CA Bordeaux, 3e ch. corr., 25 février 2000, n° 99-00580
BORDEAUX
Arrêt
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Robert (faisant fonction)
Conseillers :
M. Minvielle, Mme Chamayou-Dupuy
Avocat :
Me Joseph
Rappel de la procédure
Par actes en date du 11 mai 1999 reçus au Secrétariat-greffe du Tribunal de police de Bordeaux, le prévenu et le Ministère public ont relevé appel d'un jugement contradictoire, rendu par ledit tribunal le 4 mai 1999, à l'encontre de G Gilles Marie poursuivi comme prévenu:
* d'avoir le 11 août 1997, en dehors d'une agglomération érigé ou maintenu un panneau publicitaire à moins de 200 mètres d'une voie rapide, à savoir la rocade A 630 sur la commune de Bègles, en l'espèce un panneau intitulé " Dr KNOCK - Supermarché Vert, 1re à droite ou sortie 20 Bègles centre à mn ";
Fait prévu par l'article 9 alinéa 2 du Décret 76-148 du 11 février 1976 et réprimé par l'article 11 alinéa 1 du Décret 76- 148 du 11 février 1976.
LE TRIBUNAL
A déclaré Monsieur G Gilles Marie coupable des faits qui lui sont reprochés,
En répression, a condamné Monsieur G Gilles Marie à une peine d'amende de 8 000 F en application de l'article 11 alinéa 1 du Décret 76-148 du 11 février 1976.
A ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.
Sur la recevabilité des appels
Les appels successivement interjetés par le prévenu et le Ministère public sont recevables pour avoir été déclarés dans les formes et délais de la loi;
Prétentions des parties
Le prévenu demande à être relaxé des fins de la poursuite.
Il soulève une exception de nullité du procès-verbal constatant l'infraction, pour non-visa du deuxième alinéa de l'article 9 du décret du 11 février 1976 et absence de lettre de mise en demeure avant poursuite.
Il en déduit la nullité de toutes les procédures subséquentes. Il conteste la réalité de l'infraction et le fondement de la poursuite sur la base de cette disposition.
Il expose
- que le panneau incriminé est implanté en agglomération et que le tribunal s'est fondé sur une application inexacte de cette notion, car la portion de voie rapide sur laquelle le panneau est visible est bien inclue dans le périmètre d'une agglomération, balisé par des plaques d'entrée et de sortie d'agglomération EB 10 et EB 20.
- que dès lors il n'est pas besoin de rechercher si ces espaces ainsi délimités présentent ou non un caractère urbanise.
- que la jurisprudence administrative considère que lorsqu'un maire décide de l'implantation de panneaux d'agglomération au delà des limites réelles de celles-ci, l'administration doit assumer les conséquences de ces décisions et admettre la présence de panneaux publicitaires dans des espaces agglomérés ainsi définis.
Enfin il fait valoir qu'une circulaire de l'équipement n° 76-81 à la quelle les professionnels doivent se référer prévoit que c'est la localisation du dispositif publicitaire qui constitue le facteur décisif de mise en œuvre de la servitude, et non celle de la voie rapide, non plus que celle de l'automobiliste.
Qu'enfin les panneaux litigieux situés sur la commune de Villenave d'Ornon ou de Bègles sont inclus dans une zone de publicité restreinte par dérogation aux dispositions de l'article 9 du décret du 11 février 1976.
Il ajoute oralement que le procès-verbal ne saurait servir de base aux poursuites, alors même qu'il ne précise pas selon quel paramètre les calculs de distance ont été faits, puisqu'aussi bien la notion de visibilité depuis une voie rapide diffère en fonction du sens de marche des véhicules qui y circulent.
Le Ministère public requiert la confirmation de la décision sur la déclaration de culpabilité et la peine.
Motivation
Sur l'exception de nullité
Il est constant que toute exception de nullité de la citation doit être soulevée in limine litis en vertu de l'article 385 du Code de procédure pénale.
Qu'il ne résulte, ni de la lecture du jugement déféré, ni des notes d'audience que ce moyen ait été soulevé devant le premier juge avant toute défense au fond,
Qu en conséquence cette exception de nullité présentée pour la première fois devant la cour est irrecevable,
Qu'en ce qui concerne les mises en demeure avant poursuites le prévenu en a reçu plusieurs ce qui lui a permis de discuter la position de l'administration, sans qu'il ait voulu modifier l'implantation reprochée.
Au Fond
Attendu qu'il est constant que le 11 août 1997 a été constaté par un procès-verbal de la Direction Départementale de l'Equipement que la société X dont le prévenu est gérant, a fait ériger un panneau publicitaire portant la mention "Docteur KNOCK supermarché vert" au droit du PR 34 et 480 de la rocade A.630 sens intérieur de la commune de BEGLES, à 20 mètres du bord extérieur droit de la chaussée ".
Attendu qu'il n'est pas fait état pour la commune de Bègles de l'existence de zone de publicité restreinte, dont il est soutenu qu'elle serait de nature à constituer un mode dérogatoire à l'application des dispositions du décret de 1976.
Attendu que l'article 9 du décret 76-148 du il février 1976 institué dans l'intérêt de la sécurité routière sur les voies ouvertes à la circulation publique, dispose en son alinéa 2 qu'en dehors des agglomérations, la publicité visible d'une voie rapide est interdite de part et d'autre de celle-ci sur une largeur de 200 mètres mesurée à partir du bord extérieur de la chaussée,
Que cette disposition qui est la seule à laquelle il importe de se référer, à l'exclusion de toute circulaire, émanerait elle des services de l'équipement, impose une servitude générale de reculement de 200 mètres, dont l'assiette est matériellement fixée de chaque côté de la voie publique et ne saurait être calculée en fonction du sens de marche des usagers de la voie.
Attendu que l'article R.1 du Code de la route définit l'agglomération comme un espace sur lequel sont groupé des immeubles bâtis rapprochés et dont l'entrée et la sortie sont signalés par des panneaux placés à cet effet le long de la route qui le traverse ou qui le borde.
Attendu qu'aucun panneau de ce type n'est disposé sur la voie rapide A.630, ainsi qu'en atteste le procès-verbal de la Direction Départementale de l'Equipement qui fait foi jusqu'à preuve contraire,
Que cette voie ne se trouve donc pas située en agglomération.
Que le prévenu ne conteste pas que le panneau litigieux ait été implanté à moins de 200 mètres du bord extérieur de la chaussée de cette voie.
Que peu importe dès lors qu'il se trouve à 20 mètres comme l'établit le procès-verbal, ou à quarante mètres comme le soutient le prévenu, puisqu'il ne respecte en aucun cas le reculement de 200 mètres imposé par l'article 9 alinéa 2 du décret susvisé, par l'implantation des publicités visibles d'une voie rapide, en dehors des agglomérations.
Attendu que dès lors c'est par une exacte analyse des faits dont il était saisi que le tribunal a retenu la culpabilité du prévenu.
Qu'en revanche il apparaît que la sanction prononcée par le tribunal est d'une excessive sévérité et il y a lieu de condamner le prévenu à une amende de 800 F pour la contravention constatée.
Par ces motifs, LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement et contradictoirement. Déclare recevables les appels interjetés, Déclare irrecevable l'exception de nullité de la citation, Confirme le jugement déféré sur la qualification des faits et la déclaration de culpabilité, Le réformant sur la peine, Condamne Gilles G à 800 F d'amende pour la contravention constatée. La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de huit cent F dont est redevable chaque condamné par application de l'article 1018 A du Code général des impôts.