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Décisions

CA Dijon, ch. corr., 25 avril 2002, n° 01-00253

DIJON

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Masson-Berra

Conseillers :

M. Bray, Mme Clerc

Avocats :

Mes du Parc, de Mez, Roussot, Mathieu, Brunet, Grebot, Lorrillière, SCP Dubos Pelissie Prunier, de Bauge, Franck.

TGI Macon, ch. corr., du 21 févr. 2001

21 février 2001

LA COUR,

Faits et procédure:

A Philippe, B Jean, G et S Yves, ont été poursuivis devant le Tribunal correctionnel de Macon en vertu d'une ordonnance de renvoi du 17-08-2000 rendue par le Juge d'instruction de ce tribunal pour avoir, sur toute le territoire national et notamment dans le département de Saône-et-Loire,

A Philippe, B Jean et S Yves:

- courant 1996-1997, falsifié des denrées servant à l'alimentation de l'homme ou des animaux de nature à nuire à la santé de l'homme ou de l'animal, en l'espèce en administrant à des bovins des substances anabolisantes ou chimiques prohibées;

A Philippe et B Jean:

- de mai à juillet 1997, détourné des objets placés sous main de justice, en l'espèce des bovins qui avaient été placés sous scellés le 2 mai 1997 par le Juge d'instruction au Tribunal de grande instance de Macon

S Yves:

et à Sémur en Brionnais, détenu dans des lieux ou hébergés les animaux dont la viande ou les produits sont destinés à l'alimentation humaine ou animale, des produits propres à effectuer la falsification des denrées servant à l'alimentation de l'homme ou des animaux, nuisibles à leur santé.

Infractions prévues et réprimées par les articles L. 213-1, L. 213-3, L. 213-4, L. 215-1 à L. 215-4, L. 215-6, L. 215-10 à L. 215-17, L. 216-1 à L. 216-9 du Code de la consommation, 434-22, 434-44 du Code pénal;

Il a été fait appel du jugement dont la teneur suit:

Statuant publiquement et par jugement contradictoire,

1. Sur l'action publique:

Relaxe Monsieur S Yves du chef de falsification de denrées servant à l'alimentation de l'homme ou des animaux de nature à nuire à leur santé et le déclare coupable de détention de produits propres à effectuer la falsification des denrées servant à l'alimentation de l'homme ou des animaux, nuisibles à leur santé

Condamne S Yves à la peine de quinze mois d'emprisonnement; Dit qu'il sera sursis à l'exécution de la peine d'emprisonnement qui vient d'être prononcée contre lui;

Le condamne en outre à 40 000 F d'amende;

Déclare Monsieur B Jean G coupable de Falsification de denrées servant à l'alimentation de l'homme ou des animaux, de nature à nuire à leur santé et détournement d'objets placés sous main de justice

Condamne B Jean G à la peine de deux ans d'emprisonnement; Dit qu'il sera sursis à l'exécution de la peine d'emprisonnement qui vient d'être prononcée contre lui; Le condamne en outre à 50 000 F d'amende.

Déclare Monsieur à Philippe coupable de falsification de denrées servant à l'alimentation de l'homme ou des animaux, de nature à nuire à leur santé et détournement d'objets placés sous main de justice.

Condamne à Philippe à la peine de dix-huit mois d'emprisonnement; Dit qu'il sera sursis à l'exécution de la peine d'emprisonnement qui vient d'être prononcée contre lui;

Le condamne en outre à 40 000 F d'amende.

Ordonne aux frais des condamnés la publication du dispositif du présent jugement dans les journaux suivants: le Monde, le Courrier de Saône-et-Loire - 9 rue des Tonneliers à Chalon-sur-Saône; La France Agricole - 8 cité du Paradis 75493 Paris; l'Exploitant Agricole - maison de l'Agriculture 71000 Macon sans que les frais de chacune des insertions dépassent la somme de 10 000 F HT;

Prononce la confiscation au profit de l'Etat des scellés saisis et déposés au Greffe sous les n° PAC 23-98, 24-98, 25-98, 418-98, 419-98;

Compte tenu de l'absence des condamnés lors du prononcé du jugement, le Président n'a pu donner l'avis prévu par l'article 132-29 du Code Pénal;

2. Sur l'action civile:

Par jugement contradictoire à l'égard de la FDSEA de Saône-et-Loire,

Par jugement contradictoire à l'égard de l'UFC Que Choisir

Par jugement contradictoire à l'égard de la Fédération Nationale Bovine,

Par jugement contradictoire à l'égard de la Chambre de l'Agriculture de Saône-et-Loire,

Par jugement contradictoire à l'égard de la Confédération Syndicale du Cadre de Vie,

Par jugement contradictoire à l'égard de la Fédération Départementale des Coopératives Agricoles de Saône-et-Loire,

par jugement contradictoire à l'égard de GECSEL,

Par jugement contradictoire à l'égard du Centre Départemental des Jeunes Agriculteurs de Saône-et-Loire,

Par jugement contradictoire à l'égard de la SNIA,

Par jugement contradictoire à l'égard de la Fédération Syndicale "La Confédération Paysanne,

Par jugement contradictoire à l'égard du Groupement Départemental de Défense Sanitaire de Saône-et-Loire,

Reçoit la Fédération Départementale des Syndicats d'Exploitants Agricoles de Saône-et-Loire (FDSEA) en sa constitution de partie Civile;

Déclare B Jean-G, à Philippe et S Yves responsables du préjudice subi par la partie civile;

Condamne solidairement B Jean-G, à Philippe et S Yves à payer avec intérêts légaux à compter du présent jugement, les sommes de:

- 20 000 F à titre de dommages et intérêts;

- 5 000 F sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale;

Reçoit le Centre Départemental des Jeunes Agriculteurs de Saône-et-Loire (CDJA) en sa constitution de partie civile;

Déclare B Jean-G, à Philippe et S Yves responsables du préjudice subi par la partie civile;

Condamne solidairement B Jean-G, à Philippe et S Yves à payer avec intérêts légaux à compter du présent jugement les sommes de:

- 20 000 F à titre de dommages et intérêts;

- 5 000 F sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale

Reçoit la Fédération Départementale des Coopératives Agricoles de Saône-et-Loire (FDCA) en sa constitution de partie civile;

Déclare B Jean-G, à Philippe et S Yves responsables du préjudice subi par la partie civile;

Condamne solidairement B Jean-G, à Philippe et S Yves à payer avec intérêts légaux à compter du présent jugement, les sommes de:

- 20 000 F à titre de dommages et intérêts

- 5 000 F sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale

Reçoit la Chambre d'Agriculture de Saône-et-Loire en sa Constitution de partie civile;

Déclare B Jean-G, à Philippe et S Yves responsables du préjudice subi par la partie civile;

Condamne solidairement B Jean-G, à Philippe et S Yves à payer avec intérêts légaux à compter du présent jugement, les sommes de:

- 20 000 F à titre de dommages et intérêts;

- 5 000 F sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale;

Reçoit le Groupement Départemental de Défense Sanitaire de Saône-et-Loire (GDDS) en sa constitution de partie civile;

Déclare B Jean-G, à Philippe et S Yves responsables du préjudice subi par la partie civile;

Condamne solidairement B Jean-G, à Philippe et S Yves à payer avec intérêts légaux à compter du présent jugement, les sommes de:

- 20 000 F à titre de dommages et intérêts;

- 5 000 F sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale;

Reçoit la Fédération Nationale Bovine en sa constitution de partie civile;

Déclare B Jean-G, à Philippe et S Yves responsables du préjudice subi par la partie civile;

Condamne solidairement B Jean-G, à Philippe et S Yves à payer avec intérêts légaux à compter du présent jugement, les sommes de:

- 20 000 F à titre de dommages et intérêts

- 5 000 F sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale;

Reçoit la Fédération Syndicale "Confédération Paysanne" en sa constitution de partie civile;

Déclare B Jean-G, à Philippe et S Yves responsables du préjudice subi par la partie civile;

Condamne solidairement B Jean-G, à Philippe et S Yves à payer avec intérêts légaux à compter du présent jugement, les sommes de:

- 20 000 F à titre de dommages et intérêts;

- 5 000 F sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale;

Rejette la demande de publication du jugement présentée par la partie civile;

Reçoit le Syndicat National des Industriels de la Nutrition Animale (SNIA) en sa constitution de partie civile;

Déclare B Jean-G, à Philippe et S Yves responsables du préjudice subi par la partie civile;

Condamne solidairement B Jean-G, à Philippe et S Yves à payer avec intérêts légaux à compter du présent jugement, les sommes de:

- 20 000 F à titre de dommages et intérêts;

- 5 000 F sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale

Rejette les demandes en exécution provisoire et en publication du jugement présentées par la partie civile;

Reçoit l'Union Fédérale des Consommateurs UFC Que Choisir en sa constitution de partie civile;

Déclare B Jean-G, à Philippe et S Yves responsables du préjudice subi par la partie civile;

Condamne solidairement B Jean-G, à Philippe et S Yves à payer avec intérêts légaux à compter du présent jugement, les sommes de:

- 20 000 F à titre de dommages-et-intérêts

- 5 000 F sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale;

Rejette la demande de publication du jugement présentée par la partie civile;

Reçoit l'Association Consommation Logement Cadre de Vie "CLCV" anciennement dénommée Confédération Syndicale du Cadre de Vie en sa constitution de partie civile;

Déclare B Jean-G, à Philippe et S Yves responsables du préjudice subi par la partie civile;

Condamne solidairement B Jean-G, à Philippe et S Yves à payer avec intérêts légaux à compter du présent jugement, les sommes de:

- 20 000 F à titre de dommages et intérêts

- 5 000 F sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale

Rejette les demandes en exécution provisoire et en publication du jugement présentées par la partie civile;

Reçoit l'Union des Sociétés Coopératives Agricoles GECSEL en sa constitution de partie civile;

Déclare B Jean-G, à Philippe et S Yves responsables du préjudice subi par la partie civile

Condamne solidairement B Jean-G, à Philippe et S Yves à payer avec intérêts légaux à compter du présent jugement, les sommes de:

- 10 000 F à titre de dommages et intérêts

- 5 000 F sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale

Condamne solidairement B Jean G, à Philippe et S Yves aux dépens de l'action civile;

Ce jugement a été frappé d'appel par:

Monsieur à Philippe, prévenu, le 28 Février 2001, appel principal général,

M. le Procureur de la République, le 28 Février 2001, appel incident des dispositions pénales, contre à Philippe,

Monsieur B Jean, prévenu, le 02 mars 2001, appel principal général,

M. le Procureur de la République, le 02 mars 2001, appel incident des dispositions pénales, contre B Jean L'association Consommation Logement Cadre de Vie "CLCV", partie civile, le 02 mars 2001, appel incident des dispositions civiles,

L'union Fédérale des Consommateurs Que Choisir (UFC), et La Fédération Nationale Bovine, parties civiles, le 02 mars 2001, appel incident des dispositions civiles Monsieur S Yves, prévenu, le 05 Mars 2001, appel principal général,

M. le Procureur de la République, le 05 Mars 2001, appel incident des dispositions pénales contre S Yves,

Le Syndicat National des Industriels de La Nutrition Animale (SNIA), partie civile, le 7 mars 2001, appel incident des dispositions civiles,

La Confédération Paysanne, Syndicat pour une Agriculture Paysanne et La Défense des Travailleurs, partie civile, le 8 mars 2001, appel incident des dispositions civiles,

Décision:

La Cour, après en avoir délibéré,

Sur l'action publique:

Attendu que la non-comparution du témoin Colin, qui a donné lieu à un incident joint au fond, est excusée par un certificat médical;

Que l'absence de l'intéressé a donc une cause valable et légitime et qu'il n'y a pas lieu d'ordonner sa comparution forcée, ou de renvoyer l'affaire;

Attendu que les trois prévenus demandent à la Cour de les relaxer des fins de la poursuite;

Que B et à ont déposé des conclusions dans lesquelles ils soutiennent, d'une part qu'ils n'ont pas administré d'anabolisants aux vaches qu'ils engraissaient et que le dossier ne rapporte nullement la preuve contraire, d'autre part, que c'est sans intention frauduleuse qu'ils ont revendu une partie de leurs bêtes placées sous main de justice;

Attendu que B conteste également l'intérêt à agir d'une partie civile et pour toutes les parties civiles, l'existence d'un préjudice sinon de pur principe;

Attendu qu'il résulte des pièces de la procédure que courant 1996, le directeur des services vétérinaires de Saône-et-Loire, qui suspectait quatre engraisseurs, dont les trois prévenus, d'utiliser des anabolisants pour agir sur la prise de poids des animaux, demandait l'ouverture d'une enquête;

Qu'une information était ouverte et qu'à l'issue de celle-ci B, à et S étaient renvoyés devant le tribunal sous la prévention sus-énoncée;

Sur la culpabilité de B:

Attendu que sur les 19 prélèvements d'urine effectués sur des vaches appartenant au prévenu, Il se sont avérés positifs avec présence de nandrolone, molécule ayant des propriétés anabolisantes, et d'épinandrolone qui est un produit de transformation de la nandrolone par les bovins;

Attendu qu'après que l'expert Devaux ait procédé à des vérifications pour s'assurer que les vaches n'étaient pas gestantes au moment des prélèvements, ce qui aurait pu expliquer la présence des substances précitées, les experts André et Le Bizec ont conclu que pour 8 bêtes (sur les trois autres: 1 était morte et 2 avaient avorté) cette présence ne pouvait être due qu'à une administration exogène de nandrolone ou de l'un de ses esters (D598);

Attendu que selon le prévenu les opérations d'expertise comportent des irrégularités, dont il reconnaît qu'en application de l'article 385 du Code de procédure pénale, elles ne peuvent entraîner de nullité, mais pour lesquelles il soutient qu'elles ont porté atteinte aux droits de la défense et qu'elles affectent la force probante de l'expertise;

Attendu que contrairement à ce qu'il prétend les procès-verbaux établis par le vétérinaire inspecteur qui a procédé aux prélèvements d'urine, exposent suffisamment les circonstances dans lesquelles il a effectué ceux-ci;

Attendu ensuite que les numéros d'ordre des prélèvements ne figurent pas dans ces procès-verbaux mais qu'ils sont indiqués en face du numéro de chaque animal dans le procès-verbal des gendarmes, officiers et agents de police judiciaire qui assistaient le vétérinaire (D 237) et qui avaient qualité pour rechercher et constater les infractions au Code de la consommation;

Qu'il n'y a donc pas d'incertitude quant à l'attribution aux bovins de B, des résultats des analyses;

Attendu que le prévenu prétend également que toutes les bêtes, pour lesquelles des traces d'anabolisants ont été retrouvées, auraient avorté entre la date des prélèvements et celle de l'examen de l'expert Devaux;

Que cette affirmation gratuite est contredite par le fait qu'il n'a évoqué que deux avortements devant cet expert et qu'il n'a jamais effectué de déclaration en ce sens auprès des services vétérinaires, comme il en avait l'obligation;

Attendu enfin que si le rapport des experts ne précise pas la quantité de nandrolone et d'épinandrolone détectée, cette circonstance n'est pas de nature à remettre en cause les conclusions de ces spécialistes quant à l'origine exogène de ces substances;

Attendu que les conclusions des experts sont confortées par les déclarations de Raquin, qui, à l'époque des faits était ouvrier agricole chez le prévenu, et qui entendu comme témoin par la cour a précisé que les animaux étaient piqués, il ne savait pas avec quel produit, mais qui a réaffirmé (il l'avait déjà déclaré aux enquêteurs D 649) que son patron lui avait dit de ne pas en parler;

Que cette recommandation de B confirme que celui-ci procédait à l'injection de substances illicites;

Attendu que les autres moyens invoqués par le prévenu concernent des faits pour lesquels il n'est pas poursuivi (prélèvements opérés en 1994) Qu'ils portent également sur des indices de culpabilité retenus à son encontre, mais dont il est inutile de discuter le bien-fondé, dès lors que l'expertise confortée par la déposition de Raquin, établit suffisamment qu'il administrait des anabolisants à ses bovins;

Attendu que l'administration de substances anabolisantes à des animaux destinés à la consommation humaine étant interdite par la loi interne et par le droit communautaire en raison du danger qu'elle présente pour la santé humaine, il en résulte que la circonstance aggravante de l'article L. 213-3 du Code de la consommation est constituée, quelle que soit la quantité administrée;

Qu'il importe donc peu que les experts n'aient pas précisé la quantité de nandrolone ou d'épinandrolone retrouvée;

Attendu qu'en sa qualité de professionnel de l'engraissement des bovins, B ne pouvait ignorer ni l'existence de l'interdiction, ni la cause de celle-ci;

Que son intention frauduleuse est établie et que le premier délit est caractérisé;

Attendu en ce qui concerne la seconde infraction, qu'aux termes d'un procès-verbal de gendarmerie du 20 mai 1997, le prévenu a reconnu être informé que les bêtes lui appartenant qui se trouvaient sur son exploitation, faisaient l'objet d'une saisie conservatoire et qu'elles ne pouvaient quitter cette exploitation sans autorisation du magistrat instructeur qu'il reconnaît avoir cédé 139 de ces bovins, sans avoir sollicité l'autorisation du juge;

Attendu que le 20 mai 1997 le vétérinaire inspecteur lui a écrit que les animaux qui avaient fait l'objet de prélèvements ne pouvaient pas être vendus;

Que toutefois, au moins pour une partie des ventes, il ne peut prétendre que ce courrier l'a induit en erreur;

Qu'en effet, dès le 27 mai le même vétérinaire lui a adressé un courrier lui précisant que la notification qui lui avait été faite le 20 mai était annulée, dans la mesure où le magistrat instructeur avait opéré une saisie conservatoire;

Que cette lettre lui prescrivait de se référer aux instructions de ce magistrat

Attendu d'ailleurs que Michel Plat a déclaré aux enquêteurs (D373): "dans l'été 1997, j'ai revu B. Il est revenu chez moi pour me demander de me racheter des bêtes. Il m'a dit que son troupeau était consigné et malgré cela il m'a dit qu'il voulait m'en vendre";

Que les auditions ultérieures de Plat n'infirment nullement cette déclaration;

Attendu que la seconde infraction est donc également constituée;

Sur la culpabilité d'A:

Attendu que l'analyse des 15 prélèvements d'urine opérés sur des bovins appartenant à ce prévenu (le 16ème prélèvement concerne une bête qui n'était pas à lui) a révélé pour six des animaux la présence d'épinandrolone ou de nandrolone;

Attendu qu'après que l'expert Devaux ait constaté l'état de viduité de ces six animaux, les experts André et Le Bizec ont conclu (D 598) que cette présence ne pouvait s'expliquer que par une administration exogène;

Attendu qu'A qui a déclaré aux enquêteurs (D 238) qu'il s'en remettait à l'expert unique désigné par le magistrat instructeur, ne peut invoquer une violation des droits de la défense tenant à ce que l'un des experts n'a pas été choisi par lui;

Attendu ensuite qu'un rapprochement entre les mentions qui figurent sur le procès-verbal établi par les gendarmes lors des prélèvements (D23 8) et celles qui sont sur les rapports d'expertise (D 290,291 et 440) établit que les six bêtes concernées sont bien celles d'A et que ce sont bien elles dont l'expert Devaux a constaté l'état de viduité;

Attendu que les conclusions des experts André et Le Bizec en date du 27 décembre 1997 (D 447) sont dubitatives mais que celles qu'ils ont prises le 5 février 1999 (D 598), après que le magistrat instructeur leur ait demandé un complément d'expertise, sont affirmatives quant à l'origine exogène des anabolisants trouvés dans les urines;

Que l'absence d'indication du dosage de ceux-ci n'infirme pas ces dernières conclusions

Attendu que de son côté l'expert Devaux est formel quant au fait que les vaches concernées n'étaient pas gestantes au moment des prélèvements, le 20 mai 1997, sauf si celles-ci ont avorté entre cette date et celle où il les a examinées, le 20 août suivant (D 600);

Attendu que dans la mesure où le prévenu ne justifie pas qu'il ait fait à la Préfecture, des déclarations d'avortement pour ces bêtes et pour cette période, la cour est fondée à considérer que ces avortements ne se sont pas produits;

Qu'il y a eu un certain retard dans la notification des rapports d'expertise, mais qu'une contre expertise n'aurait pas fourni d'élément d'information supplémentaire quant à l'existence ou non d'avortement;

Attendu que les conclusions des experts sont confortées par le fait qu'en mars 1996, quatre prélèvements d'urine avaient été opérés sur des bovins dans l'exploitation du prévenu, et que l'un d'eux avait révélé la présence de méthyl testostérone, facteur de croissance interdit (D 1);

Attendu enfin que le prévenu ne justifie pas que d'autres personnes que lui intervenaient sur son exploitation agricole et que l'hypothèse selon laquelle il aurait été victime d'un acte de malveillance, alors que les prélèvements ont été faits de façon inopinée, n'est pas sérieuse;

Attendu comme il l'a déjà été exposé pour B, que l'utilisation des anabolisants qui a été faite est interdite;

Qu'elle présente un danger pour la santé de l'homme et qu'en raison de sa qualité de professionnel de l'engraissement, à ne pouvait l'ignorer;

Que le délit de falsification qui lui est reproché est donc caractérisé;

Attendu qu'il est constant que le prévenu s'est dessaisi d'une partie de son troupeau en violation de la saisie-conservatoire opérée à la demande du magistrat instructeur;

Qu'il prétend cependant que de bonne foi, il a cru que la saisie ne portait que sur les animaux qui avaient fait l'objet de prélèvements;

Attendu qu'A avait été clairement avisé de ses obligations, ainsi qu'il résulte de la déclaration qu'il a faite aux enquêteurs, qui le 20 mai 1997 lui ont présenté la liste des animaux qui se trouvaient sur son exploitation et auxquels il a répondu (D 252): "je suis informé que vous procédez à une saisie-conservatoire de ces animaux... Je suis informé que je dois aviser le juge mandant sous huitaine avant que ceux-ci ne quittent mon exploitation. Ces bêtes ne quitteront mon élevage que sur ordre de ce magistrat";

Attendu que c'est donc en connaissance de cause que le prévenu s'est dessaisi des bêtes et que le délit de l'article 434-22 du Code pénal qui lui est reproché est constitué;

Sur la culpabilité de S:

Attendu que la cour fait siens les motifs du jugement dont il résulte que l'intéressé doit être relaxé pour le délit de falsification qui lui est reproché, mais qu'il est coupable du délit de détention de produits propres à effectuer la falsification des denrées servant à l'alimentation de l'homme ou des animaux, nuisibles à leur santé, qui lui est imputé;

Sur les peines:

Attendu qu'eu égard à la gravité des faits, qui est certaine puisque ceux-ci ont mis en jeu la santé des consommateurs, et à la personnalité des prévenus, il y a lieu de condamner B et à à dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis et S à quinze mois d'emprisonnement avec sursis;

Qu'en outre en considération des bénéfices que procurent ces pratiques une amende significative doit être infligée aux intéressés;

Attendu ensuite que la publication de l'arrêt, sous forme d'extrait, sera ordonnée en application de l'article L. 216-3 du Code de la consommation;

Attendu enfin que la confiscation ordonnée est justifiée et doit être confirmée;

Sur l'action civile:

Attendu que les parties civiles justifient de leur qualité et de leur intérêt à agir;

Que d'ailleurs, seul l'intérêt à agir de l'Association CLCV est contesté, mais que l'existence de celui-ci découle de l'article 3 des statuts de cet organisme qui prévoit qu'il a pour objet, notamment: "la défense... des intérêts matériels et moraux des consommateurs";

Attendu que les agissements des prévenus ont causé un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif:

- des consommateurs dès lors que les produits en cause sont dangereux pour la santé de ceux-ci,

- des professionnels axés sur la production de viande de bovins et des exploitants agricoles en général, en les faisant apparaître comme malhonnêtes , en jetant la suspicion sur leurs produits et en créant une concurrence déloyale vis-à-vis de ceux qui respectent la réglementation;

Attendu qu'en fonction des éléments d'appréciation dont elle dispose, la cour estime que le préjudice causé à l'intérêt collectif des consommateurs doit être chiffré à 6 098 euro et celui causé aux producteurs de viande et aux exploitants agricoles à 10 675 euro;

Que ces sommes doivent être réparties par parts viriles entre les parties civiles respectivement concernées (2 pour la première catégorie et 7 pour la seconde);

Attendu que l'Union des Sociétés Coopératives Agricoles, GECSEL, invoque un préjudice personnel constitué par une baisse de ses ventes à la suite de la découverte des agissements des prévenus;

Qu'au vu des justifications produites, le tribunal a exactement apprécié ce préjudice;

Attendu par contre que le Syndicat National des Industriels de la Nutrition Animale qui représente les professionnels de l'industrie des aliments du bétail, ne justifie pas qu'il ait été porté atteinte à l'intérêt collectif qu'il défend;

Attendu que l'équité commande de faire bénéficier de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, les parties civiles dont l'action est bien fondée;

Que pour calculer l'indemnité qui leur revient il est tenu compte de ce que cinq d'entre elles avaient le même Conseil;

Par ces motifs: LA COUR, statuant publiquement et par arrêt contradictoire, SUR l'action publique: Confirme les dispositions du jugement relatives à la culpabilité des trois prévenus et celles relatives aux peines d'emprisonnement et d'amende infligées à à Philippe et S Yves, en disant que le montant de chacune des amendes est converti en 6 000 euro; Réformant sur les peines d'emprisonnement et d'amende infligées à B Jean G; Condamne celui-ci à dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis et 6 000 euro d'amende; Confirme le jugement sur le principe de la publication et sur les journaux dans lesquels celle-ci aura lieu, mais réformant pour le surplus; Dit qu'elle se fera sous forme du communiqué suivant: "Par arrêt du 25 avril 2002, la Chambre correctionnelle de la Cour d'appel de Dijon a condamné Jean G B, et Philippe A, chacun, à dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis et 6 000 euro d'amende, pour avoir commis le délit de falsification de denrées alimentaires, boissons ou substances médicamenteuses nuisibles à la santé et le délit de détournement d'objets placés sous main de Justice; Par ce même arrêt, Yves S a été condamné à quinze mois d'emprisonnement avec sursis et 6 000 euro d'amende, pour avoir commis le délit de détention de produits propres à effectuer la falsification des denrées servant à l'alimentation de l'homme ou des animaux, nuisibles à leur santé"; Dit que cette publication se fera aux frais des trois prévenus , tenus solidairement, dans la limite de l'article 131-35 du Code pénal; Confirme également le jugement sur la confiscation; Sur l'action civile: Réformant le jugement, Déboute le Syndicat National des Industriels de la Nutrition Animale de sa constitution de partie civile; Confirme le jugement en ce qu'il a reçu les autres parties civiles en leurs constitutions et en ce qu'il a déclaré les trois prévenus responsables du préjudice que celles-ci ont subi; Confirme le jugement en ce qu'il a condamné solidairement Jean G B, Philippe à et Yves S à payer avec intérêts au taux légal à compter du jugement: 3 049 euro à titre de dommages et intérêts et 762, 24 euro en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale à chacune des parties civiles suivantes: Union Fédérale des Consommateurs Que Choisir (UFC) et à l'Association Consommation Logement Cadre de Vie "CLCV"; 1 524, 49 euro à titre de dommages et intérêts et 762, 24 euro en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale à l'Union des Sociétés Coopératives Agricoles - GECSEL; Ajoutant au jugement, Condamne solidairement les trois prévenus à verser à chacune de ces trois parties civiles 381, 12 euro pour leurs frais irrépétibles devant la cour; Confirme également le jugement en ce qu'il a condamné solidairement Philippe A, Jean G B et Yves S à payer, en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale 762, 24 euro aux parties civiles suivantes: Confédération Paysanne , Syndicat Pour une Agriculture Paysanne et la Défense des Travailleurs et Fédération Nationale Bovine; Réformant pour le surplus; Condamne solidairement A, B et S à payer: à chacune des parties civiles suivantes: Confédération Paysanne et Fédération Nationale Bovine la somme de 1 525 euro à titre de dommages et intérêts: à chacune des parties civiles suivantes: Fédération Départementale des syndicats d'exploitants agricoles de Saône-et-Loire (FDSEA), Centre Départemental des Jeunes Agriculteurs de Saône-et-Loire (CDJA), Fédération Départementale des Coopératives agricoles de Saône-et-Loire (FDCA), Chambre de l'Agriculture de Saône-et-Loire, Groupement Départemental de Défense sanitaire de Saône-et-Loire, la somme de 1 525 euro à titre de dommages et intérêts et 381 euro en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale; Déboute les parties civiles de leurs prétentions autres ou plus amples; Le Président a donné l'avertissement prévu par l'Article 132-29 du Code Pénal aux intéressés présents lors du prononcé; La présente décision étant assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de 120 euro dont est redevable chaque condamné; Le tout en application des articles 434-22, 434-44 al. 1, al. 4 du Code pénal, L. 213-3 , L. 213-4, L. 216-1, L. 216-2, L. 216-3 du Code de la consommation, 513, 514, 515, 446, 417, 418, 2, 3, 424, 749 à 751 du Code de procédure pénale, 1018A du Code général des impôts.