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Décisions

CA Versailles, 9e ch., 16 mars 2000, n° 185-2000

VERSAILLES

Arrêt

PARTIES

Défendeur :

Fédération nationale des horlogers bijoutiers joailliers orfèvre de France, Chambre syndicale des horlogers bijoutiers joailliers orfèvre de Paris et de la région parisienne, DGCCRF

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Guirimand

Avocats généraux :

Mme Chesquière, Diericksc

Conseillers :

Mme Delafollie, M. Boilevin

Avocats :

Mes Martin, Dupeux.

TGI Nanterre, 15e ch. corr., du 17 nov. …

17 novembre 1998

RAPPEL DE LA PROCEDURE

Le jugement

Par jugement en date du 17 novembre 1998, le Tribunal correctionnel de Nanterre a déclaré M. Bernard G non coupable et l'a relaxe pour les faits de publicité mensongère ou de nature à induire en erreur;

Faits commis à Levallois-Perret en décembre 1996 a mis la société X hors de cause;

Sur l'action civile:

a déclaré irrecevables les constitutions de partie civile de la Fédération nationale des horlogers bijoutiers joailliers orfèvre de France et de la Chambre syndicale des horlogers bijoutiers joailliers orfèvre de Paris et de la région parisienne;

les a condamnées aux dépens de l'action civile;

Appels

Appel a été interjeté par:

- le Ministère public, le 23 novembre 1998

- Fédération nationale des horlogers bijoutiers joailliers orfèvre de France et de la Chambre syndicale des horlogers bijoutiers joailliers orfèvre de Paris et de la région parisienne, le 27 novembre 1998 des dispositions civiles du jugement;

DECISION

LA COUR,

après en avoir délibéré conformément à la loi:

Statuant sur les appels régulièrement formés les 23 et 27 novembre 1998 par la Fédération nationale des chambres syndicales des horlogers bijoutiers orfèvres de France et par la Chambre syndicale des horlogers bijoutiers joailliers orfèvre de Paris et de la région parisienne, parties civiles, ainsi que par le Ministère public, contre le jugement sus énoncé rendu contradictoirement le 17 novembre 1998 par le Tribunal de grande instance de Nanterre;

Devant la cour, lors des audiences en date des 2 décembre 1999 et 20 janvier 2000:

- Bernard G, prévenu, comparaît, assisté de son conseil;

- La société X civilement responsable, est représentée;

Le conseil commun du prévenu et de la société civilement responsable dépose des conclusions tendant à la confirmation du jugement déféré;

- Madame l'Avocat général a pris ses réquisitions;

- La Fédération des chambres syndicales des horlogers bijoutiers joailliers orfèvres de France et la Chambre syndicale des horlogers bijoutiers joailliers orfèvre de Paris et de la région parisienne, parties civiles, sont représentées par leur conseil commun, lequel dépose des conclusions tendant à l'infirmation du jugement déféré; les parties civiles prient la cour de condamner Bernard G et X à leur verser, à chacune d'elles, la somme de 100 000 F à titre de dommages-intérêts et la somme de 30 000 F en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, d'ordonner la publication de la décision à intervenir dans cinq publications de leur choix, ainsi que l'affichage sur les lieux de vente;

- Le représentant de la Direction de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes du département des Hauts-de-Seine, a été entendu sous la foi du serment;

Il sera statué contradictoirement à l'égard des parties;

AU FOND:

Considérant que Bernard G a été poursuivi devant la juridiction répressive à la requête du Ministère public sous la prévention d'avoir:

- à Levallois-Perret, courant décembre 1996, effectué une publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur sur les prix et conditions de vente, en annonçant des rabais de 40 %, une opération de "99 F: Le gramme d'or" ainsi qu'une fausse "promotion exceptionnelle", et en ne justifiant pas des prix de référence;

Considérant que les premiers juges, après avoir rappelé que les poursuites étaient fondées sur un procès-verbal émanant de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes en date du 30 juillet 1997 et dressé postérieurement à une enquête effectuée au stand Y du magasin A de Colombes les 31 décembre 1996 et le 12 mars 1997, puis relevé que X exerçait à la fois les activités de fabricant, d'importateur et de distributeur de bijoux et qu'elle commercialisait exclusivement ses produits dans les stands W ou Y implantés dans des magasins à enseigne "B ou A", et observé que la publicité incriminée avait été pratiquée le jour de l'ouverture du stand Y au magasin A de Colombes,

ont déclaré la prévention non établie et débouté les parties civiles de leurs demandes, en retenant que:

I. Sur l'annonce d'une réduction de 40 %:

- il résultait du procès-verbal, base de la poursuite, que le 31 décembre 1996, dans une vitrine du stand tenu dans le magasin A de Colombes , les bijoux étaient annoncés avec un rabais de 40 %, auquel s'ajoutait un rabais de 10 % pour les titulaires de carte de fidélité A ou Y,

- il avait été noté par la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes que les rabais étaient illusoires, puisque Bernard G était dans l'impossibilité de démontrer la réalisation de ventes de bijoux au prix sans rabais dans le mois précédant l'opération, et d'autre part, que le prix de référence de ces bijoux était surévalué au regard des prix habituellement pratiqués par X,

- cependant, il était établi que Bernard G avait pratiqué les remises critiquées dès l'ouverture du stand,

- dans ces conditions, les dispositions de l'article 3 de l'arrêté du 2 septembre 1977, d'ailleurs non visé comme fondement légal des faits reprochés, ne pouvaient s'appliquer en l'espèce,

- le prévenu avait démontré que des articles identiques avaient effectivement été vendus dans d'autres stands de bijouterie appartenant à X,

- le coefficient multiplicateur moyen pratiqué par X en 1995 tel qu'analysé par la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes était inopérant et ne pouvait servir de fondement à la démonstration, en ce qu'il occultait totalement les différentes activités exercées par cette entreprise,

- aucune preuve n'était rapportée du fait que la remise de 40 % pratiquée au stand Y du magasin A de Colombes était fictive et en conséquence constituait le délit de publicité mensongère,

II. Sur l'opération "99 F: Le gramme d'or"

- il avait été constaté par les agents verbalisateurs le 31 décembre 1996 et le 12 mars 1997 qu'une vitrine du stand contenait des bijoux marqués "99F le gramme d'or"; que les bijoux supportaient un prix, le poids en or et le prix de vente résultant de cette opération et que le prix de vente laissait penser au consommateur qu'il bénéficiait d'une remise de 52 à 66 % sur le prix affiché,

- il n'était cependant nullement démontré que les bijoux n'avaient pas été vendus à 99 F le gramme d'or,

- il n'était aucunement allégué une quelconque remise sur ces produits,

III. Sur les promotions exceptionnelles:

- il avait été constaté que dans une vitrine, les bijoux étaient vendus à un prix promotionnel allant de 199 à 699 F,

- ces bijoux ne portaient que l'indication de ce prix sans mention de prix initialement pratiqué,

- aucun élément de la procédure ne permettait toutefois de démontrer le caractère mensonger de la publicité entreprise,

- X avait prouvé qu'elle avait vendu les mêmes articles dans d'autres stands à des prix n'ayant pas un caractère promotionnel;

En cause d'appel:

- Considérant que les parties civiles exposent que:

1°) Sur les annonces de réduction de 40 % + 10 % supplémentaires:

- Bernard G n'a pu justifier d'aucun prix de référence, alors que les dispositions de l'arrêté 77-105 P du 2 septembre 1977 obligent tout commerçant qui annonce des rabais à justifier du prix de référence sur lequel porte la réduction,

- le fait que le stand Y vienne d'ouvrir au jour de l'opération ne dispensait pas le prévenu de justifier du prix par rapport auquel étaient déterminés les rabais,

- le tribunal ne pouvait relaxer le prévenu au motif qu'il était démontré que des articles identiques avaient été vendus dans d'autres stands de bijouterie appartenant à X, une telle motivation étant inopérante, dans la mesure où l'arrêté 77-105 P précité prévoit que le prix de référence effectivement pratiqué doit s'apprécier dans le même établissement de vente au détail au cours des trente derniers jours précédant le début de la publicité

- les remises proposées étaient illusoires, les prix après remises étant supérieurs à ceux pratiqués sans remise par les concurrents,

- Bernard G ne peut soutenir que les coefficients multiplicateurs de l'ordre de 4,29 relevés au sein de X seraient justifiés par le fait que X cumule les qualités d'importateur, de fabricant en gros et de détaillant, dès lors que cette société ne peut sérieusement invoquer une réduction de ses coûts par ses volumes d'achats, -du fait de la disparition des "grossistes" en bijouterie -, et que dans le domaine des bijoux en or 18 carats, qui composent la gamme de X, le prix d'achat hors taxes d'un bijou se compose de la façon suivante: or seul ou avec pierres 70 %, façon: 30 %, que les cours de l'or fixés à un niveau international sont intangibles, et qu'il est impossible de proposer des réductions aussi importantes que celles de X sur le seul prix de façon;

2°) sur les articles vendus à un prix promotionnels de 199 à 699 F:

- la décision entreprise aboutit à admettre que X a pu valablement annoncer aux consommateurs des "promotions exceptionnelles, lesquelles ne comportent aucune réalité, puisque X est dispensée de justifier d'un prix de référence;

3°) Sur l'offre "99 F le gramme d'or":

- il s'agissait d'une offre permanente reposant sur des prix de référence fictifs;

- considérant que Madame l'Avocat général requiert l'infirmation du jugement, la condamnation du prévenu à une amende d'un montant de 60 000 F, et la publication de l'arrêt à intervenir;

- considérant que Bernard G, prévenu, expose que:

- les deux parties civiles sont irrecevables à agir, dès lors qu'elles ne justifient pas que la personne se présentant pour elles est toujours président en exercice, que la FNBBJO a été habilitée à agir après consultation du bureau ou du Conseil fédéral ainsi que le prévoient ses statuts, et enfin, que la Chambre syndicale de Paris et de la région parisienne ne justifie pas d'un intérêt à agir distinct de celui défendu par la FNHBJO,

- X a été créée en 1988 à l'initiative du groupe B, avec l'objet suivant "l'achat, la vente, l'importation, l'exportation, la fabrication en gros et en détail d'articles de bijouterie et d'horlogerie", et ce afin de proposer à la clientèle de cette chaîne de grands magasins des articles de bijouterie en or 18 carats, à des prix très compétitifs,

- elle est à la fois fabricant et distributeur,

- à l'occasion de l'ouverture du stand à l'enseigne "Y" au sein du magasin A de Colombes, X a décidé de proposer différentes opérations promotionnelles à la clientèle:

1°) une opération promotionnelle sur les prix, du 29 novembre au 31 décembre 1996, destinée aux titulaires de cartes A (Cofinoga) ou Y et proposant une remise de -40 % et une remise de - 10 % supplémentaire relative aux prix affichés sur un grand nombre de produits en vitrine, pour laquelle les poursuites ne visent en aucune façon l'arrêté du 2 septembre 1977, ce texte demeurant non applicable aux opérations d'ouverture et de lancement, et à propos de laquelle X a justifié de la pratique de ses prix de référence dans les autres stands de la société, étant précisé, d'une part, qu'à partir de la fabrication, chaque exemplaire de produit est répertorié avec un numéro de stock, accompagné d'un bon de livraison, et, d'autre part, que la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes a fait une analyse erronée du coefficient multiplicateur, puisque les chiffres retenus par l'administration sont relatifs à toutes les activités de X, et non aux seuls articles vendus au détail,

2°) une promotion exceptionnelle: Prix unique de 199 à 699 F, non cumulable avec la précédente, pour laquelle l'administration n'a jamais demandé aucun justificatif;

3°) une nouvelle promotion intitulée "Or, 99 F le gramme", prétendument permanente, et à propos de laquelle aucune demande n'a été effectuée par la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes après des constatations du mois de mars 1997;

Sur ce, LA COUR:

Considérant que le 30 juillet 1997, la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes du département des Hauts-de-Seine a dressé procès-verbal à l'encontre de Bernard G, gérant de la SNC en nom collectif X, société dont le siège social se trouve à Levallois-Perret, et qui exploite l'établissement Y sous forme de stand dans le magasin A à Colombes;

Que le 31 décembre 1996, il avait été constaté dans l'établissement:

- l'existence de nombreux calicots posés sur les vitrines annonçant:

"Du 29 novembre au 31 décembre

-40 %

-10 % supplémentaire

dans cette vitrine avec la carte A ou de fidélité Y

- non cumulable avec les opérations en cours,

cette réduction intéressant environ 85 % des articles disponibles à la vente,

- la présence de panonceaux indiquant:

"Promotion exceptionnelle

Prix unique de 199 à 699 F

dans les vitrines indiquées

offre non cumulable avec les promotions en cours"

cette offre concernant 5 % environ des articles mis en vente,

- la présence, sur deux vitrines, d'affichettes mentionnant:

"Or 99 F le gramme dans cette vitrine

non cumulable avec les opérations en cours,

cette offre concernant environ 10 % des articles proposés à la vente;

1°) Sur la première opération (réduction de 40 % + 10 %):

Considérant qu'interrogé sur les prix servant de références à l'application des rabais pratiqués, Bernard G a déclaré ne pouvoir justifier de la vente de produits similaires à un prix non réduit dans le mois précédent l'opération, d'une part parce que, dans le cas du stand de Colombes, l'opération avait commencé le jour de l'ouverture, d'autre part, parce que les articles commercialisés étaient en majorité uniques , et a ajouté que les prix affichés résultaient de deux coefficients multiplicateurs, correspondant, pour le premier, à l'activité de grossiste de sa société, et pour le second, à, l'activité de vente au détail;

Qu'en tenant compte des prix de revient fournis par X, la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes a constaté que:

- le coefficient multiplicateur moyen (Prix de vente TTC/prix de revient RI) avant remise était de 4,29

- le coefficient multiplicateur moyen après remise de 40 % (remise consentie dès le jour de l'ouverture) était de 2,59

- le coefficient multiplicateur moyen, après remise de 40 % et 10 %, était de 2,32

- l'analyse du compte de résultats de X pendant l'année 1995 permettait de déterminer un coefficient annuel de 2,13 (chiffre d'affaires: achats et variation de stock);

- le coefficient annuel était donc très éloigné du coefficient multiplicateur moyen calculé avant réduction (2,13 contre 4,29), et était voisin des coefficients moyens obtenus après application des remises de 40 %, ou de 40 % +10 %;

Qu'il est ainsi apparu aux agents verbalisateurs que les prix affichés n'étaient pas réellement pratiqués et que les remises étaient illusoires;

Que différents relevés effectués ensuite ont montré que les articles vendus avec une réduction de 40 % aux porteurs de carte étaient constamment proposés avec des réductions, qu'une remise supplémentaire de 10 % avait été proposée au cours de la semaine précédant les soldes, que pendant les soldes (du 3 janvier au 14 février 1997), les mêmes produits avalent bénéficié d'une réduction de 50 % offerte à tous;

2°) Sur les articles vendus à un prix promotionnel de 199 à 699 F:

Considérant qu'il a été constaté que les coefficients multiplicateurs de deux articles concernés étaient proches du coefficient annuel calculé à partir du compte de résultats (2,20 ou 2,48 par rapport à 2,13), ce qui établissait l'absence d'une quelconque "promotion", et que Bernard G n'avait apporté aucun justificatif de la réalité de la promotion exceptionnelle annoncée;

3°) Sur les produits vendus "99F. Le gramme d'or":

Considérant qu'il a été constaté qu'il s'agissait d'une offre permanente du stand Y, et que les prix de référence étaient fictifs;

Considérant, en cet état, que l'infraction poursuivie n'intègre pas les dispositions de l'arrêté du 2 septembre 1977 relatif à la publicité des prix à l'égard du consommateur, s'agissant de prix dits de "lancement";

Considérant que pour vérifier l'existence de l'infraction, il appartient à la cour de déterminer si, comme le soutient la défense, la SNC X a effectivement pratiqué des prix de référence, afin d'apprécier la réalité des remises de prix ou des promotions annoncées;

Que sur ce point, Bernard G a fait valoir que X contrôlait la conformité de chaque produit qu'elle fabriquait et en fixait définitivement le prix de vente tout en procédant à son étiquetage, déterminant ainsi un prix de référence qui restait inchangé pendant toute la vie du produit; que le prévenu a ajouté que le calcul opéré par l'administration des coefficients multiplicateurs était erroné, dans la mesure où auraient dû être distingués les achats et les ventes relevant des activités de détaillant de X, et ceux relevant de son activité de fabricant, de grossiste ou d'importateur;

Considérant, cependant, que les calculs de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes ont été opérés sur la base des propres documents fournis par Bernard G, auquel il avait été demandé de fournir les justifications nécessaires; que ces calculs ont exactement tenu compte du montant du chiffre d'affaires et du montant des achats de marchandises ou de matières premières, ainsi qu'il a été précédemment exposé;

Qu'il ajustement été relevé que le coefficient annuel, tel que dégagé par le compte de résultats de la société X, était très éloigné du coefficient multiplicateur moyen calculé avant réduction (2,13 contre 4,29) et voisin des coefficients moyens obtenus après application des remises;

Que ce mode de calcul n'a pas utilement combattu par Bernard G, alors, d'une part, que selon ses propres déclarations à l'administration le 22 avril 1997, "le prix affiché par sa société tenait compte des activités de fabricant, de grossiste d'importateur et de détaillant "(de la société), et alors, d'autre part, qu'il appartenait au prévenu de fournir aux agents de contrôle les éléments propres à justifier ses présentations publicitaires, en application des dispositions de l'article L. 121-2 du Code de la consommation, ce qu'il n'a pas fait;

Qu'en conséquence, les agissements reprochés à Bernard G, sur le premier point relevé, sont établis;qu'en effet, l'offre promotionnelle effectuée a laissé supposer aux consommateurs qu'ils allaient bénéficier de prix attractifs, alors que tel n'était pas le cas en la circonstance;qu'il a en outre été constaté lors des différents contrôles effectués par la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes entre la fin de l'année 1996 et le mois de mars 1997, que des réductions de prix avaient été constamment proposées aux consommateurs entre la fin du mois de novembre 1996 et le 12 mars 1997;

Considérant, en ce qui concerne les articles vendus à un prix promotionnel de "199 à 699 F",qu'il s'agissait d'une "promotion" présentée comme " exceptionnelle";que les relevés des prix et références de deux articles ont toutefois fait apparaître des coefficients proches du coefficient annuel calculé à partir du compte de résultats(2,48 et 2,20, par rapport à 2,13);

Que Bernard G n'a apporté aucun justificatif de la réalité de la promotion exceptionnelle annoncée, lors de son audition par les agents de Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes en date du 22 avril 1997, - soit postérieurement aux constatations opérées, et alors qu'il lui avait été demandé de fournir tous documents utiles à cet égard, par des courriers dont les doubles ont été joints à la procédure;

Que l'infraction poursuivie est également caractérisée sur ce point;

Considérant, en ce qui concerne l'opération relative à l'offre "de 99 F le gramme d'or"qu'il a été constaté dans le procès-verbal, base des poursuites, qu'il s'agissait d'une offre permanente du stand Y;que les vérifications effectuées sur onze articles ont révélé que les prix de vente annoncés correspondaient à l'application d'une réduction de 52 à 66 % sur le prix affiché;

Que lors de son audition par les agents de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes le 22 avril 1997, c'est-à-dire, postérieurement à la seconde visite des agents de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes dans le stand Y du magasin A de Colombes, Bernard G a exposé que les prix de cette marchandise étaient calculés avec les mêmes coefficients que ceux précédemment décrits;

Qu'il est donc établi, pour les mêmes raisons que celles qui ont été exposées ci-dessus, que Bernard G n'a pu faire état d'un prix de référence justifiant ses allégations publicitaires;

Que l'infraction reprochée au prévenu est donc encore caractérisée sur ce point, au regard des dispositions de l'article L. 121-1 du Code de la consommation qui interdit toute publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur en ce qui concerne le prix et les conditions de vente de marchandises;

Considérant que les infractions commises justifient le prononcé à l'encontre du prévenu, d'une amende d'un montant de 60 000 F, ainsi que la publication, au frais du prévenu, dans le journal "Le Parisien", édition des Hauts-de-Seine , dans les conditions qui seront précisées au dispositif ci- après;

Sur l'action civile:

Considérant que l'action civile par les deux syndicats parties civiles a été contestée devant le tribunal et devant la cour;

Considérant qu'il ressort des dispositions des articles L. 411-10 et L. 411-11 du Code du travail que les syndicats professionnels ont le droit d'ester en justice;qu'ils peuvent devant toutes juridictions exercer les droits réservés à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent;

Que la Fédération nationale des chambres syndicales des horlogers bijoutiers joailliers orfèvres, détaillants et artisans de France, d'une part, et la Chambre syndicale des horlogers bijoutiers joailliers orfèvres, détaillants et artisans de Paris et de la région parisienne, ont toutes deux vocation en principe, au regard des textes précités, sur le plan national et sur le plan local, à demander la réparation du préjudice causé, - distinct pour chacune d'elles - par les infractions de publicité de nature à induire en erreur, s'agissant de leurs secteurs d'activité, la bijouterie;

Considérant que lorsque les statuts d'un syndicat contiennent une disposition subordonnant l'exercice de toute action en justice à une formalité spéciale (délibération, consultation ou vote), l'appréciation de la recevabilité de la constitution de partie civile dudit syndicat est subordonnée à la justification de l'exécution de la formalité imposée (Cass. crim., 20-3-1972, n° 113);

Considérant, en la circonstance, que les statuts de la Fédération nationale des chambres syndicales des horlogers bijoutiers joailliers orfèvres détaillants et artisans de France modifiés prévoient que le président est habilité à ester en justice, - après consultation du collège des vice-présidents - et à signer les actes qui engagent la Fédération, son bureau ou son conseil, dans un recours ou une défense, et que les vice-présidents assistent le président qui peut leur déléguer tout ou partie de ses pouvoirs;

Considérant que les modifications statutaires sont signées en l'espèce par M. Atlan, "vice-président", et qu'il n'a pas été fait état, pour engager l'action civile dans la présente procédure, de la consultation, par le président (qui serait à ce jour M. Atlan) des vice-présidents de l'organisme en cause;

Qu'il n'est donc pas établi que l'action civile, exercée au nom de la fédération par M. Atlan, ait été engagée en la circonstance conformément aux statuts, en l'état des pièces produites;

Que la Fédération nationale des chambres syndicales des horlogers bijoutiers joailliers orfèvres détaillants et artisans de France doit donc être déclarée irrecevable en son action et en ses demandes;

Considérant, par ailleurs, que les statuts de la Chambre syndicale des horlogers bijoutiers joailliers orfèvres, détaillants et artisans de Paris et de la région parisienne prévoient en leur article 22 que le président de cet organisme représente le syndicat en justice, et exerce tout action judiciaire;

Que l'action civile a été exercée par M. Claude Barrier, président du syndicat en exercice;

Que ces mentions suffisent à établir la régularité de l'action engagée, au regard des statuts de ce syndicat, M. G n'articulant, ni n'alléguant aucune irrégularité relative à la présidence de M. Barrier;

Considérant que l'atteinte causée aux intérêts collectifs professionnels défendus par ce syndicat, dans la région même où l'infraction a été commise, sera exactement réparé, en la cause, par l'allocation de la somme d'un franc à titre de dommages-intérêts;

Que Bernard G sera condamné à verser cette somme à la Chambre syndicale des horlogers bijoutiers joailliers orfèvres, détaillants et artisans de Paris et de la région parisienne ainsi que la somme de 6 000 F en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale pour les frais irrépétibles engagés en première instance et en cause d'appel;

Que la société X sera déclarée civilement responsable.

Par ces motifs: LA COUR, Statuant publiquement, contradictoirement, Reçoit les appels; Réformant le jugement déféré: Sur l'action publique: Déclare Bernard G, prévenu, coupable du délit de publicité de nature à induire en erreur prévu et puni par les articles L. 121-1, L. 121-4 et L. 213-1 du Code de la consommation; Condamne Bernard G, prévenu, à une amende d'un montant de soixante mille F (60 000 F); Ordonne, aux frais du condamné, la publication, dans le journal Le Parisien, édition des Hauts-de-Seine, du communiqué suivant: "Par arrêt en date du 16 mars 2000 rendu par la Cour d'appel de Versailles, neuvième chambre, Bernard G, gérant de la SNC X, a été condamné à une peine d'amende de soixante mille F (60 000 F) et à des réparations civiles à raison d'une infraction de publicité de nature à induire en erreur commise à Levallois-Perret, au mois de décembre 1996". Sur l'action civile: Déclare la Fédération nationale des chambres syndicales des horlogers bijoutiers joailliers orfèvres détaillants et artisans de France, partie civile, irrecevable en son action et en ses demandes; Reçoit la Chambre syndicale des horlogers bijoutiers joailliers orfèvres, détaillants et artisans de Paris et de la région parisienne en sa constitution de partie civile; Condamne Bernard G à verser à cette partie civile la somme d'un franc (1 F) à titre de dommages-intérêts, et la somme globale de six mille F (6 000 F) sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, pour les frais irrépétibles engagés en première instance et en cause d'appel; Déclare la société X civilement responsable. Rejette toutes autres demandes, plus amples ou contraires des parties, comme inopérantes ou mal fondées.