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Décisions

CA Grenoble, 1re ch. corr., 6 septembre 2000, n° 99-01608

GRENOBLE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Ministère public, Chambre syndicale de l'ameublement de l'Isère

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Fayol-Noireterre

Conseillers :

Mme Robin, M. Balmain

Avocat :

Me Martin

T. corr. Grenoble, 1er ch. corr., du 10 …

10 mai 1999

LA COUR,

Par jugement du 10 mai 1999 le Tribunal correctionnel de Grenoble a notamment déclaré la SA X France coupable de soldes saisonnières en dehors des périodes autorisées et l'a condamnée à 200 000 F d'amende, à la publication de sa décision et à des réparations civiles envers la Chambre syndicale de l'ameublement de l'isère.

Appel a été successivement relevé par la prévenue puis par le Procureur de la République.

La SA X France conclut à sa relaxe aux motifs que l'arrêté préfectoral du 24 novembre 1997 fondant les poursuites ne régit que la seule période des soldes annuelles pour l'année 1998 alors que la poursuite vise des faits de fin 1997 et abroge explicitement l'arrêté du 16 décembre 1996 fixant la période des soldes pour l'année 1997, que la période des soldes d'hiver dans l'Isère commençait de toutes façons le 2 janvier 1998, l'inopposabilité de l'arrêté préfectoral qui n'avait pas été porté à sa connaissance, et en contestant que l'opération de promotion en cause ait constitué des soldes au sens de la loi du 5 juillet 1996 dès lors qu'elle ne tendait pas explicitement à l'écoulement accéléré d'un stock déterminé et que les marchandises proposées étaient renouvelables.

Le Ministère public demande la confirmation pure et simple du jugement.

Sur l'action publique:

Il résulte de l'enquête préliminaire et des débats devant le premier juge et la cour que les faits reprochés à la SA X France ont été exactement retenus, qualifiés et sanctionnés par le premier juge.

1. Il résulte clairement des énonciations du procès-verbal des agents de la Direction départementale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes et même des conclusions de la défense, que la SA X France a organisé à partir du 30 décembre 1997 jusqu'au 5 janvier 1998 une opération" grande opération prix barrés "portant sur des articles identifiés par des affichettes portant l'ancien prix, le nouveau, et le pourcentage de réduction appliqué. Cette opération concernait d'une part des articles d'exposition, d'autres part des articles en stock, et parmi ceux-ci des articles susceptibles de suivis et d'autre qui n'étaient pas réaprovisionables. Le procès-verbal retient que 21 produits, soit la majorité de ceux pour lesquels les représentants de la SA X France ont bien voulu répondre aux questions posées, étaient présentés comme de la marchandise en stock ou d'exposition et n'étaient pas susceptibles de réapprovisionnement L'opération promotionnelle de la SA X France s'analyse ainsi en une vente en solde, encore que son objectif ait pu être également de se faire prendre pour des soldes, mais la publicité de nature à induire en erreur n'est pas visé par la poursuite et la cour n'est donc pas saisie des faits correspondants.

Une telle opération de solde constitue un tout. Elle tombe globalement sous le coup de la loi dès lors qu'elle a été délibérément lancée avant la période autorisée et quand bien même elle se serait achevée durant la période autorisée.

2. La cour ne partage absolument pas l'analyse juridique de la défense sur une prétendue obligation d'information individuelle de chaque commerçant par le préfet pour que l'arrêté portant fixation de la date des soldes autorisées lui soit opposable. Il s'agit en effet par sa généralité (l'ensemble des commerçants du département) d'un acte administratif réglementaire et non d'un acte administratif individuel ne s'adressant qu'à quelques individus en nombre limité, et sauf exception prévue par une disposition légale ou réglementaire que la cour malgré ses recherches n'a pas retrouvée en l'espèce et que la SA X France n'indique pas dans ses conclusions, les actes administratifs réglementaires sont opposables à tous les administrés à compter de leur publication dans l'organe de presse prévu pour les recevoir.

S'agissant d'un arrêté préfectoral sa publication effective au recueil périodique des actes administratifs de la préfecture de l'Isère suffit, et il appartient aux professionnels de s'y référer, étant rappelé que la circulaire visée est manifestement interne à l'administration et dénuée de tout caractère réglementaire. En outre, s'agissant d'une professionnelle parfaitement outillée au point de vue juridique, d'une part la SA X France ne saurait sérieusement soutenir qu'elle ignorait que la date des soldes périodiques est fixée par arrêté préfectoral, département par département, et d'autre part ne serait en tout état de cause pas excusable de ne pas s'être renseigné sur le régime juridique d'une forme de vente ayant l'importance des soldes, notamment dans l'ameublement. Il est au contraire évident que l'opération en cause a été manifestement calculée de façon délibérée pour devancer de quelques jours la période des soldes légales, commençant le 2 janvier 1998 afin de s'octroyer un avantage indu sur les concurrents respectant la loi.

3. L'abrogation de l'arrêté préfectoral annuel fixant les dates des soldes autorisées pour l'année civile en cause n'a ni pour objet ni pour effet d'autoriser les soldes durant la période de l'année civile qui reste à courir. Au contraire, en supprimant les exceptions au principe général d'interdiction posé par la loi, son effet ne peut être que de les interdire pour le cas où dans cette période restant à courir seraient compris des jours durant lesquels les soldes auraient été précédemment autorisées.

Sur l'action civile:

Il résulte de ce qui précède que la décision sur l'action civile, non autrement critiquée, sera purement et simplement confirmée par voie de conséquence.

Par ces motifs, LA COUR, Reçoit les appels de la SA X France et du Ministère public contre le jugement rendu le 10 mai 1999 par le Tribunal correctionnel de Grenoble; Confirme le jugement en toutes ses dispositions critiquées; Dit que la publication s'effectuera comme ordonnée par le premier juge, sauf à ajouter après les références du jugement la mention "purement et simplement confirmé par arrêt de la Cour d'appel de Grenoble du 6 septembre 2000"; Constate que le présent arrêt est assujetti au droit fixe résultant de l'article 1018 A du Code général des impôts à la charge du condamné; Le tout par application de l'article 31 de la loi 96-603 du 5 juillet 1996.