que, le législateur a entendu exclure du bénéfice de l'amnistie les infractions pour lesquelles une peine ou une mesure autre que l'amende peut être prononcée, peu important qu'il y eût encore utilité à les prononcer et quelqu'en soit la nature;

Considérant que, l'article 12 de la loi du 9 juillet 1976, dans sa rédaction issue de la loi du 10 janvier 1991, applicable aux faits de la cause, prévoit que le tribunal ordonne, s'il y a lieu, la suppression, l'enlèvement ou la confiscation de la publicité interdite aux frais des délinquants;

Considérant que, dans ces conditions, les infractions à la loi du 9 juillet 1976, n'entrent pas dans le champ d'application de la loi d'amnistie susvisée;

Sur le moyen tiré de la transaction

Considérant que, la transaction invoquée par le prévenu avait pour objet des publicités parues dans le Point et l'Auto Journal;

Qu'elle n'a donc pas affecté les droits de la partie civile de demander réparation du préjudice résultant des publicités illicites parues dans d'autres organes de presse;

Que l'action de la partie civile n'est donc pas éteinte par suite d'une transaction;

Sur le moyen tiré du désistement de la partie civile

Considérant que, la partie civile qui prend l'initiative de saisir de son action civile le juge de la répression met en mouvement l'action publique;

Considérant toutefois que, dans cette hypothèse, lorsque la partie civile se désiste, le tribunal n'a pas à statuer sur l'action publique, si le Ministère public ne le requiert pas expressément;

Considérant que, dans ces conditions l'action publique n'est pas éteinte;

Considérant que, si le désistement de la partie civile qui lui interdit d'agir à nouveau devant le juge répressif, ne peut être limité à certaines personnes et doit intervenir "in rem", encore faut-il que les personnes contre lesquelles une poursuite est engagée à la suite de ce désistement aient été connues et parties dans la procédure de citation directe initiale;

Que, c'est seulement au moment de l'audience que les parties civiles ont connu l'identité de l'auteur principal de l'infraction;

Qu'elles ont estimé opportun de se désister de leur action contre les co-auteurs de l'infraction, pour pouvoir faire citer l'auteur principal;

Qu'en conséquence, leur désistement n'emportait pas renonciation à l'utilisation de la voie pénale pour obtenir réparation de leur préjudice à l'encontre de l'auteur principal qui n'était pas connu lors de l'introduction de l'instance par voie de citation directe à la demande de la partie civile;

Que, le moyen tiré de l'irrecevabilité de la constitution de partie civile du CNCT et de la Ligue contre la fumée du tabac en public doit donc être écarté;

Que, le jugement déféré doit donc être confirmé en ce qu'il a accueilli la constitution de partie civile du CNCT et de la Ligue contre la fumée du tabac en public;

Sur les infractions à la loi du 9 juillet 1976

* Sur la représentation des marques C et Y:

Considérant que, la loi du 9 juillet 1976, dans sa rédaction applicable aux faits de la cause dans les cas où elle autorisait la publicité en faveur du tabac ou des produits du tabac, ne pouvait comporter d'autre représentation graphique ou photographique, outre celle du produit et de son emballage, que celle de l'emblème de la marque;

Considérant que, la publicité en faveur de la marque C, représentait un chameau dans le désert sur un fond de pyramide à proximité d'une colonne, la patte avant gauche de l'animal étant tordue, alors que l'emblème de la marque le montre avec les quatre pattes dans la même position sur un fond de désert et d'oasis, mais ne comportant pas de colonnes;

Que, ces modifications outre le caractère malicieux de la posture du chameau, constituent une modification de l'emblème habituel de la marque;

Considérant qu'un emblème modifié de la marque a été déposé à l'INPI, mais que ce dépôt n'autorise pas son utilisation publicitaire illicite;

Considérant que, comme l'ont retenu les premiers juges cette modification constitue une infraction aux dispositions de l'article 8 de la loi précitée;

Considérant que, la présentation des cigarettes Y constitue un montage élaboré et complexe de plusieurs paquets de cigarettes, sur un fond de couleur fauve entouré d'un filet bleu;

Que, ce montage était destiné à valoriser le produit qui devenait ainsi un élément d'un style de vie attrayant;

Qu'il ne s'agit donc pas de la représentation du produit et de son emballage, seule autorisée par l'article 8 de la loi du 9 juillet 1976;

* Sur le libellé du message sanitaire

Considérant que, le droit d'un fabricant de cigarettes d'exprimer son opinion ne l'autorise pas à faire échec à la loi;

Considérant que, le législateur, dans la mesure où il autorisait la publicité en faveur du tabac, imposait qu'elle soit accompagnée d'un avertissement sanitaire destiné à éclairer le consommateur sur les dangers du tabac;

Considérant que, le libellé de l'avis est strictement défini par les textes;

Considérant que, l'adjonction du terme "selon" qui peut signifier que fumer n'est pas dangereux en soi, mais parce que le législateur en a décidé ainsi, ce que le prévenu ne dénie pas puisqu'il invoque précisément la liberté d'opinion pour justifier cette adjonction, ce qui affaiblit, en raison de son ambiguïté même, la portée du message;

Considérant que, les infractions à la loi précitées sont caractérisées dans tous leurs éléments;

* Sur l'imputabilité des infractions à Monsieur W

Considérant que, les premiers juges, par des motifs pertinents que la cour adopte ont relevé que Monsieur W est gérant de la société X GmbH qui a réalisé la conception de ces publicités et acheté les espaces publicitaires;

Qu'ils l'ont donc à juste titre retenu dans les liens de la prévention;

Considérant que, dans ces conditions, le jugement déféré doit être confirmé tant sur la déclaration de culpabilité que sur la peine prononcée laquelle est équitable;

Sur l'action civile

Considérant que, le Comité national contre le tabagisme, et la Ligue contre la fumée du tabac en public, associations qui ont été créées pour lutter contre le tabagisme et ont été reconnues d'utilité publique à cet effet, subissent, en raison de la spécificité du but et de l'objet de leur mission, un préjudice direct et personnel du fait d'une publicité illicite en faveur du tabac ou des produits du tabac, un préjudice dont elles sont recevables à demander réparation;

Qu'en effet, le CNCT déploie pour la sauvegarde de la santé, notamment par de nombreuses campagnes d'information et par l'édition d'une publication périodique, des efforts constants de lutte contre le tabagisme, qui sont contrariés par les agissements du prévenu;

Que, la cour estime au vu de l'ampleur de la campagne publicitaire entreprise par le prévenu insuffisant le montant des dommages et intérêts alloués au CNCT et possède les éléments pour évaluer son préjudice à 600 000 F;

Que, les premiers juges ont, en revanche, fait une exacte appréciation du préjudice résultant directement pour la Ligue contre la fumée du tabac en public, partie civile des agissements de Monsieur W;

Que, dés lors, il y a lieu d'infirmer le jugement attaqué sur les dommages-intérêts alloués au CNCT et de condamner le prévenu à lui payer la somme de 600 000 F et de le confirmer sur ceux accordé à la ligue contre la fumée du tabac en public;

Sur la mise en cause de la société en qualité de civilement responsable:

Considérant que, la société X GmbH ne saurait être retenue comme civilement responsable du président de son conseil d'administration;

Qu'en effet, Monsieur W qui l'engage et l'oblige n'est pas son préposé, que dés lors il y a lieu de mettre la société X GmbH hors de cause;

Sur la demande sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale:

Considérant que, la demande d'une somme de 60 000 F formulée par le Comité national contre le tabagisme au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale pour les frais irrépétibles exposés par lui devant la cour, est justifiée dans son principe, mais doit être limitée à 5 000 F;

Considérant que la demande d'une somme de 10 000 F, formulée par la Ligue contre la fumée du tabac en public, est justifiée, mais doit être ramenée à la somme de 1 500 F;

Sur la demande du prévenu sur le fondement de l'article 472 du Code de procédure pénale:

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la constitution de partie civile du CNCT et de la Ligue contre la fumée du tabac en public n'est pas abusive;

Que, la demande de Monsieur W et de la société X GmbH n'est donc pas fondée et qu'il y a lieu de les en débouter;

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement, Rejette les conclusions de Messieurs L et S et la société X France qui ne sont pas dans la cause, Rejette les conclusions de Monsieur W et de la société X GmbH tendant à voir appliquer la loi d'amnistie et à constater le désistement des parties civiles, Rejette les conclusions de relaxe de Monsieur W, Sur l'action publique: Confirme le jugement déféré tant sur la déclaration de culpabilité que sur la peine prononcée, Sur l'action civile: Infirme le jugement sur les dommages-intérêts alloués au Comité national contre le tabagisme partie civile, Condamne Monsieur W à lui payer la somme de 600 000 F à titre de dommages-intérêts, Confirme le jugement attaqué sur les dommages-intérêts alloués à la Ligue contre la fumée du tabac en public et sur la condamnation du prévenu en remboursement des frais irrépétibles exposés en première instance par le Comité national contre le tabagisme et la Ligue contre la fumée du tabac en public, Sur la condamnation du civilement responsable: Met hors de cause la société X GmbH; Sur les frais irrépétibles exposés en cause d'appel: Condamne Monsieur W à payer: 1°) au Comité national contre le tabagisme la somme de 5 000 F sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, 2°) à la Ligue contre la fumée du tabac en public la somme de 1 500 F sur ce même fondement; Sur la demande du prévenu sur le fondement de l'article 472 du Code de procédure pénale: Déboute Monsieur W de sa demande en dommages-intérêts; Dit inopérants, mal fondés ou extérieurs à la cause, tous autres moyens, fins ou conclusions contraires ou plus amples, les rejette. Le tout en application des articles 8 dans sa rédaction alors applicable et 12 de la loi n° 76-616 du 9 juillet 1976, 512 et 515 du Code de procédure pénale.